Léopardins — Wikipédia

Les Léopardins, appelés aussi « Assemblée de Saint-Marc » ou « Faction des 85 »[1], sont les élus membres de l’Assemblée autoproclamée qui tentèrent de résister aux réformes de la Révolution française, en se prétendant au-dessus du Gouverneur général, puis débarquèrent en France via un voyage à bord du navire militaire "Le Léopard" pour tenter d'y imposer la Sécession de Saint-Domingue. Les « Léopardins » avaient été précédés par le Club de l'hôtel de Massiac, comme eux inquiets des projets de donner plus de libertés aux mulâtres ou aux noirs.

Histoire[modifier | modifier le code]

Les et , les députés élus des trois provinces du Nord, de l'Ouest et du Sud, furent convoqués à Saint-Marc, sous la présidence de Thomas Millet, pour créer une nouvelle « Assemblée Générale de la Partie française de Saint-Domingue »[2]. C'est surtout l'assemblée de l'ouest qui répond à l'appel, celle du nord se maintenant pour rester « légaliste »[3], comme le souhaitaient les vieilles et grandes familles y siégeant. La nouvelle « Assemblée générale de la partie française de Saint-Domingue », dite « de Saint-Marc », a très vite pour mission principale, dans l'esprit de ses électeurs, d'empêcher l'application du décret du , qui était alors préparé en France par la Constituante, pour accorder aux gens de couleur (mulâtres) l'égalité des droits politiques avec les Blancs. Thomas Millet, successivement président puis vice-président, proposa une motion permettant de contraindre tous les blancs qui épouseraient une femme de couleur, à prendre un nom africain[4].

Après avoir publié le ses propres lois constitutionnelles sur la colonie, « l'Assemblée de Saint-Marc » décida d'ouvrir les ports de la colonie aux étrangers, ce qui va à l'encontre des lois de l'exclusif commercial toujours en vigueur dans le Royaume. Elle fit savoir que Saint-Domingue devait être indépendante. Plusieurs affrontements sanglants ont alors lieu entre partisans de cette assemblée, appelés « Pompons rouges », et les représentants du roi, menés par le gouverneur Antoine de Thomassin de Peynier et le colonel Mauduit et nommés "Pompons blancs"[2], en raison des épinglettes blanches qu'ils attachaient sur les poches de leurs chemises.

Le , les troupes loyalistes attaquèrent l'Assemblée de l'Ouest[3]. Quelques sympathisants des « pompons rouges » tentant de partir en France pour faire valoir leur point de vue auprès des révolutionnaires sont interceptés, à peine arrivés dans port de Saint-Marc, puis jetés en prison. Dans la nuit du 29 au , le gouverneur Antoine de Thomassin de Peynier fait disperser les députés de l'"Assemblée de Saint-Marc".

Un groupe de 85 élus de cette assemblée "s’emparèrent du bâtiment d’état Le Léopard, le , après en avoir séduit l’équipage qui s’était mutiné"[5]. Ils naviguèrent à destination de la métropole et de Paris pour y faire valoir les intérêts des colons de Saint-Domingue lors de la Révolution française[6]. Lorsque le navire réquisitionnés par les "Léopardins" arrive en rade de Brest après avoir traversé l'Océan[Lequel ?], le conseil municipal de la ville, impressionné par le fait que quasiment tous les élus de l'assemblée étaient à bord du navire, leur envoya une délégation[7]. Dans la foulée, ils obtiennent un soutien financier de la part d'un négociant de Dunkerque, sous la forme d'une somme de 400 000 francs[7].

L'assemblée nationale accepta de les auditionner, mais décida cependant le de dissoudre l'assemblée de Saint-Marc[7].

Parmi les "Léopardins", Thomas Millet, planteur de café, René-Ambroise Deaubonneau, député de Petit-Goâve à l'Assemblée coloniale, qui fut l’un des fondateurs de l’Assemblée dite "de Saint Marc "et le président de cette assemblée, Paul de Cadush ou encore le colonel Jean-Jacques Bacon de La Chevalerie qui fut également président de cette assemblée, et avait joué auparavant, par ailleurs, un rôle dans le développement de la franc-maçonnerie.

Chronologie[modifier | modifier le code]

  • 1778, les mariages inter-raciaux interdits en métropole
  • , ordonnance royale pour l'amélioration du sort des esclaves
  • , la Société des amis des Noirs fondée à Paris
  • , première assemblée des « colons résidant à Paris » réunie par Louis Marthe de Gouy d'Arsy
  • , le Club de l'hôtel de Massiac fondé à Paris.
  • , arrivée d'un nouveau gouverneur Philippe François Rouxel de Blanchelande.
  • , formation d'une assemblée coloniale au Nord[8].
  • , adresse de la Société des amis des Noirs contre la Traite négrière.
  • , Jean-Jacques Bacon de La Chevalerie nommé capitaine-général des troupes nationales à Saint-Domingue.
  • , trois assemblées coloniales de Saint-Domingue exclusivement composées de blancs, ont été élues, pour le sud, le nord et l'ouest.
  • , adresse du négoce du Havre contre l'abolition de l'esclavage[8].
  • , décret à Paris ouvrant la représentation sans discrimination de couleur (aux propriétaires): l’assemblée coloniale s’oppose à sa diffusion, malgré un amendement de Médéric Louis Élie Moreau de Saint-Méry lui laissant un pouvoir de décision[3], et revendique l’autonomie.
  • , une "Assemblée de Saint-Marc" (futurs "Léopardins") se réunit[8].
  • , l'"Assemblée de Saint-Marc" veut remplacer l’assemblée coloniale, jugée trop molle, en invoquant des ordres du roi.
  • , premiers émissaires envoyés par cette "assemblée de Saint-Marc" à la Jamaïque[9].
  • , décret de la Constituante parisienne accordant aux mulâtres l'égalité des droits politiques avec les Blancs.
  • , l'"Assemblée de Saint-Marc" vote "les bases constitutionnelles de Saint-Domingue[8].
  • , l'"Assemblée de Saint-Marc" ouvre les ports au commerce étranger[8].
  • nuit du 29 au , le gouverneur fait disperser "l'Assemblée de Saint-Marc".
  • , révolte des "Léopardins", appelés aussi "Faction des 85"[1], soit la totalité de l’Assemblée "de Saint Marc". Ils réquisitionnent le navire militaire Le Léopard pour se rendre en métropole.
  • , article de Léger-Félicité Sonthonax pour l'abolition.
  • 12 octobre, l'assemblée nationale dissout "l'assemblée de Saint-Marc"[10].
  • , Jacques-Vincent Ogé débarque au Cap d’un navire américain, avec des munitions de guerre, il équipe 250 à 300 hommes pour exiger l’application du décret. Son arrivée de Paris a été dénoncée par le «club de l'hôtel de Massiac».
  • , Ogé et Jean-Baptiste Chavannes battent d’abord M. de Vincens avec 500 hommes, puis sont battus par le colonel Cambefort avec 1 500 hommes, réfugiés dans la partie espagnole, ils sont livrés au gouverneur Philippe François Rouxel de Blanchelande.
  • l'assemblée coloniale du nord accusée de jeter de l'huile sur le feu en votant un texte de défiance envers les progressistes noirs[1].
  • , Pierre Venant de Charmilly écrit à William Pitt pour lui demander de venir au secours de la colonie[11].
  • janvier 1791: Philippe François Rouxel de Blanchelande, cède son poste de gouverneur à Philippe François Rouxel de Blanchelande.
  • , Ogé et Chavannes suppliciés jusqu’à ce que mort s’ensuive. L'affaire fait grand bruit et amène la Constituante à réexaminer la situation en mai.
  • , Bois-Caïman, les esclaves décident la révolte, menés par Boukman, Jean-François et Biassou.
  • , l'assemblée coloniale, menée par Paul de Cadush, dépêche un émissaire à la Jamaïque, et bloque les bateaux à destination de la France[11], ayant fait le choix de demander en priorité de l'aide à l'Angleterre, jugée moins incertaine que la Métropole.
  • , les nouveaux commissaires civils arrivent, menés par Ignace-Frédéric de Mirbeck.
  • , décret à Paris, donnant à l'Assemblée coloniale le droit de statuer sur le régime intérieur de la colonie[12]. La constituante révoque le décret du qui accordait aux mulâtres l'égalité.
  • , les commissaires civils dissolvent l'Assemblée coloniale[8].
  • , Ignace-Frédéric de Mirbeck officiellement commissaire civil à Saint-Domingue
  • , Ignace-Frédéric de Mirbeck annonce une amnistie générale. Les chefs noirs proposent la paix contre des affranchissements[8].
  • 1er avril 1792, Ignace-Frédéric de Mirbeck revient en France réclamer des renforts
  • , Paris accorde la pleine citoyenneté à tous les libres de couleur.
  • , Léger-Félicité Sonthonax désigné comme l’un des trois commissaires civils
  • , prise des Tuileries
  • , Pierre-Victor Malouët et Pierre Venant de Charmilly partent en Angleterre[13]
  • septembre 1792, Paul de Cadush, les généraux Lussan et de Montesquiou-Fezençac, destitués par les commissaires civils Sonthonax et Polvérel, arrivent à Kingston, parfois avec leurs esclaves.
  • , Adam Williamson, gouverneur de la Jamaïque, soumet à autorisation les débarquements en Jamaïque[14].
  • février 1793, guerre à l’Angleterre et l’Espagne à la suite de l’exécution de Louis XVI
  • , Léger-Félicité Sonthonax proclame la liberté à tous les esclaves qui se battraient pour la République.
  • , Pierre Venant de Charmilly signe avec Adam Williamson la «capitulation de la grande Anse»
  • , Traité de Whitehall entre les Anglais et les colons de Saint-Domingue

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. a b et c "Compte sommaire de l'état actuel de la colonie de Saint-Domingue", par Ignace-Frédéric de Mirbeck, page 33 [1]
  2. a et b "La Ville de St-Marc HISTOIRE, ÉCONOMIE, POLITIQUE ET SOCIÉTÉ DES ORIGINES À 1971", par Lemarec Destin, ÉDITIONS DAMI MONTREAL, 20111
  3. a b et c Saint-Domingue espagnol et la révolution nègre d'Haïti (1790-1822) : commémoration du bicentenaire de la naissance de l'état d'Haïti (1804-2004), par Alain Yacou, page 125, KARTHALA Éditions, 2007 [2]
  4. Étude sur l’histoire d’Haïti
  5. Victor Schœlcher in "Vie de Toussaint-Louverture"
  6. "L'intervention britannique à Saint-Domingue en 1793 " pat Charles Frostin, dans la Revue française d'histoire d'outre-mer de 1962, volume 49, page 299 [3]
  7. a b et c " Histoire de la révolution de Saint-Domingue, suivie d'un mémoire sur le rétablissment de cette colonie", par Antoine Dalmas page 83 [4]
  8. a b c d e f et g "La colonie française de Saint-Domingue: de l'esclavage à l'indépendance", par François Blancpain, page 225 [5]
  9. Le soulèvement de 1791 et ses conséquences dans la Méditerranée des Caraïbes, contribution de Bruno D Lara, page 201 [6]
  10. " Histoire de la révolution de Saint-Domingue, suivie d'un mémoire sur le rétablissement de cette colonie", par Antoine Dalmas page 83 [7]
  11. a et b Le soulèvement de 1791 et ses conséquences dans la Méditerranée des Caraïbe, contribution de Bruno D Lara, page 201 [8]
  12. "Vie de Toussaint Louverture", par Victor Schœlcher, page 60 [9]
  13. "L'intervention britannique à Saint-Domingue en 1793", par Charles Frostin", dans la Revue française d'histoire d'outre-mer 1962, Volume 49 [10]
  14. "La diaspora des colons de Saint-Domingue et le monde créole : le cas de la Jamaïque", par Jacques de Cauna, dans la Revue française d'histoire d'outre-mer 1994, Volume 81, numéro 304 [11]

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]