Vol British Airways 38 — Wikipédia

Vol British Airways 38
G-YMMM, le Boeing 777 assurant le vol 38 de British Airways après l'accident.
G-YMMM, le Boeing 777 assurant le vol 38 de British Airways après l'accident.
Caractéristiques de l'accident
Date
TypeDéfaillance des moteurs lors de l'atterrissage
CausesPanne simultanée des 2 moteurs, défaut de conception
SiteAéroport de Londres Heathrow, aux Royaume-Uni
Coordonnées 51° 27′ 54″ nord, 0° 25′ 54″ ouest
Caractéristiques de l'appareil
Type d'appareilBoeing 777-236ER
CompagnieBritish Airways
No  d'identificationG-YMMM
PhaseAtterrissage
Passagers136
Équipage16
Morts0
Blessés14 (1 grave)
Survivants152

Géolocalisation sur la carte : Royaume-Uni
(Voir situation sur carte : Royaume-Uni)
Vol British Airways 38
Géolocalisation sur la carte : Angleterre
(Voir situation sur carte : Angleterre)
Vol British Airways 38

Le vol British Airways 38 est un vol international régulier assurant la liaison entre l’aéroport international de Pékin et l’aéroport de Londres Heathrow. Le , à 12 h 42, le Boeing 777-200ER de la compagnie britannique British Airways atterrit sur l'herbe 350 à 400 m avant la piste 27L, faucha son train d'atterrissage et vint s'immobiliser au début de cette même piste. Sur les 136 passagers et 16 membres d’équipage présents à bord, seuls 14 passagers furent blessés.

L'appareil, qui n'était âgé que de sept ans, fut économiquement non réparable. C’est le premier accident grave impliquant un Boeing 777, depuis la mise en service de ce modèle d'avion en 1995.

Avion et équipage[modifier | modifier le code]

G-YMMM, le Boeing 777 impliqué dans l'accident, photographié en janvier 2003

L'appareil impliqué est un Boeing 777-236ER, immatriculé G-YMMM (c/n 30314/342) et propulsé par deux turboréacteurs Rolls-Royce Trent 895-17.

Ce biréacteur long-courrier a effectué son premier vol le et a été livré neuf à British Airways deux semaines plus tard. Il avait une cabine conçu pour transporter jusqu'à 233 passagers.

L'équipage est composé du commandant de bord Peter Burkill (43 ans), qui totalise 12 700 heures de vol (dont 8 450 sur Boeing 777), et du copilote John Coward (41 ans), qui totalise 9 000 heures de vol (dont 7 000 sur Boeing 777), ainsi que d'un second copilote, Conor Magenis (35 ans), qui totalise 5 000 heures de vol, (dont 1 120 sur Boeing 777), et de 13 membres d'équipage en cabine.

L'accident[modifier | modifier le code]

Lors de l'approche finale à environ 220 m de haut et à 3,2 km de la piste, une première demande d'augmentation de la poussée effectuée par le pilote automatique, puis une deuxième demande manuelle des pilotes, restèrent sans effets. Le pilote automatique réduisit la vitesse à 108 nœuds à 61 m de hauteur, pour maintenir la pente de descente de l'ILS. Le pilote automatique fut déconnecté à 175 pieds (53 m) et l'avion se posa sur l'herbe à environ 300 m du début de la piste 27L.

Le point bleu marque l'endroit où le Boeing s'est immobilisé, en rouge son parcours sur l'herbe

Pendant l'impact et le roulage au sol, le train d'atterrissage avant s'effondra, le train arrière droit fut arraché de l'appareil et pénétra dans le réservoir central et dans l'espace de la cabine, le train gauche fut poussé au travers de l'aile. L'avion finit sa course sur les marques indiquant le début de piste.

Une importante quantité de kérosène s'écoula mais aucun incendie ne se déclara. L'avion était passé approximativement 6 mètres au-dessus des voitures circulant sur l'autoroute A30 et sur la route du périmètre sud de l'aéroport.

Quatre membres de l'équipage et huit passagers furent blessés et évacués vers l'hôpital pour des blessures légères et contusions. Un des passagers en a eu la jambe cassée.

L'accident provoqua la fermeture de la piste sud de l’aéroport londonien ne laissant que la piste nord ouverte, contraignant de nombreux vols à être redirigés sur les aéroports de Luton et Stansted.

Enquête[modifier | modifier le code]

L'enquête fut menée par l'Air Accidents Investigation Branch, l'AAIB, l'équivalent britannique du BEA français ou du BST canadien. En , elle n'était pas encore achevée.

Rapport préliminaire du . Dès le lendemain de l'accident, l'AAIB publia un rapport préliminaire [1]:

« Les premières indications résultants d'interviews et d'analyse des enregistreurs de vols montrent que le vol et l'approche se sont déroulés normalement jusqu'à ce que l'avion effectue son approche finale sur la piste 27L. À approximativement 600 pieds et 3 km de l'atterrissage, la commande automatique des gaz demanda une augmentation de la puissance sur les deux moteurs mais ces derniers ne répondirent pas. Suivant d'autres demandes d'augmentation de la puissance de la commande automatique puis une commande manuelle de l'équipage sur la manette des gaz, les deux moteurs, de manière similaire, ne répondirent pas. La vitesse de l'avion se réduisit et l'avion descendit jusqu'à la pelouse, non loin de la piste. »

Elle compléta ce rapport le [2]:

« Comme déjà rapporté, alors que l'avion était stabilisé sur une approche ILS avec le pilote automatique engagé, la commande automatique des gaz ordonna une augmentation des gaz sur les deux moteurs. Les deux moteurs initialement répondirent mais après 3 secondes, la puissance du moteur droit se réduisit. Huit secondes plus tard, la puissance se réduisit à un même niveau sur le moteur gauche. Les moteurs ne s'éteignirent pas et les deux continuèrent à produire de la poussée à un régime supérieur au ralenti vol mais insuffisant pour obtenir la poussée demandée.
Les données enregistrées indiquent qu'une quantité adéquate de carburant était à bord de l'appareil et que la commande automatique des gaz et les commandes de contrôle des moteurs fonctionnaient comme attendus, avant et après la réduction de puissance. Tous les scénarios possibles pouvant expliquer cette réduction de poussée et le manque continu de réponse des moteurs aux commandes de poussées sont examinés, en coopération étroite avec Boeing, Rolls Royce et British Airways. Ce travail comprend une analyse et un examen détaillé du circuit complet du carburant des réservoirs jusqu'aux buses d'injection. »

Bulletin du . L'AAIB émit un bulletin complémentaire où elle déclara qu'il n'y avait « aucun élément probant d'une défaillance mécanique ou de l'absorption par les réacteurs d'oiseaux ou de glace », qu'il n'y avait non plus « aucun élément probant d'une contamination du carburant ou d'un niveau d'eau inhabituel dans celui-ci » et que les données enregistrées indiquaient qu'il n'y avait « aucune anomalie sur les principaux systèmes de l'avion. » Certains petits corps étrangers ont cependant été détectés dans les réservoirs de carburant et sont en analyse complémentaire.

Le rapport note qu'il a été démontré qu'une cavitation s'est produite dans les deux pompes de carburant à haute pression, ce qui peut être indicatif d'une restriction de l'apport en carburant ou d'un excès d'aération du carburant, cependant le constructeur a estimé que les deux pompes étaient toujours capables de fournir un débit suffisant de carburant. Le rapport note que l'avion a volé au travers d'un air inhabituellement froid (mais pas exceptionnel) et conclut que la température n'était pas assez basse pour faire geler le carburant. Des tests se poursuivent pour tenter de reproduire les dommages visibles sur les pompes à carburant et de les faire coïncider avec les données enregistrées du vol. Un examen et une analyse complète vont être menés sur l'ensemble de l'avion et du système d'alimentation en carburant des réacteurs incluant une modélisation des flux de carburant prenant en compte les effets aérodynamiques et l'environnement de l'appareil.

Le rapport note également que les poignées d'extinction d'incendie ont été manuellement déployées par l'équipage avant les interrupteurs d'arrivée de carburant. Les poignées d'extinction d'incendie ont aussi pour effet de désactiver les interrupteurs de carburant, ce qui signifie que le carburant continuait de s'écouler après l'atterrissage forcé, une situation potentiellement dangereuse. Le rapport a repris un précédent Boeing Service Bulletin qui donnait comme consigne de procédure que les interrupteurs de carburant doivent être activés avant les poignées d'extinction d'incendie. Le rapport indique que « Ce n'est pas la cause de l'accident mais que cela peut avoir de sérieuses conséquences en cas d'incendie lors de l'évacuation de l'appareil. »

En fait la nécessité de publier la Safety Recommendation 2008-009, affectant toutes les versions des 777 qui avait déjà été incorporé dans le Boeing Service Bulletin (SB 777-28-0025) - comme cela était le cas pour le G-YMMM - fut donné par l'AAIB comme principale raison d'avoir publié ce bulletin spécial bien avant que l'enquête sur l'accident ne soit achevée.

Bulletin du  : Dans ce nouveau bulletin, l'AAIB confirme que l'investigation continue de se centrer sur la délivrance du carburant au réacteur. Il déclare que « la réduction de la poussée sur les deux moteurs est le résultat d'une réduction de l'arrivée de carburant et tous les paramètres moteurs après cette réduction de poussée sont cohérents avec cela. » Le rapport confirme que le carburant était de bonne qualité et avait un point de congélation plus bas que les plus basses températures rencontrées par le vol. Comme cela était déjà mentionné dans le bulletin de février, le rapport note que les dommages dus à la cavitation dans les pompes à haute pression, sont la preuve d'une pression anormalement basse aux orifices de la pompe. Après avoir exclu la congélation ou la contamination du carburant, l'enquête se centre maintenant sur ce qui a pu causer cette basse pression aux orifices de la pompe. « Des restrictions dans le système d'alimentation en carburant entre les réservoirs de l'avion et chacune des pompes des moteurs, conduisant à une réduction du flux de carburant, sont suspectées. » Le système d'alimentation en carburant est inspecté chez Boeing et les moteurs chez Rolls Royce à Derby.

Le bulletin exclut d'autres causes possibles, déclarant qu'« il n'y a aucun élément probant de la rencontre avec un vortex de sillage, un choc d'oiseau ou le givrage du cœur du moteur. Il n'y a pas non plus d'éléments d'un comportement anormal de quiconque dans l'avion ou des systèmes des réacteurs suggérant une interférence électromagnétique. »

Incident similaire[modifier | modifier le code]

N862DA, le 777 impliqué dans l'incident du vol Delta Air Lines 18, ici photographié en août 2009.

Le , le vol 18 de Delta Air Lines reliant Shanghai à Atlanta, assuré par un Boeing 777-200ER propulsé par deux turboréacteurs Rolls-Royce Trent 895, a subi une perte de puissance sur un de ses moteur, alors qu'il était en croisière à 39 000 pieds (12 000 m). L'équipage a suivi les procédures de récupération manuelle et le vol s'est poursuivi sans incident.

Le Conseil national de la sécurité des transports (NTSB) a affecté à cet incident l'un des enquêteurs qui ont travaillé sur l'incident du vol 38 et a recherché spécifiquement toute similitude entre les deux incidents. Le rapport du NTSB a conclu que la présence de glace obstruant l'échangeur de chaleur en était la cause probable. La preuve était plus solide dans ce cas, puisque les données de l'enregistreur de paramètres ont permis aux enquêteurs de localiser l'endroit où le débit de carburant à diminué.

Début 2009, Boeing a envoyé une mise à jour aux exploitants d'avions, reliant les incidents de British Airways et de Delta Air Lines et identifiant le problème comme étant spécifique aux échangeurs de chaleur des moteurs Rolls-Royce. À l'origine, on pensait que les autres avions n'étaient pas affectés par ce type de problème. Cependant, en mai 2009, un autre incident similaire s'est produit sur un Airbus A330 équipé de moteurs Trent 700.

Conclusions[modifier | modifier le code]

Réplication en laboratoire des cristaux de glace colmatant l'échangeur de chaleur de kérosène sur un moteur Rolls-Royce Trent 800, à la suite du rapport du NTSB sur les incidents du BA38 et du DL18[3].

L'AAIB a publié un rapport complet sur l'accident du vol 38 le .

Le rapport final indique que la perte de puissance était due à une obstruction de l'échangeur de chaleur, qui doit réchauffer le carburant sortant des réservoirs de l'avion, par de la glace s'étant formée dans le circuit carburant, à partir de l'eau naturellement présente dans le kérosène, alors que l'avion fonctionnait avec un faible débit de carburant pendant une longue période. Lors de la phase d'approche, la réduction de la vitesse devant être compenser par une augmentation de la poussée des moteurs, impliquant un débit de carburant accru, la glace s'est détaché du circuit et s'est accumulée à l'entrée de l'échangeur, provoquant une réduction du débit de carburant et une perte rapide de poussée sur les deux moteurs.

Le rapport d'enquête indique que la structure de ces échangeurs, bien que conforme aux exigences de certification, le rendait susceptible de subir ce type de dysfonctionnement lorsqu'il est colmaté par de la glace en forte concentration, avec une température de carburant inférieure à −10 °C et un débit de carburant supérieur à celui utilisé en vol.

Par la suite, de nouveaux échangeurs de chaleur de carburant ont été installés sur les 777 de British Airways courant [4]. Les enquêtes de l'AAIB et du NTSB ont également conduit Boeing à réduire la durée recommandée pendant laquelle le carburant des 777 équipés de moteurs Rolls-Royce Trent 800 reste à des températures inférieures à −10 °C (14 °F), passant alors de trois à deux heures.

Le , le NTSB a publié la consigne de navigabilité SB-09-11, appelant à la refonte des FOHE utilisés sur les moteurs Rolls-Royce Trent 800, ce que Rolls-Royce avait déjà commencé à revoir la conception de l'échangeur, avec une date de mise en service prévue en mars 2010 au plus tard. Tous les moteurs concernés devaient être équipés de ce composant modifié dans les six mois suivant sa certification. En mai 2010, cette consigne de navigabilité a été étendue pour couvrir également les moteurs de type Trent 500 et 700, équipé du même modèle d'échangeur.

Médias[modifier | modifier le code]

L'accident a fait l'objet d'un épisode dans la série télé Air Crash nommé « L'énigme d'Heathrow » (saison 10 - épisode 2).

Sources[modifier | modifier le code]

Article connexe[modifier | modifier le code]

  • Vol Cathay Pacific 780, accident similaire, survenue deux ans plus tard, impliquant la perte de puissance des deux réacteurs d'un Airbus A330 en vol

Lien externe[modifier | modifier le code]

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