Siège de Caen (1450) — Wikipédia

Le siège de Caen de 1450 fait partie de la quatrième phase (1429-1453) de la guerre de Cent Ans qui voit la reconquête par le royaume de France de ses territoires.

Contexte[modifier | modifier le code]

Occupée par les Anglais depuis 1417, Caen devient l'un des principaux points d'appui anglais sur le continent[1]. Les fortifications sont restaurées et complétées[2],[3], une université est fondée, la troisième d'Angleterre[4].

Avec la reprise des hostilités entre Français et Anglais en 1449 et la prise de Rouen en octobre de cette année, les Anglais ne sont plus forts que de quelque 2 000 hommes commandés par le duc de Somerset ; leur situation devient de plus en plus compliquée[5].

Somerset s'enferme alors à Caen, dans l'attente de renforts promis par Henri VI à son lieutenant-général. À l'annonce du débarquement de Thomas Kyriell à la tête de 3 500 soldats à Cherbourg le 15 mars 1450, Somerset envoie au devant de Kyriell dans le Cotentin les garnisons de Caen, commandées par Robert Vere, celles de Bayeux et de Vire. Les deux armées se rejoignent à Valognes, en s'emparant de la cité, puis se dirigent vers Caen, à travers la baie des Veys, suivies par l'armée française qui les attendaient à Carentan. Le 14 avril, les Anglais font sur les hauteurs de Formigny, où ils sont rejoints par les Français. La bataille du lendemain voit l'anéantissement des troupes anglaises.

Préparatifs[modifier | modifier le code]

Plan en perspective cavalière de Caen au début du XVIIe siècle.
Plan en perspective cavalière de Caen, au début du XVIIe siècle, par Jacques Gomboust.

Les restes de l'armée anglaise se réfugient à Caen, où affluent également les garnisons des dernières places fortes normandes, à l'exception de Cherbourg. Selon l'historien Victor-René Hunger, entre 3 000 et 4 000 Anglais sont présents à Caen avant le début du siège[6].

Somerset s'attache à renforcer les défenses de Caen et fait notamment incendier et raser une partie du Bourg-l'Abbé — autour de l'abbaye aux Hommes, à l'entrée ouest de Caen — et abattre le pont Frileux, qui traverse l'Orne à la sortie sud de la ville, en direction de Rouen et Paris[7].

Côté français, Jean de Dunois et Arthur de Richemont, connétable de France, organisent le siège et rassemblent autour de Caen d'importantes forces, accompagnées de la puissante artillerie des frères Gaspard et Jean Bureau[8]. Le 5 juin, Richemont et Clermont s'établissent aux alentours de l'abbaye aux Hommes avec environ 8 200 hommes, tandis que Dunois, bientôt rejoint par Charles VII et 600 archers[9], massait ses 5 000 hommes à proximité du faubourg de Vaucelles, sur la rive droite de l'Orne[10]. Une troisième force se positionne sur les hauteurs autour de l'abbaye aux Dames, au nord-est de la ville, et une quatrième sur celles au nord de la ville, dominant le château[11]. En y ajoutant les artilleurs, sapeurs et charpentiers utiles au siège, Victor-René Hunger estime le nombre d'assiégeants à 20 000 hommes[12], dont 15 000 combattants[13].

Pour pallier la destruction du pont Frileux et assurer la communication entre les deux rives de l'Orne, un pont de bois est jeté en amont de Caen, probablement entre les villages de Louvigny et Allemagne (aujourd'hui Fleury-sur-Orne)[14].

Déroulement[modifier | modifier le code]

enluminure représentant la reddition de Caen
« Comment ladite ville de Caen se rendit au roi », Les Vigiles de la mort de Charles VII, Martial d'Auvergne, v. 1483.

Dès le 5 juin, Richemont attaque le boulevard de la porte de Bayeux (actuelle place Saint-Martin) mais ne parvient pas à s'y établir. Au sud, Dunois attaque la bastille de la porte Milet. Durant les jours suivants, les troupes de Richemont s'attachent à saper les remparts au nord-ouest de l'enceinte (depuis l'actuelle place Fontette jusqu'à la place Saint-Martin) et parviennent à faire effondrer plusieurs pans de mur, dont la grosse tour d'angle[15].

Souhaitant se préserver l'opinion des bourgeois de Caen et, selon Robert Blondel, pour protéger la ville qu'il trouva fort riche et belle de la destruction[16], Charles VII interdit l'assaut par ses troupes, préférant attendre la reddition anglaise[17]. L'effet des bombardements et sapes sur les murailles de Caen assurait Somerset de la victoire française et, le 20 juin, celui-ci demanda à entrer en négociation[17]. Le traité de reddition est signé le 24 : si le 1er juillet à midi les Anglais n'avaient reçu aucun secours, ceux-ci devraient se rendre aux Français et leur livrer la ville ; les Anglais et leurs partisans seraient libres de partir en Angleterre ou dans les places qu'ils occupaient encore sur le continent[18]. Le jour dit, le duc de Somerset remet à Richemont les clefs de la ville et, avec la plupart des Anglais, il est escorté jusqu'à Ouistreham où ils s'embarquent les jours suivants pour l'Angleterre[19].

Conséquences[modifier | modifier le code]

Avant même la reddition de la ville, Charles VII accorde aux Caennais une absolution générale et leur garantissait le maintien de leurs privilèges et franchises[20]. Il fait son entrée solennelle à Caen le 6 juillet, entouré des grands capitaines qui avaient assiégé la ville, à l'exception de Richemont, retenu à Ouistreham pour surveiller le départ des Anglais[21].

La perte de Caen scelle le sort de la Normandie anglaise, dont la dernière position, Cherbourg, se rend le 12 août 1450.

Le siège de Caen est représenté dans Les Vigiles de la mort de Charles VII, par Martial d'Auvergne, un manuscrit conservé à la Bibliothèque nationale de France[22]. On peut voir la porte de la ville protégée par une avancée palissadée en bois[23].

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Jouet 1981, p. 98.
  2. Hunger 1912, p. 21-23.
  3. Jouet 1981, p. 105.
  4. Jouet 1981, p. 99-101.
  5. Hunger 1912, p. 9-12.
  6. Hunger 1912, p. 12-13.
  7. Hunger 1912, p. 35.
  8. Hunger 1912, p. 36-39.
  9. Hunger 1912, p. 50-53.
  10. Hunger 1912, p. 47.
  11. Hunger 1912, p. 49-54.
  12. Hunger 1912, p. 55.
  13. Sablon du Corail 2022, p. 323.
  14. Hunger 1912, p. 48.
  15. Hunger 1912, p. 58-59.
  16. Robert Blondel, « La Réduction de la Normandie », dans Oeuvres de Robert Blondel, historien normand du XVe siècle, Rouen, A. Lestringant, 1891-1893 (lire en ligne), p. 380
  17. a et b Hunger 1912, p. 61-62.
  18. Hunger 1912, p. 62.
  19. Hunger 1912, p. 64.
  20. Hunger 1912, p. 66.
  21. Hunger 1912, p. 67.
  22. BnF, Paris, Ms. Fr. 5054, fo 197 verso.
  23. Valérie Serdon, « Villes et forteresses au Moyen Âge », Moyen Âge, no 125,‎ mai-juin-juillet 2021, p. 25 (ISSN 1276-4159).

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Nouveau dictionnaire historique des sièges et batailles mémorables, et des combats maritimes les plus fameux, de tous les Peuples du monde, anciens et modernes, jusqu'à nos jours, t. II, Paris, Gilbert et Cie, Fantin, , 6 volumes ; 22 cm (BNF 44409131, lire en ligne)
  • Victor-René Hunger, Le siège et la prise de Caen par Charles VII en 1450, Paris, Impr. de Champon et Pailhé, , 213 p. (lire en ligne)
  • Roger Jouet, « La ville « anglaise » et la réadaptation au royaume (1417-1483) », dans Gabriel Désert (dir.), Histoire de Caen, Toulouse, Privat, , 341 p., p. 93-112
  • Amable Sablon du Corail, La Guerre de Cent Ans : Apprendre à vaincre, Paris, Passé composé, , 464 p. (ISBN 9782379332166)

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]