Système visuel humain — Wikipédia

Les principaux éléments du système visuel humain et leur place dans le cerveau.
Les principes de projection des voies visuelles sont :
(P1) le renversement de l'image par le système optique de l’œil dans le sens haut/bas et gauche/droite
(P2) au niveau du chiasma, le croisement des fibres issues de l'hémirétine nasale et la projection du même côté des fibres issues de l'hémirétine temporale
(P3) au niveau des radiations optiques, les fibres représentant le quadrant supérieur arrivent sur la lèvre inférieure de la scissure calcarine (et inversement)
(P4) la fovéa, au centre du champ visuel, se projette dans la partie postérieure du cortex strié. La partie binoculaire de chaque hémichamp visuel se projette dans la région intermédiaire du cortex strié. La partie temporale, monoculaire de chaque champ visuel se projette sur la partie antérieure du cortex visuel.

Le système visuel humain est l'ensemble des organes participant à la perception visuelle humaine, des yeux au système sensori-moteur. Son rôle est de percevoir et d'interpréter deux images en deux dimensions pour obtenir une image en trois dimensions. Il fait partie du cerveau et est principalement constitué des yeux, des nerfs optiques, du chiasma optique, des tractus optiques, des corps géniculés latéraux dans le thalamus, des radiations optiques et des cortex visuels ainsi que autres es aires utilisées dans le cerveau pour la vision.

Œil et nerf optique

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Schéma montrant les différentes parties d'un œil humain
Coupe simplifiée d'un œil humain

En première approximation, l'œil peut être assimilé à un appareil photographique. La lumière pénètre dans l'œil, diaphragmée par la pupille (avec contrôle par l'iris), elle est déviée par la cornée et le cristallin puis projetée sur la rétine[1]. L'image ainsi formée sur la rétine est une perspective conique inversée (haut-bas et droite-gauche) de l'espace environnant[2].

Deux yeux et deux fonds d'œil
Les deux fonds d'œil droit et gauche : ils montrent la surface de la rétine, ses vaisseaux sanguins, la macula, la tâche aveugle (appelée aussi papille optique).

La rétine contient un grand nombre de cellules « réceptrices » (cônes et bâtonnets principalement) qui permettent une transduction de l'information lumineuse en potentiels d'actions. L'image bénéficie d'un première analyse au sein même de la rétine en zones de contraste et le résultat de ce traitement est envoyé au reste du système visuel par le nerf optique[3],[4].

Chez les humains, le système visuel est le seul système sensoriel à être directement relié au cerveau, via le nerf optique, ce qui est dû à la nécessité de traiter rapidement l'information visuelle[5].

Chiasma et tractus optique

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Les nerfs optiques venant de chaque œil se rejoignent au niveau du chiasma optique, ce qui permet de redistribuer l'information visuelle selon qu'elle va dans la partie droite ou dans la partie gauche du champ visuel (chaque œil voit à gauche et à droite en même temps). L'hémichamp gauche va dans l'hémisphère droit et vice-versa (il y a une inversion)[2].

La continuation des nerfs optiques après le chiasma s'appelle les tractus optiques (en) (ou bandelettes optiques). Dans chaque hémisphère, il distribue l'information visuelle à différents noyaux[6],[7], principalement dans le thalamus :

  • le corps géniculé latéral [a]envoie l'information qui va être analysée par le cortex visuel parles fibres nerveuses de la radiation optique de l'hémisphère concerné. Une lésion d'une radiation optique conduit à la perte partielle ou totale de la vision dans l'hémisphère concerné (une anopsie[8]). C'est donc par cette voie que se fait la perception visuelle consciente.
  • le noyau suprachiasmatique de l'hypothalamus. Ce noyau contient l'horloge biologique. L'information de la présence ou de l'absence de lumière permet de synchroniser le cycle éveil/sommeil ;
  • le colliculus supérieur (voir ci-après) ;
  • le pulvinar qui jouerait un rôle important dans l'attention visuelle et la perception du mouvement.

Vision binoculaire.

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Article détaillé : Vision binoculaire.

En vision binoculaire, une image se forme sur la rétine de chacun des deux yeux. Il y a donc deux images et elles sont un peu différentes car les deux yeux sont décalés. Cette vision binoculaire présente plusieurs avantages, en particulier : le sujet voit toujours même s’il a perdu un œil ; le champ de vision est plus large avec deux yeux (en moyenne 180 °) qu’avec un seul (en moyenne 150 °) ; le cerveau fusionne les deux images pour obtenir une vision du relief (vision stéréoscopique) et apprécier les distances (pour faire facilement les gestes quotidiens : verser de l'eau dans un verre, monter les escaliers...).

Deux voies visuelles vers le cortex visuel

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Deux systèmes visuels transportent de l'information de la rétine vers le corps genouillé latéral puis au cortex visuel primaire[9],[10].

  1. la voie du système magno-cellulaire. Il est spécialisé dans trois types d'informations : le mouvement (on parle de « système analyseur de flux » visuel), la profondeur (liée à la vision 3D binoculaire) et la forme globale. Il retient les fréquences spatiales basses et mobilise les cellules de la rétine périphérique (qui sont également plus sensibles que les autres dans la pénombre). Cette voie se prolonge ensuite par la « voie visuelle dorsale », qui répartit les informations visuelles ainsi acquises à plusieurs structures corticales et sous-corticales qui lui sont fortement connectées (cortex temporal, pariétal, pré-frontal et frontal, cervelet, structures thalamiques mésencéphaliques et pontiques)[11].
  2. la voie du système parvo-cellulaire (on parle de « système analyseur d’images »), qui véhicule les signaux permettant au cerveau de distinguer les couleurs et d'apprécier le détail des formes et des textures (fréquences spatiales hautes) ; cette voie mobilise les cellules du centre de la rétine. On a montré (sur le modèle animal) qu'à la naissance cette voie est moins mûre que celle du système analyseur de flux[11]. Cependant, lors des premiers mois de vie, ces deux voies améliorent ensuite rapidement leur performance[11].

Les informations transportées séparément par ces deux systèmes sont ensuite recombinées par le cerveau (maladroitement les premières années de la vie) puis permettent la perception spatiotemporelle nécessaire à une planification de plus en plus sûre des actes[12].

Cortex visuel

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Le cortex visuel est le système le plus important en taille dans le cerveau humain et est responsable des traitements des images. Il effectue des traitements de bas niveau (orientation, contours) mais aussi de haut niveau (formes, mouvements).

Chemins alternatifs de la vision

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Le relais des fibres visuelles au niveau du corps géniculé latéral permet à environ 10 % de celles-ci de se projeter directement dans le colliculus supérieur. Des expériences menées sur des sujets ayant subi une ablation chirurgicale du cortex visuel primaire ont montré que ceux-ci possèdent cependant une capacité visuelle sub-consciente, et qu'ils demeurent capables de localiser des objets, d'en déterminer l'orientation, éventuellement d'en percevoir la couleur, mais non de les comparer à des objets consciemment perçus (en cas d'ablation unilatérale). La sensation est donc inexploitable par le sujet (intuitive) et ne se manifeste pas, à l'exception d'objets en mouvement, de manière spontanée. Ce phénomène est nommé aussi vision aveugle (« blindsight » en anglais)[13].

Des expériences complémentaires (Nakamura et Mishkin, 1980-1986)[6] ont démontré qu'on pouvait provoquer la cécité consciente en isolant totalement le cortex visuel primaire du reste de l'encéphale, même si le tractus optique demeurait intact. La conscience visuelle résulterait donc d'un processus complexe de dialogue entre la perception corticale « classique » de la zone V1, les autres zones corticales V et les voies sous-corticales ou thalamiques « inconscientes »[6],[14].

Deux zones du cortex préfrontal (Brodmann 9 et 46 droite) ont été identifiées dans le mécanisme de vision consciente. 9 pourrait correspondre à une zone de discrimination entre vision consciente et subconsciente, et 46 intégrerait et synthétiserait les perceptions visuelles corticales et thalamiques (Barbur, Sahraie, Weiskrantz, 1996)[source insuffisante].

Intégration

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Une des interrogations les plus importantes en 2019, concernant le système visuel humain, est le peu d'informations échangées entre l'œil et le système visuel du cerveau. Une grande partie de ce que nous voyons est « conjecturé » par le cerveau. L'information provenant de l'œil passe par un goulot d'étranglement informationnel avant d'atteindre le cortex visuel du cerveau, qui traite fortement le signal épars[15].

Notes et références

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  1. Le corps géniculé latéral (anciennement « genouillé externe » ou bien « corps genouillé latéral ») est un noyau relais, situé au niveau du thalamus, qui permet le transfert de l'information des yeux vers le cortex visuel. On a cru pendant un certain temps que c'était le simple et unique relais de la perception visuelle. En fait, ce n'est pas le seul noyau recevant de l'information visuelle (voir plus haut) et l'information qu'il reçoit ne vient pas que des yeux.

Références

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  1. « Vision - comprendre le mécanisme - Symptômes, Causes et traitements », sur Vulgaris-medical (consulté le )
  2. a et b Alain Lieury, Manuel visuel de psychologie cognitive - 4e édition, Dunod, (ISBN 978-2-10-080118-3)
  3. Christine Courteix et Benoît Sion, « Physiologie de l’œil et principes généraux de la vision », Actualités Pharmaceutiques, vol. 57, no 576,‎ , p. 20–24 (ISSN 0515-3700, DOI 10.1016/j.actpha.2018.03.004, lire en ligne, consulté le )
  4. [Collectif La cognition] Thérèse Collins, Daniel Andler, Catherine Tallon-Baudry et al., La cognition Du neurone à la société, Éditions Gallimard, (ISBN 978-2-07-276437-0), pp. 265 à 267.
  5. Andrew Huberman, « Contre le stress… regardez l’horizon ! », sur cerveauetpsycho.fr, CERVEAU & PSYCHO N° 130, (consulté le ), « Ce dont la plupart des gens ne se rendent pas compte, c’est que les yeux sont en fait des excroissances du cerveau. Ils ne sont pas connectés au cerveau, ils en sont un élément à part entière. Chez l’embryon, ils lui sont d’ailleurs intégrés. Ils sont ensuite « expulsés » du crâne au cours du premier trimestre de gestation, puis se reconnectent au reste de l’encéphale. Ils font partie intégrante du système nerveux central. »
  6. a b et c « LE CERVEAU À TOUS LES NIVEAUX! », sur lecerveau.mcgill.ca (consulté le )
  7. « Différentes voies visuelles — Site des ressources d'ACCES pour enseigner les Sciences de la Vie et de la Terre », sur acces.ens-lyon.fr (consulté le )
  8. « Interprétation des anomalies du champ visuel — Site des ressources d'ACCES pour enseigner les Sciences de la Vie et de la Terre », sur acces.ens-lyon.fr (consulté le )
  9. Jean-Michel Leuliot, « Les mécanismes de retransmission de la performance », dans Jean-Paul Callède, La recherche de performance, Maison des Sciences de l’Homme d’Aquitaine, , 33–41 p. (lire en ligne)
  10. Margaret Livingstone et David Hubel, « Segregation of Form, Color, Movement, and Depth: Anatomy, Physiology, and Perception », Science, vol. 240, no 4853,‎ , p. 740–749 (ISSN 0036-8075 et 1095-9203, DOI 10.1126/science.3283936, lire en ligne, consulté le )
  11. a b et c Bruno Gepner, « "Malvoyance? du mouvement dans l'autisme infantile ?: Une nouvelle approche neuropsychopathologique développementale », La psychiatrie de l'enfant, vol. 44, no 1,‎ , p. 77 (ISSN 0079-726X et 2102-5320, DOI 10.3917/psye.441.0077, lire en ligne, consulté le )
  12. Y. De Prost, Étude clinique et physiopathologique des érythèmes fessiers du nouveau-né et du nourrisson, vol. 13, (ISSN 0929-693X, DOI 10.1016/s0929-693x(06)80001-1, lire en ligne), p. 1
  13. Anil Seth et al. (trad. de l'anglais par Antonia Leibovici, préf. Chris Frith), 3 minutes pour comprendre les 50 plus grands mécanismes du cerveau - Architecture et fonctionnement du cerveau, cerveau gauche contre cerveau droit, cerveau linguistique, émotionnel, sommeil et rêve... [« 30-second Brain »], Guillaume Trédaniel, , 4e éd. (1re éd. 2014) (ISBN 978-2-7029-1068-9), p. 100
  14. « Cas n°15 : perte globale de la vision — Site des ressources d'ACCES pour enseigner les Sciences de la Vie et de la Terre », sur acces.ens-lyon.fr (consulté le )
  15. Kevin Hartnett, « A Mathematical Model Unlocks the Secrets of Vision », sur Quanta Magazine (consulté le )

Liens externes

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