Sofia Goubaïdoulina — Wikipédia

Sofia Goubaïdoulina
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Sofia Goubaïdoulina en 1981.
Nom de naissance Sofia Asgatovna Goubaïdoulina
Naissance (92 ans)
Tchistopol (RSSA tatare, RSFS de Russie, Drapeau de l'URSS Union soviétique)
Nationalité Drapeau de l'URSS Union soviétique puis Drapeau de la Russie Russie
Activité principale Compositrice
Lieux d'activité Moscou puis Allemagne
Éditeurs Éditions Sikorski
Formation Conservatoire de Moscou
Maîtres Nikolaï Peïko, Vissarion Chebaline
Enseignement Conservatoire de Kazan, Conservatoire de Moscou
Récompenses Prix Polar Music (2002), Prix Bach de Hambourg (2007)

Sofia Asgatovna Goubaïdoulina (en russe : София Асгатовна Губайдулина) est une compositrice soviétique, puis russe, née le à Tchistopol en RSSA tatare (RSFS de Russie, Union soviétique) qui réside en Allemagne depuis 1991.

Elle est l'auteur d'une centaine d'œuvres, relevant de différents genres : la symphonie, le concerto, la musique de chambre, les œuvres pour la scène, mais aussi la musique de film et de télévision.

Biographie[modifier | modifier le code]

Sofia Goubaïdoulina est la fille d'un ingénieur géodésique (lui même fils d’un mollah), mais la religion est un sujet proscrit au sein de sa famille, pour ne pas attirer l'attention du NKVD. Elle ne reçoit pas d'éducation religieuse[1].

Elle effectue ses études musicales au Conservatoire de Kazan, capitale du Tatarstan où sa famille a déménagé en 1932. En 1937, cette famille acquiert un piano à queue qui fascine la fillette et lui fait découvrir la musique[1]. Elle étudie dès 1949, avec Grigory Kogan (piano) et Albert Leman (composition) et est diplômée en 1954. Elle poursuit son cycle au Conservatoire Tchaïkovski de Moscou pour étudier le piano avec Iakov Zak et la composition avec Nikolaï Peïko[2].

De 1954 à 1959, elle est assistante de Dmitri Chostakovitch. En 1959, elle présente une Symphonie de chambre pour son examen de composition, peu appréciée du jury, mais en privé, Chostakovitch l’encourage, au contraire, à persévérer dans cette direction[1]. Après avoir obtenu son diplôme supérieur en 1963 et avoir été reçue au sein de l'Union des compositeurs soviétiques, elle étudie la composition avec Vissarion Chebaline[3],[4]. Sa première œuvre importante, un quintette avec piano, y fut créée en 1958[4].

Compositrice indépendante, « elle puise son inspiration aux sources de la poésie et de la spiritualité », ce qui rend parfois ses relations difficiles avec l'Union des compositeurs soviétiques et notamment Tikhon Khrennikov[4].

Entre 1963 et 1985, elle compose dix-neuf musiques de film[4].

En 1969 et 1970, Sofia Goubaïdoulina fonde un studio expérimental de musique électronique. À l’instigation de la pianiste Maria Youdina, elle se fait baptiser le à Moscou au sein de l’Église orthodoxe russe[1]. Elle devient membre de l'Ensemble Astreya (1975–1981), aux côtés des compositeurs Viatcheslav Artiomov et Viktor Sousline (depuis 1991)[3], avec qui elle improvise sur des instruments rares d'Europe de l'Est, ainsi que sur des instruments rituels. Elle compose en 1972 Stufen, symphonie en sept mouvements, et en 1976 L'Heure de l'âme sur un poème de Marina Tsvetaïeva[4]. En 1979, elle est mentionnée sur une liste noire de musiciens, établie par Tikhon Khrennikov (chef de l'Union des compositeurs soviétiques). Elle y figure avec six autres « décadents » (dont Edison Denisov). Cette année-là, elle crée un duo pour violoncelle et orgue, intitulé In croce[1].

En 1988, le musicologue Nicolas Slonimsky considère que les compositeurs « Alfred Schnittke, Edison Denisov (prénommé ainsi en hommage à Thomas Edison) et Sofia Goubaïdoulina sont très estimés parmi les compositeurs du monde entier[note 1] ».

En 1981, le violoniste Gidon Kremer interprète son concerto Offertorium et la fait connaître du monde musical international[6]. Outre Kremer, d'autres artistes ont été séduits par l'œuvre de la compositrice, tels que le Kronos Quartet, le Quatuor Arditti, le percussionniste Mark Pekarski, Valery Popov, Vladimir Tonkha, les chefs d'orchestre Simon Rattle, Guennadi Rojdestvenski et les solistes Mstislav Rostropovitch[3] et Anne-Sophie Mutter. Cette dernière, lors de la découverte du concerto pour violon qui lui est dédié In tempus praesens (2007), a dit : « Ce fut, sans exagérer, la plus grande expérience que j'ai vécue avec une partition contemporaine. Cette pièce est d'une extrême densité émotionnelle »[7].

Influencée par ses origines tatares, qui ont un profond effet sur ses œuvres[3], et toutes formes de musiques rituelles[6], par la mystique chrétienne et la philosophie orientale, qui se reflètent dans le choix de ses titres ou l'usage de textes latins, allemands et italiens[3], elle a reçu de nombreux prix, dont le prix international du disque Koussevitzky (1989 et 1994), le prix Franco Abbiato (1991), le Heidelberger Künstlerinnenpreis (1991) et le prix de l'État russe (1992).

Depuis 1992, elle s'est installée près de Hambourg en Allemagne[8],[9], tout en gardant sa citoyenneté russe[10]. Elle épouse Piotr Mechtchaninov en 1991 avec qui elle collaborait depuis longtemps. Il meurt en 2006.

En 1998, elle est invitée au centre Acantes associé au Festival d'Avignon[11].

Une série d'événements fêtent son 90e anniversaire : un nouvel enregistrement par l'Orchestre du Gewandhaus de Leipzig et de nombreux concerts en Europe, aux États-Unis, et à Kazan, capitale de sa région d'origine[12].

Œuvres (sélection)[modifier | modifier le code]

Son éditeur tient à jour le catalogue de ses œuvres[13].

  • Chaconne (1962), pour piano
  • Sonate (1965), pour piano en 3 mouvements (Allegro, Adagio et Allegretto)
  • Jouets musicaux (1969), 14 pièces pour piano
  • Toccata-Troncata (1971), pour piano
  • Invention (1974), pour piano
  • Introitus (1978), pour piano et orchestre de chambre
  • Hommage à Marina Tsvetaïeva (1984), pour chœur
  • Hommage à T. S. Eliot (1987), pour octuor et soprano
  • In croce (1979-92), pour violoncelle et orgue
  • Offertorium (1980), pour violon et orchestre. Commande de Gidon Kremer.
  • Rejoice!, sonate pour violon et violoncelle (1981)
  • Sieben Worte (1982), pour violoncelle, accordéon et cordes
  • Quatuor à cordes no 1 (1971)
  • Quatuor à cordes no 2 (1987)
  • Quatuor à cordes no 3 (1987)
  • Pro et Contra (1989), pour orchestre
  • Alléluia (1990) oratorio
  • Prière pour l'ère du Verseau (1991) — reprend les deux partitions précédentes, associées à l'oratorio Lauda, en une trilogie chorégraphique
  • Cantique au soleil de saint François d'Assise (1997), pour violoncelle, chœur et percussions
  • Trio pour violon, alto et violoncelle (1988)
  • Quatuor à cordes avec bande magnétique (1993)
  • In Erwartung, pour quatuor de saxophones et 6 percussionnistes (1994)
  • Passion selon saint Jean (2000)
  • Pâques selon saint Jean, oratorio (2002)
  • Réflexion sur le thème BACH (2002), commande du quatuor Brentano
  • In Tempus Praesens, concerto pour violon, dédié à Anne-Sophie Mutter (2006/2007)

Prix et distinctions[modifier | modifier le code]

Discographie[modifier | modifier le code]

Son éditeur, Sikorski, tient sa discographie[15].

Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

  1. Texte original : « The names of Alfred Schnittke, Edison Denisov (who received his first name in honour of Thomas Edison) and Sophia Gubaidulina stand high in the ranks of world composers[5] ».

Références[modifier | modifier le code]

  1. a b c d et e Pierre Gervasoni, « Sofia Goubaïdoulina, l’eucharistie dans la composition », Le Monde,‎ (lire en ligne)
  2. Theodore Baker et Nicolas Slonimsky (trad. de l'anglais par Marie-Stella Pâris, préf. Nicolas Slonimsky), Dictionnaire biographique des musiciens [« Baker's Biographical Dictionary of Musicians »], t. 1 : A-G, Paris, Éditions Robert Laffont, coll. « Bouquins », (réimpr. 1905, 1919, 1940, 1958, 1978), 8e éd. (1re éd. 1900), 4728 p. (ISBN 2-221-06787-8), p. 1526
  3. a b c d et e (en) Valentina Kholopova, « Gubaydulina, Sofiya Asgatovna », dans Stanley Sadie (éd.), The New Grove Dictionary of Music and Musicians, Londres, Macmillan, seconde édition, 29 vols. 2001, 25 000 p. (ISBN 9780195170672, lire en ligne)
  4. a b c d et e Frans C. Lemaire, Le destin russe et la musique : Un siècle d'histoire de la révolution à nos jours, Paris, Arthème Fayard, coll. « Les chemins de la musique », , 736 p. (ISBN 2-213-62457-7), chap. 13 (« La musique russe au féminin »), p. 533-547.
  5. Nicolas Slonimsky 1988, p. 250.
  6. a et b (de) Biographie sur le site de son éditeur, sikorski.de.
  7. Cité dans le livret du disque DG (2008), p. 23.
  8. Scène Magazine, mai 2013.
  9. Sax, Mule & Co, Jean-Pierre Thiollet, H & D, 2004 (p. 129).
  10. (ru) София Губайдулина: Нельзя включаться в ненависть (25 septembre 2014) sur russkoepole.de.
  11. « Ostracisée sous Staline pour son anticonformisme, la compositrice est l'invitée du centre Acanthes », Libération,‎ (lire en ligne)
  12. (en) J.S. Marcus, « At 90, a Composer Is Still Sending Out Blasts », sur nytimes.com, (consulté le ).
  13. Catalogue (28 avril 2017) [PDF] sur sikorski.de.
  14. (de) Sofia Gubaidulina - Von 1988 bis 1993 Mitglied der Akademie der Künste, Berlin (West), Sektion Musik. Seit 1993 Mitglied der Akademie der Künste, Berlin, Sektion Musik sur le site de l’Akademie der Künste
  15. Discographie (version septembre 2011) [PDF] sur sikorski.de.

Bibliographie[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]