Shibui — Wikipédia

Shibui est un adjectif utilisé en japonais pour désigner une sensation ou une attitude esthétique. Le nom propre correspondant est shibumi.

Shibui (渋い?) (adjectif), ou shibumi (渋み?) (substantif) se réfèrent en japonais à la sensation subjective produite par la beauté simple, subtile, et discrète. À l'instar d'autres termes du vocabulaire affecté au domaine esthétique (comme iki [idéal esthétique] et wabi-sabi ), shibui peut s'appliquer à un vaste éventail de sensations, et non exclusivement à l'art ou à la mode.

Histoire du terme et du concept[modifier | modifier le code]

Apparu à l'origine lors de la période Muromachi (1333-1568) sous la forme shibushi, le mot fut d'abord utilisé pour désigner un goût acide ou astringent[1], comme celui du kaki[2] encore vert. De nos jours, shibui a gardé cette acception, et est l'antonyme de amai (甘い?), qui signifie « doux ».

Kaki presque à maturité (photo de Garitzko).
Les kakis se mangent blets, ils sont alors beaucoup moins astringents. (Cette photo de Josephbanjo ne pourrait-elle pas être qualifiée de shibui ?…)[non neutre]

Cependant, au début de la période Edo (1603-1867), le mot shibui commença à faire référence à une sensation esthétique agréable. On l'utilisa alors dans des domaines aussi variés que le chant, la mode ou l'artisanat d'art, pour désigner une œuvre d'une beauté particulièrement sobre, discrète et efficace.

De grands chanteurs, des acteurs renommés, des maîtres céramistes et des artistes de diverses spécialités furent ainsi qualifiés de shibui, surtout s'ils avaient le sens de la mesure et évitaient de produire des œuvres clinquantes.

De nos jours, le terme shibui est devenu en langage courant l'équivalent de « cool », et peut ainsi désigner un joueur de baseball qui ne cherche pas à s'illustrer aux dépens de son équipe.

Apparition du concept en Occident[modifier | modifier le code]

Le concept de shibui apparut en Occident en 1960, le magazine américain House Beautiful en fit la base de deux parutions.

Dans les arts[modifier | modifier le code]

L'écrivain James A. Michener, dans son livre Iberia[3] fait référence au mot shibui : « Il existe en japonais un mot intraduisible, qui résume tout ce qu'il y a de meilleur dans la vie pour un Japonais, c'est le mot shibui, dont la traduction la plus approchante est : “délicieusement acide”. »

L'écrivain Trevanian a intitulé Shibumi un de ses livres[4]. Son héros est une sorte de samouraï moderne qui, alors qu'il pense pouvoir enfin atteindre un état euphorique d'effacement et de détachement du monde, va avoir à reprendre les armes contre une organisation secrète hégémoniste.

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Selon Makoto Ueda, « Shibui », Kodansha Encyclopedia of Japan, Tokyo, Kodansha Ltd., 1985.
  2. Le plaqueminier (persimmon en anglais), est un arbre du genre diospyros, dont le fruit (le kaki) ressemble à une tomate et se consomme blet. Après les premières gelées, il est moins astringent.
  3. James A. Michener, Iberia (Spanish Travels and Reflections), A Fawcett Crest Book reprinted by arrangement with Random House, Inc., 1968.
  4. Trevanian, Shibumi, New York, Crown Publishers Inc., .

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Donald Richie (trad. de l'anglais), Traité d'esthétique japonaise, Vannes, Sully-Le Prunier, , 112 p. (ISBN 978-2-35432-301-1).

Articles connexes[modifier | modifier le code]