Renaud Piarroux — Wikipédia

Renaud Piarroux, né le à Cherbourg, en France, est un pédiatre et biologiste spécialiste des maladies infectieuses et des maladies tropicales.

Il est connu comme étant « l’un des meilleurs spécialistes des épidémies de choléra »[1],[2].

Biographie[modifier | modifier le code]

Famille et formation[modifier | modifier le code]

Renaud Piarroux est le « fils d’un père artisan peintre et d’une mère médecin en anatomopathologie dans un laboratoire pharmaceutique »[3]. Suivant son épouse à Marseille, il y poursuit également ses études de médecine[3]. Il est marié depuis 1987 et père de trois enfants[1]. Il devient pédiatre et en parallèle diplômé en médecine tropicale et en parasitologie[3].

Carrière professionnelle[modifier | modifier le code]

En 1994, au Zaïre il est « le seul pédiatre » sur place à lutter, entre autres, contre le choléra[3]. Il comprend que des bébés orphelins participent à la propagation de l'épidémie de choléra car l'orphelinat ne dispose pas de couches et de lait infantile « comme les bébés européens »[3]. Une fois ces manques comblés l'épidémie disparait[3]. Cette expérience le marque et l'incite à se spécialiser dans la lutte contre les épidémies[3].

De 1996 à 2008, il dirige le laboratoire de parasitologie à l’université de Franche-Comté (Besançon, France) qui étudie notamment le choléra[3].

Sa spécialité est l’éco-épidémiologie[3], qui consiste à essayer de comprendre y compris sur le terrain « l’environnement dans lequel se développe une maladie » tout en travaillant avec les populations afin de l'éradiquer[3].

En 2008, il dirige le laboratoire de parasitologie à l'université d'Aix-Marseille[3].

À l'automne 2016, il est en désaccord avec le projet de l'IHU de Marseille porté par Didier Raoult[3],[1]. Cela dégrade ses conditions de travail à tel point qu'il quitte ses fonctions à Marseille[1] pour devenir chef du service de parasitologie-mycologie à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière, à l'Assistance publique – Hôpitaux de Paris[1].

Durant sa carrière, Renaud Piarroux participe à des missions humanitaires pour Médecins du monde et de nombreux projets de recherche en Afrique[4], notamment sur l'étude de la dynamique des épidémies[5],[6], en république démocratique du Congo[5],[7],[8],[9],[10],[11],[12],[13] et en Guinée[14], et un programme de lutte contre les maladies à transmission hydrique en Côte d'Ivoire[15],[16].

Principaux travaux[modifier | modifier le code]

Lutte contre l'épidémie de choléra en Haïti et les experts scientifiques de l'ONU[modifier | modifier le code]

En , le gouvernement haïtien et l'ambassade de France demandent à Renaud Piarroux d'enquêter sur l'origine et l'évolution de la plus importante épidémie de choléra de l'époque actuelle[17],[18],[19],[20],[21],[22] et d'aider les autorités à mettre en place un programme de lutte contre la maladie.

Son rapport confidentiel du « Comprendre l'épidémie de choléra en Haïti » est d'abord évoqué par le journal « Le Monde » quelques jours plus tard[23] avant d'être publié en dans la revue scientifique « Emerging Infectious Diseases » du Centers for Disease Control[24],[3].

Au bout de plusieurs années, il contribue à « faire reconnaître la responsabilité de casques bleus de l’ONU dans la propagation de l’épidémie »[1] malgré les « mensonges et dénégations » scientifiques des experts de l'ONU[25]. Cette pandémie causera la mort de 10 000 personnes[26].

Cette mission est relatée dans le livre Deadly River (Rivière mortelle, Cornell University Press, 2016), de Ralph R. Frerichs (en)[27],[28],[29]. Renaud Piarroux a également écrit en 2019 un ouvrage relatant la suite de cette histoire et les controverses scientifiques qui y ont été associées : Choléra. Haïti 2010-2018 : histoire d’un désastre[30],[25].

Alerte aux autorités et implantations d'équipes mobiles à domicile durant la pandémie du Covid-19[modifier | modifier le code]

En 2020, Renaud Piarroux s'implique dans la gestion de la crise de la Covid-19 au sein de l'AP-HP, notamment sur l'épidémiologie[31] et le développement du dispositif « Covisan » d'aide au confinement des personnes Covid positives[32],[33],[34].

Le , il alerte, avec Éric Caumes, Martin Hirsch, le directeur des Hôpitaux de Paris, sur la possibilité d'un « tsunami de cas » de Covid-19[1],[35],[36],[37]. Afin d'essayer de casser les chaines de transmission, il suggère à Martin Hirsch, la mise en place d'un outil supplémentaire[2] qui a fait ses preuves dans d'autres épidémies (choléra aux Comores et en Haïti)[38],[1] : des équipes mobiles. Ce dispositif appelé « Covisan » est tout d'abord lancé à Paris le « sans véritable relais dans la communication gouvernementale »[39]. Il permet d'accompagner le patient avec des équipes qui se déplacent à son domicile « pour voir comment pouvoir protéger les proches et l'entourage »[38]. Cette approche permet également de sensibiliser sur le terrain les cas positifs asymptomatiques (personnes contagieuses sans symptôme) afin que ces personnes adhèrent mieux aux recommandations[40],[41]. En sept mois 40 000 personnes ont été suivies en Île-de-France[42]. Le , le ministre de la Santé, Olivier Véran, annonce qu'un dispositif de visites à domicile va désormais « être étendu à l’ensemble du pays »[43],[44].

Il décrit son expérience dans le livre La Vague, l'épidémie vue du terrain[45].

Publications[modifier | modifier le code]

Décorations[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. a b c d e f g et h « Renaud Piarroux : un épidémiologiste de terrain contre le Covid-19 », La Croix,‎ (ISSN 0242-6056, lire en ligne, consulté le ) :

    « Il est aujourd’hui mondialement reconnu comme l’un des meilleurs spécialistes des épidémies de choléra. »

  2. a et b « Pr Piarroux : « Les cas augmentent depuis 15 semaines, il aurait fallu agir plus tôt » », sur LExpress.fr, (consulté le ).
  3. a b c d e f g h i j k l et m « Renaud Piarroux, le médecin qui a tenu tête à l’ONU », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  4. « Les enfants perdus du Rwanda », sur LExpress.fr, (consulté le ).
  5. a et b « Afrique. Une plaque tournante de choléra identifiée au Congo. », La Croix,‎ (ISSN 0242-6056, lire en ligne, consulté le ).
  6. (en) Christopher Troeger, Kankoe Sallah, Dennis L. Chao, Romain Truillet, Jean Gaudart et Renaud Piarroux, « Cholera Outbreak in Grande Comore: 1998–1999 », The American Journal of Tropical Medicine and Hygiene, vol. 94, no 1,‎ , p. 76–81 (ISSN 0002-9637, PMID 26572869, PMCID 4710449, DOI 10.4269/ajtmh.15-0397).
  7. République Démocratique du Congo - Direction de la lutte contre la maladie, Plan stratégique d’élimination du choléra en République démocratique du Congo 2008-2012, (lire en ligne [archive du ]), p. 6.[PDF].
  8. (en) D Bompangue, P Giraudoux, P Handschumacher, M Piarroux, B Sudre, M Ekwanzala, I Kebela et R Piarroux, « Lakes as source of cholera outbreaks, Democratic Republic of Congo », Emerging Infect. Dis., vol. 14, no 5,‎ , p. 798–800 (PMID 18439365, PMCID 2600234, DOI 10.3201/eid1405.071260).
  9. (en) D Bompangue, P Giraudoux, M Piarroux, G Mutombo, R Shamavu, B Sudre, A Mutombo, V Mondonge et R Piarroux, « Cholera epidemics, war and disasters around Goma and Lake Kivu: an eight-year survey », PLoS Negl Trop Dis, vol. 3, no 5,‎ , e436 (PMID 19436726, PMCID 2677153, DOI 10.1371/journal.pntd.0000436).
  10. (en) S Moore, B Miwanda, AY Sadji, H Thefenne, F Jeddi, S Rebaudet, H de Boeck, B Bidjada, JJ Depina, D Bompangue, AA Abedi, L Koivogui, S Keita, E Garnotel, PD Plisnier, R Ruimy, N Thomson, JJ Muyembe et R Piarroux, « Relationship between Distinct African Cholera Epidemics Revealed via MLVA Haplotyping of 337 Vibrio cholerae Isolates », PLoS Negl Trop Dis, vol. 9, no 6,‎ , e0003817 (PMID 26110870, PMCID 4482140, DOI 10.1371/journal.pntd.0003817).
  11. (en) B Miwanda, S Moore, JJ Muyembe, G Nguefack-Tsague, IK Kabangwa, DY Ndjakani, A Mutreja, N Thomson, H Thefenne, E Garnotel, G Tshapenda, DK Kakongo, G Kalambayi et R Piarroux, « Antimicrobial Drug Resistance of Vibrio cholerae, Democratic Republic of the Congo », Emerging Infect. Dis., vol. 21, no 5,‎ , p. 847–851 (PMID 25897570, PMCID 4412219, DOI 10.3201/eid2105.141233).
  12. (en) N Floret, JF Viel, F Mauny, B Hoen et R Piarroux, « Negligible risk for epidemics after geophysical disasters », Emerging Infect. Dis., vol. 12, no 4,‎ , p. 543–548 (PMID 16704799, PMCID 3294713, DOI 10.3201/eid1204.051569).
  13. (en) Didier Bompangue, Patrick Giraudoux, Martine Piarroux, Guy Mutombo, Rick Shamavu, Bertrand Sudre, Annie Mutombo, Vital Mondonge et Renaud Piarroux, « Cholera Epidemics, War and Disasters around Goma and Lake Kivu: An Eight-Year Survey », PLoS Neglected Tropical Diseases, vol. 3, no 5,‎ , e436 (ISSN 1935-2735, PMID 19436726, PMCID 2677153, DOI 10.1371/journal.pntd.0000436).
  14. (en) S Rebaudet, MA Mengel, L Koivogui, S Moore, A Mutreja, Y Kande, O Yattara, V Sarr Keita, BM Njanpop-Lafourcade, PE Fournier, E Garnotel, S Keita et R Piarroux, « Deciphering the origin of the 2012 cholera epidemic in Guinea by integrating epidemiological and molecular analyses », PLoS Negl Trop Dis, vol. 8, no 6,‎ , e2898 (PMID 24901522, PMCID 4046952, DOI 10.1371/journal.pntd.0002898).
  15. « Fiche d'expérience ».
  16. (en-GB) « Water as a source of disease - Interview with Professor Renaud Piarroux », sur Solidarités International, (consulté le ).
  17. (en) R Piarroux, R Barrais, B Faucher et al., « Understanding the cholera epidemic, Haiti », Emerging Infect. Dis., vol. 17, no 7,‎ , p. 1161–1168 (PMID 21762567, PMCID 3381400, DOI 10.3201/eid1707.110059).
  18. (en) J Gaudart, S Rebaudet, R Barrais, J Boncy, B Faucher, M Piarroux, R Magloire, G Thimothe et R Piarroux, « Spatio-temporal dynamics of cholera during the first year of the epidemic in Haiti », PLoS Negl Trop Dis, vol. 7, no 4,‎ , e2145 (PMID 23593516, PMCID 3617102, DOI 10.1371/journal.pntd.0002145).
  19. (en) L Bengtsson, J Gaudart, X Lu, S Moore, E Wetter, K Sallah, S Rebaudet et R Piarroux, « Using mobile phone data to predict the spatial spread of cholera », Sci Rep, vol. 5,‎ , p. 8923 (PMID 25747871, PMCID 4352843, DOI 10.1038/srep08923).
  20. (en) S Baron, J Lesne, S Moore, E Rossignol, S Rebaudet, P Gazin, R Barrais, R Magloire, J Boncy et R Piarroux, « No Evidence of Significant Levels of Toxigenic V. cholerae O1 in the Haitian Aquatic Environment During the 2012 Rainy Season », PLoS Curr (en), vol. 5,‎ (PMID 24077904, PMCID 3783635, DOI 10.1371/currents.outbreaks.7735b392bdcb749baf5812d2096d331e).
  21. (en) S Rebaudet, P Gazin, R Barrais, S Moore, E Rossignol, N Barthelemy, J Gaudart, J Boncy, R Magloire et R Piarroux, « The dry season in haiti: a window of opportunity to eliminate cholera », PLoS Curr (en), vol. 5,‎ (PMID 23873011, PMCID 3712488, DOI 10.1371/currents.outbreaks.2193a0ec4401d9526203af12e5024ddc).
  22. (en) RR Frerichs, J Boncy, R Barrais, PS Keim et R Piarroux, « Source attribution of 2010 cholera epidemic in Haiti », Proc. Natl. Acad. Sci. U.S.A., vol. 109, no 47,‎ , E3208; author reply E3209 (PMID 23047703, PMCID 3511120, DOI 10.1073/pnas.1211512109).
  23. « Choléra en Haïti : l'hypothèse népalaise confirmée », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  24. (en-US) Renaud Piarroux, Robert Barrais, Benoît Faucher et Rachel Haus, « Understanding the Cholera Epidemic, Haiti », Emerging Infectious Diseases journal - CDC, vol. 17 Number 7,‎ (DOI 10.3201/eid1707.110059, lire en ligne, consulté le ).
  25. a et b « Importation du choléra en Haïti, manipulation scientifique », La Croix,‎ (ISSN 0242-6056, lire en ligne, consulté le ).
  26. « HAÏTI. L'ONU reconnait sa responsabilité dans l'épidémie de choléra », sur Sciences et Avenir (AFP) (consulté le ).
  27. (en) Ralph Frerichs, Deadly River: Cholera and Cover-Up in Post-Earthquake Haiti, Ithaca, NY, Cornell University Press, coll. « The Culture and Politics of Health Care Work », (ISBN 9781501713583, présentation en ligne).
  28. (en) Mark Schuller, « Deadly River: Cholera and Cover-Up in Post-Earthquake Haiti, by Ralph R. Frerichs », New West Indian Guide (en), vol. 92, nos 1-2,‎ , p. 148–149 (ISSN 1382-2373 et 2213-4360, DOI 10.1163/22134360-09201022, lire en ligne, consulté le ).
  29. (en) Jocalyn Clark, « Cholera cover up in Haiti », The Lancet Infectious Diseases, vol. 17, no 1,‎ , p. 38 (DOI 10.1016/S1473-3099(16)30568-0, lire en ligne, consulté le ).
  30. Piarroux 2019.
  31. Paul Benkimoun, « Coronavirus : « Il faut cartographier les cas de porteurs du virus et renforcer la surveillance là où existent des clusters » », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne).
  32. Paul Benkimoun et Chloé Hecketsweiler, « Coronavirus : « Il faudra suffisamment d’équipes mobiles opérationnelles » pour empêcher un rebond de l’épidémie », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne).
  33. « Tout savoir sur Covisan ».
  34. « Coronavirus : en Île-de-France, des équipes pour briser les chaînes de transmission », sur lefigaro.fr (consulté le ).
  35. Gilles Pialoux, Nous n'étions pas prêts : Carnet de bord par temps de coronavirus, JC Lattès, , 250 p. (ISBN 978-2709666855), « Vendredi 13 mars 2020 – 15 Heures ».
  36. Caroline Coq-Chodorge, « Avec les brigades de dépistage franciliennes : « Le virus circule doucement, on peut s’en protéger » », sur Mediapart (consulté le ) : « […] le pour l’alerter sur la gravité de la situation : les capacités de l’AP-HP allaient être dépassées, il fallait se réorganiser d’urgence. […] ».
  37. « « Un paradoxe à lui tout seul » : Martin Hirsch, patron de l’AP-HP, de la crise de l’hôpital à l’épidémie de Covid-19 », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  38. a et b « Prise en charge des malades : en quoi consiste le dispositif Covisan ? », sur France Culture (consulté le ).
  39. « Le récit de la crise du coronavirus à l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris », sur Les Échos, (consulté le ).
  40. « « Resserrer les mailles » : le défi du traçage des chaînes de contamination du Covid-19 », AFP,‎  :

    « […] Renaud Piarroux […] des équipes se déplacent […] pour leur délivrer des informations et estimer leurs besoins. « On explique aux cas positifs asymptomatiques qu'ils n'ont rien, mais qu'ils sont porteurs du virus et peuvent le transmettre. On leur dit « vous ne sortez pas, vous prenez beaucoup de précautions » », un discours beaucoup plus facile à faire admettre en face à face que par un coup de téléphone impersonnel, souligne-t-il. […] »

  41. Caroline Coq-Chodorge, « L’épidémiologiste Renaud Piarroux : « La contrainte n’aidera pas » », sur Mediapart (consulté le ) : « […] On a besoin d'équipes mobiles dans toute la France, casser 5 % des chaînes de contamination suffit […] »
  42. « Coronavirus : des brigades pour accompagner les malades dans leur isolement », sur Franceinfo, (consulté le ).
  43. « Covid-19 : des brigades à domicile pour éviter une troisième vague », La Croix,‎ (ISSN 0242-6056, lire en ligne, consulté le ).
  44. « Covid : les visites au domicile des personnes contaminées vont être généralisées », sur Les Échos, (consulté le ).
  45. Piarroux 2020.
  46. « Choléra en Haïti: le douloureux récit d’un scandale », sur sante.lefigaro.fr, (consulté le ).
  47. « Choléra Haïti 2010-2018 : histoire d’un désastre / Afis Science - Association française pour l’information scientifique », sur Afis Science - Association française pour l’information scientifique (consulté le ).
  48. « Le choléra en Haïti : histoire d’une catastrophe politique », sur France Culture, (consulté le ).
  49. Le JDD, « "La santé publique sort laminée" : dans son livre, le Pr Renaud Piarroux tire les leçons de la première vague », sur lejdd.fr (consulté le ).
  50. « Décret du portant promotion et nomination - Légifrance », sur www.legifrance.gouv.fr (consulté le ).

Liens externes[modifier | modifier le code]