Littérature bretonne — Wikipédia

La littérature bretonne est la littérature produite en Bretagne ou écrite par des Bretons, quelle que soit la langue dans laquelle elle est écrite. Cependant il s'agit généralement de littérature écrite en breton, en français ou en gallo. Par le passé il y a également eu une littérature de langue latine.

Les débuts : VIe siècle[modifier | modifier le code]

La littérature produite au VIe siècle par les Bretons de l'île de Bretagne est précurseur de la littérature des Bretons continentaux. En tant que tel, les œuvres en breton des poètes Aneirin, Taliesin, Llywarch Hen, poètes du VIe siècle du Nord de l'île, sont devenues partie intégrante de la littérature bretonne bretonnante. De la littérature produite au VIe siècle par les Bretons armoricains ne sont parvenus que des textes en latin : De excidio et conquestu Britanniae de Gildas (ou saint Gildas, VIe siècle). En plus, les manuscrits de Historia Brittonum compilées par Nennius au début du IXe siècle contiennent des fragments de textes datant du VIe siècle.

Du VIIe siècle au XIe siècle[modifier | modifier le code]

La période du VIIe siècle au XIe siècle correspond à la période dite du vieux breton. La littérature bretonne de Bretagne armoricaine est surtout, dans cette période, une littérature de langue latine comportant des vies (ou Uitae) de saints bretons (venus pour la plupart d'outre Manche) rédigées dans les monastères armoricains. Ainsi la Vita Sancti Winwaloei (vers 860) et la Vita de Saint Pol (884).

La plupart des termes vieux bretons connus de nos jours viennent de gloses rédigées dans des manuscrits latins des VIIIe siècle et IXe siècle. Le plus ancien manuscrit qui contient des mots en langue bretonne est le manuscrit de Leyde (fin du VIIIe siècle), conservé à l'université de Leyde aux Pays-Bas et plus ancien d'au moins un siècle que le plus vieux manuscrit en langue française. Généralement considéré par les spécialistes comme le plus ancien texte en langue brittonique continentale, il a été étudié notamment par Léon Fleuriot. Il s'agit d'un fragment de recette médicinales, ce qui permet de supposer que le breton était utilisé par les classes érudites de l'époque.

Au cours de la période dite du vieux breton, une importante tradition orale a dû se développer. Il semble que les manuscrits de cette période ont disparu à cause des invasions normandes, au Xe siècle. Pourtant, il subsiste des traces de la littérature du vieux breton et cette littérature a inspiré vers 1100 - 1200 de nombreuses œuvres écrits en d'autres langues :

Au XIe siècle, Étienne de Fougères, évêque de Rennes, a écrit en latin des vies de saints et en français un Livre des Manières.

Du XIIe siècle au XVIIe siècle[modifier | modifier le code]

La période du XIIe siècle au XVIIe siècle correspond à la période dite du moyen breton. Après le passage des Normands, la nouvelle élite n'est plus bretonnante. Ainsi, bien avant l'unification de la Bretagne avec la France, le français devient la langue administrative en Bretagne, et jusqu'au XVe siècle peu de manuscrits en breton sont connus, sauf le Dialogue entre Arthur, Roi des Bretons Et Guinglaff[1]. Pourtant la littérature orale en breton subsiste, dans divers dialectes. D'ailleurs, durant cette période, la Bretagne ne produit pas non plus d'auteurs renommés en français.

L'un des premiers textes de cette période est le Roman d'Aiquin, composé au début du XIIIe siècle par un auteur inconnu. Il s'agit de la seule chanson de geste écrite en Bretagne, conservée grâce à une copie du XVe siècle[2].

Vers la fin du XVe siècle une génération d'historiens (chroniqueurs) écrit sur la Bretagne : Guillaume Gruel (Chronique d'Arthur de Richemont), Jean de Saint-Pol (Chronique de Bretagne), Pierre Le Baud (Histoire de Bretagne) et Alain Bouchart (Les grandes chroniques de Bretagne).

La publication imprimée, en 1499 d'un dictionnaire trilingue (breton, français et latin), le Catholicon, premier dictionnaire breton, ouvre la voie à la traduction, au XVIe siècle, de mystères français en breton. Inversion de l'histoire : trois siècles plus tard, ces mystères en breton seront faussement interprétés par Hersart de La Villemarqué comme les prototypes des mystères français[3].

Au XIXe siècle[modifier | modifier le code]

On compte à cette époque en Bretagne plusieurs grands écrivains de langue française.

C'est la période que les philologues mettent la littérature orale de la Bretagne en écrit; notamment Souvestre, La Villemarqué, Luzel et Sébillot.

À cheval sur la XIXe siècle et la XXe siècle plusieurs auteurs ont laissé des œuvres bretonnes fortement régionalistes et inspirées par la littérature orale.

Au XXe siècle[modifier | modifier le code]

Après la première guerre mondiale, une nouvelle génération d'auteurs bretons se sont engagés dans un courant nationaliste.

  • Auguste Dupouy (1872-1967) de la géneration regionaliste de Le Braz et le Goffic, par sa longévité devenu contemporain de cette nouvelle génération, s'oppose encore au courant nationaliste.
  • Camille Le Mercier d'Erm (1888-1978), créateur du Parti nationaliste breton : Les bardes et poètes nationaux de ma Bretagne armoricaine, La question bretonne, le nationalisme et l'action française, La Bretagne vue par les écrivains et les artistes, etc.
  • Roparz Hemon (1900-1970) : Ur Breizhad oc'h adkavout Breizh, An Aotrou Bimbochet e Breiz, Gaovan hag an den gwer, etc.
  • Youenn Drezen (Yves Le Drézen de son nom français) (1899-1972) : An Dour en-dro d'an Inizi, Itron Varia Garmez, Skol Louarn Veig Trebern (L'École buissonnière du petit Hervé Trebern), etc.
  • Louis Guilloux(1899-1980) se situe à l'écart du nationalisme et du régionalisme. La première guerre mondiale a laissé sur lui une forte influence. Il situe l'action de ses romans Le Sang noir (1935), Le Pain des rêves (1942), et Le Jeu de patience (1949) dans sa ville de Saint-Brieuc, mais sans jamais en citer le nom. Son inspiration dépasse son appartenance bretonne.
  • Henri Queffélec (1910)-(1992) a écrit un grand nombre de romans inspirés par sa Bretagne natale et par la mer. Le plus célèbre reste Un recteur de l'Île de Sein (1945).

La seconde partie du XXe siècle est davantage marquée par la montée des régionalismes.

  • Pierre-Jakez Hélias (1914-1995) réalise un retour au régionalisme avec Le Cheval d’orgueil (1975) qui raconte la jeunesse de l’auteur en pays bigouden ; l'approche passéiste de ce livre est vivement critiquée par le poète Xavier Grall (1930-1981) dans son livre-pamphlet Le Cheval couché (1977).
  • Paol Keineg (né en 1944). Autonomiste, longtemps membre de l'Union démocratique bretonne, dont il fut un des fondateurs, il exprime dans ses recueils Le poème du pays du pays qui a faim (1967), Hommes liges des talus en transes (1969), Chroniques et croquis des villages verrouillés (1971) et dans sa pièce Le Printemps des bonnets rouges une révolte viscérale contre la dépossession linguistique et l'oppression politico-économique dont sont, selon lui, victimes les Bretons.

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. « An dialog etre Arzur Roe d'an Bretounet ha Guynglaff », sur chrsouchon.free.fr (consulté le ).
  2. Borgnis Desbordes 2018, p. 339-359.
  3. Auguste Dupouy, La Bretagne intellectuelle et littéraire, in : Visages de la Bretagne, Éditions des Horizons de France, 1941, p. 88.

Annexes[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Pascal Rannou (direction, avec François Labbé, Philippe Walter, Thierry Glon, Alain-Gabriel Monot, Jean Balcou, Eugène Bérest, Yannick Pelletier, Hervé Carn, Jakeza Le Lay, Nathalie Caradec, Erwan Chartier, Maël Rannou), La Littérature bretonne de langue française. Chapitres sur la matière de Bretagne, la légende du roi Arthur, Brocéliande, Tristan en Bretagne, la Bretagne et le romantisme, le Parnasse breton, la littérature régionaliste, le roman d'aventure au XIXe s. ; Nantes, deuxième ville surréaliste, les écrivains et l'éveil breton des années 60, les revues Ar Vro, Sav Breizh, Bretagnes, Hopala !, le phénomène du polar breton, paysage et poésie, la bande dessinée en Bretagne, Mer et littératures (légendes, poésie, roman, chanson, cinéma) en Bretagne, et sur les écrivains suivants : Chateaubriand, Brizeux, Émile Souvestre, Renan, Jules Verne, Tristan Corbière, Villiers de l'isle-Adam, Saint-Pol-Roux, Jarry, Segalen, Féval, Loti, Guéhenno, Guilloux, Max Jacob, Julien Gracq, Armand Robin, René Guy Cadou, Yves Elléouët, Jean-René Huguenin, Pierre-Jakez Hélias, Xavier Grall, Paol Keineg, Guillevic, Georges Perros, Yvon Le Men, Jean Rouaud, Philippe Le Guillou, Fabienne Juhel, Fouesnant, Yoran Embanner, 466 p., 2020 (ISBN 978-2-36785-034-4).
  • Éric Borgnis Desbordes, Constance de Bretagne (1161-1201) : une duchesse face à Richard Cœur de Lion et Jean sans Terre, Fouesnant, Yoran embanner, , 475 p. (ISBN 978-2-36785-014-6). Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article
  • Marie-Joëlle Letourneur (Chargée de la vie littéraire, EPCC Livre et lecture en Bretagne), « L'édition bretonne : des caractéristiques identitaires et patrimoniales fortes », dans Jean Foucault, Michel Manson, Luc Pinhas, L'édition de jeunesse francophone face à la mondialisation, Paris, L'Harmattan, coll. « Références critiques en littérature d'enfance et de jeunesse », , 302 p. (ISBN 978-2-296-11192-9, lire en ligne)
  • Nathalie Couilloud, Promenades littéraires en Finistère, Coop Breizh, Spezet, 2009, 271 p.
  • Francis Favereau (dir.), Anthologie de la littérature de langue bretonne au XXe siècle, Skol Vreizh, Morlaix, tome I, Entre rêve et réalité, 1900-1918 (2002, 445 p. (ISBN 2-911447-57-3)) ; tome II D'une guerre à l'autre : Breiz Atao et les autres en littérature, 1919-1944 (2003, 575 p. (ISBN 2-911447-94-8) ; tome III, De 1945 à 1968 (2008, 510 p. (ISBN 978-2-915623-41-3)) ; Tome IV. Effet mai 68 et décennies de métissage. (2020, 480 p. (ISBN 2367580278).
  • (br + en) Jacqueline Gibson et Gwyn Griffiths (dir.), The Turn of the ermine : an anthology of Breton literature, F. Boutle, Londres, 2006, 506 p. (ISBN 1-903427-28-2)
  • Marc Gontard (dir.), Dictionnaire des écrivains bretons du XXe siècle, Presses Universitaires de Rennes, 2005
  • Marc Gontard, La langue muette : littérature bretonne de langue française, Presses universitaires de Rennes, Rennes, 2008, 158 p. (ISBN 978-2-7535-0614-5)
  • Yves Le Berre, Nelly Blanchard et Ronan Calvez, Qu'est-ce que la littérature bretonne ? : essais de critique littéraire, XVe – XXe siècles, Presses universitaires de Rennes, Rennes, 2006, 238 p. (ISBN 9782753502499)
  • Charles Le Quintrec, Littératures de Bretagne, Éd. Ouest-France, Rennes, 1992, 541 p. (ISBN 2-7373-1158-6)
  • Edmond Rébillé, Itinéraire littéraire en Côtes-d'Armor : 372 communes, 1033 écrivains, Coop Breizh, Spezet, 1998, 379 p. (ISBN 2-8434-6043-3)
  • Jean Balcou, Yves Le Gallo, Histoire littéraire et culturelle de la Bretagne, Champion, Brest, 1997.
  • Ur Apalategui, "Une lecture refondatrice de la littérature bretonne", in Erwan Hupel. Ribinoù : les degrés bretons de l'écriture, TIR, 2018, p. 5-8 (ISBN 9782917681428), hal-02022671

Articles connexes[modifier | modifier le code]

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