Attaque du vol DHL en 2003 à Bagdad — Wikipédia

Vol DHL Oscar Lima Lima
L'Airbus A300 de DHL impliqué, en juin 2003.
L'Airbus A300 de DHL impliqué, en juin 2003.
Caractéristiques de l'accident
Date
TypeTir de missile
Causesacte terroriste
SiteBagdad, Irak
Coordonnées 33° 15′ 44″ nord, 44° 14′ 05″ est
Caractéristiques de l'appareil
Type d'appareilAirbus A300B4-203F
CompagnieDHL
No  d'identificationOO - DLL
Lieu de destinationBruxelles
Phasedécollage
Passagers0
Équipage3
Morts0
Survivants3

Géolocalisation sur la carte : Irak
(Voir situation sur carte : Irak)
Vol DHL Oscar Lima Lima

L'attaque du vol DHL en 2003 à Bagdad est un attentat perpétré le à Bagdad contre un Airbus A300 cargo opérant pour DHL et immatriculé en Belgique avec l'indicatif OO-DLL. Alors que l'avion vole à près de 10 000 pieds, son aile gauche est très endommagée par l'explosion d'un missile sol-air portatif Strela-2 (SAM-7) tiré par des terroristes. La déflagration provoque la perte des trois systèmes hydrauliques permettant le contrôle de l'avion. L'équipage réussit à le contrôler en ajustant individuellement la puissance des moteurs, alors qu'il effectue une courbe phugoïde (il monte puis descend de manière répétée) et qu'il faut compenser le déséquilibre provoqué par l'état de l'aile gauche, en flammes. Le commandant réussit à faire atterrir l'avion sur la piste 33L de l'aéroport, en utilisant l'inversion de poussée des moteurs pour ralentir. L'appareil sort de la piste et termine sa course sur le sable. Les trois membres d'équipage sont sains et saufs[1].

Contexte[modifier | modifier le code]

Destination et équipage de l'Airbus A300[modifier | modifier le code]

L'avion décolle à h 30 UTC le 22 novembre 2003 de l'aéroport international de Bagdad, à destination de Bruxelles via Bahreïn. Il transporte du courrier[1]. L'équipage se compose du commandant Éric Genotte, du copilote Steeve Michielsen, tous deux de nationalité belge, et de Mario Rofail, mécanicien navigant, de nationalité écossaise[2]. Sur ces destinations à risques, les équipages sont tous volontaires, et savent qu'en dessous de 10 000 pieds, ils peuvent craindre les tirs de missiles ennemis. Dans les mois précédents, huit missiles ont été tirés contre des avions militaires américains de l'aéroport de Bagdad, sans les atteindre[1].

Préparation de l'attaque[modifier | modifier le code]

Insurgés irakiens équipés de lance-missiles antiaérien (Strela-2 et Strela-3), vers 2003.

Un groupe d'insurgés, les Fedayin Saddam, a récupéré du matériel militaire laissé par l'armée irakienne. Le , ils invitent la journaliste française Claudine Vernier-Palliez, ainsi que son photographe, qui travaillent pour Paris Match, à les accompagner pour documenter une de leurs actions[2]. Les journalistes sont témoins du tir d'un missile sol-air portatif en direction d'un avion[2].

Attentat[modifier | modifier le code]

Décollage et impact du missile[modifier | modifier le code]

Tir d'un missile sol-air 9K32 Strela-2 (SAM-7), ici lors d'un exercice de l'armée allemande.

Aux alentours de 9 000 pieds (soit environ 2 700 m), après trois minutes de vol, un missile sol-air SAM-7[2] touche l'Airbus sur le bout de son aile gauche[1]. Le missile endommage la structure de l'avion, perçant l'un des réservoirs de kérosène, ce qui provoque une fuite qui s'enflamme rapidement[1]. Le missile cause également une fente de 5 mètres sur le longeron arrière de l'aile, et perfore les trois circuits hydrauliques. Ces circuits, au nombre de trois afin de pallier la panne éventuelle du premier voire du deuxième circuit, servent à commander l'avion. Ils permettent notamment de diriger l'appareil (gestion des ailerons, gouvernes de profondeur et de direction), de sortir les volets, ainsi que le train d'atterrissage[1].

L'aile gauche touchée par le missile, après l'atterrissage de l'appareil.

En raison de la perte des circuits hydrauliques de contrôle, l'avion entame une courbe phugoïde, il entre dans un cycle où il monte, puis descend, puis remonte. Une fois ce cycle enclenché, et sans commandes de vol, il est très difficile de rétablir l'avion dans une configuration de vol stable[1].

À ce moment, l'équipage ignore la cause de la panne et qu'ils ont été la cible d'un missile, même si cette hypothèse est déjà dans la tête de chacun des membres. Des hélicoptères américains patrouillant dans le secteur confirment à l'équipage que l'aile gauche est en feu et dégage de la fumée.

Contrôle de l'appareil[modifier | modifier le code]

Le capitaine Éric Genotte, se remémorant une émission télévisée consacrée au vol 232 d'United Airlines, décide de tenter de poser l'avion, sans aucune commande de vol, en utilisant uniquement la poussée des réacteurs, de façon symétrique (augmenter la poussée permet de monter, réduire la poussée de descendre), ou de façon asymétrique pour tourner (l'avion tourne du côté opposé au moteur délivrant le plus de puissance). Après quelques minutes, le commandant parvient à maîtriser la courbe phugoïde, et l'avion adopte à nouveau une configuration de vol stable. À la demande du commandant, le mécanicien navigant Mario Rofail effectue la sortie manuelle du train par gravité (les trains sont normalement sortis grâce à la pression hydraulique). Cette action change l'aérodynamique de l'avion, qui se remet à perdre rapidement de la vitesse, descendant à 210 nœuds[1]. Pour autant, la partie n'est pas gagnée. En effet, l'aile gauche, considérablement endommagée, traîne plus que l'aile droite : il faut donc en permanence corriger l'inclinaison de l'avion, qui a tendance à partir à gauche, et trouver un moyen de jouer sur les moteurs pour l'orienter correctement[1].

Enfin, le commandant de bord, toujours en ne jouant que sur la puissance des moteurs, parvient, après un long détour de 40 kilomètres, à aligner l'avion avec la piste de l'aéroport de Bagdad afin d'y effectuer l'atterrissage[1]. La manœuvre est très délicate : il faut à la fois maintenir le cap, compenser l'effet de l'aile gauche qui fait virer l'avion à droite, tout en diminuant l'altitude et la vitesse de l'appareil[1]. À cela s'ajoutent des vents turbulents qui renforcent l'instabilité de l'Airbus A300, et le carburant qui s'échappe du trou sur l'aile gauche, menaçant de mettre le moteur gauche en panne[1].

Atterrissage[modifier | modifier le code]

l'Airbus après l'incident.

Lors de l'approche de la piste 33R, il devient clair que l'avion vole trop haut pour tenter un atterrissage dans ces conditions. Le copilote préférerait tenter un long final sur la piste 33L, mais le commandant de bord estime que l'aile gauche, qui brûle depuis plusieurs minutes, pourrait lâcher d'un moment à l'autre, et décide de tenter l'atterrissage sur la 33R.

Après quelques secondes, le commandant se rend à l'évidence : l'avion arrive trop haut, trop vite, l'atterrissage sur la 33R est impossible ; il faut effectuer un long final sur la 33L[1]. L'équipage s'éloigne alors, jusqu'à 12 miles du seuil de piste (20 km). Le commandant donne plus de puissance au réacteur gauche, ce qui incline l'avion sur la droite. Il effectue le virage de 180° pour s'aligner sur la piste 33L, puis remet l'avion en vol horizontal. L'approche se passe bien, toutefois, comme c'était arrivé au vol 232 d'United Airlines, à 400 pieds (120 m d'altitude), le vent latéral décale l'avion de l'axe de la piste[1]. Le train droit touche la piste en premier, dégageant un nuage de fumée important, suivi par le train gauche, puis par la roulette de nez. L'avion sort de piste, et s'immobilise dans l'espace entre la piste et la taxiway. Ce faisant, il est entré dans une zone délimitée par des fils barbelés, qui ont déchiré plusieurs pneus ainsi que le toboggan d'évacuation gauche. L'ordre est donc donné d'évacuer par le toboggan droit, intact. L'équipage constate par lui-même les dégâts, puis se dirige vers la piste afin de regagner les locaux de l'aéroport[1].

Conséquences[modifier | modifier le code]

L'accident eut un énorme retentissement dans la presse, car c'était la première fois dans l'histoire de l'aviation commerciale qu'un équipage effectuait un atterrissage sans commandes hydrauliques[1]. Mario Rofail, le plus âgé des trois membres de l'équipage, estima qu'il était temps pour lui de prendre sa retraite.

DHL fut critiqué[évasif] pour n'avoir attribué aucune prime aux équipages volontaires qui se rendaient dans les zones à risques.[réf. nécessaire]

Une journaliste de Paris Match, Claudine Vernier-Palliez, ainsi que son photographe, furent également critiqués. En effet, ils ont assisté au lancement du missile qui a touché l'avion de DHL[3]. Ils effectuaient alors un reportage sur les armes détenues par les islamistes. Le principal reproche qui leur fut fait était de n'avoir rien fait pour empêcher le terroriste de tirer le missile.

Médias[modifier | modifier le code]

Vidéos de l'attaque[modifier | modifier le code]

Une cassette vidéo montrant un combattant tirant un missile sol-air contre l'Airbus A300 de DHL est confiée à des journalistes du Nouvel observateur après l'attentat. La cassette n'est accompagnée d'aucun message. Le Pentagone se montre méfiant vis-à-vis des revendications[4].

La vidéo montre une dizaine d'hommes debout dans un champ, dont la plupart portent des foulards cachant leur visage. On voit ensuite un hélicoptère survolant la zone à une altitude d'environ 100 mètres, mais les soldats dans l'hélicoptère ne semblent pas repérer les hommes, ni les trois voitures garées non loin. Puis, l'un d'eux charge un missile sur son épaule et tire sur une cible invisible[4].

La cassette continue de tourner, mais montre les hommes se précipitant vers leurs voitures. Après un moment, la caméra est à nouveau dirigée vers le ciel en direction de l'appareil touché par le missile. L'avion amorce sa descente sur l'aéroport, mais son atterrissage forcé n'est pas montré[4].

Documentaires[modifier | modifier le code]

L'accident a fait l'objet d'un épisode dans la série télé Air Crash nommé « Le tir aux pigeons » (saison 3 - épisode 2).

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. a b c d e f g h i j k l m n o et p (en) Sylvia Wrigley, Why Planes Crash Case Files: 2003, Sylvia Wrigley, (lire en ligne), p. 67-72
  2. a b c et d « European Tribune - Special planes: OO-DLL hit above Bagdad . », sur www.eurotrib.com, (consulté le )
  3. « ParisMatch on DHL A300 (2 of 9) », sur iasa-intl.com (consulté le ).
  4. a b et c « L'attaque de l'Airbus de DHL a été filmée », sur www.nouvelobs.com, (consulté le )

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Lien externe[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]