Sheshonq Ier — Wikipédia

Sheshonq Ier
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Image illustrative de l’article Sheshonq Ier
Gravure d'un relief de Sheshonq Ier trouvé à Karnak.
Naissance
Oussalit
Période Troisième Période intermédiaire
Dynastie XXIIe dynastie
Fonction roi
Prédécesseur Psousennès II (XXIe dynastie)
Dates de fonction 943 à 922 AEC[1]
Successeur Osorkon Ier
Famille
Grand-père paternel Sheshonq, Grand Chef des
Grand-mère paternelle Méhytemousekhet
Père Nimlot
Mère Tanytsepeh
Conjoint Karoma Ire
Enfant(s) Osorkon Ier
Deuxième conjoint Pentreshmès ?
Enfants avec le 2e conjoint Nimlot Ier
Troisième conjoint ?
Enfants avec le 3e conjoint Ioupout
♀ Tashepenbastet
♀ Méhytemouskhet ?
♀ Tanytsepeh ?
Djedptahiouefânkh ?
Fratrie ♂ Méhytemousekhet

Sheshonq Ier[2] est un roi égyptien, fondateur de la XXIIe dynastie et issu de la tribu libyque des Mâchaouach[3]. Il n'est pas le premier roi de sa famille : en effet, son oncle Osorkon l'ancien a régné quelques années avant son avènement[4]. Il succède à Psousennès II, dernier roi de la XXIe dynastie et précède son fils Osorkon Ier[1].

Il est appelé Sesonchôsis[5] par Manéthon, qui lui compte vingt et un ans de règne. La grande majorité des égyptologues situent celui-ci entre 945 et 924 avant l'ère commune, bien que cette durée ait récemment été revue à la baisse de quelques années, de 943 à 922 AEC, par quelques spécialistes dont Erik Hornung, Rolf Krauss et Frédéric Payraudeau[1], car Sheshonq Ier aurait vécu pendant deux à trois ans après sa campagne réussie en Canaan, traditionnellement datée comme s'étant achevée en 925 AEC. Il serait le Sesaq ou Shishak (שִׁישַׁק) de la Bible hébraïque, et ses exploits sont gravés sur le portail bubastite, à Karnak.

Généalogie[modifier | modifier le code]

Origine[modifier | modifier le code]

Les origines de Sheshonq Ier, et donc de la dynastie, nous sont connues grâce notamment à une stèle qu'un certain Pasenhor, prêtre et lointain descendant de sa lignée, laissa au Sérapéum de Saqqarah sous le règne de Sheshonq V. Connu sous le nom de stèle de Pasenhor ou de généalogie de Pasenhor, ce document contient une énumération des ancêtres de ce prêtre, selon un genre assez courant à l'époque donnant les fonctions et le rang de chaque personnalité, et, élément non négligeable pour établir la généalogie de la dynastie, donnant également le nom et les qualités des épouses[6].

C'est ainsi que l'on connaît des ancêtres du fondateur de la dynastie : ces derniers gravitaient déjà à des postes à responsabilités importantes dès la fin de la dynastie précédente. Ils cumulaient des charges religieuses et militaires, héritant de père en fils de titres prestigieux à la cour tels que père divin et spécifiques à leur ethnie comme celui de grand chef des Mâ. Enfin cette généalogie relie directement la lignée aux tribus libyques, le premier ancêtre cité étant simplement désigné comme le Libyen Bouyouwawa[7],[8].

Famille proche[modifier | modifier le code]

Sheshonq Ier est donc le petit fils d'un grand chef des Mâ nommé Sheshonq l'ancien tout comme lui, et de son épouse Méhytemousekhet[9]. Sheshonq Ier est donc le fils du grand chef des Mâ Nimlot et de son épouse Tanytsepeh[9]. Sheshonq l'ancien est également le père d'un roi nommé Osorkon l'ancien, ayant régné à la fin de la XXIe dynastie, avant les rois Siamon et Psousennès II[10].

Sheshonq Ier a une sœur nommée Méhytemousekhet qui épouse le grand prêtre de Ptah Chedsounéfertoum.

Sheshonq Ier épouse Karoma Ire avec qui il a le roi Osorkon Ier[11].

Sheshonq Ier est également le père de plusieurs autres enfants :

Règne[modifier | modifier le code]

Grand sphinx de granit réinscrit au nom de Sheshonq Ier - Trouvé à Tanis, aujourd'hui au Musée du Louvre.

Avant le règne et prise du pouvoir[modifier | modifier le code]

La famille de Sheshonq Ier faisait partie de la tribu des Mâchaouach. Elle est inscrite sur la stèle de Pasenhor où la généalogie de Pasenhor, prêtre et lointain descendant de Sheshonq Ier, est décrite, remontant à six générations avant le fondateur de la XXIIe dynastie. Les premiers sheshonqides exercèrent semble-t-il des fonctions militaires dans la région de Per-Sopdou. Il est probable que la famille entretenait des liens avec les dirigeants de la XXIe dynastie. Osorkon l'ancien, oncle de Sheshonq Ier, a en effet régné pendant la XXIe dynastie, entre des rois égyptiens (Amenemopet (pharaon) et Siamon), sans que cela ne pose visiblement problème. Des liaisons matrimoniales sont possibles, même si cela reste spéculatif[16].

De plus, sous le règne de Psousennès II, dernier roi de la XXIe dynastie, lorsque le père de Sheshonq Ier, Nimlot, meurt, Sheshonq arrive à lui obtenir l'établissement d'un culte funéraire à Abydos, ce qui montre son importance en cette fin de XXIe dynastie : Sheshonq devait être alors le numéro deux ou trois de l'État (après le roi lui-même)[17].

À la mort de Psousennès II, Sheshonq Ier monte sur le trône vers 943 AEC pour un règne d'environ vingt et un ans. Il s'allie aux grandes familles thébaines et memphites : le grand prêtre de Ptah Chedsounéfertoum semble épouser la sœur de Sheshonq Ier, nommée Méhytemousekhet, tandis que son propre fils, le futur Osorkon Ier, épouse Maâtkarê, la fille de Psousennès II. Ces différents étéments assurent une transition sans heurt entre la XXIe dynastie et la XXIIe dynastie[18].

Politique intérieure[modifier | modifier le code]

Relief représentant Sheshonq Ier et son fils, le grand prêtre d'Amon Ioupout, à Karnak.

Le roi inaugure une politique d'apanage en octroyant des fonctions importantes à ces fils, politique poursuivie par ses successeurs. Ainsi, Ioupout devient généralissime du Sud et grand prêtre d'Amon, Nimlot devient général d'Héracléopolis et grand prête d'Héryshef tandis que Djedptahiouefânkh, qui était peut-être son fils, devient troisième prophète d'Amon et chef du district autour de Thèbes. De plus, sa probable fille Méhytemouskhet devient divine adoratrice d'Amon vers 940 AEC[19]. Il continue de s'allier au cours de son règne aux puissantes familles locales : sa fille Tashepenbastet épouse le général et troisième prophète d'Amon Djeddhéhoutyiouefânkh, une fille de Ioupout épouse le quatrième prophète d'Amon Djedkhousouiouefânkh et une autre fille du roi, Tanytsepeh, épouse le grand prêtre de Ptah Chedsounéfertoum de Memphis[20].

Grâce à cette politique, Sheshonq Ier parvient à réunir sous la coupe de son clan l'unité des Deux Terres. De plus, dans le cadre de cette politique, seul un fils royal peut succéder à un autre fils royal, permettant ainsi d'éviter la constitution de dynasties locales[21]. Cette stratégie, reprise par les successeurs de Sheshonq (en particulier son fils Osorkon Ier et son arrière-petit-fils Osorkon II), va entraîner l'éclatement du royaume de manière irréversible à partir de la fin du règne d'Osorkon II vers 834 avant l'ère commune, soit un peu moins d'un siècle après le règne de Sheshonq Ier[22].

Il semble que ce soit sous son règne qu'a lieu le déplacement final de certaines momies royales du Nouvel Empire. Pinedjem Ier avait fait restaurer et réinhumer un certain nombre de momies royales dans le tombeau d'Amenhotep II (où elles resteront jusqu'à leur découverte en 1898) et celui de Séthi Ier[23]. Ensuite, Pinedjem II avait fait déplacer en l'an X de Siamon les momies situées dans le tombeau de Séthi Ier vers celui non localisé de la reine Ahmès-Inhapy[24]. Et c'est sous le règne de Sheshonq Ier que ces momies, ainsi que celles de la famille de Pinedjem Ier, sont déplacées dans le tombeau de la famille de Pinedjem II, où elles seront découvertes en 1881[18]. La date la plus haute est l'an X de son règne sur des bandelettes de la momie de Djedptahiouefânkh[12].

Activité constructrice[modifier | modifier le code]

Statue de Sekhmet portant la titulature de Sheshonq Ier - Temple de Mout à Karnak

La déesse Bastet, associée à la déesse Sekhmet à laquelle le roi fait ériger de nombreuses statues dans le temple de Mout à Thèbes[25], devient la grande déesse nationale. Le culte de ces divinités autrefois mineures prendra peu à peu le pas sur celui d'Amon dans les générations suivantes, cependant le programme monumental de Sheshonq reste centré sur les grands dieux de l'empire des Ramsès. En effet, le règne de Sheshonq apporte aussi un certain renouveau dans la construction de monuments à travers tout le pays.

À Thèbes, outre son intervention dans le temple de Mout, en l'an 21, Sheshonq entreprend, dans l'enceinte d'Amon-Rê, l'édification d'un monument baptisé le Château des millions d'années d'Hejkhéperrê Sétepenrê, constitué d'un grand pylône et d'une vaste cour bordée de portiques dont les murs sont décorés de reliefs à la gloire de ses victorieuses conquêtes consacrées au dieu de Karnak. Il dépêche, dans cette intention, l'architecte royal Horemsaf, et fait rouvrir les carrières du Gebel Silsileh par son fils le grand prêtre d'Amon Ioupout[26],[25].

À Memphis, il commande la construction d'un autre monument baptisé le Château des millions d'années du roi Hedjkhéperrê Sétepenrê, le fils de Rê Sheshonq Méryamon qui est dans l'Hout-ka-Ptah[27],[25], consacré au dieu Ptah, qui serait à rechercher sous la ville moderne de Mit-Rahineh. Un taureau sacré est enterré sous son règne, comme l'atteste une stèle provenant du Sérapéum de Saqqarah qui est inscrite à son nom[28],[25]. C'est probablement à l'occasion ou en prévision de cet événement national que le roi commande également au grand prêtre de Ptah, Chedsounéfertoum, l'édification d'une salle d'embaumement, une ouâbet, pour le dieu Apis, bâtie en calcaire, décorée de reliefs et pourvue du mobilier nécessaire pour le service funéraire du dieu, et dont une des inscriptions signale :

« Au soin du grand des chefs des artisans, le prêtre-sem Chedsounéfertoum, juste de voix. C'est sa Majesté qui a fait construire en travail parfait un laboratoire d'embaumement pour son père Osiris-Apis[29]. »

À Tanis, qui reste la capitale du royaume sheshonqide, il orne le grand temple d'Amon de grands sphinx réinscrits à son nom, sculptures de granit sans doute prélevées à Pi-Ramsès, l'ancienne capitale ramesside devenue une carrière dès la XXIe dynastie[25]. Le site de Tanis, aujourd'hui très ruiné, ne permet pas de restituer l'œuvre du roi, dont seuls quelques éléments subsistent, comme une partie d'une corniche monumentale inscrite à son nom, qui laisse imaginer les dimensions selon lesquelles l'agrandissement du temple fut réalisé[30].

Le roi est également intervenu ailleurs, son nom ayant été retrouvé :

Politique extérieure[modifier | modifier le code]

De plus, le roi a organisé a minima une campagne en Palestine, comme figuré sur le mur sud de la cour du temple d'Amon à Karnak (première cour, portique dit des Bubastides, à l'est de la façade du petit temple reposoir de Ramsès III[33],[34]). Cette campagne est encore assez floue, que ce soit sa raison d'être, la date et les lieux visités mais il semble qu'elle avait des raisons économiques, qu'elle a eu lieu vers 927-926 AEC et que les armées égyptiennes visitèrent le Néguev, la plaine côtière (Gaza, Gezer) et les confins de ce qui sera où était déjà le royaume d'Israël (vallée de Jezraël avec Megiddo, où il laisse une stèle, et vallée moyenne du Jourdain)[33].

Le roi a également noué des relations étroites avec les cités phéniciennes alors en pleine expansion, comme l'atteste un fragment de base d'une statue (en) de Sheshonq Ier portant le nom du roi Abibaal[33].

Peu de temps après cette victoire sur les royaumes de Syro-Palestine, Sheshonq Ier se tourne vers l'ouest, et fait main basse sur les grandes oasis du désert Libyque, gagnant ainsi de nouvelles terres et une nouvelle source de revenus non négligeable à la couronne, notamment grâce au blé et à d'autres denrées alimentaires, que ces terres fertiles du désert produisent en grande quantité[35]. Puis il mate une rébellion au sud, envoyant ses troupes contre les Troglodytes, peuplade que l'on situe traditionnellement dans le désert nubien, entre le Nil et la mer Rouge. Il reprend ainsi, manifestement, le contrôle de la Basse-Nubie et des voies commerciales avec l'Afrique, et consacre les tributs qu'il en retire aux dieux de Thèbes et de Memphis[36].

Sépulture[modifier | modifier le code]

Coffre à canopes de Sheshonq Ier. Albâtre. Musée égyptien de Berlin.

Le lieu où se trouve le tombeau de Sheshonq Ier n'est pas connu avec certitude. Plusieurs sites ont été proposés pour avoir abrité la sépulture et le viatique funéraire du roi :

  • Bubastis, selon la tradition qui en fait la ville d'origine de Sheshonq. La tombe du roi serait à rechercher dans l'enceinte du temple de Bastet, selon une pratique, inaugurée à la dynastie précédente, d'édifier la nécropole royale entre les murs mêmes du sanctuaire de la ville choisie par les pharaons comme résidence. Cette hypothèse semble être écartée par la plupart des égyptologues car aucune trace d'une nécropole royale ou princière n'a été découverte sur les lieux jusqu'à présent ;
  • Tanis, en raison de la découverte, en 1939, par l'équipe de Pierre Montet, dans le temple d'Amon de la ville, d'une nécropole royale de la XXIe dynastie et d'une partie des souverains de la XXIIe dynastie. Lors des fouilles qui menèrent à cette découverte inédite, les archéologues mirent au jour les restes de divers mobiliers funéraires abandonnés par des pillards, dont deux vases canopes qui portent le nom du roi. Cette découverte, ainsi que celle de bijoux royaux également à son nom dans une autre sépulture, invitent la plupart des égyptologues à situer la tombe de Sheshonq dans cette nécropole même. Le roi aurait suivi la tradition, en se faisant bâtir une tombe à proximité de celle de ses prédécesseurs directs. Mais aucune tombe d'envergure n'a été découverte au nom de Sheshonq Ier, et les sépultures anonymes de la nécropole de Tanis, de tailles modestes et anépigraphes, ne semblent pas être appropriées pour un pharaon aussi puissant, fondateur d'une dynastie ;
  • Memphis, selon une hypothèse récente émise par Troy Leiland Sagrillo. En raison, d'une part d'un culte funéraire rendu à ce roi dans la cité pendant de nombreuses générations, et d'autre part grâce à l'attestation, dans les annales du règne, d'un monument, un Château des millions d'années, élevé par le roi dans le temple de Ptah au cœur de la ville, dont la fonction le rattache à son culte funéraire, l'égyptologue soumet l'hypothèse que Sheshonq aurait choisi l'antique capitale comme lieu de sépulture[37].

Seul un certain nombre d'objets, pouvant provenir de la tombe du roi, indiqueraient qu'elle a été pillée dès l'Antiquité, comme la plupart des tombes royales de l'époque. Cependant, lorsque l'on réunit l'ensemble de ces pièces, elles ne semblent pas appartenir au même puzzle, et ne permettent pas de valider l'une ou l'autre des hypothèses.

Ainsi, à la fin du XIXe siècle, est apparu, sur le marché des antiquités, un coffre à vases canopes au nom du roi, qui a été acquis par le Musée égyptien de Berlin[38]. De provenance inconnue, il s'agit d'un coffre en albâtre, dont les quatre angles sont recouverts par quatre représentations des déesses Isis et Nephtys protégeant les vases canopes. Il serait un remploi d'un viatique funéraire royal ou princier d'une époque antérieure, mais ce coffre, qui porte la titulature du roi et provient assurément de sa tombe, est trop petit pour avoir contenu les deux vases canopes découverts à Tanis dans la nécropole royale.

Quant aux bijoux au nom du roi trouvés à Tanis, dont deux bracelets en or cloisonnés, sertis de pierres semi-précieuses, ainsi qu'au moins un pectoral, ils ont été découverts sur la dépouille momifiée d'un autre Sheshonq, deuxième du nom, qui aurait régné plus tard et dont la place dans la famille royale est imprécise[39].

Les hypothèses concernant le lieu exact de cette sépulture restent donc pour l'instant non prouvées.

Dans la Bible[modifier | modifier le code]

Dans le Premier Livre des Rois, qui fait partie de l'Ancien Testament biblique, Sheshonq Ier et un ou deux de ses prédécesseurs sont évoqués, d'abord sous le titre de Pharaon, Roi d'Égypte, puis sous son nom à lui, Sheshonq (traduction du grec des Septante ?), parfois transcrit Shishak (Vulgate traduite du latin ?), Schischak (renvois infra vers Wikisource), voire Schischa[40] (שִׁישַׁק), entre autres variantes.

Les pharaons ayant directement précédé Sheshonq, probablement Siamon, puis peut-être Psousennès II, à la fin de la XXIe dynastie, avaient « recueilli » le prince édomite Hadad, rescapé d'un massacre perpétré par les Hébreux du roi David, le pourvoyant en maison, subsistance, terres, et même femme, en la personne de la sœur de la femme de Siamon, Thachpenès (sic) reine d'Égypte, belle-sœur de Pharaon dont le prince réfugié aura un fils, élevé près de la cour et au milieu des enfants royaux d'Égypte[41].

Quelques décennies plus tard, en bon stratège, Pharaon (Psousennès II ou Sheshonq) marie, quant à lui, sa propre fille au roi hébreu Salomon, fils et successeur direct de David[42].

Elle est emmenée alors « dans la ville de (son défunt beau-père) David » durant l'achèvement de travaux d'aménagement[42], et Schischa (le pharaon Sheshonq ? ou un quasi-homonyme ?) fait peut-être placer un ou deux de ses fils comme « secrétaire(s) » auprès de Salomon[40], tout cela afin de s'assurer de la neutralité de celui-ci pendant ses conquêtes au sud de l'Égypte.

Salomon fait donc construire une maison à sa femme, fille de Pharaon[43]. Pendant ce temps, le Roi d'Égypte, s’empare de Gezer, l’incendie, tue les Cananéens qui habitent dans la ville, et la donne pour dot à sa fille, femme de Salomon. Salomon rebâtit ensuite Guézer[44].

La fille de Pharaon monte, de la cité de David, dans sa maison que Salomon lui a construite[45]. Ce dernier achète des chevaux et des chars en Égypte[46], servant même d'intermédiaire en cela avec des rois plus au nord[47]. Et il « aime » aussi beaucoup d'autres femmes, d'autres étrangères, outre cette légitime épouse, jusqu'à 700 épouses de rang princier et 300 concubines, qui le détournent partiellement vers leurs propres dieux[48].

Jéroboam, un serviteur (architecte ?) « éphratien », surveillant de corvéables de Salomon, se rebelle, peut-être contre la dureté des chantiers de Salomon, mais surtout parce qu'influencé par un prophète, qui lui fait connaître la « volonté divine » de confisquer pour un temps (ce sera plusieurs générations), au moins dix des douze tribus d'Israël (sans Jérusalem) au fils et futur successeur de Salomon sur le trône, et l'incite à s'en saisir pour devenir lui-même, lorsque Salomon mourra, roi d'Israël (c'est-à-dire roi sur ces dix tribus sans le royaume sud de Juda), de manière stable (infra), selon une promesse de l'Éternel, et à la condition de suivre ses ordres, voies, lois et commandements, comme l'avait fait David[49].

Salomon cherche à faire mourir Jéroboam, qui s’enfuit en Égypte auprès de Schischak, roi d’Égypte, où il demeurera jusqu'à la mort de Salomon (et c'est alors la première fois que la Bible nomme clairement Schischak, ou Sheshonq, et par ce seul titre de roi d'Égypte, plus que par celui de Pharaon)[50].

Shishak (Sheshonq) protège Jéroboam, mais n'attaque pas Jérusalem durant le règne de Salomon.

Salomon s'éteint, après environ quarante ans de règne à Jérusalem et sur tout Israël. Roboam, son fils, lui succède sur le trône[51].

Après la mort de Salomon, le royaume de ce dernier va se voir divisé en deux, après consultation, par le nouveau roi, de tout Israël, dont Jéroboam toujours en Égypte qui préconise à Roboam de desserrer l'étau de son père sur le peuple hébreu et sur lui, ce que ce dernier finit par refuser à son détriment, puisque cette intransigeance provoque la scission du pays, et la réduction de son pouvoir réel à presque seulement Jérusalem la ville du Temple (et des palais royaux).

Jéroboam revient d'Égypte et devient lui-même roi de la partie nord du territoire hébraïque[52], tentant d'y instaurer un nouveau culte, de nouveaux rites, et son propre clergé, pour célébrer Yahvé sous forme de statues de veaux en or et tenter d'éloigner, religieusement aussi, ses sujets de Jérusalem et son Temple qu'il ne contrôle pas, et éviter qu'ils ne se retournent, un jour, contre lui et le tuent, en étant revenus à leurs « fondamentaux » hiérosolymitains[53].

Vers 927/926 av. J.-C., Shishak, roi d’Égypte, monte contre Jérusalem, sur laquelle règne Roboam[54], fils et successeur légitime de Salomon, depuis 931 (et jusqu'à environ 913) av. J.-C.. Shishak, avec une armée de 60 000 cavaliers, égyptiens, nubiens et éthiopiens, attaque Jérusalem, capitale de la partie sud, c'est-à-dire du nouveau royaume dit de Juda.

Et cette fois-ci encore, pour la deuxième voire troisième (et dernière) fois, la Bible nomme explicitement « Sheshonq », et l'on est donc mieux assuré qu'il s'agit bien de lui, et non, peut-être, d'un de ses prédécesseurs plus vaguement désigné(s) par le titre générique de Pharaon, alors plus protecteur(s) et allié qu'agresseur (et allié !...). Dès lors que Pharaon monte en agressivité, même ponctuelle dans le temps et partielle dans l'espace, contre la f(r)action sud de son pérenne allié du nord-est, le Livre saint de ce dernier semble le faire descendre de son prestigieux titre pharaonique pour ne plus l'appeler que par son seul et simple (pré)nom.

Shishak entre dans la ville sainte hébraïque. Il y prend les trésors de la maison de l’Éternel (temple ou synagogue) et les trésors de la maison du roi voisin (le palais), il prend tout, dont tous les boucliers d’or que Salomon avait faits. Le roi Roboam fera à leur place des boucliers d’airain[55].

Jéroboam qui, pendant sa fuite préalable en Égypte, aurait épousé une belle-sœur (voire une fille ?) de Shishak, aurait ainsi aidé ce dernier à s'emparer provisoirement de tout l'ancien royaume de Salomon, ou tout au moins de cette partie méridionale de Juda, et en échange Shishak aurait intronisé Jéroboam roi de l'Israël d'alors, au nord de Jérusalem et de Juda (cf. supra), pour un règne ayant duré quant à lui de 931 à 910 av. J.-C.

Le rôle des pharaons d'Égypte, et en particulier de Sheshonq Ier, dans la genèse du fameux schisme hébraïque évoqué dans une partie dite historique de la Bible, source documentaire israélite qui plus est, semble donc loin d'être anodin, en tant que voisin suzerain voire souverain qui aurait fait sienne la célèbre maxime Diviser pour régner, ou au moins pour assurer une sorte de glacis protecteur de sa frontière nord à son propre territoire.

Titulature[modifier | modifier le code]

Acculturation[modifier | modifier le code]

Aujourd'hui, le calendrier berbère célèbre la date de son avènement sur le trône d'Égypte comme étant le jour de l'an du calendrier amazigh : Yennayer[56].

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. a b et c Payraudeau 2020, p. 555.
  2. Chechonq ou encore Chechanq selon les translittérations de son nom en berbère, Cacnaq ; en tifinagh, ⵛⵛⵏⵈ
  3. Sheshonk I, king of Egypt sur britannica.com
  4. Payraudeau 2020, p. 85-87.
  5. En anglais le nom s'écrit Shoshenq, en allemand Scheschonq...
  6. À l'exception des quatre plus anciens ancêtres, pour lesquels les noms des épouses n'apparaissent pas.
  7. Yoyotte 1987, catalogue 35, p. 152-154.
  8. Voir la descendance de Bouyouwawa sur l'arbre généalogique de Pasenhor.
  9. a et b Payraudeau 2020, p. 561.
  10. Payraudeau 2020, p. 85-87, 561.
  11. Payraudeau 2020, p. 98 et 561.
  12. a b c d et e Payraudeau 2020, p. 98.
  13. Payraudeau 2020, p. 98 et 114.
  14. a et b Payraudeau 2020, p. 99.
  15. Kitchen 1996.
  16. Payraudeau 2020, p. 85-86.
  17. Payraudeau 2020, p. 96-97.
  18. a et b Payraudeau 2020, p. 97-98.
  19. Payraudeau 2020, p. 558.
  20. Payraudeau 2020, p. 98-99.
  21. Payraudeau 2020, p. 377-378.
  22. Payraudeau 2020, p. 129-137.
  23. Payraudeau 2020, p. 69-70.
  24. Payraudeau 2020, p. 88-89.
  25. a b c d e f g h i j et k Payraudeau 2020, p. 99-100.
  26. Breasted 1906, § 701-708 p. 344-347.
  27. Breasted 1906, § 723-724 p. 357-358.
  28. Aly 1996, p. 5-16.
  29. Pour une version hiéroglyphique complète du texte et une traduction, cf. Maystre 1992, Ch. XVI, § 166, p. 357.
  30. Yoyotte 1987, Ch. Les premiers chéchanquides : un retour de puissance, p. 66.
  31. Daressy 1901, p. 153-156.
  32. Leclant 1980, Introduction, p. 4.
  33. a b et c Payraudeau 2020, p. 100-106.
  34. Lepsius 1849-1859, Abt. III. Bl. 252 et Abt. III. Bl. 253.
  35. Pirenne 1963, Ch. Ier, § 5 La politique de la XXIIe dynastie.
  36. Breasted 1906, § 719-720 p. 355-356 et § 724 p. 358.
  37. Sagrillo 2005.
  38. Schäfer et Andrae 1925, pl. 1, p. 443.
  39. Le sarcophage intact de Sheshonq II a été découvert dans l'antichambre du tombeau de Psousennès Ier.
  40. a et b Bible, 1er livre des rois, chapitre 4, verset 3 (1R 4,3)
  41. 1er livre des rois, chapitre 11, versets 17 et suivants (1R 11,17 sequentiaque / sqq)
  42. a et b Bible, 1er livre des rois, chapitre 3, verset 1 (1R 3,1)
  43. 1er livre des rois, chapitre 7, verset 8 (1R 7,8)
  44. 1er livre des rois, chap. 9, versets 16 et 17 (1R 9,16&17)
  45. 1er livre des rois, ch. 9, v. 24 (1R 9,24)
  46. 1er L. des rois, 10, v28 (1R 10,28)
  47. 1 Rois, 10, 29 (1R 10,29)
  48. 1R., 11, 1 et vts suivants (1R 11,1 sqq / SeQuentiaQue)
  49. v. 26 à 39 (1R 11,26-39)
  50. v40 et suivants (1R 11,40 sqq)
  51. 43 et 42 (1R 11,43&42)
  52. 1R 12,2sqq (2 et suivants)
  53. 1R 12,25-33 (25 à 33)
  54. 1R 14,25
  55. 1R 14,26sqq (26 & s.)
  56. « Yennayer 2971 : les Berbères fêtent le jour de l'An du calendrier amazigh », sur Franceinfo, (consulté le )

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Karl Richard Lepsius, Denkmäler aus Aegypten und Aethiopien, Berlin, Nicolaische Buchhandlung, 1849-1859 (lire en ligne) ;
  • Georges Daressy, « Le temple de Hibeh », ASAE, no 2,‎  ;
  • James Henry Breasted, Ancient records of Egypt historical documents from earliest times to the persian conquest, collected edited and translated with commentary, vol. IV The Twentieth to the Twenty-Sixth Dynasties, The University of Chicago press, .
  • Heinrich Schäfer et Walter Andrae, Die Kunst des Alten Orients, Berlin, Propyläen Verlag,  ;
  • Jacques Pirenne, Histoire de la civilisation de l'Égypte ancienne, vol. 3, Neuchâtel, Éd. de la Baconnière,  ;
  • Jean Leclant, L'Égypte du crépuscule, Larousse,  ;
  • Nicolas Grimal, Histoire de l'Égypte ancienne [détail des éditions], « Les Libyens » ;
  • Jean Yoyotte, Tanis, l'or des Pharaons, Paris, Association Française d’Action Artistique,  ;
  • (en) Kenneth Anderson Kitchen, The Third Intermediate Period in Egypt (1100–650 BC), Warminster, Aris & Phillips Limited, , 608 p. (ISBN 978-0856682988) ;
  • Charles Maystre, Les Grands prêtres de Ptah de Memphis, Freiburg, Orbis biblicus et orientalis - Universitätsverlag,  ;
  • Mohamed Ibrahim Aly, « Une stèle inédite du Sérapéum mentionnant le nom de Sheshonq Ier », Bulletin de la Société d'égyptologie de Genève, no 20,‎  ;
  • Frédéric Payraudeau, L'Égypte et la Vallée du Nil : Les époques tardives, t. 3, Paris, PUF, coll. « Nouvelle Clio », , 624 p. (ISBN 978-2130591368) ;
  • Troy Leiland Sagrillo, The Mummy of Shoshenq I Re-discovered?, vol. N°205, Göttinger Miszellen, , p. 95-103.

Article connexe[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]