Famille Wittgenstein — Wikipédia

La famille Wittgenstein est une famille juive puis protestante d'industriels, d'intellectuels et d'artistes originaire du comté de Wittgenstein en Westphalie. Les descendants du commerçant Hermann Christian Wittgenstein (1802–1878) qui s'installa à Vienne (Autriche), en particulier, ont connu une renommée internationale.

Pour l'écrivain Olivier Todd, les Wittgenstein forment une « tribu avec une rare densité de talents, de génies, de névrosés, de psychoses et de suicides », en particulier chez les enfants de Karl Wittgenstein, « le Wendel et le Krupp autrichien, le père autocrate »[1].

Historique[modifier | modifier le code]

Moses et Breindel Meyer-Wittgenstein, vers 1810.

Les plus anciens membres de la famille que l'on connaît, Ahron Moses Meier († 1804) et son épouse Sarah, étaient au service de la maison de Sayn-Wittgenstein à Laasphe. Leur fils Moses Meyer (1761–1822) a d'abord été engagé par les comtes pour en être un régisseur ; néanmoins, le comté fut médiatisé en faveur du grand-duché de Hesse en 1806. Lors de l'émancipation des Juifs sous la juridiction de Napoléon Ier, en 1808, Moses a choisi le nom patronymique de Meyer-Wittgenstein. Afin d'éviter les situations de conflits avec le prince Guillaume de Sayn-Wittgenstein-Hohenstein, homme d'État prussien, il s'installe à la principauté de Waldeck, toute proche, où il a a fondé un commerce de gros avec des lainages à la ville de Korbach.

C'était Hermann Christian Wittgenstein (1802–1878), le plus jeune fils de Moses Meyer-Wittgenstein et de son épouse Bernhardine (Breindel) née Simon (1768–1829), qui quitte la ville en 1839 pour s'établir à Leipzig en Saxe. La même année, il fut baptisé à l'église Sainte-Croix de Dresde et il épousait Franziska (Fanny) Figdor (1814–1890), fille d'une famille juive convertie d'entrepreneurs originaire de Kittsee près de Vienne, la cousine du violiniste Joseph Joachim. En 1851, la famille déménage à Vösendorf au sud de Vienne.

Karl Wittgenstein, vers 1908.

Le fils de Hermann Christian, Karl Wittgenstein (1847–1913), compte parmi les entrepreneurs les plus riches de la monarchie danubienne. Un bourgeois caractéristique du Gründerzeit (« époque des fondateurs »), il est le père du philosophe Ludwig Wittgenstein (1889–1951) et du pianiste Paul Wittgenstein (1887–1961), ainsi que de la mécène Margarethe Stonborough (1882–1958). La famille a possédé notamment le palais Wittgenstein et la maison Wittgenstein à Vienne. L'épouse de Karl Wittgenstein, Leopoldine née Kalmus (1850–1926), n'était pas juive selon la Halakha, et leurs enfants n'étaient donc pas non plus considérés comme juifs. Cependant, ayant trois grands-parents juifs, ils furent en butte aux persécutions raciales du Troisième Reich.

Membres de la famille[modifier | modifier le code]

Branche paternelle[modifier | modifier le code]

Selon un arbre généalogique préparé à Jérusalem après la Seconde Guerre mondiale, l'arrière-arrière-grand-père paternel de Wittgenstein, Moses Meier[2], est un agent foncier juif qui vit avec sa femme, Brendel Simon, à Bad Laasphe dans l'arrondissement de Wittgenstein, en Westphalie[3]. En juillet 1808, Napoléon publie un décret selon lequel tout le monde, y compris les Juifs, doit adopter un nom de famille héritable, de sorte que le fils de Meier prend le nom de ses employeurs, les Sayn-Wittgensteins, et devient Moses Meier Wittgenstein[4]. Son fils, Hermann Christian Wittgenstein — qui a choisi comme deuxième prénom « Christian » pour se distancier de ses origines juives — épouse Fanny Figdor, également juive, convertie au protestantisme juste avant leur mariage. Venus de Saxe (Allemagne) où ils fondent une entreprise prospère de commerce de laine à Leipzig, ils s'installent en Autriche-Hongrie[5]. La grand-mère de Ludwig, Fanny, est une cousine germaine du violoniste Joseph Joachim[6]. Ils ont 11 enfants, dont le père de Wittgenstein.

Karl Wittgenstein (1847-1913), le père de Ludwig, élevé dans la religion luthérienne, fait fortune dans l'industrie sidérurgique : il est l'un des principaux « maîtres de forges » de l'Empire austro-hongrois[7],[8]. Grâce à Karl, les Wittgenstein sont devenus la deuxième famille la plus riche de l'Empire austro-hongrois, derrière la famille Rothschild[8]. Grâce à la décision de Karl, en 1898, d'investir massivement aux Pays-Bas et en Suisse ainsi qu'à l'étranger, notamment aux États-Unis, la famille est, dans une certaine mesure, protégée de l'hyperinflation qui frappe l'Autriche en 1922[9]. Cependant, leur capital est atteint en raison de l'hyperinflation qui suit 1918 et de la Grande Dépression. En 1938, la famille Wittgenstein possède encore treize hôtels particuliers dans la seule ville de Vienne[10].

Branche maternelle[modifier | modifier le code]

Photographie en noir et blanc d'un groupe de cinq personnes, 3 jeunes femmes vêtues de blanc et 2 petits garçons en vareuses à larges cols.
Ludwig Wittgenstein (en bas à droite), son frère Paul et ses sœurs.

Sa mère, Léopoldine Maria Josefa Kalmus, est de confession catholique[11],[12]. Son père est un Juif tchèque et sa mère une Austro-Slovène de confession catholique – elle est la seule aïeule de Lugwig Wittgenstein qui ne soit pas juive[13],[14]. Elle est la tante du prix Nobel Friedrich Hayek.

Enfants[modifier | modifier le code]

Karl et Léopoldine ont neuf enfants — quatre filles : Margarethe (dite Gretl), Hermine, Hélène, et une quatrième fille Dora mort-née ; cinq garçons : Johannes (Hans), Kurt, Rudolf (Rudi), Paul, et Ludwig, le benjamin.

Généalogie[modifier | modifier le code]

Arbre généalogique simplifié[15] :

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Olivier Todd, préface in Alexander Waugh, Les Wittgenstein : Une famille en guerre, Perrin, 2011, p. 10.
  2. John Preston, « Wittgenstein Family History - Ludwig Wittgenstein : Une chronologie de sa vie et de son œuvre » [archive du ], sur www.wittgensteinchronology.com
  3. Voir château de Wittgenstein. Diverses sources orthographient le nom de Meier Maier et Meyer.
  4. Bartley 1994, p. 199–200.
  5. Monk 1990, p. 4-5.
  6. Monk 1990, p. 5.
  7. D'après Henrik von Wright, in Le Cahier bleu et Le Cahier brun. Études préliminaires aux « Investigations philosophiques », Paris, Gallimard, 1965, « Notice biographique », page 312.
  8. a et b Edmonds et Eidinow 2001, p. 63.
  9. Monk 1990, p. 7.
  10. Edmonds et Eidinow 2001, p. 102.
  11. Chatterjee 2005, p. 178.
  12. McGuinness 1988, p. 21.
  13. « Ludwig Wittgenstein : Background » [archive du ], Wittgenstein archive, University of Cambridge (consulté le ).
  14. Anthony Gottlieb, « A Nervous Splendor », The New Yorker,‎ (lire en ligne).
  15. D'après Alexander Waugh (en), Les Wittgenstein : Une famille en guerre, Perrin, 2011, p. 14-15.

Bibliographie[modifier | modifier le code]

En français[modifier | modifier le code]

En anglais[modifier | modifier le code]

En allemand[modifier | modifier le code]

  • Georg Gaugusch, Die Familien Wittgenstein und Salzer und ihr genealogisches Umfeld. In: Adler, Zeitschrift für Genealogie und Heraldik. 21. (XXXV.) Band (2001–2002) S. 120–145 (2001).
  • Birgit Schwaner, Die Wittgensteins. Kunst und Kalkül. Metro Verlag, Wien 2008.
  • Nicole L. Immler, Das Familiengedächtnis der Wittgensteins. Zu verführerischen Lesarten von (auto-)biographischen Texten. Transcript, Bielefeld 2011.
  • Hermine Wittgenstein hrsg. von Ilse Somavilla, Familienerinnerungen. Haymon Verlag, Innsbruck/ Wien 2015, (ISBN 978-3-7099-7200-7)