Cinquième problème de Hilbert — Wikipédia

Le cinquième problème de Hilbert fait partie de la liste des vingt-trois problèmes posés par David Hilbert en 1900, et concerne la caractérisation des groupes de Lie. Il s'agissait (dans un langage moderne et en interprétant la question, puisqu'à l'époque la notion précise de variété différentielle n'existait pas) de démontrer que dans la définition d'un groupe de Lie, la condition de différentiabilité est redondante. Cette conjecture était plausible (les groupes classiques, exemples centraux de la théorie des groupes de Lie, sont des variétés lisses) et finit par être confirmée au début des années 1950.

Formulation[modifier | modifier le code]

Une formulation moderne du problème est : montrer que sur toute variété topologique (de dimension finie) munie d'une structure de groupe topologique, il existe une structure de variété différentielle, essentiellement unique, pour laquelle la loi de groupe est différentiable. Le degré de différentiabilité n'est pas précisé car s'il existe une telle structure Ck-différentiable, alors il en existe une C et même analytique réelle.

Solution[modifier | modifier le code]

Le premier résultat majeur fut celui de John von Neumann en 1933[1], pour les groupes compacts. Le cas des groupes abéliens localement compacts fut résolu en 1934 par Lev Pontryagin et le cas général — au moins dans cette interprétation de l'énoncé de Hilbert — par les travaux d'Andrew Gleason, Deane Montgomery et Leo Zippin (en), dans les années 1950. Plus précisément : en 1952, Gleason introduisit la notion de groupe « sans petits sous-groupes » (cf infra) et démontra la conjecture sous cette hypothèse[2], pendant que Montgomery-Zippin prouvaient que cette hypothèse est en fait redondante. L'année suivante, Hidehiko Yamabe (en)[3] élimina quelques conditions techniques de la preuve de Gleason[4],[5], montrant que tout groupe connexe localement compact G est limite projective d'une suite de groupes de Lie, et que si G n'a pas de petits sous-groupes, alors G est un groupe de Lie.

Groupes sans petits sous-groupes[modifier | modifier le code]

Un groupe topologique G est dit sans petits sous-groupes (en) s'il existe un voisinage de l'élément neutre ne contenant aucun autre sous-groupe que le groupe trivial. Par exemple, le cercle unité vérifie cette condition, mais pas le groupe additif de l'anneaup des entiers p-adiques, car un voisinage du neutre contient toujours les sous-groupes pkp pour k assez grand.

Conjecture de Hilbert-Smith[modifier | modifier le code]

Le cinquième problème de Hilbert est parfois interprété au sens plus large de la conjecture suivante, nommée d'après David Hilbert et Paul Althaus Smith et toujours non résolue :

Conjecture de Hilbert-Smith[6] : tout groupe localement compact agissant fidèlement[7] sur une n-variété connexe est un groupe de Lie.

Elle équivaut à : p n'agit fidèlement sur aucune n-variété connexe[6].

Dimension infinie[modifier | modifier le code]

Le cinquième problème de Hilbert sans supposer la dimension finie a aussi été étudié. La thèse de Per Enflo[8],[9] portait sur ce problème, sans hypothèse de compacité.

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. (de) John von Neumann, « Die Einführung analytischer parameter in topologischen Gruppen », Annals of Mathematics, vol. 34, no 1,‎ , p. 170-190 (DOI 10.2307/1968347).
  2. Richard Palais, « Gleason's contribution to the solution of Hilbert's Fifth Problem », dans (en) Ethan D. Bolker, « Andrew M. Gleason 1921-2008 », Notices Amer. Math. Soc., vol. 56, no 10,‎ , p. 1243-1248 (lire en ligne).
  3. (en) Hidehiko Yamabe, « On an arcwise connected subgroup of a Lie group », Osaka Mathematical Journal, vol. 2, no 1,‎ , p. 13-14.
  4. (en) « Andrew M. Gleason », dans Donald J. Albers, Gerald L. Alexanderson et Constance Reid, More Mathematical People: Contemporary Conversations, Harcourt Brace Jovanovich, (ISBN 978-0-15-158175-7), p. 86.
  5. Selon (en) Goto Morikuni, « Hidehiko Yamabe (1923–1960) », Osaka Mathematical Journal, vol. 13, no 1,‎ , i-ii (lire en ligne), Yamabe a apporté « la réponse finale » au cinquième problème. Mais on trouve dans la littérature d'autres revendications du même type, principalement à cause d'interprétations différentes du cinquième problème par divers chercheurs. Pour un exposé récapitulatif (qui ne mentionne pas les contributions de Yamabe) et une nouvelle « réponse finale », voir (en) Elemér E. Rosinger, Parametric Lie Group Actions on Global Generalised Solutions of Nonlinear PDE. Including a solution to Hilbert's Fifth Problem, Kluwer Academic Publishers, coll. « Mathematics and Its Applications » (no 452), , 238 p. (ISBN 978-0-7923-5232-7, lire en ligne), xiii-xiv et 169-170.
  6. a et b (en) John Pardon, « The Hilbert-Smith conjecture for three-manifolds », J. Amer. Math. Soc., vol. 26, no 3,‎ , p. 879-899 (lire en ligne).
  7. (en) D. Montgomery et L. Zippin, Topological Transformation Groups (présentation en ligne).
  8. (en) Per Enflo, Investigations on Hilbert's fifth problem for non locally compact groups (thèse de Ph. D. constituée de 5 articles) :
    • (en) Per Enflo, « Topological groups in which multiplication on one side is differentiable or linear », Math. Scand., vol. 24,‎ , p. 195-197,
    • (en) Per Enflo, « On the nonexistence of uniform homeomorphisms between Lp spaces », Ark. Mat., vol. 8, no 2,‎ , p. 103-105 (DOI 10.1007/BF02589549),
    • (en) Per Enflo, « On a problem of Smirnov », Ark. Math., vol. 8,‎ , p. 107-109,
    • (en) Per Enflo, « Uniform structures and square roots in topological groups I », Israel J. Math., vol. 8, no 3,‎ , p. 230-252,
    • (en) Per Enflo, « Uniform structures and square roots in topological groups II », Israel J. Math., vol. 8, no 3,‎ , p. 253-272.
  9. (en) Yoav Benyamini et Joram Lindenstrauss, Geometric nonlinear functional analysis, AMS, coll. « Colloquium publications » (no 48), dernier chapitre.
  • (en) Irving Kaplansky, Lie Algebras and Locally Compact Groups, coll. « Chicago Lectures in Mathematics »,