Tōkaidō — Wikipédia

Le Pont Nihonbashi à l'aube par Hiroshige, le célèbre illustrateur de la route du Tōkaidō

Le Tōkaidō (東海道?, littéralement « la route de la mer de l'est ») ou Tokaïdo est un axe de circulation japonais important entre Tokyo, Kyoto, Osaka et Kobe.

Historiquement, le Tōkaidō était une circonscription administrative dans l'Antiquité, regroupant plusieurs provinces entre ce qui allait devenir les deux plus importantes régions du Japon, à savoir le Kantō et le Kansai. Il désigne aussi l'itinéraire passant par ces provinces. C'est l'installation du shogunat à Kamakura qui fut à l'origine du fort développement que connut cette route reliant Edo (l'actuelle Tokyo) à Kyoto.

De nos jours, le Tōkaidō regroupe plusieurs axes de circulation : l'autoroute Tōmei-Meishin (東名名神高速道路, Tōmei Meishin kōsoku dōro?) reliant Tokyo à Osaka, ainsi que deux lignes ferroviaires : la ligne principale Tōkaidō pour les trains classiques et la ligne Shinkansen Tōkaidō pour les trains à grande vitesse. De cette fameuse route qu'emprunte le shinkansen on peut apercevoir le Mont Fuji. C'est l'un des axes de communication les plus actifs du pays.

Le Tōkaidō représente l'artère principale de la vaste mégalopole du même nom Tōkaidō megaroporisu (東海道メガロポリス?) où vivent plus de 55 millions d'habitants, reliant les villes de Tokyo, Nagoya et Osaka (respectivement première, quatrième et troisième villes du pays par la population) ainsi que Kobe.

Les origines du Tōkaidō[modifier | modifier le code]

Photographie de voyageurs sur le Tōkaidō en 1865

La route du Tōkaidō, reliant Edo à Kyoto en passant par le littoral, représente une distance totale de 500 kilomètres environ, que les voyageurs du XVIIe siècle mettent alors pratiquement deux semaines à parcourir, à pied la plupart du temps, mais aussi à cheval, en logette de bambous tressés (kago) ou en palanquin (norimono), selon l'aisance plus ou moins grande des voyageurs[1].

Cette route est la plus connue des « Cinq Routes » du shogunat Tokugawa. Ces « Cinq Routes » (五街道, Gokaidō?) sont les cinq voies majeures (街道, kaidō?) qui partaient d'Edo (aujourd'hui Tokyo) pendant la période Edo, et dont la plus importante est la route du Tōkaidō.

Le shogun Tokugawa Ieyasu commence en 1601 la construction de ces cinq routes de façon à augmenter son contrôle sur le pays, mais c'est Tokugawa Ietsuna, quatrième shogun du shogunat Tokugawa et petit-fils de Ieyasu, qui les proclame « routes majeures ». De nombreux relais (宿場, shukuba?) sont installés tout au long des routes pour permettre aux voyageurs de se reposer et de se ravitailler.

Le tracé initial du Tōkaidō remonte au XIe siècle, et faisait partie des sept « circuits » ou régions administratives qui divisaient le Japon en étoile en partant de Kyoto dans le système des « Cinq provinces et sept circuits » (五畿七道, Gokishichidō?) ; la route prend toute son importance à l'ère Edo, à partir de 1603, compte tenu du pouvoir central fort désormais installé à Edo avec les shōgun Tokugawa. Elle part du pont Nihonbashi (日本橋« le pont du Japon ») à Edo, pour se terminer au pont Sanjō Ōhashi (三条大橋), à Kyoto. Elle était jalonnée de cinquante-trois relais distants en moyenne de quatre ri (une unité de longueur représentant environ 2 km)[2].

À l'ère Edo, la route est fréquentée en particulier par les daimyō, astreints par le système du sankin-kōtai à résider un an sur deux à Edo, où ils doivent d'ailleurs laisser leur famille en otage, car le pouvoir shogunal se méfie d'eux après la longue période de guerre civile dont le pays sort à peine. Ce système coûte aussi fort cher aux daimyō, contraints d'entretenir deux résidences, et d'emmener avec eux leur suite, qui peut compter de cent à deux mille personnes[2]. Mais la route est parcourue par bien d'autres voyageurs : marchands, pèlerins et bonzes, et même touristes.

Les relais sont souvent situés dans des sites pittoresques, ou près de sanctuaires bouddhistes ou shinto, et offrent, non seulement des auberges pour passer la nuit, mais aussi des restaurants ou des commerces vendant des spécialités locales. On y trouve aussi tout l'indispensable pour voyager dans de bonnes conditions : écuries, palefreniers, portefaix, guides[2]...

Liste des 53 étapes du Tōkaidō en partant d'Edo (Nihonbashi) jusqu'à Kyoto[modifier | modifier le code]

  1. Nihonbashi (日本橋) à Edo, ancienne province de Musashi, actuellement arrondissement de Chūō à Tokyo.
  2. Shinagawa (品川) dans la préfecture de Tokyo
  3. Kawasaki (川崎), préfecture de Kanagawa : rive sud de la Tama-gawa (多摩川, Tamagawa?) également appelée rivière Rokugo (六郷川, Rokugōgawa?)
  4. Kanagawa (神奈川)
  5. Hodogaya (程ヶ谷, 保土ヶ谷) ancienne province de Musashi
  6. Totsuka (戸塚) ancienne province de Sagami
  7. Fujisawa (藤沢)
  8. Hiratsuka (平塚) rive ouest de la Sagami (相模川, Sagamigawa?)
  9. Ōiso (大磯)
  10. Odawara (小田原)
  11. Hakone (箱根) ancienne province de Sagami, actuellement préfecture de Kanagawa : Il y avait un poste frontière à la Passe de Hakone.
  12. Mishima (三島) ancienne province d'Izu, actuellement préfecture de Shizuoka
  13. Numazu (沼津) ancienne province de Suruga
  14. Hara (原) inclus maintenant dans Numazu
  15. Yoshiwara (吉原) inclus maintenant dans la ville de Fuji : rive est de la Fuji (富士川, Fujikawa?)
  16. Kanbara / Kambara (蒲原) maintenant une enclave de l'arrondissement de Shimizu-ku
  17. Yui (由井, 由比)
  18. Okitsu (興津) inclus maintenant dans Shimizu-ku
  19. Ejiri (江尻) maintenant dans la ville de Shizuoka
  20. Fuchū / Sunpu (府中 / 駿府) maintenant dans la ville de Shizuoka : rive est de l'Abe (安倍川, Abekawa?)
  21. Mariko / Maruko (鞠子 / 丸子) maintenant inclus dans Shizuoka
  22. Okabe (岡部)
  23. Fujieda (藤枝)
  24. Shimada (島田) ancienne province de Suruga : rive est de l'Ōi (大井川, Ōigawa?)
  25. Kanaya (金屋, 金谷) ancienne province de Totomi : maintenant inclus dans Shimada : rive ouest de la rivière Oi
  26. Nissaka (日坂) inclus maintenant dans Kakegawa
  27. Kakegawa (掛川)
  28. Fukuroi (袋井)
  29. Mitsuke (見附) actuellement Iwata
  30. Hamamatsu (浜松) : rive ouest du fleuve Tenryū (天竜川, Tenryū-gawa?)
  31. Maisaka (舞阪) inclus maintenant dans Hamamatsu
  32. Arai (荒井, 新居): Il y avait un poste frontière à cet endroit, comme à Hakone.
  33. Shirasuga / Shirasuka (白須賀) ancienne province de Tōtōmi, maintenant inclus dans Kosai, préfecture de Shizuoka
  34. Futakawa / Futagawa (二川) ancienne province de Mikawa, maintenant inclus dans Toyohashi, Préfecture d'Aichi
  35. Yoshida (吉田) actuellement Toyohashi
  36. Goyu (御油) maintenant inclus dans Toyokawa
  37. Akasaka (赤坂) maintenant inclus dans Otowa
  38. Fujikawa (藤川) maintenant inclus dans Okazaki
  39. Okazaki (岡崎)
  40. Chiryū / Chirifu (地鯉鮒, 知立) ancienne province de Mikawa
  41. Narumi (鳴海) ancienne province d'Owari maintenant inclus dans Nagoya
  42. Miya (宮) ancienne province d'Owari, actuellement inclus dans l'arrondissement d'Atsuta à Nagoya, préfecture d'Aichi : le trajet s'effectuait en bateau, entre Miya et Kuwana, en baie d'Ise, pour éviter de devoir franchir les deux fleuves Kiso et Ibi, et la rivière Nagara.
  43. Kuwana (桑名) anciennement province d'Ise, actuellement préfecture de Mie
  44. Yokkaichi (四日市)
  45. Ishiyakushi (石薬師) maintenant inclus dans la ville de Suzuka
  46. Shōno (庄野) maintenant inclus dans Suzuka
  47. Kameyama (亀山)
  48. Seki (関) maintenant inclus dans Kameyama
  49. Sakanoshita (坂ノ下) ancienne province d'Ise : inclus dans Seki jusque 2005, a fusionné avec Kameyama, préfecture de Mie : sud-est de la passe de Suzuka
  50. Tsuchiyama (土山) ancienne province d'Ōmi, actuellement inclus dans Kōka, préfecture de Shiga : sur-ouest de la passe de Suzuka
  51. Minakuchi (水口) maintenant inclus dans le district de Kōka
  52. Ishibe (石部) maintenant inclus dans Kōka
  53. Kusatsu (草津)
  54. Ōtsu (大津) ancienne province d'Ōmi, actuellement préfecture de Shiga
  55. Kyoto (京都, parfois 'Keishi', 京市) ancienne province de Yamashiro, actuellement préfecture de Kyoto

Tōkaidō dans l'art japonais[modifier | modifier le code]

Le Tōkaidō a inspiré de nombreux artistes d'ukiyoe dont Hokusai et Hiroshige.

Tōkaidō aujourd'hui[modifier | modifier le code]

Le Tōkaidō reste encore aujourd'hui le principal axe de transports au Japon, en tant qu'épine dorsale de la mégalopole japonaise appelée Tōkaidō megaroporisu (東海道メガロポリス?) lorsqu'elle est limitée à la conurbation unissant les villes de Tokyo, Nagoya et Osaka (où vivent plus de 55 millions d'habitants) ou encore Taiheiyō Beruto (太平洋ベルト?) dans son acceptation la plus large et la plus complète (de Tokyo à Fukuoka, soit plus de 85 millions d'individus). Axe multimodal, il est constitué d'un réseau ferroviaire et routier particulièrement dense.

À Yui (Shizuoka), de jour, trois axes symbolisant le Tōkaidō aujourd'hui, de g. à d. : la ligne principale Tōkaidō, la Route Nationale 1 et l'Autoroute Tōmei

Transports ferroviaires[modifier | modifier le code]

Le groupe Japan Railways a développé ses deux principales lignes sur le tracé du Tōkaidō, en reprenant d'ailleurs ce nom :

Parcours de la ligne Shinkansen Tōkaidō
  • la ligne principale Tōkaidō (東海道 本線, Tōkaidō-honsen?) relie Tokyo (Gare de Tokyo) à Kobe (Gare de Kobe), soit 589,5 km et 161 gares. Il s'agit de l'un des tout premiers chemins de fer construits au Japon, le premier tronçon (entre Shimbashi et Yokohama) étant inauguré en 1872 et la ligne étant complétée en 1889. En 1987, lors de la privatisation et de la scission de la JNR, son exploitation a été divisée en trois parties réparties entre trois compagnies ferroviaires différentes (si bien qu'aujourd'hui il n'existe plus de trains couvrant la totalité du parcours à l'exception de certaines liaisons nocturnes) :

Une nouvelle ligne plus rapide, le Shinkansen Chūō (中央新幹線?), est actuellement est en cours de construction depuis . L'ouverture du premier tronçon reliant la gare de Shinagawa (Tokyo) à Nagoya est prévue pour 2027.

Transports routiers[modifier | modifier le code]

Le tracé du Tōkaidō est suivi dans l'essentiel par deux axes autoroutiers parallèles de première importance : une publique nationale (la Route Nationale 1) et deux privées (les Autoroutes Tōmei et Meishin).

Bibliographie[modifier | modifier le code]

Roman
  • A pied sur le Tôkaidô, Jippensha Ikkû, Éditions Philippe Picquier (2000) (ISBN 2-87730-361-6)
Illustrations
  • Le Tôkaidô d'Hiroshige, Hiroshige Andô - Jocelyn Bouquillard, Éditions Art Stock, Collection Bibliothèque de l'image, 95p. (2002) (ISBN 2-914239-69-6)
  • La Route du Tôkaidô, Thierry Girard, (textes de Yuko Hasegawa, Nagahiro Kinoshita et Philippe Bata), Paris, Marval, 128p. (1999) (ISBN 2-86234-274-2)
  • Hiroshige sur la route du Tokaîdo, Nelly Delay, Éditions Hazan, 200 p., 160 illustrations. (2010) (ISBN 9782754104982)
Jeu de société

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Notice sur les 53 stations du Tōkaidō de l'exposition Estampes japonaises, Images d'un monde éphémère, à la BnF du 18 novembre 2008 au 15 février 2009
  2. a b et c Jocelyn Bouquillard, Le Tōkaidō de Hiroshige, Bibliothèque de l'image, 2002, page 5
  3. [PDF] « Databook 2008 », Central Japan Railway Company
  4. (en) Site officiel de la NEXCO Central

Articles connexes[modifier | modifier le code]