Prix Louis-Delluc — Wikipédia

Prix Louis-Delluc
Pays Drapeau de la France France
Date de création 1936

Le prix Louis-Delluc est une récompense cinématographique française qui est décernée depuis 1936 et nommée en hommage à l'écrivain et réalisateur Louis Delluc.

De nos jours, il est considéré par certains comme le prix Goncourt du cinéma[1],[2].

En 1999 a été créé un prix Louis-Delluc du premier film.

Genèse[modifier | modifier le code]

En décembre 1936, au nom de l'association La Jeune Critique indépendante, Maurice Bessy et Marcel Idzkowski (écrivain et journaliste)[réf. souhaitée] souhaitent joindre un Prix de la jeunesse au Grand prix du cinéma français que l'on remet depuis 2 ans[3].

Le nom de Louis Delluc s'impose : théoricien d'un cinéma « à la française » alors en pleine maturation avant la guerre, militant pour une reconnaissance institutionnelle de ce média délaissé et parfois détesté[4], cet écrivain prolifique et jeune réalisateur à 30 ans fut censuré pour son film La Boue en mai 1921, victime d'une administration rétrograde. Mort à 33 ans après seulement 7 films, il est le chef de file de la jeune et innovante première avant-garde du cinéma français.

Pour que s'applique au mieux la devise « Défendre avec enthousiasme et franchise le cinéma, art jeune et art de jeunes », à l'image de Louis Delluc quand il évoque son engagement pour le cinéma[5],[6],[7], le jury est constitué de 23 membres tous trentenaires, à l'exception de leur doyen Paul Gordeaux âgé de 45 ans et de quatre benjamins : Pierre Ogouz (journaliste), 27 ans, Maurice Bessy, 26 ans, Émile Cerquant (journaliste), 25 ans, et le jeune Georges Cravenne alors âgé de 22 ans.

Les autres membres du premier jury du prix Louis-Delluc sont, par ordre alphabétique, Marcel Achard, Georges Altman, Claude Aveline, Pierre Bost, Odile Cambier (chroniqueuse), Suzanne Chantal, Georges Charensol, Louis Cheronnet (journaliste), Benjamin Fainsilber (auteur dramatique), Nino Frank, Paul Gilson, Pierre Humbourg, Marcel Idzkowski, Henri Jeanson, André Le Bret (acteur), Roger Lesbats, Roger Régent et Jean Vidal.

Le jury étend les critères de sélections des films à ceux « faits pour un esprit français »[8] ce qui permet d'inclure certains films étrangers quand ceux qui sont sélectionnés pour le grand prix du cinéma français ne doivent souffrir d'aucune collaboration extérieure.

Le jury retient une trentaine de films.

Le mardi 22 décembre, à 13h, au cours d'un déjeuner amical que préside René Delluc, le père de Louis Delluc, le premier prix Louis-Delluc est remis au film Les Bas-fonds réalisé par Jean Renoir, à une courte majorité de voix devant le film Jenny de Marcel Carné.

Le grand prix du cinéma sera lui remis dans la soirée au film L'Appel du silence de Léon Poirier.

L'accueil de ce nouveau prix par la presse est nuancé[9] : ses ambitions affichées de promouvoir l'émergence cinématographique occultent certaines questions qui se posent déjà dans la presse sur les modes de fonctionnement[10] de ce collectif autoproclamé où, dans un mélange des genres et avec une liberté de ton difficiles à justifier, des membres du jury chroniquent eux-mêmes leur travail[11].

L'année suivante, du retard est pris dans l'organisation de l'événement qui est repoussé à février 1938, mais le principe d'une remise des prix à la fin de l'année civile est conservé et reproduit pour la troisième édition la même année.

Il n'y a donc aucune remise de prix en 1937 et il y en a deux en 1938, à 10 mois d'intervalle.

La guerre contrarie l'organisation de l'événement qui ne remet pas de prix de 1939 à 1944.

Évolution[modifier | modifier le code]

Après la guerre, le prix emporte progressivement l'estime des cinéphiles, avant tout par l'efficacité d'une appellation prix Louis-Delluc qui, en plus d'être iconique, marque les esprits et aux côtés de laquelle le vocable « grand prix du cinéma français » peine à se maintenir.

En 1949 et en 1953, alors que la remise du grand prix du cinéma français n'a pas lieu, le prix Louis-Delluc, désormais autonome, est maintenu.

S'il conserve une certaine dimension avant-gardiste en s'attachant à mettre à l'honneur des films de genre ou du documentaire, sa notoriété grandissante et l'intérêt qu'il suscite aux yeux de la profession poussent ses responsables successifs à contrevenir aux recommandations de ses fondateurs comme la défense d'un cinéma exclusivement jeune et le maintien de l'âge des membres du jury en dessous de 40 ans.

Le prix Louis-Delluc de nos jours[modifier | modifier le code]

Gilles Jacob, membre du jury depuis 1975, le préside chaque année depuis 1993[12]. Les délibérations ont lieu au restaurant parisien le Fouquet's sur les Champs-Élysées.

Exempt de toutes considérations commerciales, il arrive que le prix Louis-Delluc honore un film qui n'est pas encore sorti en salles et affecte sa distribution comme en 1958 pour Moi, un noir qui est distribué en , Le Roi et l'oiseau primé en 1979 et qui sera exploité en mars de l'année suivante ou Danton en 1982, sorti en janvier, un mois après l'attribution de la récompense.

Critère d'éligibilité modifié après guerre et maintenu jusqu'en 1986 : le film devait être tourné en France[13]. Aujourd'hui, l'exigence se porte surtout sur la nationalité des réalisateurs et des productions : deux films non-francophones, Espoir, sierra de Teruel et Sils Maria ont ainsi remporté le prix en 1945 et en 2014.

Les films choisis allient une exigence artistique, un style singulier, la vision d'un auteur et une reconnaissance publique. Ils sont sélectionnés indifféremment parmi des premiers films (Jean-Paul Rappeneau en 1965 ou Sandrine Veysset en 1996) ou des réalisations d'auteurs confirmés et reconnus (Jean-Luc Godard et Louis Malle, conjointement distingués en 1987, Claude Chabrol en 2000…), malgré une convention qui, si elle n'est plus appliquée depuis longtemps et qu'elle sera abandonnée en 1986, engage à récompenser un réalisateur jeune et de préférence jamais primé[13],[14].

Après l'abandon de la convention initiale, le prix Louis-Delluc a parfois été remis à plusieurs reprises aux mêmes cinéastes, comme Alain Resnais en 1966, 1993 et en 1997, Michel Deville en 1967 et en 1988, Louis Malle en 1957 et en 1987, Claude Sautet en 1969 et en 1995 et Abdellatif Kechiche en 2007 et en 2013.

Les membres du jury se renouvellent par cooptation[15].

En 2023, le jury, présidé par Gilles Jacob, est composé de Sophie Avon (Sud-Ouest), Ariane Allard (Causette), Ava Cahen (Clap), Élisabeth Franck-Dumas (Libération), Jean-Michel Frodon (Slate), Charlotte Lipinska (France Inter), Serge Kaganski, Jean-Marc Lalanne (Les Inrocks), Gérard Lefort, Mathieu Macheret (Le Monde), Pierre Murat (Télérama), et Alex Vicente (El País)[16].

Le Prix Louis Delluc dispose depuis 2023 d'un site officiel www.prixlouisdelluc.com

Palmarès[modifier | modifier le code]

En alinéa des films primés sont indiqués les films ayant été très discutés. À noter qu'à partir des années 1990, les instances mirent en place une présélection des films proposés au jury.

Prix Louis-Delluc[modifier | modifier le code]

Années 1930/1940[modifier | modifier le code]

Années 1950[modifier | modifier le code]

Années 1960[modifier | modifier le code]

Années 1970[modifier | modifier le code]

Années 1980[modifier | modifier le code]

Années 1990[modifier | modifier le code]

Années 2000[modifier | modifier le code]

Années 2010[modifier | modifier le code]

Années 2020[modifier | modifier le code]

Prix Louis-Delluc du premier film[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

  1. Le journal Le Monde est assez imprécis sur les autres films discutés mais mentionne Mes petites amoureuses de Jean Eustache, Trompe-l'œil de Claude d'Anna et L'important c'est d'aimer de Andrzej Żuławski. Le jury avait également décidé par convention de ne pas attribuer le prix à Lancelot du Lac de Robert Bresson et Lacombe Lucien de Louis Malle, les réalisateurs étant déjà primés, en dépit d'être les plus grands succès critiques de l'année.
  2. a et b Fait assez exceptionnel : les deux films lauréats ne furent pas présélectionnés et ne faisaient pas partie des nommés. Le jury expliqua qu'on pouvait rajouter exceptionnellement des films en cas de coup de cœur. À noter que les deux lauréats sont sortis en novembre après l'annonce de la liste restreinte et qu'ils passèrent inaperçus au box-office.

Références[modifier | modifier le code]

  1. « Prix Louis-Delluc », sur Allociné (consulté le ).
  2. Mathilde Cesbron, « La Vie d'Adèle reçoit le prix Louis-Delluc », Le Figaro, (consulté le ).
  3. « Le Jour (1933-1944), 6 décembre 1936 - page 6 - 2ème colonne - "Le prix Louis-Delluc" », sur Retronews.
  4. Les termes « détestations », « haïr », etc. sont redondants chez de nombreux auteurs, acteurs et/ou metteurs en scène quand ils sont interrogés dans la presse sur leur premières impressions vis-à-vis du cinéma avant 1914.
    « Les Lettres françaises, 31 mars 1949 - page 6 - 2ème colonne bas - "Au cinéma, il avait fini par presque tout donner..." », sur Retronews.
  5. « Le Petit Journal, 15 juin 1923 - page 4 - 6ème colonne milieu - "Que si! Le projet..."" », sur Retronews.
  6. Article de Léon Moussinac, ami d'enfance et collègue de toujours de Louis Delluc, qui prend la plume, après la mort de Delluc, pour mettre en garde ceux qui se risqueraient à une interprétation irréfléchie des propos de ce dernier sur le cinéma pour et par les jeunes.
    « L'Humanité, 15 octobre 1927 - page 4 - 3ème colonne milieu - "A cinéma, moyen d'expressions jeune..." », sur Retronews.
  7. Article de Louis Delluc : « Le Siècle, 28 juillet 1918 - page 3 - 1ère colonne - 2ème partie - "Ainsi nous nous habituons à voir..." », sur Retronews.
  8. « Le Populaire (1916-1970), 18 décembre 1936 - page 6 - 5ème colonne - "Le prix Louis-Delluc" », sur Retronews.
  9. « Comoedia , 23 décembre 1936 - page 1 - 1er article - colonnes 1,2 et 3 », sur Retronews.
  10. « Comoedia , 23 décembre 1936 - page 3 - 2ème colonne - dernières lignes - Tours de scrutin », sur Retronews.
  11. En l'occurrence, ci-après dans un article qu'il rédige 4 jours avant la délibération, Paul Gordeaux, doyen du jury.
    « La Petite Gironde, 18 décembre 1936 - page 6 - 3ème et 4ème colonne - "Projections" - "Le prix Louis-Delluc, rival du Grand Prix du Cinéma" », sur Retronews.
  12. a et b « La Gifle Prix-Delluc », sur Le Monde, .
  13. a b et c « Le Delluc à Mauvais Sang », sur Le Monde, .
  14. a et b « Le Prix Louis-Delluc décerné à Jean-Luc Godard et Louis Malle », sur Le Monde, .
  15. a b et c Robin Cannone, « Prix Louis-Delluc 2016 : Stéphane Brizé au nom d'«Une Vie» », Le Figaro,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  16. Léa André-Sarreau, « Prix Louis-Delluc 2019 : Une fille facile, Grâce à Dieu et Synonyme sélectionnés », sur troiscouleurs.fr, (consulté le ).
  17. « La Belle et la Bête obtient le Prix Louis-Delluc », sur Le Monde, .
  18. « Le Cinéma Paris 1900 obtient le prix Louis-Delluc », sur Le Monde, .
  19. Georges Sadoul, Noël-Noël lauréat du Prix-Delluc, in Les Lettres françaises no 238 du 16 décembre 1948, p. 6.
  20. « Crise de la qualité », sur Le Monde, .
  21. « Alexandre Astruc remporte le prix Louis-Delluc », sur Le Monde, .
  22. Jean-Luc Godard, « Prix Louis-Delluc 1958 », Arts, no 701,‎ , republié dans Jean-Luc Godard et Alain Bergala (dir.), Jean-Luc Godard par Jean-Luc Godard : 1950-1984, t. 1, Cahiers du cinéma, éditions de l'Étoile, , 638 p., « Les Années cahiers », p. 155.
  23. « Benjamin Prix Louis-Delluc », sur Le Monde, .
  24. « Le Prix Delluc est attribué au Genou de Claire d'Éric Rohmer », sur Le Monde, .
  25. « L'Argent des Autres de Christian de Chalonge obtient le prix Louis-Delluc », sur Le Monde, .
  26. « Une étrange affaire de Pierre Granier-Deferre », sur Le Monde, .
  27. « Le Prix Delluc au film La Diagonale du fou », sur Le Monde, .
  28. « CINÉMA Le prix Louis-Delluc à La Lectrice », sur Le Monde, .
  29. « Le prix Louis-Delluc à Un monde sans pitié d'Eric Rochant », sur Le Monde, .
  30. « Les prix Louis-Delluc », sur Le Monde, .
  31. « Le Prix Louis-Delluc 1991 au réalisateur Alain Corneau », sur Le Monde, .
  32. « CULTURE EN BREF PRIX : le Delluc s'étoffe », sur Le Monde, .
  33. « EN BREF CINEMA: première sélection pour le Prix-Delluc », sur Le Monde, .
  34. « Cinéma: huit candidats pour le Delluc », sur Les Échos, .
  35. « Cinéma : la première liste du prix Louis-Delluc », sur Les Échos, .
  36. « Merci… pour le Prix Louis-Delluc », sur Libération, .
  37. « Intimité de Patrice Chéreau reçoit le prix Louis-Delluc », sur L'Obs, .
  38. a et b « La sélection du Prix Louis-Delluc », sur L'Obs, .
  39. « allocine », sur Allociné.
  40. « allocine ».
  41. a et b « Le prix Louis-Delluc 2006 récompense Lady Chatterley, de Pascale Ferran », sur Le Monde / AFP, .
  42. a et b « Bonello, Godard et Assayas nominés pour le prix Louis-Delluc », sur Les Inrocks, .
  43. a et b « Prix Louis-Delluc 2015 : découvrez les nominations », sur Télérama, .
  44. a et b « Neuf films visent le prix Louis-Delluc 2017 », sur Écran Noir, .
  45. « Le prix Louis-Delluc 2019 décerné à Bruno Dumont pour son film "Jeanne" », sur francetvinfo.fr, consulté le 10 décembre 2019.
  46. « Prix Louis-Delluc 2020 : "Adolescentes" de Sébastien Lifshitz primé, annonce Gilles Jacob », sur franceinter.fr (consulté le ).
  47. « "Onoda" d'Arthur Hariri remporte le prix Louis-Delluc », sur la-croix.com (consulté le ).
  48. « «Saint-Omer» et «Pacifiction» remportent ex æquo le prix Louis-Delluc 2022 », sur liberation.fr (consulté le ).
  49. a et b Voir sur francetvinfo.fr.
  50. a et b « Cinéma : le prix Louis-Delluc couronne "Le Règne animal", de Thomas Cailley », sur Franceinfo.fr,
  51. « Cinéma : six films pour le Delluc », sur Les Échos, .

Annexes[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]

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