Tori (cheval) — Wikipédia
Tori alezan brûlé de type trait | |
Région d’origine | |
---|---|
Région | Estonie |
Région d'élevage | Estonie et Ukraine |
Caractéristiques | |
Morphologie | Cheval de trait ou cheval de sport |
Taille | 1,52 m à 1,66 m |
Poids | 620 à 650 kg |
Robe | Généralement alezan |
Tête | Profil rectiligne, front large |
Pieds | Larges |
Caractère | Docile |
Autre | |
Utilisation | Surtout attelage |
modifier |
Le Tori (estonien : tori hobune) est une race chevaline estonienne. Les prémices de sélection remontent au XIXe siècle. La plupart des Tori descendent de juments estoniennes et d'un étalon de race croisée Anglo-normand et Trotteur Norfolk, nommé Hetman, stationné dans le haras de la commune de Tori. La demande porte alors sur un cheval apte aux travaux d'agriculture, d'où son nom de « Tori universel » lors de l'officialisation de la race par les autorités soviétiques en 1950. Le stud-book est créé en 1932.
Avec le recul de la traction agricole, le Tori a été croisé avec diverses races de chevaux de sport, transformant son modèle vers celui du « warmblood » européen. De solide constitution, ce cheval est destiné en priorité à l'attelage. La majorité des effectifs sont toujours situés en Estonie, quelques-uns en Ukraine. Ayant subi une sévère réduction de population, le Tori reste menacé d'extinction. Des mesures de conservation ont été mises en place en Estonie.
Histoire
[modifier | modifier le code]La race est connue sous les noms de « Tori » et « Toric » en estonien[1], et « Torian » ou « Torijska » en ukrainien[2]. Relativement récente[3], issue de croisements[4], elle est intimement liée au haras du même nom, situé en Livonie, au sud-ouest de l'Estonie[5]. Ce haras créé en 1856[6] sélectionne à Pärnumaa 47 juments et 7 étalons de la race locale (probablement proche de l'Estonien natif[3]), alors en voie d'extinction, toisant 1,35 m à 1,40 m, et les croise avec 10 juments et trois étalons de race finlandaise[5],[7]. Bien que certains chevaux de race pure finlandaise naissent dans ce haras, cette population reproductrice est principalement utilisée en croisement[7]. Plus tard, les chevaux descendants croisés finlandais ne se révèlent pas adaptés au travail demandé[7]. Le haras de Tori cesse progressivement d'utiliser les chevaux finlandais[7]. Cependant, un étalon finno-arabe, Orro, a une influence notable sur le cheval Tori moderne par le biais de son arrière-petit-fils Haroun 42 T, qui a une multitude de descendants[7].
Le haras de Tori importe trois étalons arabes et deux trotteurs allemands[5]. L'élevage se poursuit dans le but de modifier la race locale de l'Estonien par croisements avec des chevaux de selle et de trait léger[5]. Cette première phase d'élevage dure de 1856 jusqu'à 1880[8]. L'objectif est l'obtention d'un cheval apte aux travaux agricoles[9].
À la fin du XIXe siècle, l'objectif du haras est d'élever des chevaux plus rapides[5]. L'élevage du cheval de Tori débute officiellement en 1890[10] ou 1892[5] (1862 d'après le Guide Delachaux[11]), en intégrant un programme de croisements avec le Hackney à partir de 1896[5]. Les résultats étant insatisfaisants, un étalon issu d'un croisement entre Anglo-normand et Trotteur Norfolk est introduit[5]. Nommé Hetman, cet étalon né en Pologne en 1886, et acquis par le haras de Tori en 1892[10] ou 1896[9], est considéré comme le fondateur de la race[12] : la création de cette dernière découle en effet principalement des croisements avec Hetman et ses fils[10],[6],[13].
La race reste en formation jusqu'en 1920 ou 1921[14], année du début de l'élevage du « cheval de ferme universel », qui se poursuit jusqu'en 1973[1]. La race est officiellement reconnue en 1925[14]. Le Tori est influencé par le Hanovrien et l'Ardennais avant les années 1950[9], et par le Frison et l'Arabe[3]. Son stud-book est créé en 1932[1]. Jusqu'en 1936, des croisements Norfolk-Estonien sont pratiqués[1]. Cependant, à la fin des années 1930, la qualité du cheptel est réputée décroître en raison de la consanguinité[10],[15]. Des croisements avec des postiers bretons sont effectués afin d'augmenter la diversité génétique[10]. Le Tori devient un cheval de trait massif et se répand largement dans toute l'Estonie, mais la qualité de ses allures laisse parfois à désirer[10],[15].
La race est officialisée en 1950, sous le nom de « Tori universel »[5],[16],[17] : elle représente alors 67,5 % du cheptel de chevaux présent en Estonie soviétique[9]. Des Hanovriens et des Trakehner sont croisés à partir des années 1970, dans l'objectif d'améliorer la dimension « universelle » du Tori[5],[3]. Le modèle s'allège au fil des années[1]. Les haras de Tori, de Pyarivere et d'Aravete constituent longtemps les principaux centres d'élevage[18] ; en 1950, la race est surtout présente dans les régions de Viljandi, Järva, Pamu, et Laane[9].
En , les autorités soviétiques recensent 15 643 chevaux de race Tori dans toute l'URSS, dont 3 349 sont de pure race[15]. En 1992 (après la dislocation de l'URSS et l'indépendance de l'Estonie), l'Association des éleveurs de chevaux d'Estonie est restaurée, et prend le suivi de la race à sa charge[19]. En 2012, des tensions entre les éleveurs quant à la sélection de la race aboutissent à une décision du tribunal administratif de ne pas scinder la race Tori en deux, en raison de la menace d'extinction[14].
Description
[modifier | modifier le code]Ce cheval de solide constitution[1] ,[10] peut être typé trait ou sport[5], il existe en effet deux types distincts reconnus chez la race[20]. Le Tori est cependant plus souvent classé parmi les « warmblood »[21].
Taille et poids
[modifier | modifier le code]L'auteur italien Maurizio Bongianni (1988) cite 1,52 m à 1,55 m[22]. Bonnie Lou Hendricks, de l'université de l'Oklahoma, donne une moyenne de taille de 1,52 m à 1,53 m[10]. CAB International cite une taille moyenne de 1,52 m à 1,55 m ou davantage[5], le Guide Delachaux cite 1,58 m à 1,66 m, avec une moyenne de 1,59 m chez les juments, et 1,62 m chez les mâles[11], DAD-IS enregistre une moyenne 1,64 m et 1,66 m chez les mâles, pour un poids de 620 à 650 kg[1]. Le poids des poulains à la naissance est d'environ 50 kg[9]. Le Tori est plus léger que la plupart des races de chevaux de trait[23].
Morphologie
[modifier | modifier le code]Dans les années 1980, le type est nettement celui du cheval d'attelage[15] ; la race est mésomorphe[22]. La tête, moyenne à grosse[10], présente un profil rectiligne[22], un front large[11] et de longues oreilles[22]. L'encolure est musclée[22], forte et de longueur moyenne, le garrot est moyennement sorti[15] ou bas[22]. Le poitrail est large et profond, le dos large et long (court selon Bongianni[22]), la croupe développée, musclée et inclinée[11],[15], les membres courts[9] et solides, terminés par de larges sabots[11],[18] à la corne dure[22]. La race est caractérisée par un corps très long et ample, et une longue croupe[9]. Crinière et queue sont fournis en crins[11].
Robes
[modifier | modifier le code]L'alezan est la robe la plus fréquente, incluant les variantes foncées et brûlées[11]. En 1950, les fréquences des robes se répartissent entre 65,3 % d'alezans, 25,8 % de bai, 4,9 % de noir, 3,9 % de rouan et 0,3 % avec expression du gène Dun ou apparence bai clair[9]. D'après Bongianni, le gris est possible et les marques blanches sont fréquentes[22].
La race a fait l'objet d'une analyse génétique sur la présence des allèles de l'alezan et du Silver : l'étude publiée en 2012 montre que 77,8 % des 45 sujets testés présentent les allèles de l'alezan (ee), aucun n'exprimant le gène Silver[24]. Ce cheval peut aussi être palomino[11], et quelques cas de pie sur base noire ont été signalés[1].
Tempérament, entretien et allures
[modifier | modifier le code]Le Tori est réputé pour son calme, sa patience[22], sa docilité, sa longévité, sa fertilité[1], sa puissance[25] et sa vivacité. La race déploie des allures vives[11] et de qualité[18],[25]. Ses facilités de débourrage et d'apprentissage sont reconnues[11]. La fertilité des juments est très bonne, évaluée à 86,8 % en 1950[9]. Les juments poulinent en moyenne 16 à 17 fois au cours de leur vie, avec un record de 23 poulinages[9].
Il existe 10 lignées chez le Tori[15]. La sélection est assurée par la Eesti Hobusekasvatajate Selts (Association estonienne des éleveurs de chevaux)[14].
Utilisations
[modifier | modifier le code]Le Tori est destiné prioritairement à l'attelage, mais peut aussi être monté[11]. Il était destiné autrefois à la traction agricole, de poids léger à médian[22]. Il dispose d'une bonne aptitude au saut d'obstacles[18]. Le Tori a été utilisé en croisement avec d'autres races, particulièrement dans le Nord-Ouest de l'Ukraine et au Kazakhstan[25]. Lors de tests de performance, les sujets de la race ont tracté une charge de 150 kg sur 2 000 mètres en 13 min 2,15 s au pas[15]. La même performance a été réalisée au trot en 4 min 44,8 s, avec une charge de 50 kg[15]. Le record d'endurance avec une charge de 300 kg a été réalisé sur une distance de 1 238 m[15]. Le record de traction au poids est de 880 kg[15].
Diffusion de l'élevage
[modifier | modifier le code]Présent en Estonie et dans un élevage de l'Ouest de l'Ukraine[2], le Tori est devenu très rare[11], bien qu'il s'agisse de la race de chevaux estonienne la plus connue culturellement parlant[25]. Le relevé de population de 2007 indique un cheptel situé entre 500 et 1 300 individus[1]. La population ukrainienne est de seulement 20 sujets[2]. En 2005, le cheptel de Tori de l'ancien type se situe entre 600 et 700 têtes, pour 10 naissance de poulains « pur » ancien type chaque année, contre environ 100 poulains croisés[3]. En 2012, d'après un article de presse estonien paru dans postimees.ee, les effectifs totaux sont de 1 376 sujets[14]
L'étude menée par l'université d'Uppsala, publiée en pour la FAO, signale le Tori comme race de chevaux locale européenne menacée d'extinction, faisant l'objet de mesures de protection[26]. Elle est en effet préservée par cryoconservation du sperme d'étalons[27]. Les éleveurs estoniens reçoivent des primes nationales pour la conservation des races menacées[28]. L'ouvrage Equine Science (4e édition de 2012) classe le Toric parmi les races de chevaux de selle peu connues au niveau international[29].
Notes et références
[modifier | modifier le code]- DAD-IS.
- DAD-IS2.
- Saastamoinen et Mäenpää 2005, p. 132.
- Ilmjärv 1957, p. 12.
- Porter et al. 2016, p. 464.
- (en) Heldur Peterson, « Tori Stud Farm 150, founder of Tori Horse Hetman 120 », dans Book of Abstracts of the 57th Annual Meeting of the European Association for Animal Production: Antalya, Turkey, 17-20 September 2006, Wageningen Academic Pub, , 376 p. (ISBN 9086860036 et 9789086860036), p. 354.
- Ojala 1995, p. 53.
- Mariliis 2014, p. 6.
- Iljm'Jarv 1950, p. 5-12.
- Hendricks 2007, p. 420.
- Rousseau 2016, p. 233.
- Ilmjärv 1957, p. 55.
- (en) Sir Richard Hamilton Glyn (Bart.), The world's finest horses and ponies, G. G. Harrap, , 128 p. (ISBN 0-245-59267-9 et 9780245592676), p. 130.
- (et) BNS, « Tori hobuste eest seisjad said olulise kohtuvõidu », Postimees, (lire en ligne, consulté le ).
- Kosharov, Pern et Rozhdestvenskaya 1989.
- (en) Elwyn Hartley Edwards, A Standard guide to horse & pony breeds, McGraw-Hill, , 352 p., p. 290.
- (en) Caroline Silver, Horses and ponies, Collins, , 240 p. (ISBN 0-00-458869-X et 9780004588698), p. 207.
- Hendricks 2007, p. 421.
- (en) H. Peterson, « Development, management and direction of the Estonian Horsebreeders Society », dans 6. Baltic Animal Breeding Conference, Jelgava (Latvia), 27-28 Apr 2000, Latvia University of Agriculture, .
- (en) Elwyn Hartley Edwards, A Standard guide to horse & pony breeds, SPGI, , 352 p., p. 290-291..
- (en) Ralph Bogart (ill. William Elvin Jones), Genetics of the horse, Caballus Publishers, , 2e éd., 356 p., p. 42.
- Bongianni 1988, p. 63.
- (en) I︠U︡riĭ Nikolaevich Barmint︠s︡ev, Ûrij Nikolaevič Barmincev et Evgeniĭ Valentinovich Kozhevnikov, Konevodstvo v SSSR : Horse breedings in the USSR, Kolos, , 159 p., p. 60.
- (en) Erkki Sild, Värv Sirje et Viinalass Haldja, « The occurrence of silver dilution in horse coat colours », Veterinarija ir zootechnika, t. 60, no 82, , p. 67-71 (ISSN 1392-2130, lire en ligne).
- (en) Heldur Peterson, « On breeding value of the Tori Horse », dans Book of Abstracts of the 56th Annual Meeting of the European Association for Animal Production: Uppsala, Sweden, 5-8 June 2005, Wageningen Academic Pub, , 496 p. (ISBN 9076998663 et 9789076998664), p. 354.
- (en) Rupak Khadka, « Global Horse Population with respect to Breeds and Risk Status », Uppsala, Faculty of Veterinary Medicine and Animal Science - Department of Animal Breeding and Genetics, , p. 60 ; 65.
- (en) « Evaluation of cryopreserved stallion semen from Tori and Estonian breeds using CASA and flow cytometry », Animal Reproduction Science, vol. 76, nos 3-4, , p. 205–216 (ISSN 0378-4320, DOI 10.1016/S0378-4320(02)00247-6, résumé).
- Mariliis 2014.
- (en) Rick Parker, Equine Science, Cengage Learning, , 4e éd., 608 p. (ISBN 1-111-13877-X), p. 62..
Annexes
[modifier | modifier le code]Bibliographie
[modifier | modifier le code]- [Bongianni 1988] (en) Maurizio Bongianni (trad. Ardèle Dejey), Simon & Schuster's Guide to Horses and Ponies, New York, Simon & Schuster, , 255 p. (ISBN 0-671-66068-3, OCLC 16755485, lire en ligne), « Toric », p. 63. .
- [Hendricks 2007] (en) Bonnie Lou Hendricks, International Encyclopedia of Horse Breeds, Norman, University of Oklahoma Press, , 2e éd., 486 p. (ISBN 0-8061-3884-X, OCLC 154690199), « Tori », p. 420-421. .
- [Kosharov, Pern et Rozhdestvenskaya 1989] (en) A. N. Kosharov, E. M. Pern et G. A. Rozhdestvenskaya, « Horses », dans Animal Genetic Resources of the USSR. Animal Production and Health Paper Publ., Rome, FAO, , 517 p. (lire en ligne)
- [Ilmjärv 1957] (et) M. Ilmjärv, Tori hobune, Tallinn, Eesti Riiklik Kirjastus, , 256 p.
- [Mariliis 2014] (et) Laus Mariliis, Ohustatud tõugu looma pidamise toetuse ja loomade arvukuse seoste hindamine, Tartu, (lire en ligne)
- [Ojala 1995] (fi) Ilmari Ojala, Suomenhevonen : Alkuperän monet mahdollisuudet [« Cheval finlandais - ses nombreuses possibilités d'origine »], Tammen Suuri hevoskirja (Tammi), (ISBN 951-31-0515-6), p. 48–52
- [Porter et al. 2016] (en) Valerie Porter, Lawrence Alderson, Stephen J. G. Hall et Dan Phillip Sponenberg, Mason's World Encyclopedia of Livestock Breeds and Breeding, CAB International, , 6e éd., 1 107 p. (ISBN 1-84593-466-0, OCLC 948839453), « Estonian native », p. 465.
- [Rousseau 2016] Élise Rousseau (ill. Yann Le Bris), Guide des chevaux d'Europe, Delachaux et Niestlé, (ISBN 978-2-603-02437-9), « Tori », p. 232.
Articles de recherche
[modifier | modifier le code]- [Iljm'Jarv 1950] (ru) M. M. Iljm'Jarv, « Novaja toriiskaja poroda loSadel » [« La nouvelle race de chevaux Tori »], Konevodstvo, no 6, , p. 5-12 (présentation en ligne)
- [Saastamoinen et Mäenpää 2005] (en) M.T. Saastamoinen et M. Mäenpää, « Rare horse breeds in Northern Europe », dans Conservation genetics of endangered horse breeds, Wageningen Academic Pub, , 187 p. (ISBN 9076998795 et 978-90-76998-79-4, ISSN 0071-2477, lire en ligne), p. 129-136.
- [Mauring 1981] (ru) Kh. Mauring, « Metody razvedeniya i selektsii pri vyvedenii toriiskoi porody » [« Méthodes de développement et de sélection durant la formation des chevaux de Tori »], Konevodstvo i konnyj sport, vol. 6, , p. 16-18 (ISSN 0023-3285)
Articles connexes
[modifier | modifier le code]Liens externes
[modifier | modifier le code]- (en) « Tori hobune / Estonia (Horse) », Domestic Animal Diversity Information System of the Food and Agriculture Organization of the United Nations (DAD-IS) (consulté en )
- (en) « Torian / Ukraine (Horse) », Domestic Animal Diversity Information System of the Food and Agriculture Organization of the United Nations (DAD-IS) (consulté en )