Territoire d'outre-mer (France) — Wikipédia

  • Actuel territoire d'outre-mer (TAAF)
  • Anciens territoires d'outre-mer ayant changé de statut (vers COM ou DROM)
  • Anciens territoires d'outre-mer devenus indépendants

Un territoire d'outre-mer, ou TOM, est un type de collectivité française d'outre-mer créé en 1946 avec l'Union française, en remplacement du statut de colonie.

En 1958, la plupart des territoires d'outre-mer deviennent des États membres de la Communauté française avant de devenir indépendants au moment de la décolonisation de l'Afrique. Le statut de territoire d'outre-mer perdure toutefois jusqu'en 2003 où les TOM restants (Mayotte, Polynésie française, Saint-Pierre-et-Miquelon, Wallis-et-Futuna) deviennent des collectivités d'outre-mer (hors Mayotte qui est un département d'outre-mer). Seules les Terres australes et antarctiques françaises, inhabitées, sont encore considérées comme un territoire d'outre-mer.

Histoire[modifier | modifier le code]

Union française[modifier | modifier le code]

Carte de l'Union française.
  • Métropole et départements d'outre-mer
  • Territoires d'outre-mer (anciennes colonies)
  • Territoires d'outre-mer (sous tutelle)
  • États associés (deviennent indépendants avant 1958)

À l'issue de la Seconde Guerre mondiale, le statut de l'empire colonial français change. Deux décrets pris en et suppriment les principales dispositions de l'indigénat[1],[2]. En , la loi de départementalisation accorde aux plus anciennes colonies (Guadeloupe, Martinique, La Réunion et Guyane) le statut de département d'outre-mer dans lesquels s'appliquent les lois et décrets déjà en vigueur en France métropolitaine. Enfin, la Constitution du 27 octobre 1946 instituant la Quatrième République crée l'Union française.

Les colonies et les territoires sous tutelle deviennent alors des territoires d'outre-mer, partie intégrante de la République française (à la différence des protectorats, dénommés États associés, qui font partie de l'Union mais pas de la République française).

Ce changement de statut entraine de nouveaux droits pour les habitants : les sujets de l'empire colonial reçoivent notamment le statut de citoyen français ce qui permet aux territoires d'outre-mer d'élire des représentants au Parlement. Mais il ne s'agit toutefois pas d'un statut égalitaire puisque sont maintenus deux catégories de citoyens : les citoyens de statut civil français et les citoyens de statut local (anciens sujets)[3].

La loi du crée deux collèges électoraux distincts dans les territoires d'outre-mer : celui des citoyens de statut français et celui des autochtones. L'ouverture du droit de vote est limité dans la plupart des territoires aux « notables évolués » et aux titulaires de certaines décorations ou fonctions[4] et les assemblées territoriales créées disposent d'un pouvoir limité[3].

Les territoires d'outre-mer restent en outre soumis au régime de la spécificité législative ou « régime des décrets »[3] : « la loi française n'est applicable dans les territoires d'outre-mer que par disposition expresse ou si elle a été étendue par décret »[5].

En 1947, le territoire de la Haute-Volta est recréé[6].

Entre 1950 et 1954, l'ensemble de l'Inde française est absorbé de fait par l'Inde nouvellement indépendante (ce coup de force[réf. nécessaire] est validé par un traité de 1956[7] ratifié en 1962[8]).

En 1955, les Terres australes et antarctiques françaises sont créées : elles comprennent diverses îles inhabitées de l'Océan Indien précédemment rattachées à Madagascar et une portion de l'Antarctique revendiquée par la France. Elles sont dotées de l'autonomie administrative sous l'autorité d'un préfet[9],[10].

Face aux revendications de plus en plus importantes d'autonomie voire d'indépendance, la loi-cadre Defferre est adoptée en 1956[11]. La loi abolit le système des doubles collèges dans les territoires d'outre-mer et crée des conseils de gouvernement composés de membres élus et de fonctionnaires et « dotés d'une large compétence qui embrassera toutes les questions d’intérêt local »[12].

Ve République[modifier | modifier le code]

L'adoption de la Constitution du 4 octobre 1958 qui fonde la Cinquième République permet à la plupart des territoires d'outre-mer de s'affranchir de la tutelle de la France. L'Union française est remplacée par une Communauté et, à la mise en place de la Constitution, l'article 76 offre le choix à chaque TOM[3] :

  • soit de conserver son statut de territoire d'outre-mer (TOM) au sein de la République française,
  • soit de devenir département d'outre-mer de la République (c'est-à-dire être intégré à la République) ;
  • soit de quitter la République française en devenant État membre de la Communauté (c'est-à-dire gagner en autonomie).

Seuls cinq TOM décident de conserver ce statut (Comores, Polynésie française, Côte française des Somalis, Nouvelle-Calédonie et Saint-Pierre-et-Miquelon).

Le Gabon choisit, en premier temps, de devenir département d'outre-mer, ce qui est refusé par De Gaulle et son ministre de l'Outre-mer, Bernard Cornut-Gentille[13]. Le refus du ministre Cornut-Gentille reflétait la pensée du général de Gaulle, qui confia à Alain Peyrefitte : « Nous ne pouvons pas tenir à bout de bras cette population prolifique comme des lapins (…). Nos comptoirs, nos escales, nos petits territoires d’outre-mer, ça va, ce sont des poussières. Le reste est trop lourd »[14]. Le général de Gaulle s'expliqua en ces termes sur l'« affaire gabonaise » : « Au Gabon, Léon M'Ba voulait opter pour le statut de département français. En pleine Afrique équatoriale ! Ils nous seraient restés attachés comme des pierres au cou d'un nageur ! Nous avons eu toutes les peines du monde à les dissuader de choisir ce statut. »[15]. Le refus du choix du Gabon de devenir un département français était donc contraire à la Constitution.

La Guinée refuse la Constitution par référendum et devient indépendante dès 1958. Les autres territoires deviennent des États membres de la Communauté puis, dès 1960, prennent leur indépendance[3].

L'article 74 de la Constitution prévoit que les territoires d'outre-mer subsistant « ont une organisation particulière tenant compte de leurs intérêts propres ». Le régime de la spécialité législative est ainsi maintenu.

Wallis-et-Futuna devient un territoire d'outre-mer en 1961[16], à la suite d'un référendum en 1959[17] .

La Côte française des Somalis devient le Territoire français des Afars et des Issas en 1967 et obtient son indépendance en 1977 sous le nom de Djibouti. Le territoire des Comores devient État comorien indépendant en 1975 mais Mayotte — seule île de l'archipel à voter contre l'indépendance — est conservé par la France et est érigée en collectivité territoriale à statut particulier en 1976[18].

En 1976, Saint-Pierre-et-Miquelon devient département d'outre-mer[19] avant de devenir une collectivité territoriale à statut particulier en 1985[20].

En 1998, à la suite de plusieurs années de tensions et de violences qui se terminent avec la signature de l'accord de Nouméa, la Nouvelle-Calédonie obtient le statut particulier traité au titre XIII de la Constitution.

En 2003, une révision de l'article 74 de la Constitution substitue à territoire d'outre-mer la notion de collectivité d'outre-mer (COM). La nouvelle rédaction prévoit que le statut de chacune des collectivités d'outre-mer est « défini par une loi organique, adoptée après avis de l'assemblée délibérante » de la collectivité. Seules les Terres australes et antarctiques françaises, inhabitées, continuent d'être considérées comme un territoire d'outre-mer. L'article 73 permet de mettre fin à cette complexité et offre la possibilité de créer « une collectivité se substituant à un département et une région d'outre-mer » ou « une assemblée délibérante unique pour ces deux collectivités » à condition que ce projet soit validé par référendum dans le territoire concerné. C'est cette option de la collectivité territoriale unique (dite « département de Mayotte ») qui est retenue en 2011 après que les Mahorais ont voté pour la départementalisation de leur île. Mayotte, territoire acquis par la France au XIXe siècle et rattaché au territoire des Comores de 1946 à l'indépendance des Comores en 1975, était précédemment une collectivité territoriale à statut particulier devenue « collectivité départementale » en 2001.

En 2007, les communes insulaires de Saint-Barthélemy et Saint-Martin se détachent de la Guadeloupe à laquelle elles étaient rattachées pour devenir des collectivités d'outre-mer.

En 2016, la Guyane et la Martinique deviennent à leur tour des collectivités territoriales uniques.

Liste des territoires d'outre-mer français[modifier | modifier le code]

Nom Ensemble Création Disparition Remarque
Cameroun
(territoire sous tutelle)
Afrique-Équatoriale française 1946 1958 Devient un État de la Communauté en 1958 et indépendant en 1960.
Cochinchine Indochine française 1946 1949 Rattachement au Gouvernement central provisoire du Viêt Nam.
Comores 1946 1975 Deviennent indépendantes en 1975 sauf Mayotte, conservée par la France.
Côte d'Ivoire Afrique-Occidentale française 1946 1958 Devient un État de la Communauté en 1958 et indépendante en 1960.
Dahomey Afrique-Occidentale française 1946 1958 Devient un État de la Communauté en 1958 et indépendant en 1960.
Moyen Congo Afrique-Équatoriale française 1946 1958 Devient un État de la Communauté sous le nom de Congo en 1958 et indépendant en 1960.
Guinée Afrique-Occidentale française 1946 1958 Refuse la Constitution de la Ve République et devient indépendante en 1958.
Haute-Volta Afrique-Occidentale française 1947 1958 Devient un État de la Communauté en 1958 et indépendant en 1960.
Inde française 1946 1954 Transférée à l'Inde entre 1950 et 1954.
Madagascar 1946 1958 Devient un État de la Communauté en 1958 et indépendant en 1960.
Mauritanie Afrique-Occidentale française 1946 1958 Devient un État de la Communauté en 1958 et indépendante en 1960.
Mayotte 1976 2003 Créé sous forme d'une collectivité territoriale à statut particulier après l'indépendance du reste des Comores, devient une collectivité d'outre-mer à la disparition du statut de TOM, puis département et région d'outre-mer (DROM) à partir du (à la suite du référendum de 2009).
Niger Afrique-Occidentale française 1946 1958 Devient un État de la Communauté en 1958 et indépendant en 1960.
Nouvelle-Calédonie 1946 1998 Devient une collectivité sui generis à la suite de l'accord de Nouméa.
Oubangui Afrique-Équatoriale française 1946 1958 Devient un État de la Communauté sous le nom de République centrafricaine en 1958 et indépendante en 1960.
Polynésie française
Établissements d'Océanie avant 1957
1946 2003 Devient une collectivité d'outre-mer à la disparition du statut de TOM.
Sénégal Afrique-Occidentale française 1946 1958 Devient un État de la Communauté en 1958, adhère à la Fédération du Mali en 1959 puis devient indépendant en 1960.
Somalis ;
Afars et Issas à partir de 1967
1946 1977 Devient indépendant sous le nom de Djibouti en 1977.
Saint-Pierre-et-Miquelon 1946 2003 Est département d'outre-mer de 1976 à 1985 puis devient une collectivité d'outre-mer à la disparition du statut de TOM.
Soudan Afrique-Occidentale française 1946 1958 Devient un État de la Communauté en 1958, adhère à la Fédération du Mali en 1959 puis devient indépendant sous le nom de Mali en 1960.
Tchad Afrique-Équatoriale française 1946 1958 Devient un État de la Communauté en 1958 et indépendant en 1960.
Terres australes et antarctiques françaises 1955 Territoire inhabité et dernier TOM.
Togo
(territoire sous tutelle)
Afrique-Occidentale française 1946 1958 Devient un État de la Communauté en 1958 et indépendant en 1960.
Wallis-et-Futuna 1961 2003 Ancien protectorat, devient une collectivité d'outre-mer à la disparition du statut de TOM de la Constitution, bien que la loi du conférant le statut de TOM soit encore en vigueur[21].

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Décret n° 45-137 du 22 décembre 1945, Journal officiel de la République française, 26 décembre 1945, p. 8583.
  2. Décret n° 46-277 du 20 février 1946, Journal officiel de la République française, 22 février 1946, p. 1581.
  3. a b c d et e Véronique Dimier, « De la France coloniale à l'outre-mer », Pouvoirs, vol. 2, no 113,‎ , p. 37-57 (lire en ligne)
  4. « Loi no 46-2151 du 5 octobre 1946 relative à l'élection des membres de l'Assemblée nationale », sur lexpol.cloud.pf
  5. Article 72 de la Constitution du 27 octobre 1946
  6. Loi no 47-1707 du 4 septembre 1947 tendant au rétablissement du territoire de la Haute-Volta
  7. Traité de cession des Établissements français de Pondichéry, Karikal, Mahé et Yanaon
  8. Décret no 62-1238 du 25 septembre 1962.
  9. Loi no 55-1052 du 6 août 1955 conférant l'autonomie administrative et financière aux Terres australes et antarctiques françaises.
  10. « Présentation générale des TAAF », sur TAAF.fr (consulté le )
  11. Loi no 56-619 du 23 juin 1956 MESURES PROPRES A ASSURER L'EVOLUTION DES TERRITOIRES RELEVANT DU MINISTERE DE LA FRANCE D'OUTRE-MER
  12. « Gaston Defferre fait adopter la loi-cadre sur l'évolution des territoires d'outre-mer », sur Archives de France (consulté le )
  13. Le colonisateur colonisé de Louis Sanmarco, Ed. Pierre-Marcel Favre-ABC, 1983, p. 211. Voir également Entretiens sur les non-dits de la décolonisation, de Samuel Mbajum et Louis Sanmarco, Ed. de l’Officine, 2007, p. 64
  14. Charles de Gaulle, cité par Alain Peyrefitte, in C’était de Gaulle, Ed. Fayard, 1994, p. 59.
  15. C'était de Gaulle, t. 2, pp. 457-458
  16. Loi no 61-814 du 29 juillet 1961 conférant aux îles Wallis et Futuna le statut de territoire d'outre-mer
  17. Frédéric Angleviel, « Wallis-et-Futuna (1942-1961) ou comment le fait migratoire transforma le protectorat en TOM », Journal de la Société des océanistes, nos 122-123,‎ , p. 61-76 (lire en ligne)
  18. Loi no 76-1212 du 24 décembre 1976 RELATIVE A L'ORGANISATION DE MAYOTTE
  19. Loi no 76-664 du 19 juillet 1976 relative à l’organisation de Saint-Pierre-et-Miquelon
  20. Loi no 85-595 du 11 juin 1985 RELATIVE AU STATUT DE L'ARCHIPEL DE SAINT-PIERRE-ET-MIQUELON
  21. « WALLIS-ET-FUTUNA : L'ÉVOLUTION DANS LA CONTINUITÉ ? », sur Sénat,

Articles connexes[modifier | modifier le code]