Wassila Bourguiba — Wikipédia

Wassila Bourguiba
Wassila Bourguiba en 1962.
Wassila Bourguiba en 1962.
Première dame de Tunisie
 – 
(24 ans, 3 mois et 30 jours)
Prédécesseur Moufida Bourguiba
Successeur Naïma Ben Ali
Biographie
Nom de naissance Wassila Ben Ammar
Date de naissance
Lieu de naissance Béja (Tunisie)
Date de décès (à 87 ans)
Lieu de décès La Marsa (Tunisie)
Père Mhamed Ben Ammar
Mère Fatma Dellagi
Conjoint Habib Bourguiba
(1962-1986)
Enfants Hajer Bourguiba

Wassila Bourguiba (arabe : وسيلة بورقيبة), née Wassila Ben Ammar le à Béja et morte le à La Marsa, est la deuxième épouse du président tunisien Habib Bourguiba et la Première dame de ce pays de 1962 à 1986. Elle est alors connue sous le titre de Majda (الماجدة soit « Vénérable »)[1].

Biographie[modifier | modifier le code]

Famille, jeunesse et mariage[modifier | modifier le code]

Son père, l'avocat Mhamed Ben Ammar, appartient à une branche relativement désargentée[2] d'une vieille famille de la bourgeoisie tunisoise anciennement composée de hauts fonctionnaires et de grands propriétaires terriens. Sa mère, Fatma Dellagi, appartient également à la bourgeoisie de Tunis.

Elle est membre de l'Union musulmane des femmes de Tunisie (UMFT), fondée par Bchira Ben Mrad.

Wassila rencontre Bourguiba pour la première fois le alors qu'elle est venue le féliciter de sa libération après cinq ans de détention[1] ; « ce fut le coup de foudre », comme l'écrit Habib Bourguiba dans son autobiographie Ma vie, mon œuvre[3]. Wassila avait déjà, à cette époque, une fille d'un petit propriétaire terrien[3].

Par le biais de sa relation naissante avec Bourguiba, elle a notamment influé sur l'abolition du régime beylical et favorisé la proclamation d'une république[3]. Par la suite, elle plaide fortement en faveur d'Ahmed Ben Salah[3], qui est nommé le comme secrétaire d'État à la Santé publique et aux Affaires sociales, poste équivalent à celui de ministre.

Habib Bourguiba épouse finalement Wassila le [1], un an après avoir divorcé de Moufida Bourguiba le [4]. Le fils de Bourguiba, Habib Bourguiba Jr., issu de l'union entre Habib et Moufida, aurait témoigné d'une certaine animosité vis-à-vis de sa belle-mère[4]. Puisqu'elle est issue d'une famille de la bourgeoisie tunisoise traditionnelle[1],[5] qui compte des hommes aussi influents que riches, certains ministres tunisois voient dans ce mariage la possibilité de détacher Bourguiba des ministres originaires du Sahel tunisien dont Ben Salah. En effet, son soutien pour ce dernier ne dure pas lorsque celui-ci commence à prendre du pouvoir[3].

Une Première dame influente[modifier | modifier le code]

Wassila devient peu à peu très influente dans les affaires du palais présidentiel de Carthage — elle se faisait appeler la « présidente »[3] — même si Bourguiba la tient en apparence à l'écart des affaires politiques[1]. Pour l'ancien ministre Tahar Belkhodja, elle est celle « chez qui faisaient antichambre les premiers ministres et tous les collaborateurs du président »[1].

Elle se montre momentanément solidaire du Premier ministre Hédi Nouira dans son opposition au projet d'union entre la Tunisie et la Libye en 1974, même si globalement les deux se vouent une hostilité réciproque selon Sadri Khiari[3].

Habib et Wassila Bourguiba lors de leur mariage en 1962.
Photographie de 1966 montrant Wassila, Bourguiba et leur fille adoptive Hajer au palais présidentiel de Carthage.

En 1980, au moment de l'attaque contre la ville de Gafsa par un commando nationaliste arabe, elle agit pour faire nommer Driss Guiga ministre de l'Intérieur et Mohamed Mzali Premier ministre, alors que Mohamed Sayah était plutôt pressenti[3]. Elle fait aussi nommer quelques-uns de ses amis au sein du gouvernement[3]. En vue des élections législatives du , premières élections organisées avec la participation de plusieurs partis depuis l'indépendance, elle appuie l'opération de falsification des résultats pour nuire à la victoire de l'opposition, représentée en particulier par le Mouvement des démocrates socialistes d'Ahmed Mestiri[3]. Elle est aussi le principal artisan de l'installation à Tunis du quartier général de l'Organisation de libération de la Palestine, et de son chef Yasser Arafat, après leur évacuation de Beyrouth en 1982[6]. Bourguiba, vieillissant et malade, lui remet de plus en plus de responsabilités dans les affaires de l'État. Wassila est alors omniprésente puisqu'elle est « branchée en permanence sur les conversations téléphoniques »[7]. Elle a alors en tête de faire réviser la constitution de 1959 qui prévoit que le Premier ministre est le successeur légal du président[3]. Elle contredit à cette occasion son propre mari lors d'une interview pour Jeune Afrique paru le [3]. Mais, en 1983, Mzali limoge Tahar Belkhodja, alors ministre de l'Information et ami de Wassila. Quelques mois plus tard éclatent les « émeutes du pain », qui se déroulent du au  ; le ministre Guiga, qu'elle avait contribué à faire nommer, est démis de ses fonctions[3].

Habib Bourguiba annonce brusquement le divorce par un simple communiqué, le [8], alors que son épouse se soigne depuis plusieurs mois aux États-Unis[9].

Fin de vie[modifier | modifier le code]

Tombe de Wassila Bourguiba au cimetière du Djellaz.

Wassila s'installe par la suite à Paris. Au lendemain de la destitution de son ancien mari le , la presse tunisienne annonce qu'elle avait adressé au nouveau président Zine el-Abidine Ben Ali un message « exprimant sa confiance en la nouvelle direction politique » et « sa satisfaction pour les égards rendus à l'ancien président »[9]. Après deux ans et demi d'absence, elle regagne définitivement la Tunisie en [9]. Elle meurt le et, contrairement à la première épouse du président, elle n'est pas inhumée dans le mausolée Bourguiba à Monastir[10].

Elle est notamment la tante de Tarak Ben Ammar ainsi que l'arrière-grand-mère de Yasmine Tordjman, l'ancienne épouse du ministre français Éric Besson[11].

Références[modifier | modifier le code]

  1. a b c d e et f Tahar Belkhodja, Les trois décennies Bourguiba : témoignage, Paris, Publisud, coll. « Les témoins de l'histoire », , 286 p. (ISBN 978-2-86600-787-4), p. 14.
  2. Samy Ghorbal, « Que reste-t-il des grandes familles ? », sur jeuneafrique.com, (consulté le ).
  3. a b c d e f g h i j k l et m Sadri Khiari, « De Wassila à Leïla, Premières dames et pouvoir en Tunisie », Politique africaine, no 95,‎ , p. 55-70 (lire en ligne, consulté le ).
  4. a et b Belkhodja 1998, p. 56.
  5. Mohsen Toumi, La Tunisie de Bourguiba à Ben Ali, Paris, Presses universitaires de France, coll. « Politique d'aujourd'hui », , 318 p. (ISBN 978-2-13-042804-6, lire en ligne), p. 125.
  6. « Wassila Ben Ammar », sur lemonde.fr, (consulté le ).
  7. Belkhodja 1998, p. 174.
  8. Belkhodja 1998, p. 15.
  9. a b et c « Retour de Mme Wassila Ben Ammar à Tunis », sur lemonde.fr, (consulté le ).
  10. Philippe Bernard, « Le Libérateur »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?), sur independance.tn, .
  11. Yüsra Mehiri, « Tunisie-France. Qui est Yasmine Torjeman ? », sur kapitalis.com, (consulté le ).

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Noureddine Dougui, Wassila Bourguiba : la main invisible, Tunis, Sud Éditions, , 348 p. (ISBN 978-9938-01-148-7).
  • Jacqueline Gaspar, Wassila Bourguiba : entretiens à Carthage de novembre 1972 à mars 1973, Tunis, Déméter, , 196 p. (ISBN 978-9973-706-30-0).
  • Maher Kamoun, La Méjda et le Zaïm : amour du pouvoir, pouvoir de l'amour, Tunis, Cérès, , 680 p. (ISBN 978-9938-724-88-2).

Article connexe[modifier | modifier le code]