Pertinax (empereur romain) — Wikipédia

Pertinax
Empereur romain
Image illustrative de l’article Pertinax (empereur romain)
Buste de Pertinax, Muzeul Național al Unirii, Alba Iulia, Roumanie.
Règne

(2 mois et 27 jours)
Période 2e année des quatre empereurs
Précédé par Commode
Suivi de Didius Julianus
Biographie
Nom de naissance Publius Helvius Pertinax
Naissance
à Alba, Italie
Décès (à 66 ans)
Père Helvius Successus
Épouse Flavia Titiana (v. 180 - 193)
Descendance Publius Helvius Pertinax Junior
Helvia

Publius Helvius Pertinax (latin : Imperator Cæsar Publius Helvius Pertinax[1] Augustus), né le à Alba Pompeia[2], Ligurie, ou possiblement à Peille[3], actuellement en France, et mort le , est un empereur romain, qui régna de janvier à mars 193. S'il ne put réellement affirmer une politique particulière durant son court règne, il passe à la postérité comme un empereur favorable au Sénat et représentant des anciennes vertus romaines.

Biographie[modifier | modifier le code]

Sa carrière avant de devenir empereur est principalement connue par l'Histoire Auguste[4], complétée par le livre II d'Hérodien[5] et l’Épitomé de Cæsaribus d'Aurelius Victor[6]. Sa biographie dans l’Histoire Auguste, ouvrage anonyme inégalement fiable, s'inspire sans doute de l'œuvre perdue de Marius Maximus et la qualité de son information est confirmée en partie par une inscription de Cologne[7].

Né dans la ville d'Alba Pompeia d'un père affranchi, Helvius Successus, enrichi dans la manufacture et le commerce de laine, il commença sa carrière comme grammaticus (professeur de grammaire), puis, désireux de changer de métier et avec le soutien de son patron, il devient officier[8] dans une cohorte en Syrie vers 160. Se distinguant dans la guerre parthique qui suivit de 163 à 166, il est promu plusieurs fois, sert en Bretagne (actuelle Grande-Bretagne) vers 166 puis le long du Danube vers 167, dirige la flotte du Rhin vers 168 et devint procurateur des fondations alimentaires en Italie avant de recevoir un autre poste de procurateur en Dacie en 169.

Victime d'intrigues de cour — selon l'Histoire Auguste — durant le règne de Marc Aurèle, il est rapidement rappelé pour aider Claudius Pompeianus dans les guerres germaniques, notamment après l'invasion de l'Italie du Nord par les Quades. Grâce à ses compétences et au patronage de Pompeianus, il entre au Sénat vers 170 et se voit confier des légions dans les guerres danubiennes. Selon la Chronique d'Eusèbe de Césarée c'est en sa présence qu'aurait eu lieu le « miracle de la pluie » où une armée romaine encerclée fut providentiellement sauvée par un orage. En 175 il fut nommé consul suffect. Il participe alors à la répression de la révolte d'Avidius Cassius ce qui le conduit dans la province de Syrie en (175). Il est ensuite nommé gouverneur de Mésie — supérieure (vers 176-177) et inférieure (vers 177-178) —, des trois Dacies (178-179), puis de Syrie (179).

Pertinax fait partie du groupe des « Amis du prince », composé des gendres et des proches collaborateurs de Marc Aurèle. Marc Aurèle sur son lit de mort (en 180) leur recommande de veiller et de conseiller le jeune empereur Commode. Peu survivront aux purges politiques imposées par Commode[9]. Durant les années 180, il épouse Flavia Titiana, fille du sénateur Flavius Sulpicianus, qui lui donne un fils, également nommé Publius Helvius Pertinax Junior, consul suffect en aux côtés de Quinctus Macer, et une fille, Helvia. Après la conjuration de Lucilla, Perennis le force à se retirer de la vie publique. Pertinax reprend alors les activités de son père en Ligurie.

Trois ans plus tard, après la mort de Perennis, il est rappelé pour éviter une mutinerie militaire en Bretagne. Il y acquiert une réputation de stricte obéissance à la discipline. En 187 il doit quitter la province, officiellement à cause du ressentiment au sein des troupes face à cette discipline.

La fin du règne de Commode le voit parvenir aux plus hautes distinctions. Il est proconsul de la prestigieuse province d'Afrique vers 188-189. Il est préfet de la Ville, c'est-à-dire de Rome, de 190 à 192. Début 192, Commode le prend comme collègue pour le consulat. Lorsque Commode est assassiné le , et sans que son implication dans ce meurtre soit certaine, il apparaît comme l'homme de la situation : les conspirateurs Lætus, préfet du prétoire, et Eclectus lui offrent l'empire le jour même de l'assassinat. Le Sénat le porte au pouvoir le [10].

Devenu empereur, il dépense dans un premier temps beaucoup pour obtenir l'appui des prétoriens, puis il tente de restreindre le train de vie officiel, en vendant des biens acquis par Commode. Surtout il impose aux soldats une stricte discipline, comme il l'a toujours fait. La garde prétorienne est déçue du faible donativum qui lui fut accordé et tente de le remplacer par Falco, mais la tentative échoue.

Pour soutenir l'activité économique, il semble avoir repris une disposition légale d'Hadrien, en autorisant l'occupation des terres en friche, en toute propriété et avec une exonération fiscale de dix ans, sous condition de les cultiver. De plus, il supprime les péages imposés par Commode[11].

Le , un groupe de soldats, furieux de n'avoir reçu que la moitié de leur paye, fait irruption dans le palais et tue Pertinax. Didius Julianus prend le pouvoir, ce qui déclenche une guerre civile pour la succession, finalement remportée par Septime Sévère. Dès son arrivée à Rome, Septime Sévère fait exécuter les soldats meurtriers de Pertinax, et lui organise des funérailles d'État pour son apothéose. Il célèbre également plusieurs années de suite des jeux pour l'anniversaire de sa naissance et de son couronnement. Plus tard, Septime Sévère prit même le surnom de Pertinax[12].

Monnayage[modifier | modifier le code]

Compte tenu de la brièveté de son règne, les monnaies à l'effigie de Pertinax sont rares et ne proviennent que de l'atelier monétaire de Rome[13]. Elles présentent de fins portraits de l'empereur barbu et frisé. Les thèmes sont classiques : l'Abondance, l'Équité, la Providence, les Libéralités (distributions de nourriture) offertes par l'empereur. Plusieurs monnaies furent frappées après sa mort pour marquer son apothéose[14].

Noms et titres[modifier | modifier le code]

Noms successifs[modifier | modifier le code]

  • 126, naît PVBLIVS•HELVIVS•PERTINAX
  • 193, accède à l'Empire : IMPERATOR•CÆSAR•PVBLIVS•HELVIVS•PERTINAX•AVGVSTVS

Titres et magistratures[modifier | modifier le code]

Titulature à sa mort[modifier | modifier le code]

Lors de son assassinat en 193 la titulature de Pertinax était :

Imp. Cæs. P. Helvio/ Pertinaci Aug./ cos. II, pontifici/ maximo, trib. pot.,/ p.p., principi sen., fortissimo duci/ et omnium vir/tu[t]um principi, Capenates fœder./ pr. C. Licinio Sperando. - Dedicata XIII kal. April.,/ cur. P. Sextilio Prospecto / et /. Mucio Muciano qq., / Falcone et Claro cos.

selon l'inscription CIL XI, 3873 découverte à Capène (Étrurie méridionale)

« À l'empereur César Publius Helvius Pertinax Auguste, consul pour la 2e fois, grand pontife, dans sa première puissance tribunitienne, père de la patrie, prince du Sénat, très vaillant chef et prince de toutes les vertus, les habitants de Capène, fédérés, sous la préfecture [d’Étrurie] de Caius Licinius Sperandus. - Dédié le 13 des calendes d'avril par les soins de Publius Sextilius Prospectus et de Lucius Mucius Mucianus, magistrats quinquennaux, sous le consulat de Falco et de Clarus »

Cette base fut donc dédiée le , huit jours avant la mort de l'empereur.

Postérité[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

  1. L'adjectif latin pertinax signifie opiniâtre : Dictionnaire Gaffiot en ligne.
  2. « Pertinax. », sur www.cosmovisions.com (consulté le )
  3. « Peille à visiter (06) | Provence 7 », (consulté le )
  4. Histoire Auguste, traduction de André Chastagnol, éditions Robert Laffont, 1994 (ISBN 2-221-05734-1), pp. 251-275.
  5. Hérodien, traduction de Denis Roques, Histoire des empereurs romains de Marc-Aurèle à Gordien III, Les Belles Lettres, Collection la Roue à livres, Paris, 1990 (ISBN 2251339035), livre II.
  6. Aurelius Victor, Épitomé de Cæsaribus, 18, 4.
  7. Inscription sur une base ensuite creusée pour en faire un sarcophage, Année épigraphique, 1963, 52.
  8. Dion Cassius, livre LXXIII, 3, 1.
  9. Hérodien, I, 4 et II, 1, 4.
  10. Histoire Auguste, « Pertinax », 4:5.
  11. Hérodien, livre II, 4, 6.
  12. Dion Cassius, Histoire romaine, LXXIV, 4-5.
  13. Georges Depeyrot, Le Bas Empire romain, économie et numismatique (284-491), Éditions Errance, 1987, 140 pages (ISBN 2903442401), p. 124.
  14. Henry Cohen, Description historique des monnaies frappées sous l'Empire Romain, Paris, 1892, [1], tome III, pp. 390-396.
  15. Pierre Testud, Rétif de la Bretonne et la création littéraire, Librairie Droz, , 729 p. (lire en ligne), p. 329.
  16. Nicolas Edme Rétif de La Bretonne et Pierre Testud (éd.), Monsieur Nicolas, t. I, Paris, Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », , p. XLVIII-LIII.

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • (de) Géza Alföldy, « P. Helvius Pertinax und M. Valerius Maximianus », Situla, 1974, 14/5, pp. 199-215 repris dans Romische Heeresgeschicte. Beitrage 1962-1985, Amsterdam, 1987, pp. 326-348.
  • (en) Anthony R. Birley, « The Coups d'Etat of the Year 193 », BJ, 1969, 169, pp. 247-280.
  • (en) Anthony R. Birley, « Pertinax and the alimenta », Historia-Augusta-Colloquium 1975/76, Bonn, 1978, pp. 87-90.
  • (it) F. Cassola, « Pertinace durante il principato di Commodo », PP, 1965, 20, pp. 451-477.
  • Hubert Devijver, « Les militiæ equestres de P. Helvius Pertinax », ZPE, 1988, 75, pp. 207-214. [PDF] Lire en ligne.
  • (es) J.A. Garzon, « El emperador Publio Helvio Pértinax en las fuentes. Estado de la cuestion », Bætica, 1984, pp. 195-210.
  • (es) J.A. Garzon, El Emperado Publio Helvio Pértinax y la transformacion politica del año 193, Malaga, 1990.
  • (de) E. Hohl, Kaiser Pertinax und die Thronbesteigung seines Nachfolgers im Lichte der Herodiankritik, Sitzungsberichte der Deutschen Akademie der Wissenschaften 1956, 2, pp. 3-32.
  • (de) H.G Kolbe, « Der Pertinaxstein aus Brühl bei Köln », BJ, CLXII, 1962, pp. 407-420.
  • (es) M. Mayer, « Colonia Helvia Ricina Pertinax. À proposito de CIL IX 5747 », Picus, 27, 2007, pp. 9-21.
  • (es) M. Mayer, « Notas sobre el inicio de la Vita Pertinacis de la Historia Augusta (1, 1-4) », dans A. Cascon Dorado éd., Donum amicitiæ : estudios en homenaje al profesor Vicente Picon Garcia, 2008, Madrid, pp. 489-502.
  • (it) F. Milazzo, « Pertinacis 'Natalis Imperii' », Studi in Onore di Cesare Sanfilippo, 7, Milan, 1987, pp. 439-461.
  • (es) S. Montero, « Materiales para el estudio de la religion y de la politica religiosa del emperador Pértinax », dans Homenaje a José Maria Blazquez, vol. III : Historia de Roma, Madrid, 1996, pp. 147-164.
  • (de) Steve Pasek, Coniuratio ad principem occidendum faciendumque. Der erfolgreiche Staatsstreich gegen Commodus und die Regentschaft des Helvius Pertinax (192/193 n. Chr.).Beiträge zur Geschichte, AVM, München 2013, (ISBN 978-3-86924-405-1).
  • Hans-Georg Pflaum, Les carrières procuratoriennes équestres sous le Haut-Empire romain, no 179.
  • (en) M. Philippides, « Herodian 2.4.1 and Pertinax », Classical World, 1984, 77, pp. 295-297.
  • Gilbert-Charles Picard, « Pertinax et les prophètes de Cælestis », Revue de l'histoire des religions, 155-1, 1959, pp. 41-62. Lire en ligne.
  • (it) Giacomo Pignata, « Cenni sulla carriera militare e politica di Publio Elvio Pertinace », Atti e Memorie dell Soc. Savonese di Storia Patria, 1977, n.s. 11, pp. 7-18.
  • William Seston, « Sur les traces de Marius Maximus. I. Marius Maximus et les consuls en 209 », dans Antiquitas, 4, Beitrage zur Historia-Augusta-Forschung, 3 (B.H.A.C., 1964/1965), Bonn, 1966, pp. 211-219 repris dans Scripta Varia, Rome, 1980, pp. 221-229. Lire en ligne.
  • (it) R. Soraci, « L'opera legislativa di Pertinace », Quaderni Catanesi, 6, 1984, 12, pp. 315-336.
  • (en) A.M. Woodward, « The Coinage of Pertinax », Numismatic Chronicle, 1957, 17, pp. 84-96.
  • Christian Settipani, Continuité gentilice et Continuité familiale dans les familles sénatoriales romaines à l'époque impériale, Linacre College, Oxford University, coll. « Prosopographica & Genealogica », , 597 p. (ISBN 1-900934-02-7)