Robert Buron — Wikipédia

Robert Buron
Illustration.
Robert Buron en 1961.
Fonctions
Député français

(1 mois et 30 jours)
Élection 23 novembre 1958
Circonscription 1re de la Mayenne
Législature Ire (Cinquième République)
Groupe politique RPCD
Prédécesseur Circonscription créée
Successeur André Davoust

(13 ans et 29 jours)
Élection 21 octobre 1945
Réélection 2 juin 1946
10 novembre 1946
17 juin 1951
2 janvier 1956
Circonscription Mayenne
Législature Ire Constituante
IIe Constituante
Ire, IIe et IIIe (Quatrième République)
Groupe politique MRP
Maire de Laval

(2 ans, 1 mois et 9 jours)
Prédécesseur Francis Le Basser
Successeur André Pinçon
Maire de Villaines-la-Juhel

(16 ans et 10 mois)
Prédécesseur Albert Goupil
Successeur Pierre Cadot
Ministre des Travaux publics,
des Transports et du Tourisme

(3 ans, 4 mois et 8 jours)
Président Charles de Gaulle
Premier ministre Michel Debré
Georges Pompidou
Gouvernement Debré
Pompidou I
Prédécesseur Lui-même
Successeur Roger Dusseaulx (Travaux publics et Transports)
Ministre des Travaux publics,
des Transports et du Tourisme

(6 mois et 30 jours)
Président René Coty
Président du Conseil Charles de Gaulle
Gouvernement de Gaulle III
Prédécesseur Antoine Pinay
Successeur Lui-même
Ministre des Finances, des Affaires économiques et du Plan

(1 mois et 3 jours)
Président René Coty
Président du Conseil Pierre Mendès France
Gouvernement Mendès France
Prédécesseur Edgar Faure
Successeur Pierre Pflimlin
Ministre de la France d'Outre-Mer

(7 mois et 1 jour)
Président René Coty
Président du Conseil Pierre Mendès France
Gouvernement Mendès France
Prédécesseur Louis Jacquinot
Successeur Jean-Jacques Juglas
Ministre des Affaires économiques

(5 mois et 20 jours)
Président Vincent Auriol
Président du Conseil René Mayer
Gouvernement Mayer
Prédécesseur Antoine Pinay
Successeur Edgar Faure

(1 mois et 17 jours)
Président Vincent Auriol
Président du Conseil Edgar Faure
Gouvernement Faure I
Prédécesseur René Mayer
Successeur Antoine Pinay
Ministre de l'Information

(5 mois et 9 jours)
Président Vincent Auriol
Président du Conseil René Pleven
Gouvernement Pleven II
Prédécesseur Albert Gazier
Successeur Paul Coste-Floret
Secrétaire d'État aux Affaires économiques

(1 an, 9 mois et 13 jours)
Président Vincent Auriol
Président du Conseil Georges Bidault
Henri Queuille
René Pleven
Henri Queuille
Gouvernement Bidault II et III
Queuille II
Pleven I
Queuille III
Prédécesseur Yvon Coudé du Foresto
Successeur Émile Hugues
Biographie
Nom de naissance Robert Gaston Buron
Date de naissance
Lieu de naissance 6e arrondissement de Paris
Date de décès (à 63 ans)
Lieu de décès 13e arrondissement de Paris
Nationalité Française
Parti politique MRP (1944-1966)
Objectif 72 (1966-1973)
Enfants Martine Buron

Robert Buron est un homme politique français né le à Paris 6e et mort le à Paris 13e[1].

Il fut maire de Villaines-la-Juhel puis brièvement maire de Laval, député MRP de Mayenne et ministre sous les IVe et Ve Républiques.

Premières années[modifier | modifier le code]

Jeunesse et études[modifier | modifier le code]

Robert Buron est né en 1910 dans une famille catholique de la bourgeoisie moyenne. Son père Henri Buron (1878-1930) est un ancien médecin, externe des Hôpitaux de Paris, devenu imprimeur, et membre du CIPF affilié à l'Action française ; sa mère est sage-femme.

Il est élève au lycée Montaigne, puis au lycée Henri-IV à Paris où il obtient le baccalauréat mathématiques élémentaires. Il envisage alors une préparation à l'École navale. Adolescent, il fréquente les Camelots du Roi à l'âge de 15 ans, et est un anti-capitaliste convaincu. Il est présent en 1927 à la cérémonie de souvenir du décès de Philippe d'Orléans[2].

En 1928, il est immobilisé dans un sanatorium à Berck dans le Pas-de-Calais au « « royaume des allongés » »[3] où il reste deux ans. Il sera marqué par cette période de souffrance et d'inactivité physique. Il y prépare par correspondance le concours de sciences politiques. Il fonde le avec Suzanne Fouché (1901-1989) et quelques sympathisants l'Association pour l'insertion sociale et professionnelle des personnes handicapées. Cette maladie lui laisse une légère claudication et le conduit à de nombreux séjours à l'hôpital.

Rentré à Paris, il est élève à la faculté de droit de l'université de Paris, et achève sa scolarité à l'École libre des sciences politiques en 1931[4]. Il suit les cours d'André Siegfried[5]. Il sort major dans la section économique et financière[6]. Il est docteur en droit[6] la même année.

Au début des années 1930, il est secrétaire de la conférence Olivaint (1929-1930), cercle d'étudiants catholiques qu'il présidera ensuite. Il participe en à la fondation d'un bulletin Réaction pour l'ordre. Cette revue est royaliste et ouvertement réactionnaire. Elle est également proche du personnalisme d'Emmanuel Mounier et des « non-conformistes des années 30 » et ne cache pas sa sympathie pour le fascisme et la montée des régimes autoritaires.

Organisation professionnelle et patronale[modifier | modifier le code]

En 1932, il débute alors dans les organisations professionnelles comme secrétaire du conseil d'administration de diverses sociétés africaines. En 1933, il travaille pour le service d'études économiques de la chambre de commerce de Paris.

Ses liens avec les Croix de feu[modifier | modifier le code]

L'entre-deux-guerres voit naître des ligues républicaines d’extrême-droite, notamment les Croix-de-Feu[7],[8], cercle d'anciens combattants regroupés tout d'abord autour du colonel Maurice d'Hartoy puis, après sa mort, du colonel François de La Rocque[9]. Politiquement, Robert Buron est à droite, voire à l'extrême-droite.

Il fonde avec Suzanne Fouché en 1933 la Fédération des amicales des malades, puis en 1936 l' Union nationale des tuberculeux civils (U.N.T.C.). Le docteur Guy Hausser reprochera à l'U.N.T.C[10] « un prosélytisme religieux plus ou moins camouflé », et une proximité avec le Parti social français.

Robert Buron participe avec les Croix de feu et les Jeunesses patriotes aux évènements du 6 février 1934 à la place de la Concorde.

Comme Suzanne Fouché, il fait la connaissance de François Mauriac[11], écrivain catholique proche des Bénédictins de la rue Monsieur de Paris. Dans ce cercle on compte des convertis au catholicisme dans la lignée de Paul Claudel et de Jacques et Raïssa Maritain[12]. Pour eux, la souffrance n'est pas un mal mais un chemin vers Dieu. Ce dolorisme, très présent dans la littérature d'avant garde du début du XXe siècle, témoigne d'un mal être du siècle où la technique ne répond plus aux besoins fondamentaux de l'homme.

En 1935, il veut préparer avec Roger Ribadeau-Dumas un ouvrage sur la décolonisation qu'ils méditent pendant deux ans. Il n'y aura pas de suite : la parution en 1937 du livre d'Henri Decugis connu pour ses idées eugénistes[13], Le destin des races blanches, sera la présentation de ces idées.

Engagement et enseignement professionnel[modifier | modifier le code]

Il devient secrétaire général de la Chambre syndicale nationale des Chocolatiers de France en 1937, puis de Directeur du Groupement d'importation et de répartition des cacaos jusqu'en 1940.

Il s'intéresse alors de très près à la formation des permanents patronaux. Membre du Comité central de l'organisation professionnelle, proche du Confédération générale du patronat français, il enseigne puis dirige à partir de 1938, l'École d'application des collaborateurs et secrétaires de syndicats patronaux. Il y sera aussi professeur sous le régime de Vichy et laissera le poste de directeur en 1941 à Achille Dauphin-Meunier. L'école formait les cadres des Comités d'organisation, un ensemble d'instances créées par le régime de Vichy pour contrôler et diriger l'économie française.

Rapprochement vers la Démocratie populaire[modifier | modifier le code]

L'influence philosophique et religieuse de Jacques Maritain sur certains jeunes intellectuels proches ou ayant été proches de l'Action française, tel que Robert Buron, et comme ses encouragements aux initiatives d'Emmanuel Mounier et à la création de la revue Esprit vont contribuer, au début des années 1930, à favoriser la naissance du personnalisme des non-conformistes des années 30. Comme Maritain, Buron va être amené à approfondir parallèlement la réflexion politique et sociale, en le rapprochant des milieux de la démocratie-chrétienne. Ses convictions démocrates chrétiennes, les accords de Munich (1938) font adhérer Robert Buron sur les conseils de Georges Bidault[14] en 1938 aux Jeunesses Démocrates Populaires, mouvement de jeunesse du Parti démocrate populaire dans la perspective des élections législatives de 1940. Il est le délégué départemental du département de la Seine. Francisque Gay témoignera l'avoir connu aux groupes d'Amis du journal L'Aube où il aurait mené campagne contre les accords de Munich.

Famille[modifier | modifier le code]

Il se marie en avec Marie-Louise Trouillard (1910-2006) dont il a une fille, Martine.

Pendant la Guerre[modifier | modifier le code]

Avant l'entrée de la France dans la Seconde Guerre mondiale, il est chargé par Georges Mandel de la mise en œuvre des campagnes de propagande en faveur des produits coloniaux.

Vichy[modifier | modifier le code]

Comité d'organisation[modifier | modifier le code]

Il est secrétaire général au Comité d'organisation des cacaos, chocolaterie et confiserie, dirigé par Pierre Abelin, créé par le gouvernement de Vichy. Il est aussi conférencier du Commissariat à la famille.

Le Cinéma[modifier | modifier le code]

Il devient à partir de 1941, grâce à son ami Guy de Carmoy[15], inspecteur des finances, et sur la demande de Évrard Bourlon de Rouvre et à la suite de son expérience dans l'organisation professionnelle, secrétaire général du COIC (Comité d'organisation de l'industrie cinématographique), (1941-1944). Il s'agit d'un Comité d'organisation, un organisme professionnel permettant de réunir les professionnels du cinéma et de définir le cadre de leurs activités créé par le régime de Vichy. Robert Buron fréquente ainsi en 1942, Lucien Rebatet[16].

D'après le journaliste collaborationniste et antisémite Henry Coston[17], il aurait procédé à des liquidations d'entreprises juives[18].

Il fait partie du jury en 1942 sur un concours organisé par le secrétariat d'État à la Famille et à la Santé et le Comité d'organisation de l'industrie cinématographique chargé de choisir parmi les meilleurs scénarios de films documentaires sur le problème de la dénatalité et sur la famille. Deux prix importants sont accordés à Atlantic-Film et aux Films Jean Mineur, présentant avec le concours de l'Alliance nationale contre la population un projet de Marc Cantagrel. Il donne à Craon en Mayenne le [19] une conférence sur la Famille à l'occasion de la semaine de la propagande familiale.

Le corporatisme[modifier | modifier le code]

Robert Buron participe à partir de 1943 avec Alfred Sauvy, Louis Salleron et Antoine de Tavernost à un groupe de réflexion sur la population et l'action démographique. Il est aussi membre du comité consultatif institué par la loi du modifiant le régime du dépôt légal.

En septembre 1943[20], il présente avec Marty, Georges Ardiot[21] et Marcel Letué[22] les grandes lignes de la future Corporation du Cinéma promue par le Régime de Vichy : c'est l'organisation corporatiste prévue par la volonté du maréchal Pétain pour servir de point d'appui dans le monde du cinéma à la Révolution nationale.

Une campagne de presse sera menée en 1945 par le Canard enchaîné concernant le rôle de Robert Buron pendant cette période[23]. Ces notes ressortent en 1961 dans des lettres confidentielles lorsque Robert Buron est ministre du général de Gaulle.

Contacts avec la Résistance[modifier | modifier le code]

Parallèlement à ses activités officielles, membre de l'Organisation civile et militaire[24], il participe clandestinement à partir de 1943 au Groupe de la rue de Lille autour d'Émilien Amaury. Il participe à la rédaction des Cahiers du travaillisme français entre et aux côtés d'autres démocrates chrétiens. Il établit dans l'ombre des contacts avec le réseau Alliance où il rencontre notamment Georges et Jean-Philippe Salmson, fils et petit-fils d’Emile Salmson.

Pendant l'hiver 1943, il prend contact avec Mgr Chappoulie, représentant de l'épiscopat près du régime de Vichy, et cherche à lui faire prendre contact avec des responsables de la Résistance intérieure sur le sujet de l'école privée. Cette démarche échoue à la suite d'une série d'arrestations par la Gestapo dont sa mère internée à la prison de Fresnes, qui l'oblige à se cacher. Il est membre à partir de 1943 sous la clandestinité du Comité général d'études du Conseil national de la Résistance.

Il rejoint aussi au printemps 1944 le Comité de résistance de l'industrie cinématographique (CRIC) via la publication d'un bulletin clandestin Opéra. Le CRIC est constitué essentiellement de fonctionnaires issus du COIC. Appartenant au réseau Opéra, il était l'agent de liaison entre les industriels français appartenant à la Résistance et certains dirigeants de la France libre de Londres et de New-York.

Libération[modifier | modifier le code]

À la Libération de Paris, dès le , les locaux du COIC sont très vite occupés par les milices patriotiques menées par Jean-Paul Le Chanois. Ils constatent que les locaux sont déjà occupés par Robert Buron et Philippe Acoulon, son adjoint, qui sont à la fois à la direction du COIC, et membres du CRIC. Il y a confrontation et tensions entre la résistance communiste et la résistance gaulliste du CRIC, représentés par des fonctionnaires issus du COIC. Le groupe du CRIC se voit chassé des locaux, une arrestation étant même envisagée. Les locaux deviennent aussitôt celui du Comité de Libération du Cinéma Français (CLCF). Robert Buron reste cependant secrétariat général du COIC et expédie les affaires courantes pendant le fonctionnement, au début de l'insurrection, d'une commission de liquidation du COIC sous la présidence de Louis Daquin.

Les médias[modifier | modifier le code]

Par la suite, Robert Buron devient chargé de mission et conseiller technique de Pierre-Henri Teitgen, nommé ministre de l'Information le dans le premier gouvernement provisoire de la République française. À partir d', le COIC est dirigé par un commissaire provisoire, Philippe Acoulon, et est transformé en Office professionnel du cinéma (OPC) le .

Ses activités clandestines pendant la Seconde Guerre mondiale valent à Robert Buron de recevoir la Médaille de la Résistance française et le , de devenir administrateur général de la Radiodiffusion française.

Robert Buron devient en , directeur de la SOFIRAD. Il reste administrateur jusqu'en 1947. Il fonde le avec Émilien Amaury et Yves Helleu l'hebdomadaire Carrefour en suite des Cahiers du Travaillisme français dont il est codirecteur de 1944 à 1947. Il devient en 1947 PDG de Gaumont Actualités.

Carrière politique[modifier | modifier le code]

Il est l'un des fondateurs du Mouvement républicain populaire (MRP) après la Libération. Il défend l'option travailliste lors de sa constitution.

Quatrième république[modifier | modifier le code]

L'ancrage politique local en Mayenne[modifier | modifier le code]

Robert Buron vers 1945.

En 1945, il est parachuté par le MRP en Mayenne, dont sa femme est originaire et bénéficie aussi de l'appui de l'abbé Seigneur, animateur des Semaines sociales de France. Il déclarera : « Je fus élu avant de connaître vraiment la Mayenne »[25].

Le MRP s'appuie sur les anciens du Sillon et les proches d'Isidore Pasquier, sur les dirigeants ruraux et sur le jeune clergé JAC, CFTC, et les spécialistes de l'action sociale. Il est aussi soutenu par Ouest-France, journal démocrate-chrétien, dirigé par Paul Hutin-Desgrées.

À la suite de Guy Menant, député Jeune République élu en 1932 et de Georges Hoog, il relaie les revendications des fermiers et des métayers qui demandent une amélioration de leurs statuts.

Il est surnommé par Yves Grosrichard dans le Canard enchaîné, le « Buron des Burettes », et ne cache pas sa pratique religieuse et son soutien à l'école libre. Sa candidature passe pour celle d'un modéré. Dans ce département réputé conservateur, il est élu en [Information douteuse] député de la Mayenne en même temps que son concurrent de l'UDSR Jacques Soustelle, étranger comme lui au département, mais soutenu par Francis Le Basser et Jacques Foccard, Jean-Marie Bouvier O'Cottereau (Union Républicaine) et Camille Lhuissier (SFIO).

Il refuse en 1948 de s'associer à une large union des catholiques pour faire barrage à la candidature de Francis Le Basser au Conseil de la République (qui remplaçait le Sénat), et commence à être suspect à la fraction la plus à droite de l'électorat[26]. Il lui reste à faire ses preuves. Il est battu par Francis Le Basser, à Laval, lors des cantonales de mars 1949 (5 018 voix contre 3202). Il s'ancre localement, conseiller général en 1951, maire de Villaines-la-Juhel en 1953. Il reste député de la Mayenne jusqu'en 1959.

L'économie[modifier | modifier le code]

De 1948 à 1949, il est délégué du gouvernement français aux conférences économiques de New York et de La Havane. Robert Buron est membre du comité directeur du Mouvement socialiste pour les États-Unis d'Europe en , délégué suppléant de la France au Conseil de l'Europe.

Sa connaissance des dossiers économiques et l'appui de l'abbé Pierre, alors député MRP, lui permettent d'être nommé Secrétaire d’État aux Affaires économiques dans le gouvernement de Georges Bidault, le . Il l'est à six reprises. Il est membre en 1951 du Club des Jacobins[27] créé par Charles Hernu.

En Mayenne, ses responsabilités assoient son autorité et excitent les inimitiés du RPF qui le dépeint comme partisan du dirigisme.

Son influence en Mayenne s'accroît toutefois progressivement. La fédération MRP de la Mayenne compte 550 adhérents et est l'une des plus importantes de l'Ouest. Elle bénéficie de l'appui du clergé ainsi que du quotidien Ouest-France. Les rapports de la préfecture de Mayenne soulignent l'organisation du parti et le rôle sur le terrain d'André Davoust et de Robert Tromelin, tous deux membres de son cabinet. Aux élections de 1951, le MRP rassemble 39,9 % des suffrages et voit de peu lui échapper le troisième siège départemental.

Il est élu conseiller général de Villaines-la-Juhel en octobre 1951, puis maire de la commune en 1953, poste qu'il conservera jusqu'en mars 1970.

L'urgence sociale[modifier | modifier le code]

Proche d'Henri Alexandre Chappoulie, évêque d'Angers, il est aussi un ami de l'abbé Pierre. Tous les deux ont été parlementaires au MRP. Il se retrouve avec eux dans la défense de la militante du logement Christine Brisset et des squatters angevins au milieu des années 1950. Dès , Robert Buron est aux côtés de l'abbé Pierre, prophète égaré dans la politique selon Georges Montaron[28]. Dès le départ Robert Buron est un des premiers politiques à aider la fondation de l'abbé Pierre avec Léo Hamon. Il est l'homme de terrain et le conseiller public de l'abbé Pierre, quand Léo Hamon est le porte-parole politique. Robert Buron apporte le soutien du MRP au projet de création des cités d'urgence obtenue par la loi du .

Les ministères[modifier | modifier le code]

Il s'oppose à la guerre d'Indochine et avec huit autres députés MRP, il vote contre le gouvernement Laniel pour sa politique indochinoise en 1953. Contrairement à son parti, il soutient la constitution du gouvernement de Pierre Mendès France en 1954, ce qui lui vaut le portefeuille de l'Outre-Mer. Il est exclu du groupe parlementaire MRP mais non du parti. À l'Outre-Mer, sa politique de coopération préfigure la loi-cadre de Gaston Defferre. Il prend position pour l'autonomie de la Tunisie.

Redevenu MRP après la fin du gouvernement Mendès, il réintègre le groupe « par fidélité ou résignation, plus que par enthousiasme. »

Aux élections législatives de 1956, qui sont marquées par la percée du poujadisme, le MRP perd 12 000 voix en Mayenne et son deuxième siège. Ses prises de position contre les bouilleurs de cru, thème majeur de campagne dans le Nord Mayenne, ne sont pas étrangères à ce score. À l'été 1957, il réunit un groupe Pour un plus grand MRP, avec notamment Félix Lacambre, alors président de l'Action catholique ouvrière. La même année, il devient membre du conseil d'administration des publications de La Vie catholique. Il apporte également à la revue Croissance des jeunes nations un soutien régulier, témoignage d'une de ses sujets majeurs.

Cinquième république, basculement vers le socialisme[modifier | modifier le code]

Ministre du général de Gaulle[modifier | modifier le code]

Lors de la crise algérienne, il se dit favorable à une intervention du général de Gaulle en cas d'échec du gouvernement Pflimlin du MRP. Il est favorable à une évolution de l'Algérie française. Il accorde finalement sa confiance à de Gaulle lorsque celui-ci est investi le Président du Conseil. Il écrit à Témoignage chrétien que son « oui est presque un non ». Il n'en est pas moins nommé ministre des Travaux Publics du Transport et du Tourisme le dans le nouveau gouvernement.

Il devient en mars 1958 président de l’Institut international de recherche et de formation en vue du développement harmonisé (IRFED), à la demande de l’économiste et prêtre dominicain Louis-Joseph Lebret, pour aborder plus spécifiquement le problème de développement des pays du sud. En 1959, il devient président de la Fédération des associations de postcure. En 1961, il est cocréateur de la Société d'économie mixte de la Mayenne.

Lors du putsch des généraux en , il est prisonnier en Algérie alors qu'il y était en mission. Il est avec Louis Joxe et Jean de Broglie l'un des négociateurs et signataires des accords d'Évian, qui mettent fin, en mars 1962, à la guerre d'Algérie.

Avec les autres ministres MRP, il démissionne le après la conférence de presse du général de Gaulle sur l'Europe. Il indiquera avoir « suivi de Gaulle d’instinct en 1958 et sans regret par la suite, mais que les divergences de vues l’emportent maintenant sur les convergences ».

Le tiers-mondisme[modifier | modifier le code]

De 1962 à 1966, il est président du centre de développement de l'OCDE. Son successeur sera André Philip. Après la dissolution de l'Assemblée nationale de 1962, il laisse son poste de député à son suppléant André Davoust. Redevenu maire et conseiller général, à partir de 1963, ses « centres d'intérêt se déplacent vers le Tiers-Monde et son développement »[29]. Il devient en 1964 président de l'École nouvelle d'organisation économique et sociale.

Il appelle à voter Jean Lecanuet au premier tour, puis François Mitterrand au deuxième tour de l’élection présidentielle de 1965. Il est de 1963 à 1970, président du Comité d'expansion de la Mayenne.

Objectif 72[modifier | modifier le code]

Refusant le libéralisme et l'atlantisme du Centre démocrate de Jean Lecanuet, il s'oriente vers une voie qui lui semble plus compatible avec sa conception du catholicisme social. Il fonde le mouvement Objectif 72 (soit la date présumée de l'élection présidentielle (1965+7). Il est en 1967 président du Comité de liaison pour l'alphabétisation et la promotion des travailleurs étrangers.

Ce mouvement va au fur et à mesure s'éloigner de la mouvance démocrate-chrétienne qui évolue pour lui dans un sens trop conservateur[30]. L'action au sein des Groupes d'action municipale favorise au contact des membres du PSU entre autres, l'évolution du mouvement vers la gauche[31]. Après 1968, les militants se prononcent pour une société socialiste, et n'hésitent pas à reprendre le terme de lutte de classes. Le virage est pris et le Courrier de la Mayenne dirigé par Louis de Guébriant peut dénoncer le catholique d'apparence.

En , à la suite d'une réunion d'Objectif 72[32], Robert Triffin[33] se voit refuser en compagnie de Robert Buron, François Mitterrand, Pierre Uri l'accès à une manifestation d'étudiants défilant de la Bastille à Denfert-Rochereau. On leur reproche leur appartenance à l'establishment.

L'objection de conscience[modifier | modifier le code]

En , avec Guy-Marie-Joseph Riobé, il témoigne au tribunal correctionnel d'Orléans lors du procès de deux prêtres et du philosophe Jean-Marie Muller[34], réservistes, qui avaient renvoyés leur livret militaire après s'être vu refuser le statut d'objecteur de conscience, dont Robert Buron avait été l'un des instigateurs en 1963.

Il soutient l'opposition à la force de frappe nucléaire du Groupe d'action et de résistance à la militarisation. Il adresse un message qui est lu lors de la marche de ce groupe, de Lyon au poste de commandement nucléaire du Mont Verdun, le [35]. Lors du procès de , il envoie un témoignage écrit en soutien aux militants qui ont occupé le poste de commandement[36].

Il préside en 1969 l'association France-Biafra[37], qui fusionne en avec le Comité de lutte contre le génocide du Biafra, initié par Bernard Kouchner.

La mairie de Laval[modifier | modifier le code]

En , Robert Buron se présente à l'élection du conseiller général du canton de Villaines-la-Juhel, mais il est battu et démissionne alors de la mairie. Il vise alors celle de Laval à un moment particulièrement favorable.

Le , Robert Buron participe à Paris à un grand meeting d'union de la gauche avec les dirigeants du Parti communiste et du Parti socialiste. Il lance un appel aux chrétiens à rallier la gauche.

Lors des municipales de mars 1971, il est élu maire de Laval avec une liste non-communiste regroupant la CIR, les radicaux et Objectif 72.

Le Parti socialiste[modifier | modifier le code]

Robert Buron participe au congrès d'Épinay du Parti socialiste qu'il rejoint en juin 1971. La motion Vie nouvelle / Objectif 72, qu'il ne signe pas, recueille 0,5 % des suffrages. Son mouvement prend ensuite, en 1971, le nom d'Objectif socialiste. Le rapprochement avec le Parti socialiste provoque des débats dans son mouvement. Union pour la défense de la République En 1973, André Jaud ouvre un second hypermarché de 3 500 m2 à Laval. Une polémique aura lieu à ce sujet entre Édouard Leclerc, et Robert Buron[38], maire de Laval.

Il est maire de Laval jusqu'à sa mort en avril 1973 en France. Candidat lors législatives de mars 1973 au siège de député, malade et hospitalisé, il ne peut mener campagne contre son homonyme, l'UDR Pierre Buron, qui l’emporte de nouveau.

Robert Buron s'est employé à définir une forme de « travaillisme » à la française s'efforçant de réconcilier les valeurs socialistes et chrétiennes. Sa fille Martine Buron a été maire de Châteaubriant (Loire-Atlantique), et députée européenne socialiste.

Il fera aussi un passage remarqué sur le sujet du Tiers-Monde à l'émission de télévision À armes égales, opposé à Raymond Cartier, directeur de Paris Match. Entre 1969 et 1976, Jacques Robin et Robert Buron (jusqu'en 1973, année de sa mort) animent chaque mois des rencontres entre scientifiques et politiques[39].

Mort[modifier | modifier le code]

Il meurt après plusieurs mois de maladie à Paris le , à 63 ans. Il est inhumé à Villaines-la-Juhel dont il a été maire.

Lors de l'élection municipale partielle du pour pourvoir son poste de conseiller municipal et deux autres postes alors vacants, son épouse Marie-Louise Buron, est élue conseillère municipale de Laval[40].

Postes ministériels[modifier | modifier le code]

Publications[modifier | modifier le code]

  • Les obligations du trustee en droit anglais, Paris, Société général d'imprimerie et d'édition, 136 p., 1938, thèse de droit.
  • Cahiers du travaillisme français, 1943-1944.
  • Dynamisme des États-Unis, recueil d'articles parus dans la presse, 1950-1957, Paris : S.A.D.E.P., 1957, 96 p.
  • Le plus beau des métiers, Paris : Plon, 1963, 252 p.
  • Carnets politiques de la guerre d'Algérie : par un signataire des accords d'Évian, Paris : Plon, 1965, 267 p.
  • Les dernières années de la IVe République, carnets politiques, Paris : Plon, 1968.
  • Demain la politique, réflexions pour une autre société (en coll. avec Jean Offredo et Objectif 72), Paris : Denoël, 1970, 256 p.
  • Pourquoi je suis de nouveau candidat ?, Vendôme : C.F.I.B., 1972, 60 p.
  • Par goût de la vie, propos recueillis par Jean Offredo, Paris : Cerf, 1973, 114 p. (Pour quoi je vis).
  • La Mayenne et moi ou de la démocratie chrétienne au socialisme, postface de Marie-Louise Buron, [Malakoff] : Cana, 1978, 147 p. (Mémoire vivante).

Décoration[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

Positions[modifier | modifier le code]

  • Il apprécie la citation de Jacques Chirac qui définit la politique de la sorte : « c'est l'art de rendre possible ce qui est nécessaire »[43].
  • Dans son dernier livre, Pourquoi je vis : par goût de la vie, Robert Buron déclarait : « Je suis sûr que les civilisations les plus puissantes, techniquement et militairement, imposeront leurs valeurs aux autres. J'en conclus que le monde finira dans une catastrophe. Comme je n'aime pas l'idée de catastrophe, que j'ai le goût de la vie, et que tout ce qui bloque la vie est pour moi le mal et l'ennemi, je lutterai tant que je pourrai contre ce qui me paraît inéluctable. Je suis très pessimiste. Je suis persuadé que les technocrates occidentaux créeront une sorte de fascisme mondial, appuyé bien sûr sur les valeurs occidentales. Seulement je lutterai de toutes mes forces contre ces technocrates »[43].

Liens externes[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Relevé des fichiers de l'Insee
  2. L'Action française, 27 mars 1927.
  3. Par goût de la vie, Paris, 1973, p. 10.
  4. Chroniques d'Outre-Mer; Études et Informations, (lire en ligne)
  5. Michel Ragon, 1934-1939, l'avant-guerre, Éditions Planète, (lire en ligne)
  6. a et b Tendances: Cahiers de Documentation, (lire en ligne)
  7. Jean-Paul Thomas, « Le Parti social français (1936-1945) Une expérience de parti de masses et la préparation d’une relève », Annales de Bretagne et des Pays de l’Ouest. Anjou. Maine. Poitou-Charente. Touraine, nos 109-3,‎ , p. 109–120 (ISSN 0399-0826, DOI 10.4000/abpo.1562, lire en ligne, consulté le )
  8. Encyclopædia Universalis, « CROIX-DE-FEU », sur Encyclopædia Universalis (consulté le )
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  10. Le Populaire, 7 mai 1937
  11. « Catalogue SUDOC », sur www.sudoc.abes.fr (consulté le )
  12. « Bulletin de la Société Paul Claudel, n°181 | Société Paul Claudel », sur www.paul-claudel.net (consulté le )
  13. Patrick Tort, « Des figures de l'eugénisme en France », Pour la Science, no 342, avril 2006, p. 8-12
  14. Jacques Dalloz, Georges Bidault, une biographie politique. Paris, L'Harmattan. 1992. p. 47.
  15. Régis Boulat, Jean Fourastié, un expert en productivité: la modernisation de la France, 2008.
  16. Robert Buron est évoqué dans le tome II des Mémoires d'un fasciste de Lucien Rebatet comme « un assez gros jeune homme, d'aspect très bourgeois, veston noir, pantalon rayé, qui se présente affablement, mais avec un ton d'extrême assurance ».
  17. Contributions à la biographie de M. Robert Buron, Lectures françaises, avril-mai 1961. Henry Coston, Dictionnaire de la politique française, Paris, La librairie française, t. I, p. 184.
  18. Référence à une note pour M. Jean Coupan datée du 8 mai 1941, et concernant la liquidation des affaires israélites en Afrique du Nord, où Robert Buron se prononce pour la liquidation des entreprises juives »
  19. La Gazette de Château-Gontier, 19 avril 1942.
  20. L’Œuvre, 27 septembre 1943.
  21. [1]
  22. [2]
  23. le 28 février 1945: Buronneries à la radio d'Henri Jeanson, le 7 mars 1945: Mine d'aryen, le 25 avril 1945 : L'estampillage des faux jeton.
  24. Débats de l'Assemblée consultative provisoire, 1945, volume 2.
  25. Rompre l'opposition traditionnelle entre les blancs et les bleus, entre les Chouans et les coqs rouges et chercher à attirer les uns et les autres vers des solutions nouvelles me parut dès les premiers contacts devoir être la justification de ma présence en Mayenne, Robert Buron, La Mayenne et moi, de la démocratie chrétienne au socialisme, Paris, 1978, p. 20.
  26. Un poisson rouge dans un bénitier.
  27. A ceux qui s'étonnent de ma présence au Club de Jacobins, je déclare que lorsque dans une nation, la colère populaire, les hommes épris de liberté, de justice, de bien-être, et de paix se doivent de ne rechercher que ce qui peut les unir. La République impatiente: le Club des Jacobins, 1951-1958, de Philippe Reclus, p. 40.
  28. [3]
  29. La Mayenne et moi
  30. Dans Témoignage chrétien du 4 mai 1967, Robert Buron s'oppose à l'hibernation du MRP proposée par Joseph Fontanet.
  31. Objectif 72 apparaît dépourvu d'une mémoire collective, ou de référence à une idéologie précise. Gaëlle Hadjaoui, Un groupe d'étude et d'action politique : Objectif 1972, Objectif socialiste, 1967-1974, mémoire de maîtrise d'histoire de l'université de Paris I, 1997.
  32. Robert Triffin, conseiller des princes: souvenirs et documents, p. 43.
  33. Yale Daily news, no 18, 7 octobre 1969.
  34. En 1967, alors qu'il est officier de réserve, Jean-Marie Muller demande à bénéficier du statut des objecteurs de conscience. Le tribunal le condamne à trois mois de prison avec sursis, mille francs d'amende et cinq ans de privation de ses droits civiques. K. Christitch, « Deux prêtres et un professeur non violents sont condamnés à trois mois de prison avec sursis », Le Monde,‎
  35. Maurice Balmet, Patrice Bouveret, Guy Dechesne, Jean-Michel Lacroûte, François Ménétrier et Mimmo Pucciarelli, Résister à la militarisation : Le Groupe d'action et de résistance à la militarisation, Lyon 1967-1984, Lyon, Atelier de création libertaire, , 324 p. (ISBN 978-2-35104-121-5), p. 63
  36. Jean-Marc Théolleyre, « Le tribunal de Lyon ne retient pas le délit de déprédation de monuments publics ontre six militants pacifistes », Le Monde,‎
  37. Anne Vallaeys, Médecins sans frontières, la biographie, Fayard, 2005
  38. Le Nouvel Observateur, 9 octobre 1972, [4]
  39. Brigitte Chamak, Le Groupe des Dix, éditions du Rocher, 352 p., 1998.
  40. "Mme Robert Buron est élue à Laval", Le Monde, 29 mai 1973
  41. On trouve comme directeur du cabinet : Pierre Riedinger, ancien adjoint d'Emile Galey au COIC ; chef de cabinet : Jacques Gouault ; chefs adjoints de cabinet : Renée Djabri,ancienne secrétaire de Robert Buron à la SOFIRAD et Robert Tromelin.
  42. Ordre de la Libération, « Base Médaillés de la Résistance française - fiche Robert BURON » (consulté le )
  43. a et b Brigitte Chamak, Le Groupe des Dix, Monaco/Paris, Editions du Rocher, , 350 p. (ISBN 2-268-02481-4), page 79 à 82