Peine de mort en Suisse — Wikipédia

En Suisse, la peine de mort est interdite par la Constitution fédérale.

Histoire et abolition[modifier | modifier le code]

La peine de mort en Suisse était exécutée par décapitation (généralement à la guillotine)[1]. La peine de mort pour les crimes de droit commun a été une première fois abolie en 1874, puis réintroduite dans la Constitution à la suite d'un référendum en 1879, la proposition ayant recueilli 52,5 % des voix[2],[3]. L'universitaire Paolo Passaglia relève que « le sujet resta, toutefois, très débattu, et les réserves contre l'application de la peine de mort restèrent très fortes, ce qui est prouvé par le nombre restreint (neuf, au total) des exécutions entre 1879 et 1940 »[3].

En 1938, le peuple adopte par 53,5 % des voix, un nouveau code pénal qui prévoit, entre autres, l'abolition de la peine de mort pour les crimes de droit commun, et entrera en vigueur le [4],[3]. Paolo Passaglia relève que « la majorité était claire, mais loin d'être plébiscitaire, surtout en raison du fait que les rétentionnistes étaient en majorité dans un bon nombre de Cantons, voire dans la plupart de ceux-ci »[3]. La dernière exécution, celle d'Hans Vollenweider, intervient le dans le canton d'Obwald — où la cause rétentionniste avait obtenu près des quatre cinquièmes des suffrages lors du référendum —, plus d'un an avant l'entrée en vigueur de la réforme du Code pénal[3],[5]. Selon Paolo Passaglia, l'abolition de la peine de mort en Suisse « a été le résultat d'une majorité populaire étroite qui a basculé au cours des décennies, grâce à plusieurs facteurs, parmi lesquels figure certainement la raréfaction des exécutions, qui a progressivement privé les rétentionnistes de l'argument selon lequel la peine capitale est un instrument indispensable pour lutter contre la criminalité »[3].

Durant la Seconde Guerre mondiale, 17 personnes, parmi eux des membres de l'armée suisse, des civils ainsi que des étrangers, sont fusillés pour trahison. Cette dernière clause punissable de la peine de mort (droit pénal militaire) est à son tour abolie en 1992[6].

Situation actuelle[modifier | modifier le code]

Aujourd'hui la Suisse est signataire de divers traités interdisant la peine de mort, notamment :

  • Pacte international relatif aux droits civils et politiques - ratifié le
  • Deuxième protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, visant à abolir la peine de mort - ratifié le
    • Troisième rapport présenté par la Suisse au Comité des droits de l'homme (extraits) le .
  • Convention relative aux droits de l'enfant - ratifiée le (signée le )
    • Rapport initial présenté par la Suisse au Comité des droits de l'enfant (extraits) le
  • Les protocoles n°6 (ratifié le , signé le ) et 13 (ratifié le , signé le ) de la Convention européenne des droits de l'homme, relatif à l'abolition de la peine de mort en toutes circonstances ;

La Suisse a voté en 2007 et en 2008 une résolution de l'assemblée générale de l'Organisation des Nations unies appelant à l'abolition universelle de la peine de mort.

En , Genève a accueilli le quatrième Congrès mondial contre la peine de mort.

Le , Paul Koller (ambassadeur suisse pour les questions de droits humains) prend la présidence tournante de la Commission internationale contre la peine de mort.

À l'initiative de la Belgique, du Bénin, du Costa Rica, de la France, du Mexique, de la Mongolie, de la République de Moldova et de la Suisse, le Conseil des droits de l'homme de l'ONU adopte une résolution sur la question de la peine de mort le .

Tentatives de rétablissement[modifier | modifier le code]

En 1979, le Conseil national rejette par 131 voix contre 3 une initiative parlementaire de Valentin Oehen réclamant la réintroduction de la peine de mort pour l'assassinat et la prise d'otages[7].

En 1985, une initiative populaire visant à rétablir la peine de mort pour les trafiquants de drogue n'avait pas recueilli le nombre nécessaire de signatures pour être soumise au vote du peuple[8].

En , une nouvelle initiative populaire visant à rétablir la peine de mort en cas de meurtre ou assassinat accompagné de violences sexuelles est retirée par ses proposants quelques jours après avoir été validée par la Chancellerie fédérale[9].

Exécutions depuis 1848[modifier | modifier le code]

Liste non exhaustive
Criminel Date Méthode(s) Crime(s) Présidence
Joseph Felber Epée Meurtre en ? Constant Fornerod
Heinrich Gotti Meurtre entre 1849 et 1865 de ses sept enfants qu'il a eu avec sa femme. Karl Schenk
Niklaus Emmenegger Meurtre en ? d'un berger pour le voler. Constant Fornerod
Héli Freymond Meurtre en 1867 de sa femme afin de refaire sa vie avec son amante. Jakob Dubs
Ferdinand Gatti Guillotine Meurtre en 1890 d'une institutrice après l'avoir mutilée et violée. Walter Hauser
Johann Keller Meurtre en 1893 de sa maîtresse de vingt-et-un ans à coup de marteau. Karl Schenk
Dominik Abegg Meurtre entre 1874 et 1894 de deux femmes après les avoir violées. Emil Frey
Etienne Chatton Meurtre en 1901 de sa cousine de dix-sept ans d'un coup de hache dans la tête. Joseph Zemp
Matthias Muff Meurtre en 1909 de deux fermiers et de deux domestiques pour effacer ses dettes. Robert Comtesse
Anselme Wütschert Meurtre en 1914 d'une femme de vingt-deux ans en l'égorgeant après l'avoir violée. Giuseppe Motta
Clément Bernet Meurtre en 1924 d'une adolescente de quinze-ans lors d'un cambriolage. Ernest Chuard
Paul Irniger Meurtre en 1933 de deux chauffeurs de taxi et du gendarme venu l'arrêter. Philipp Etter
Hans Vollenweider Meurtre en 1939 d'un chauffeur de taxi, d'un facteur et du policier venu l'arrêter. Marcel Pilet-Golaz
Hermann Grimm 7 décembre 1944 Peloton d'exécution Trahison, collaboration avec l'Allemagne. Walther Stampfli
Walter Laubscher Trahison, collaboration avec l'Allemagne.

Références[modifier | modifier le code]

  1. (de) « Die Geschichte der Todesstrafe in der Schweiz », sur kuhnert.ch (consulté le )
  2. « Votation populaire du 18 mai 1879 », sur Chancellerie fédérale (consulté le )
  3. a b c d e et f Paolo Passaglia, L'abolition de la peine de mort : une étude comparée, Mnemosyne, , 192 p. (lire en ligne), p. 36.
  4. « Votation populaire du 3 juillet 1938 », sur Chancellerie fédérale (consulté le )
  5. « Hans Vollenweider, le dernier exécuté de Suisse », sur rts.ch, (consulté le ).
  6. Lukas Gschwend, « Peine de mort » dans le Dictionnaire historique de la Suisse en ligne, version du .
  7. Jean-Pierre Gattoni, « Le National balaie l'initiative Oehen pour le rétablissement de la peine de mort », Journal de Genève,‎ (lire en ligne)
  8. « Droits politiques », sur admin.ch (consulté le ).
  9. « Fedlex », sur admin.ch (consulté le ).

Voir aussi[modifier | modifier le code]

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Liens externes[modifier | modifier le code]