Natatok Éfaté — Wikipédia

Natatok
Présentation
Fondation (première)
(deuxième)
Président fondateur Jack Kalotiti (1977)
Alfred Carlot (2011)
Positionnement régionaliste

Le Natatok Éfaté est un parti politique des années 1970 au condominium des Nouvelles-Hébrides.

Histoire[modifier | modifier le code]

Les Nouvelles-Hébrides sont une colonie gouvernée conjointement par la France et le Royaume-Uni depuis le début du XXe siècle. À partir des années 1960 et surtout à partir du début des années 1970, plusieurs mouvements et partis politiques émergent dans l'archipel, dont notamment le Vanua'aku Pati (anglophone, protestant, progressiste, indépendantiste) et l'Union des communautés des Nouvelles-Hébrides (UCNH, francophone, opposée à une indépendance trop rapide du pays).

En amont des élections législatives de novembre 1977, le parti Natatok Éfaté est fondé le avec pour président Jack Kalotiti. Le nom du parti signifie « natifs de l’île d'Éfaté », et il revendique une autonomie politique locale. Il se crée en premier lieu en opposition aux prises de position du Vanua'aku Pati : Ce dernier demande que la colonie obtienne immédiatement l'indépendance, et entend supprimer le français de l'enseignement pour ne conserver que l'anglais. Le Natatok Éfaté defend le maintien du bilinguisme dans les écoles, et prône une période d'autonomie politique « comme étape d’apprentissage incontournable sur la voie menant à la démocratie » avant toute indépendance. Il rassemble à la fois des anglophones et des francophones, mais est proche politiquement des partis francophones en raison de l'hostilité du Vanua'aku Pati envers eux et envers la langue française. Dans le cadre de la campagne électorale, le Vanua'aku Pati qualifie d'ailleurs le Natatok Éfaté d'« ennemi du peuple à la solde du gouvernement français et des colons français voleurs de terre »[1],[2]. Le Natatok est par ailleurs l'un des divers partis régionalistes associés aux grands partis francophones, les autres étant notamment le Nagriamel et le Tabwemassana sur l'île d'Espiritu Santo, et le mouvement John Frum et le parti Kapiel sur l'île de Tanna.

Avec sept candidats, le parti remporte cinq des trente-neuf sièges à l'Assemblée représentative des Nouvelles-Hébrides. Les indépendantistes ayant boycotté le scrutin, les divers partis francophones, dits « partis modérés » par opposition aux indépendantistes radicaux, forment un gouvernement de coalition, le premier gouvernement responsable et autochtone de l'histoire de la colonie. George Kalsakau, du Natatok Éfaté, est choisi comme ministre-en-chef, même s'il est le seul représentant de ce parti au gouvernement[3],[4]. Le Vanua'aku Pati ne reconnait pas ce gouvernement, et tente de proclamer son propre gouvernement à travers les îles du pays. En réponse, le , Jack Kalotiti pour le Natatok et Vincent Boulekone pour l'Union tan (le principal parti à l'Assemblée et au gouvernement) mènent une manifestation de centaines de francophones devant les locaux du Vanua'aku Pati à Port-Vila ; ils parviennent à empêcher les indépendantistes à hisser leur drapeau dans la capitale, et entonnent la Marseillaise pour célébrer leur victoire symbolique[5]. George Kalsakau poursuit néanmoins les négotiations avec le Vanua'aku Pati en vue d'un gouvernement d'union nationale[6]. Celles-ci aboutissent en décembre 1978, date à laquelle le ministre-en-chef cède son poste à Gérard Leymang ; le gouvernement Leymang inclut Maxime Carlot, ministre de l'Intérieur, comme représentant du Natatok[7].

Pour les élections législatives de novembre 1979, la quasi-totalité des « partis modérés » (francophones) s'unissent en un « Parti fédéral des Nouvelles-Hébrides ». L'indépendance à court terme semblant désormais inévitable, les modérés demandent un État fédéral avec une forte décentralisation et dévolution du pouvoir aux différentes îles, tandis que le Vanua'aku Pati mène campagne pour un État unitaire et centralisé sous son autorité[8]. Le Natatok Éfaté s'associe au Parti fédéral[9] mais présente ses propres candidats aux élections, uniquement à Éfaté : quatre candidats, dont Jack Kalotiti et George Kalsakau. Dans le cadre de l'entente entre les modérés, le Parti fédéral ne présente pas de candidats contre eux, mais les candidats du Natatok sont tous battus par des candidats du Vanua'aku Pati[10]. Le Vanua'aku Pati remporte les élections, forme seul un gouvernement sans les modérés, et mène le pays à l'indépendance en  ; les Nouvelles-Hébrides deviennent le Vanuatu.

En 1981, les partis modérés fusionnent en une Union des partis modérés. Le , toutefois, le ministre des Affaires étrangères Alfred Carlot inaugure au village d'Erakor une refondation du parti Natatok, avec pour nom complet le parti Natatok démocrate populaire et autochtone (PNDPA ou Natatok)[11]. Il se présente comme un parti chrétien qui se soucie de l'intérêt de la nation vanuataise dans son ensemble, bien qu'étant ancré sur l'île d'Éfaté[12]. Il obtient deux sièges aux élections législatives de 2012[13], et un seul à celles de 2016, qu'il perd aux élections de 2020[14],[15]. Il semble avoir ensuite disparu à nouveau, ne présentant aucun candidat aux élections de 2022[16].

Sièges au Parlement[modifier | modifier le code]

Sièges obtenus à l'Assemblée représentative par la première version du parti Natatok, durant l'ère coloniale :

Élection Sièges
1977
5  /  39
1979
0  /  39

Sièges obtenus au Parlement de Vanuatu par la nouvelle version du parti Natatok aux élections auxquelles il présente des candidats :

Élection Sièges
2012
2  /  52
2016
1  /  52
2020
0  /  52

Références[modifier | modifier le code]

  1. Zorian Stech, Une confrontation comme nulle autre dans le Pacifique : la France, la Grande- Bretagne et la vie politique au condominium franco-britannique des Nouvelles-Hébrides (1945-1980), thèse de doctorat, université de Montréal, avril 2017, pp.206-207
  2. Jean-Michel Charpentier, Le pidgin bislama(n) et le multilinguisme aux Nouvelles-Hébrides, Peeters Publishers, 1979, p.152
  3. Stech, p.225
  4. (en) James Jupp et Marian Sawer, "New Hebrides 1978-79: Self-Government by Whom and for Whom?", The Journal of Pacific History, vol. 14, n°4, 1979
  5. Stech, p.219
  6. (en) "An opening in Hebrides?", Pacific Islands Monthly, juin 1978, p.20
  7. (en) "New Hebrides: Government of national unity", Pacific Islands Monthly, février 1979, pp.81-82
  8. (en) Roland Rich, Luke Hambly et Michael G. Morgan, Political Parties in the Pacific Islands, Australian National University Press, 2008, p.120
  9. Stech, p.263
  10. Stech, pp.xiii-xviii
  11. (en) Howard Van Trease, "Vanuatu in review", The Contemporary Pacific, vol. 24, n°2, automne 2012, p.428
  12. (en) "Natatok President unveils party constitution", The Vanuatu Daily Post, 28 juillet 2011
  13. "Coalition builder game", Pacific Institute of Public Policy, 6 novembre 2012
  14. (en) "General elections 2020 (unofficial results), Vanuatu Daily Post
  15. (en) Résultats officiels des élections de 2020, Commission électorale de Vanuatu
  16. (en) Résultats officiels des élections de 2022, Commission électorale de Vanuatu