Bataille de Koufra — Wikipédia

La bataille de Koufra est une bataille de la Seconde Guerre mondiale qui eut lieu en Libye du au . Elle opposa victorieusement les troupes françaises de la colonne Leclerc, composée de 350 hommes[1] et de 56 véhicules automobiles sous les ordres du colonel Philippe Leclerc, appuyée par les Britanniques du Long Range Desert Group, face aux Italiens de la compagnia sahariana (en) di Cufra et des 59a et 60a Compagnie Mitraglieri da Posizione.

À l'issue de cette victoire, le colonel Leclerc et ses troupes prononcent le « serment de Koufra », promettant de ne déposer les armes qu'après la libération de Strasbourg.

Déroulement[modifier | modifier le code]

Prélude[modifier | modifier le code]

Le 31 janvier, la T Patrol du LRDG est repérée par un avion italien suite à une interception radio, provoquant un combat avec la Sahariana di Cufra puissamment armée et soutenue par l'aviation italienne. Le combat tourne à l'avantage des italiens et fait perdre aux franco-britanniques l'avantage de la surprise[2].

Le 5 février, en raison de la perte de l'effet de surprise, Leclerc ordonne le bombardement de l'oasis de Koufra par les douze Lysander et les six Blenhein du Groupe réservé de bombardement no 1, avec cependant peu de succès, les appareils étant en limite de leur rayon d'action[2]. Un Blenheim est même perdu en raison d'une erreur de navigation entrainant la mort des trois membres d'équipages, Gérard Claron, Fernand Devin et Georges Le Clavez[3].

Au soir du 7 février, une patrouille de reconnaissance légère composée d'une soixantaine d'hommes aux ordres de Leclerc atteint Koufra et capture un radio italien. En raison de l’absence de réaction italienne, Leclerc décide de mener un raid contre l'aérodrome italien, les avions sur place étant détruits. Sur le chemin du retour, la patrouille est attaqué par l'aviation italienne, une voiture étant légèrement endommagée[4].

Combats contre la Sahariana di Cufra[modifier | modifier le code]

Le 18 février à lieu le premier combat entre les français et la Sahariana di Cufra. En raison de la puissance de feu supérieure des véhicules italiens, Leclerc ordonne à ses propres véhicules d'encercler les italiens par les flancs. Si la manœuvre force les Italiens à se retirer, deux voitures françaises s'enlisent dans du fech-fech et sont enflammées par les tirs italiens[4].

Le lendemain, la Sahariana di Cufra, largement déployée pour éviter toute nouvelle tentative de flanquement, attaque les français situés autour du fort d'El-Tag avec le soutient de l'aviation italienne. Cependant, devant le harcèlement français et une charge à la baïonnette de tirailleurs menés par Leclerc lui-même, les Italiens sont forcés de se replier. Rennepont (nom de guerre de Pierre de Hauteclocque) les poursuit alors dans le désert sur plus de 150 kilomètres[4].

Siège du fort d'El-Tag[modifier | modifier le code]

Le fort d'El-Tag est une formidable fortification, entourée d'un solide réseau de défense bien dotés en armes automatiques portant à plus d'un kilomètre[4],[5]. Ne pouvant prendre le fort de vive force en raison de son manque d'hommes et de matériel, Leclerc entreprend de le harceler continuellement pour briser le moral des Italiens.

L'artillerie joue un rôle primordial dans cette stratégie, notamment un unique canon de 75 mm de montagne et des mortiers de 81 mm. Le canon, dirigé par le lieutenant Roger Ceccaldi, tire 20 à 30 obus par jours, en changeant constamment d'objectif et de position pour donner l'impression de représenter une batterie complète. Quelques coups au but démoralisent particulièrement la garnison, comme lorsque trois obus tombent dans la salle à manger des officiers ou qu'un autre abat le drapeau italien. Le canon tire de jour comme de nuit, durant laquelle il est renforcé par les mortiers français[5].

Dans le même temps, pour maintenir les Italiens sur le qui-vive, les hommes de Leclerc harcèlent les défenses avancées de coups de main, de patrouilles, de fausses attaques qui entraînent des ripostes violentes des Italiens, en pure perte[4].

Les mouvements perpétuels des camions de la colonne font croire aux Italiens que les assiégeant reçoivent des renforts toute les nuits, ce qui les conduit à surestimer les effectifs français[2]. De plus, la garnison est abandonnée par l'aviation italienne qui prennent les deux Lysander de liaison français pour des avions de chasse[4].

Reddition italienne[modifier | modifier le code]

Le , les Italiens demandent à parlementer, pour que les blessés, de part et d'autre, soient mis à l'abri, ce que Leclerc refuse[4].

Le , enfin, des parlementaires sortent du fort et demandent aux Français leurs propositions pour une reddition dans l'honneur. Les discussions s'éternisent, jusqu'à ce que Leclerc s'invite aux négociations et ordonne aux Italiens de remonter dans leur véhicule. Lui-même se joint à eux avec deux officiers et leur commande de regagner le fort. Le coup de bluff marche à plein et les Italiens rejoignent le fort[4].

Arrivé en présence du commandant du fort, Leclerc impose ses conditions. La capitulation est signée immédiatement, sont ainsi capturés 11 officiers et 18 soldats italiens ainsi que 273 Libyens. Les combats ont causé 3 tués et 4 blessés côté italien. Les pertes du côté français ont été de 4 tués et de 21 blessés.

Le , de Gaulle adresse à Leclerc un télégramme de félicitations dans lequel transparaît la fierté du chef de la France Libre pour ce qui constitue la première victoire de la France depuis la capitulation de 1940 : « Les glorieuses troupes du Tchad et leur chef sont sur la route de la victoire. Je vous embrasse ».

La BBC diffusera un peu plus tard la nouvelle de la victoire de la lointaine bataille de Koufra en des termes très élogieux.

Le serment de Koufra[modifier | modifier le code]

Serment de Koufra, 2 mars 1941.
Monument en l’honneur de Leclerc mentionnant Koufra et le serment, place Broglie, Strasbourg.

À l'issue de la bataille, le , le colonel Philippe Leclerc prête avec ses hommes le « serment de Koufra » :

« Jurez de ne déposer les armes que lorsque nos couleurs, nos belles couleurs, flotteront sur la cathédrale de Strasbourg. »[6]

Les Français tiendront ce serment en libérant Strasbourg le à la tête de la 2e division blindée.

Le square du Serment-de-Koufra à Paris, la rue de Koufra à Nantes, un monument dans le centre de Rungis ainsi qu'une statue place Broglie à Strasbourg commémorent cet engagement. La bataille de Koufra est portée sur le drapeau du régiment de marche du Tchad (RMT). Le phénomène de « blanchiment des troupes coloniales » aura cependant évincé les combattants noirs juste avant la Libération, ne leur permettant pas de tenir leur serment.

La 2e promotion (1962-1963) de l'École militaire interarmes (EMIA) porte le nom de « Serment de Koufra ».

En 1994, pour célébrer le cinquantième anniversaire de la libération de Strasbourg, la promotion EOR 94/08 de l'École de cavalerie de Saumur (EAABC) est baptisée « Serment de Koufra ».

Depuis 2014, les bornes du "serment de Koufra" matérialisent le parcours de la 2e DB.

En 2019, la promotion des commissaires des armées 2019 est baptisée " Serment de Koufra"

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Une cinquantaine de Français et d’Européens, pour le reste des méharistes et des tirailleurs sénégalais, en fait, essentiellement des Tchadiens et des Camerounais
  2. a b et c Jean-Yves Le Naour et Frédéric Blier, Général Leclerc, Charnay-lès-Mâcon (France), Bamboo Edition, , 58 p. (ISBN 9-782818-966990), p. 28, 29
  3. « Militaires décédés pendant la Seconde Guerre mondiale, Lieu de décès : Koufra » Accès libre, sur Mémoire des hommes (consulté le )
  4. a b c d e f g et h Erwan Bergot, La Coloniale, Montrouge (France), Brodard et Taupin, , 352 p. (ISBN 2-266-01324-6), p. 128, 129
  5. a et b « 1941-La bataille de Koufra » sur Portail des sites associatifs de l'Artillerie française
  6. Il existe plusieurs versions de ce serment, qui fut exprimé oralement seulement.

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Sources[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]