Conrad Moricand — Wikipédia

Conrad Moricand
Moricand (1917), dessin d'Amedeo Modigliani, collection privée[1].
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Conrad Moricand, né le à Paris où il est mort le , est un astrologue, écrivain et illustrateur suisse.

Proche de la bohème du quartier du Montparnasse, il publie également sous le nom de Claude Valence.

Biographie[modifier | modifier le code]

Fils de Marie Chauffert[2] et de l'ingénieur Philippe André Moricand (Genève, 1859 - Paris, 1928)[3],[4], Conrad Moricand est peut-être lié à la famille genevoise, où s'illustrent deux naturalistes, dont Stefano Moricand[5].

Dès 1914, vivant dans l'hôtel particulier familial situé rue Victor-Massé, il fréquente la bohème du quartier du Montparnasse : en juin de cette année-là, il est témoin d'un duel à l'épée dit « des Polonais », organisé entre autres avec Moïse Kisling, Diego Rivera, et Léopold Gottlieb[6]. Il se lie d'amitié avec Amedeo Modigliani[7]. En août, il répond à l’Appel aux étrangers vivant en France et est versé au 3e régiment de marche du 1er étranger : c'est là qu'il rencontre Blaise Cendrars[8].

Durant une permission, il expose en novembre-décembre 1917 dans l'atelier d'Émile Lejeune, salle Huyghens, dans le cadre des performances « Lyre et palette », située 6, rue Huyghens, en compagnie de René Durey, Moïse Kisling et Henry de Waroquier, entre autres, ce qui lui vaut l'amitié de Jean Cocteau et Max Jacob[9],[10].

En 1919, il illustre de ses dessins un roman d'André Salmon, Mœurs de la famille Poivre, publié à Genève, aux éditions de L'Éventail, maison liée à la revue L'Éventail fondée dans cette ville en 1917 ; puis, la même année, il fait paraître à Paris, Les interprètes : essai de classement psychologique d'après les correspondances planétaires aux éditions de La Sirène, avec une préface de Max Jacob. Il collabore à La Rose rouge, un hebdomadaire fondé en mai 1919 par Maurice Magre et Pierre-Silvestre[11].

En 1921-1922, il entretient une correspondance avec le peintre Marcel Mouillot[12].

En 1928, il publie sous son nom la première édition du Miroir d'astrologie, au éditions Au sans pareil, puis, chez le même éditeur, en 1933, Portraits astrologiques : Kees van Dongen, Blaise Cendrars, Paul Morand, Pablo Picasso, Aristide Briand, Jean Cocteau, Louis Jouvet, Georges-Mandel, André Tardieu, Léon Daudet.

Henry Miller témoigne, dans Un diable au Paradis (A Devil in Paradise, 1956)[8], de sa rencontre avec Conrad Moricand (qu'il renomme « Tericand » dans son ouvrage), et de leur amitié, à Paris, à partir de 1936, dans la villa Seurat, que fréquentait alors Anaïs Nin, qui les présenta. Selon Miller, Moricand, qui avait perdu toute sa fortune à cause d'un escroc, après avoir été mécène et collectionneur d'œuvres d'art[13], vivait désormais dans une certaine indigence, et gagnait sa vie en produisant des thèmes astrologiques. En juin 1939, Miller prend la décision de partir en Grèce.

Au début de l'Occupation, Moricand, resté à Paris, rencontre Théophile Briant qui le publie par la suite dans Le Goéland. Entre janvier et juin 1941, il signe des articles astrologiques dans le journal collaborationniste La France au travail[14], puis perd son emploi de journaliste. En mars 1944, il entreprend des démarches pour faire libérer son ami Max Jacob du camp de Drancy, en vain[15]. Plus tard, il se réfugie à Vevey, et renoue avec Miller, qui vit sur la côte californienne, par voie postale.

En décembre 1946, Miller l'invite à venir vivre chez lui, sa femme et sa petite fille, et lui paye même le voyage. Le séjour de Moricand dure trois mois puis les choses dégénèrent : Miller, excédé par cet homme qu'il voit de plus en plus comme négatif et malsain — Moricand avouera, entre autres avoir été toxicomane —, le pousse à s'installer à San Francisco où il tente de survivre en vendant des dessins érotiques de sa composition. Expulsé durant l'automne 1949 grâce à l'intervention du consul suisse, Moricand rentre à Paris, et s'installe à l'hôtel Modial, 21 rue Notre-Dame-de-Lorette, où Théophile Briant le retrouve, devenant témoin de ses derniers jours dans l'Asile suisse de vieillards[16] — une maison de retraite située au 25 de l'avenue de Saint-Mandé et fondée par ses propres parents ! —, puis de son décès, à l'hôpital Saint-Antoine[2],[8].

Il aurait laissé un manuscrit de ses mémoires, intitulé Quand le Diable l’emporte[17].

Jamais marié, il eut pour dernière compagne l'artiste lyrique Jeanne Durand (1905-2001)[18],[2].

Autres publications[modifier | modifier le code]

  • Blaise Cendrars, Aujourd'hui, dessin de Conrad Moricand, Paris, Grasset, 1931.
  • Les Traces du culte d'Isis sur les portails mystiques de Notre-Dame de Paris, préfacé par Théophile Briant, Paramé, Éditions du Goéland, 1942.
  • [Claude Valence et Max Jacob], Miroir d'astrologie. Édition définitive, Paris, Gallimard, 1949.
  • Les cinquante rames du navire « Argo », préfacé par Frédéric Jacques Temple, Montpellier, À la licorne, 1955.
  • [posthume], Les Signes du Zodiaque suivi de Comment dresser un horoscope, coll. « Bibliothèque des dames et des demoiselles », Paris, Cercle du livre précieux, 1966.

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Vente aux enchères, sur Lempertz, 29 mai 2015.
  2. a b et c Acte de décès Paris 12e, n° 2283, vue 30/31, Archive de Paris.
  3. Chevalier de la Légion d'honneur 1910, base Léonore.
  4. « Avis de décès », in: Le Figaro, 4 avril 1928, p. 2 — sur Retronews.
  5. Jean-Carlo Flückiger, « Conrad Moricand (1887-1954) », in: Constellation Cendrars, no 6, Classiques Garnier, 2022, pp. 41-46.
  6. Le Journal, 12 juin 1914, p. 1 — sur Retronews.
  7. Lettre de Modigliani à Moricand, 8 novembre 1916, sur Autographes des siècles.
  8. a b et c Henry Miller, Un diable au Paradis, trad. d'Alex Grall, Paris, Buchet-Chastel, 1956.
  9. Jean-Paul Crespelle, Montparnasse vivant, Hachette, 1962, pp. 134-135.
  10. Jean Cocteau, Carte blanche, in: Le Siècle, 15 avril 1919, p. 3 — sur Retronews.
  11. Bruno Leclecq, La Rose rouge, sur Paperblog.
  12. Quatre lettres à Marcel Mouillot - 1921-1922, sur Traces écrites.
  13. En novembre 2022, une toile de Henri Hayden a été vendue à Drouot, comme provenant de l'ancienne collection de Moricand — in: La Gazette Drouot.
  14. La France au travail, 1er juin 1941, p. 2 — sur Retronews.
  15. Patricia Sustrac, « La mort de Max Jacob : réalité et représentations », in: Cahiers de Max Jacob, 9, 2009.
  16. L'immeuble est aujourd'hui détruit — voir carte postale d'époque, sur Cartorum.
  17. (en) « Conrad Moricand Papers », Archives de l'université de Yale.
  18. [PDF] « Ensemble d’œuvres provenant de la collection de Conrad Moricand et Jeanne Durand », vente du 3 décembre 2022, pp. 54-55.

Annexes[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Max Jacob, Lettres à Théophile Briant et Conrad Moricand 1920-1941, correspondance annotée et présentée par Stanley J. Collier, Oxford, Blackwell, 1966.
  • « Conrad Moricand », in: Le Pont de l'Épée, no 73-74, 3e et 4e trimestre 1981 — lire extrait en ligne.

Liens externes[modifier | modifier le code]