Procès de Sobibór — Wikipédia

Procès de Sobibór
Type Procès envers les criminels de guerre nazis du centre d'extermination de Sobibór
Pays Drapeau de l'Allemagne Allemagne
Localisation Hagen
Coordonnées 51° 22′ 00″ nord, 7° 29′ 00″ est
Date du au

Géolocalisation sur la carte : Allemagne
(Voir situation sur carte : Allemagne)
Procès de Sobibór

Le procès de Sobibór concerna 12 anciens SS, membres du personnel allemand du centre d'extermination de Sobibór. Il se déroula du au à Hagen en Allemagne de l'Ouest[1],[2]. Il fut l'un des nombreux procès pour crime de guerre qui se tinrent à cette époque comme le procès Adolf Eichmann à Jérusalem en 1961, le procès de Francfort concernant Auschwitz en 1963-1965 et qui permirent à l'opinion publique de se faire une idée de l'étendue des crimes perpétrés quelque vingt années auparavant par les bureaucrates et les exécutants nazis en Pologne occupée. Durant ces mêmes années et celles qui suivirent, des procès distincts se tinrent également comme ceux relatifs au personnel du centre d'extermination de Bełżec (1963-1965), de celui du centre d'extermination de Treblinka (1964-1965) et du camp de Majdanek (1975-1981).

Le procès[modifier | modifier le code]

Chargé de préparer les documents à soumettre au tribunal lors du procès, l'enquêteur Dietrich Zeug de Ludwigsbourg dépouille les archives et découvre de nombreux individus jamais inquiétés jusqu'alors. Certains officiers SS détenant des postes-clefs à Sobibor avaient été jugés une décennie plus tôt comme le SS-Oberscharführer Hubert Gomerski (de) acquitté lors du Procès de l'euthanasie en 1947 et jugé à nouveau et condamné en 1950[3],[4]. Face à l'ampleur de la tâche, Zeug demande l'aide des autorités et au printemps 1960, il a identifié trois douzaines d'hommes directement impliqué dans l'Aktion T4 et dans l'opération Reinhardt. Il contacte le Congrès juif mondial et Yad Vashem dans les mois qui suivent et, le , il est en mesure d'adresser ses premières recommandations au Secrétariat général de l'Administration judiciaire en requérant une action judiciaire à l'encontre de 19 prévenus[5],[1],[6].

Les fonctionnaires de Ludwigsbourg apprennent ainsi pour la première fois où sont localisés certains suspects. Kurt Bolender, vivant sous un faux nom à Hambourg, est identifié en 1961. Karl Frenzel est arrêté en à Göttingen. Heinrich Unverhau (de) n'est arrêté, en même temps que Franz Wolf, qu'en [7]. Pendant ce temps, à Jérusalem, 22 survivants de Sobibor vivant en Israël sont identifiés ; à ce moment, la liste des suspects compte une centaine de noms[8]. C'est à cette époque que la république fédérale allemande estime que le rapport de Zeug est devenu « politiquement sensible » et le frappe du sceau du secret[9].

La cour de justice de Hagen commence ses procédures contre 12 ex-membres de la SS (environ un quart de l'effectif du camp d'extermination de Sobibor), le pour crime contre l'humanité[10],[11]. Les verdicts sont rendus le notamment sur la base des preuves fournies par des historiens comme l'allemand Wolfgang Scheffler (en) et le néerlandais, Jules Schelvis[2].

Durant ce procès, les accusés plaident qu'une fois assignés au camp de Sobibor, ils ne voyaient aucune possibilité de refuser les ordres transmis, relayant une déclaration faite par Christian Wirth : « Si vous n'aimez pas cet endroit, vous pouvez le quitter, mais sous-terre, pas au-dessus ». Cependant et a contrario, le Untersturmführer Johann Klier (de) qui avait demandé à être affecté ailleurs qu'à Sobibor pour des motifs moraux n'avait non seulement pas été puni mais avait obtenu gain de cause, ce qui démontrait que la chose fut possible[4].

L'un des assassins les plus abjects à Sobibor, le SS-Oberscharführer Erich Bauer, surnommé Gasmeister a été traduit en justice quinze années auparavant, après avoir été reconnu dans la rue à Berlin en 1949 par le survivant Samuel Lerer. Le , Bauer avait été condamné à la peine de mort par la cour de justice de Berlin-Moabit, sentence commuée en détention à perpétuité en raison du fait que la peine de mort avait été abolie en Allemagne de l'Ouest. Bauer meurt à la prison de Tegel à Berlin en 1980[12].

Certains des gardes ukrainiens, recrutés et formés à Trawniki qui avaient servi à Sobibor sont jugés en Union soviétique dont B. Bielakow, M. Matwijenko, I. Nikifor, W. Podienko, F. Tichonowski, Emanuel Schultz, et J. Zajcew. Ils sont poursuivis pour trahison envers la patrie, déclarés coupable de crimes de guerre et exécutés. En , un tribunal de Kiev où le témoin principal à charge est Sasha Pechersky, dix anciens gardes ukrainiens sont déclarés coupables et exécutés, l'un d'entre eux étant condamné à 15 années d'emprisonnement.

Un troisième procès se tient à Kiev en , concernant trois anciens gardien du camp de Sobibor et de Belzec : condamnés à mort, ils sont conduits devant un peloton d'exécution et exécutés.

Verdicts[modifier | modifier le code]

Accusé Photographie Grade Chef d'accusation Accusation retenue Verdict
Frenzel, KarlKarl Frenzel SS-Oberscharführer Avoir personnellement tué 42 Juifs et participé aux meurtres d'approximativement 250 000 Juifs. Avoir tué personnellement 6 Juifs et d'avoir participé aux meurtres d'approximativement 15 000 Juifs Prison à vie, il purge 16 ans de réclusion
Kurt Bolender SS-Oberscharführer Avoir personnellement tué 360 Juifs et participé aux meurtres d'approximativement 86 000 Juifs. Il se suicide en prison avant le prononcé du verdict.
Franz Wolf SS-Oberscharführer Avoir personnellement tué 1 Juif et participé aux meurtres d'approximativement 115 000 Juifs. Avoir participé aux meurtres d'approximativement 39 000 Juifs. 8 années de réclusion
Alfred Ittner SS-Oberscharführer Avoir participé aux meurtres d'approximativement 57 000 Juifs. Avoir participé aux meurtres d'approximativement 68 000 Juifs. 4 années de réclusion
Werner Dubois SS-Oberscharführer Avoir participé aux meurtres d'approximativement 43 000 Juifs. Avoir participé aux meurtres d'approximativement 15 000 Juifs. 3 années de réclusion
Erich Fuchs SS-Scharführer Avoir participé aux meurtres d'approximativement 3 600 Juifs. Avoir participé aux meurtres d'approximativement 79 000 Juifs. 4 années de réclusion
Erich Lachmann SS-Scharführer Avoir participé aux meurtres d'approximativement 150 000 Juifs. Acquitté
Hans-Heinz Schütt (de) SS-Scharführer Avoir participé aux meurtres d'approximativement 86 000 Juifs. Acquitté
Heinrich Unverhau (de) SS-Unterscharführer Avoir participé aux meurtres d'approximativement 72 000 Juifs. Acquitté
Robert Jührs (de) SS-Unterscharführer Avoir participé aux meurtres d'approximativement 30 Juifs. Acquitté
Ernst Zierke SS-Unterscharführer Avoir participé aux meurtres d'approximativement 30 Juifs. Acquitté
Erwin Lambert SS-Unterscharführer Avoir participé aux meurtres d'un nombre indéterminé de Juifs. Acquitté

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Références[modifier | modifier le code]

  1. a et b Michael Bryant, Eyewitness to Genocide: The Operation Reinhard Death Camp Trials, 1955-1966 Chapter: The Hunt for Wittnesses, p. 36–132, University of Tennessee Press,2014, (ISBN 1621900495).
  2. a et b (en) J. Harrison, R. Muehlenkamp, J. Myers, S. Romanov et N. Terry, Belzec, Sobibor, Treblinka, Holocaust Controversies, First Edition, , 459–460 (PDF, 460–461) / 571, PDF file, direct download 5.30 MB (lire en ligne)

    « Source: Urteil LG Hagen, 20.12.1966, 11 Ks 1/64. The Hagen Court expressly pointed out that the total figure it arrived at, made no claim to historical completeness, but was merely a minimum number established for judicial purposes. »

  3. Bryant (2014), p. 133.
  4. a et b ARC (24 January 2006), Sobibor Trials Aktion Reinhard Camps.
  5. Dietrich Zeug (9 June 1960), "Operation Reinhard." Concise Summary of Current Results of Investigations by the Central Office of the State Justice Administrations, BA 162/3168 (in) Bryant (2014), p. 250–251
  6. Michael Bryant, "West German Prosecution of Operation Reinhard Crimes, 1958–1966" (PDF file, direct download), p. 6–21/49. Loyola of Los Angeles International and Comparative Law Review, 339 (2012).
  7. Bryant (2014), p. 160.
  8. Bryant (2014), p. 140.
  9. (en) Ruth Bettina Birn, « Fifty Years After: A Critical Look At The Eichmann Trial », Journal of International Law, Case Western Reserve University School of Law, Ohio, nos 1/28/2012,‎ , p. 5–6, 7, 13, 27/31 (lire en ligne [archive du ] [PDF] file, direct download)
  10. Sobibor - The Forgotten Revolt: Murderers. 2014 Thomas T. Blatt.
  11. Chris Webb, Carmelo Lisciotto, Victor Smart (2009), The Sobibor Death Camp. H.E.A.R.T. - Holocaust Education & Archive Research Team. See: Sobibor Trial
  12. (en) Ernst Klee, Willi Dressen et Volker Riess, The Good Old Days : The Holocaust as Seen by Its Perpetrators and Bystanders, Konecky, , 230–243 p. (ISBN 1-56852-133-2, lire en ligne), « SS-Oberscharführer Erich Bauer »