Traité des XXIV articles — Wikipédia

Traité des XXIV articles
Description de cette image, également commentée ci-après
Première page du traité.
Traité relatif à la séparation de la Belgique d'avec les Pays-Bas
Type de traité Traité
Signé
Londres
Parties
Parties Drapeau des Pays-Bas Pays-Bas Drapeau de l'Autriche Empire d'Autriche Drapeau du Royaume de France Royaume de France Drapeau du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande
Signataires Salomon Dedel Ludwig Senfft von Pilsach (de) Horace Sébastiani Henry John Temple
Ratifieurs Drapeau de la Belgique Léopold Ier Drapeau des Pays-Bas Guillaume Ier

Wikisource logo [[s:Le traité des XXIV articles|Voir le traité sur Wikisource]]

Le traité des XXIV articles ou traité de Londres du 19 avril 1839 est un ensemble de deux traités signés à Londres le entre l'Autriche, la France, la Grande-Bretagne, la Prusse et la Russie, d'une part, et les Pays-Bas d'autre part, en plus de la Belgique.

Ils reconnaissent officiellement la séparation des deux États par toutes les parties, succédant ainsi au traité des XXVII articles signé le qui reconnaissait la scission du royaume uni des Pays-Bas à la suite de la révolution belge et de la déclaration d'indépendance de la Belgique proclamée le , mais dont la signature était continuellement repoussée par le roi des Pays-Bas, Guillaume Ier, qui ne pensait pas que la Belgique pouvait être un État viable.

Ils réduisent également les frontières de la Belgique en délimitant celles du Luxembourg actuel, à l’issue de la scission du grand-duché de Luxembourg qui mène à la création de la neuvième province de Belgique : la province de Luxembourg. C'est également par ces traités qu'est scindée la province de Limbourg de part et d’autre de la Meuse, dont la partie occidentale devient la province belge de Limbourg et la partie orientale redevient le duché de Limbourg (qui sera rétrocédé aux Pays-Bas lors de la dissolution de la confédération germanique en 1866 sous la forme de la province néerlandaise de Limbourg).

Contexte[modifier | modifier le code]

Les frontières de la Belgique depuis la reconnaissance de son indépendance (1830) jusqu'au traité des XXIV articles de 1839.

Après la révolution belge et la déclaration d'indépendance de la Belgique le , le royaume uni des Pays-Bas (créé en 1815 par le congrès de Vienne) se retrouvait coupé en deux : les huit[1] provinces du sud du Royaume avaient fait sécession et annexé le grand-duché de Luxembourg, alors propriété privée du roi des Pays-Bas Guillaume Ier et de la maison d'Orange-Nassau, dès le . Ces différents évènement mènent au début de la guerre belgo-néerlandaise et à l’intervention des grandes puissances européennes réunies dès le lors de la conférence de Londres qui imposent un armistice et engage les négociations en vue d'une solution diplomatique.

Premiers traités[modifier | modifier le code]

Un premier traité est proposé le par la conférence de Londres : le traité des XVIII articles, qui délimite les frontières de la Belgique, en y incluant le grand-duché de Luxembourg, retiré à la maison d'Orange-Nassau. Ce dernier prévoyait la possibilité d'un rachat du Luxembourg et d'un échange de la partie de la province de Limbourg située au-delà de la Meuse et de Maastricht (territoires qui forment l'actuel Limbourg néerlandais). Il garantissait aussi la navigation libre sur l'Escaut. Mais le roi Guillaume Ier des Pays-Bas refuse de le ratifier et, après la prestation de serment du premier roi des Belges, Léopold Ier, le , Guillaume Ier tente de reconquérir ses territoires par la campagne des Dix-Jours qui, grâce à l’intervention de l'armée expéditionnaire française, se solde par un échec néerlandais.

Un nouveau traité international acte la séparation officielle de la Belgique et de ce qui devient alors les Pays-Bas : le traité des XXVII articles, signé par les puissances et la Belgique le , mais pas par les néerlandais, qui l'ignorent. Les grandes puissances l'époque constatant la faiblesse de la Belgique rendent ce traité un traité moins avantageux pour elle. Celui-ci lui fermait toute possibilité d'échange d'une partie du Limbourg ou de rachat du Luxembourg, ce qui garantissait aux Pays-Bas le contrôle de deux places stratégiques en cas d'attaque française : Maastricht et Luxembourg (la défense de cette dernière forteresse étant assurée par une garnison prussienne mélangée à des soldats néerlandais). Tout au plus, il accordait à la Belgique la partie du Luxembourg de langue romane ainsi que le, Pays d'Arlon, pourtant de langue germanique mais ajouté sur insistance du ministre plénipotentiaire français Charles-Maurice de Talleyrand-Périgord (guidé par des considérations de stratégie militaire)[2].

Le traité reconnaissait aussi l'indépendance du grand-duché de Luxembourg. Par ailleurs, les Pays-Bas recevaient le contrôle des bouches de l'Escaut, ainsi que l'accès à Liège par la Meuse. Il chargeait aussi la Belgique de la moitié de la dette du royaume des Pays-Bas, alors que l'essentiel de celle-ci datait d'avant l'unification de 1815. Comme le traité des XVIII articles, il faisait de la Belgique un État perpétuellement neutre (article 9) garanti par l'Autriche, la France, le Royaume-Uni, la Prusse et la Russie (article 25)[3].

Non-reconnaissance néerlandaise[modifier | modifier le code]

Malgré sa ratification par le parlement belge, le traité resta longtemps lettre morte, le roi Guillaume espérant toujours récupérer l'ensemble du territoire belge ; il refusait de signer le traité. En pratique, la Belgique administrait donc l'ensemble du Luxembourg et du Limbourg et seules les forteresses d'Anvers (libérée en 1832 par les Français lors du siège de la ville), de Maastricht et de Luxembourg échappaient à son contrôle. De même l'ensemble de la dette restait à charge des Pays-Bas. Mieux, le , la Belgique et les Pays-Bas s'engagèrent à prolonger indéfiniment l'armistice, à respecter le statu quo et à garantir la libre navigation sur les fleuves lors de la convention de Londres.

Finalement, le , le roi Guillaume fit savoir à la conférence de Londres qu'il se ralliait au traité des XXIV articles. Les autorités belges tentèrent par tous les moyens diplomatiques d'obtenir une révision du traité, mais elles n'obtinrent qu'une réduction de leur part dans la dette (qui passa de 8 400 à 5 400 millions de florins). En 1839, le traité fut définitivement ratifié par le Parlement belge et la Belgique dut rendre une partie du Limbourg (traité de Maastricht de 1843) et du Luxembourg et accepter la fermeture par un péage de l'Escaut (qui perdurera jusqu'en 1863).

Les traités[modifier | modifier le code]

Deux traités ont en fait été signés à Londres le . Le premier est conclu entre la France, l'Autriche, le Royaume-Uni, la Prusse, la Russie et les Pays-Bas. Ce traité entérine la séparation de la Belgique et des Pays-Bas. Le second traité, le traité des XXIV articles proprement dit, est conclu entre la Belgique et les Pays-Bas. Enfin, la Confédération germanique signa le même jour un acte d'accession aux deux traités.

Ce traité est un exemple d'exception au principe d'effet relatif des traités. En effet, ce traité crée une situation objective (la création d'un État, la Belgique), qui s'impose aux États tiers. Il faut remarquer que cela est possible uniquement parce que l'État ayant compétence territoriale dans la zone concernée, le royaume des Pays-Bas, est partie au traité. La Confédération germanique, compétente dans une partie du territoire concernée (le grand-duché de Luxembourg, tel que créé en 1815 par le congrès de Vienne), n'est pas partie au traité, mais elle a ratifié un acte d'accession.

Le tracé définitif de la frontière entre la Belgique et les Pays-Bas sera fixé en 1843 par le traité de Maastricht.

Signataires[modifier | modifier le code]

Les différents plénipotentiaires signataires du traité sont les suivants :

Conséquences[modifier | modifier le code]

Évolution du territoire belge depuis l'indépendance de la Belgique jusqu'au traité des XXIV articles.

Scission du Limbourg[modifier | modifier le code]

La Belgique perd 2 209,22 km2 de territoires à l'est de la Meuse, de Maastricht à Venlo. Ils furent rattachés à la Confédération germanique sous le nom de Duché de Limbourg jusqu'à la dissolution de celle-ci en 1866. Ils devinrent ensuite officiellement la province néerlandaise de Limbourg. Côté belge, les territories restant forment l'actuelle province de Limbourg, dans la région flamande.

Scission du Luxembourg[modifier | modifier le code]

La scission du Grand-duché de Luxembourg se fit sur base linguistique : la partie de langues germaniques fut rendue à Guillaume Ier, à l'exception du Pays d'Arlon qui demeura belge tout en gardant son patois luxembourgeois (ici en bleu ciel).

La Belgique perd la partie de langues germaniques du Grand-duché de Luxembourg (qu'elle avait annexé de manière unilatérale le ), à l'exception notable du Pays d'Arlon, qui lui revient pour des raisons politiques et stratégiques. Elle rend alors ces territoires à Guillaume Ier qui en est le propriétaire privé et qui sont rattachés à la Confédération germanique. Cela représente les 2 586,4 km2 de l'actuel Luxembourg qui conquerra petit à petit son indépendance de la monarchie néerlandaise. Les territoires de langues romanes plus le pays d'Arlon forment alors la neuvième province belge : la province de Luxembourg.

Accueil et ratification[modifier | modifier le code]

Ratification officielle[modifier | modifier le code]

Le traité fut officiellement ratifié par le roi des Pays-Bas, Guillaume Ier, le et par le roi des Belges, Léopold Ier, le .

Chiffon de papier[modifier | modifier le code]

Affiche de propagande britannique de 1914.

L'indépendance de facto de la Belgique s'était consolidée avec les neuf années de confrontation suivant la révolution belge. Les signataires du traité, le Royaume-Uni, l'Empire autrichien, la France, la Prusse, l'Empire russe, et le royaume des Pays-Bas, reconnaissant désormais l'indépendance de la Belgique, et sa neutralité sur insistance du Royaume-Uni.

Le traité eut son importance dans les relations internationales, notamment lors du déclenchement de la Première Guerre mondiale. Quand l'Empire allemand envahit la Belgique en en violation du traité, les Britanniques leur déclarèrent la guerre le . Informé par l'ambassadeur britannique de l'entrée en guerre à la suite notamment de la violation du traité des XXIV articles, le chancelier allemand Theobald von Bethmann Hollweg déclara qu'il ne pouvait croire que le Royaume-Uni et l'Allemagne entraient en guerre pour un « chiffon de papier ». Pour les Britanniques, il n'était pas envisageable, avec l'accroissement de la marine allemande, que le Reich puisse prendre (à plus ou moins long terme) le contrôle des ports de mer belges (essentiellement Anvers et Ostende) puis par extension ceux français.

Les armées envahirent également le grand-duché de Luxembourg à la même époque, dont la neutralité était garantie par les grandes puissances à la suite du traité de Londres de 1867.

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Anvers, Brabant, Flandre-Occidentale, Flandre-Orientale, Hainaut, Liège, Limbourg et Namur
  2. Par ailleurs, pour compenser cette diminution du territoire du grand-duché de Luxembourg, qui faisait partie de la Confédération germanique, le Limbourg néerlandais était incorporé à ladite confédération.
  3. André Weiss, La Violation de la neutralité belge et luxembourgeoise par l'Allemagne, Librairie Armand Colin, Paris, 1915 [lire en ligne].

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]