Mouvement républicain populaire — Wikipédia

Mouvement républicain populaire
Image illustrative de l’article Mouvement républicain populaire
Logotype officiel.
Présentation
Présidents Voir liste
Fondation
Fusion de Parti démocrate populaire
Union populaire républicaine
Disparition (fusion dans le CD)
(mise en sommeil)
Fusionné dans Centre démocrate
Positionnement Centre[1]
Idéologie Démocratie chrétienne[2]
Europhilie[2]
Catholicisme social
Couleurs rouge

Le Mouvement républicain populaire (MRP) est un parti politique français ayant existé de 1944 à 1967. Le MRP se présente comme un mouvement démocrate-chrétien et centriste, europhile et partisan d'une vision non-conservatrice et sociale du catholicisme politique.

Héritier du Parti démocrate populaire et de mouvements régionaux comme l'Union populaire républicaine (Alsace) et l'Union républicaine lorraine, il se voulait le parti des résistants démocrates-chrétiens qui souhaitaient dépasser le clivage droite-gauche et surtout le parti de la « fidélité » au général de Gaulle.

L'apparition du MRP s'inscrit dans le contexte plus général d'apparition de partis démocrates-chrétiens en Europe de l'Ouest après la Seconde Guerre mondiale (Allemagne de l'Ouest, Italie, Belgique, Pays-Bas, Autricheetc.).

Il fusionne avec d'autres partis en 1966 pour devenir le Centre démocrate, qui est fondé par Jean Lecanuet, arrivé troisième à l’élection présidentielle de l’année précédente.

Histoire[modifier | modifier le code]

Origine[modifier | modifier le code]

Durant l'Occupation, certains résistants comme Pierre Brossolette et Jean Moulin envisagent la création d'un parti unique issu de la Résistance, afin de remplacer les anciens partis politiques. Ce projet, qui avait sans doute l'accord du général Charles de Gaulle, est abandonné à la suite de la mort de ces deux hommes et de l'importance prise par le PCF.

Plusieurs options s'ouvrent donc au sortir de la Seconde Guerre mondiale aux démocrates-chrétiens :

  • reconstruction, et élargissement lié à la Résistance sur la base des anciens partis, tels que le Parti démocrate populaire ou Jeune République[3] ;
  • constitution d'un parti travailliste, regroupant catholiques, socialistes, et résistants[4] ;
  • parti d'inspiration chrétienne avec la mise en avant des forces catholiques non politiques associées à la Résistance (CFTC, ACJF) et donc non associées aux anciens partis.

C'est la dernière solution soutenue par Georges Bidault qui l'emporte[5]. La deuxième solution appuyée par Eugène Rigal est rejetée au premier congrès constitutif national du MRP les 25 et . L'option travailliste[6], inspirée aussi par Gilbert Dru, est jugée trop à gauche, et ne prospère pas[7].

Objectif à la création du parti[modifier | modifier le code]

Le Mouvement républicain populaire se présente comme un mouvement centriste qui vise à proposer une vision non-conservatrice et sociale du catholicisme politique.

Il se constitue à l’automne 1944, sur les bases de l’ancien Parti démocrate populaire de l’entre-deux-guerres, et du Mouvement républicain pour la libération[8], initié dès le printemps de la même année par Gilbert Dru et Maurice-René Simonnet, ainsi que de mouvements régionaux comme l'Union populaire républicaine (Alsace) et l'Union républicaine lorraine. Il se dote d'un hebdomadaire, Forces nouvelles, qui paraît à partir de 1945.

Il se présente comme un parti démocrate-chrétien non confessionnel, mais il entre plusieurs fois en conflit avec les autres partis (radicaux, SFIO, PCF) sur la question de la laïcité. Le mouvement recrute parmi les catholiques sociaux, les syndicalistes chrétiens, essentiellement issus de la CFTC, et les mouvements de jeunesse catholique[9]. L’abbé Pierre a été député MRP de 1945 à 1951.

Au sein du tripartisme de la IVe République[modifier | modifier le code]

Avec des résultats électoraux allant de 24 % des voix en 1945 à 28 % en , le MRP devient rapidement, avec le PCF et la SFIO, un des trois grands partis qui dominent la vie politique nationale dans les premières années de la IVe République : le MRP est le deuxième parti à l’Assemblée constituante de 1945 et à l’Assemblée nationale élue en , le premier lors de l’élection de la deuxième Assemblée constituante, en . La clef de son succès réside dans le fait qu’il attire le nouvel électorat féminin et l’électorat conservateur, rendu orphelin en raison du discrédit jeté sur la droite à la chute du régime de Vichy, et qu’il apparaît comme le parti de la fidélité à de Gaulle (bien que celui-ci n’en ait jamais été membre), face aux deux partis marxistes (socialiste et communiste).

Après l’élection de la première Assemblée constituante, les trois grands partis forment un gouvernement toujours présidé par de Gaulle. Mais celui-ci est en désaccord avec la tournure que prend le débat parlementaire et démissionne le . Par la suite, les socialistes et les communistes, qui disposent d’une courte majorité absolue à l’Assemblée, imposent un projet de Constitution instaurant un régime parlementaire fondé sur une assemblée législative toute-puissante et qui réduit les prérogatives de l’exécutif. De Gaulle et le MRP s’opposent à ce projet, qui est finalement rejeté par 53 % des voix.

Une nouvelle Assemblée constituante est élue, mais cette fois-ci, le MRP dépasse le PCF et devient le premier parti de France. Désormais, socialistes et communistes, qui n’ont plus de majorité, doivent composer avec le MRP. Les débats constitutionnels reprennent, mais finalement, le MRP se révèle hostile à toute réduction significative du rôle du parlement. Charles de Gaulle, en prononçant le discours de Bayeux, où il défend un système présidentiel, cherche à faire pression sur le MRP pour l’obliger à rompre avec les socialistes et les communistes. Le MRP condamne la tactique de De Gaulle, et approuve avec les deux autres grands partis, une nouvelle Constitution, qui instaure un régime parlementaire. De Gaulle rompt définitivement avec les partis politiques et raille la Quatrième République, née de l’approbation d’une Constitution soutenue par à peine 53 % des voix, avec une abstention importante, ce qu'il résume en une formule cinglante : « Cette Constitution dont on peut dire qu'un tiers des électeurs l'a approuvée, un tiers l'a rejetée et un tiers l'a ignorée. »

Après le référendum sur la Constitution, une nouvelle Assemblée nationale est élue en . Les communistes obtiennent le premier groupe parlementaire, le MRP le deuxième.

Membre de la coalition de la Troisième force[modifier | modifier le code]

En 1947, les communistes, exclus du gouvernement, entrent dans l’opposition. De l’autre côté, de Gaulle forme le RPF. Les deux partis semblent menacer aux extrêmes la survie même du régime, puisque les élections municipales de 1947 indiquent qu’ils peuvent rassembler la majorité des voix. Les socialistes et les démocrates-chrétiens décident alors d’élargir la coalition gouvernementale aux radicaux, l’UDSR et les modérés : c’est la Troisième Force, coalition hétéroclite prise entre deux feux, dont le seul objectif commun est la survie de la IVe République.

Le MRP devient alors une force politique centrale du nouveau régime, et compte parmi ses rangs trois présidents du conseil : Robert Schuman, Georges Bidault et Pierre Pflimlin. Les démocrates-chrétiens participent à tous les gouvernements la IVe République et, malgré l’instabilité politique du régime, leurs ministres restent en place de longues années : Schuman au Ministère des Affaires étrangères (1948-1953), Jean-Marie Louvel au Ministère de l’Industrie et du Commerce (1950-1954). Auguste Champetier de Ribes fut président du Conseil de la République et Pierre Schneiter, président de l'Assemblée nationale.

Le MRP joue un rôle central dans la construction européenne. Schuman et Bidault font les premiers pas avec d’autres dirigeants démocrates-chrétiens européens, comme Konrad Adenauer (RFA), Alcide De Gasperi (Italie). En 1950, Schuman propose la création de la CECA, fondement de la construction européenne. Résolument européen donc, le MRP soutient la CED et ne pardonne jamais à Pierre Mendès France l’indifférence affichée par le gouvernement, qui laisse le projet mourir au Parlement en 1954.

À partir de 1947, le MRP recule sur le plan électoral : son score est divisé par deux lors des législatives de 1951 et de 1956. Après la fondation du RPF, il n’apparaît plus comme le parti de la fidélité à de Gaulle, alors que la droite modérée traditionnelle se regroupe autour du CNI. Membre du Cartel d'action sociale et morale, une sorte de ligue de tempérance, le député de l'Ain Pierre Dominjon (MRP) obtient toutefois, après le vote de la loi Marthe Richard (1946) fermant les maisons closes, celui de la loi du 16 juillet 1949 sur les publications destinées à la jeunesse.

Face au retour de Charles de Gaulle[modifier | modifier le code]

Le MRP est divisé sur la question algérienne : Georges Bidault, par exemple, est un ardent défenseur de l'Algérie française, alors que Pierre Pflimlin, éphémère président du conseil, est un partisan des négociations avec le FLN. Le parti soutient malgré tout unanimement le retour de De Gaulle au pouvoir en 1958 et fait campagne pour le oui lors du référendum sur la Constitution de la Ve République. Quatre ministres entrent au gouvernement de De Gaulle en . Ils sont cinq lorsque de Gaulle est élu président de la République. Mais malgré le soutien au président de Gaulle, le MRP poursuit sa perte de vitesse électorale lors des élections législatives de 1958, où il obtient pour la première fois un score inférieur à 10 % et perd un tiers de ses députés.

En 1962, en désaccord avec la politique européenne de De Gaulle, qui refuse le modèle fédéraliste, les cinq ministres démocrates-chrétiens démissionnent et le MRP entre dans l’opposition[10]. Il rejette le projet de réforme constitutionnelle de 1962 sur l’élection du président de la République au suffrage universel direct. Mais le oui l’emporte lors du référendum convoqué par de Gaulle et le MRP obtient des résultats médiocres aux législatives de 1962. Le MRP présente un candidat à l’élection présidentielle de 1965, Jean Lecanuet, représentant d’un centre très critique avec le gaullisme. Il mène une campagne moderne, sur le modèle de celle de Kennedy en 1960, sans hésiter à recourir à la télévision comme nouvel instrument de campagne. Lecanuet obtient un score honorable, 15,6 % des voix, et parvient, avec François Mitterrand, à mettre de Gaulle en ballotage, alors que celui-ci était certain de sa réélection dès le premier tour.

Après le succès électoral du MRP en 1965, Lecanuet décide de fonder un nouveau parti, le Centre démocrate, devenu Centre des démocrates sociaux en 1976, parti fondateur de l’UDF en 1978.

Organisation[modifier | modifier le code]

Dirigeants[modifier | modifier le code]

Présidents[modifier | modifier le code]

Secrétaires généraux[modifier | modifier le code]

Résultats électoraux[modifier | modifier le code]

Élections législatives[modifier | modifier le code]

Année Voix % Sièges Rang Gouvernement
1945 4 580 222 23,9
150  /  586
2e De Gaulle II et Gouin
juin 1946 5 586 213 28,2
166  /  586
1er Bidault I
novembre 1946 4 988 609 25,9
173  /  627
2e Blum III, Ramadier I et II, Schuman I, Marie, Schuman II, Queuille I, Bidault II et III, Queuille II, Pleven I et Queuille III
1951 2 369 778 12,5
95  /  625
4e Pleven II, Faure I, Pinay, Mayer, Laniel I et Laniel II, Mendès France et Faure II
1956 2 366 321 10,9
83  /  626
4e Opposition, Gaillard, Pflimlin et De Gaulle III
1958 1 858 380 9,1
57  /  579
6e Debré, Pompidou I et Opposition
1962 1 665 695 9,1
36  /  482
4e Opposition

Élections présidentielles[modifier | modifier le code]

Année Candidat Voix % Rang
1947 Auguste Champetier de Ribes 242 27,41 2e
1953 Georges Bidault 143 15,58 4e
1958 Aucun candidat
1965 Jean Lecanuet 3 777 120 15,57 3e

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Laurent de Boissieu, « Mouvement Républicain Populaire (MRP) », sur france-politique.fr, .
  2. a et b (en) Nick Startin, « Maastricht, Amsterdam and beyond: The troubled evolution of the French right », dans Helen Drake, French Relations with the European Union, Routledge, , p. 64.
  3. Cette option est soutenue par Auguste Champetier de Ribes, Raymond Laurent, Paul Simon, les frères Coste-Fleuret. Elle est repoussée à la fois par Georges Bidault, et les forces catholiques non politiques associées à la résistance qui reproche à plusieurs des parlementaires leur vote du 10 juillet 1940, et par le fait que les partis lié à la Troisième république sont discrédités aux yeux de l'opinion.
  4. Cette option plus sérieuse que la précédente, inspirée du Labour est soutenue par des éléments de la Résistance intérieure : le Groupe de la rue de Lille, qui sont à l'origine des Cahiers du travaillisme français, et de l'hebdomadaire Carrefour. Au même moment, à Alger, la même option est défendue par Robert Prigent et Marcel Poimbœuf.
  5. Son autorité n'est pas contestée. Il est alors président du Conseil national de la Résistance.
  6. Cette option reviendra régulièrement avec la Troisième force ou encore la tentative de Gaston Defferre en 1964-1965.
  7. La SFIO ne se saborde pas, et les cadres du MRP ne souhaitent pas une fusion, mais uniquement une coalition gouvernementale.
  8. Cette appellation n'est pas retenue car trop proche du mouvement de résistance Mouvement de libération nationale.
  9. Jean-François Sirinelli (dir.), La France de 1914 à nos jours, Paris, PUF Premier Cycle, , 238-239 p..
  10. René Rémond, De Gaulle et les forces politiques françaises, in La politique étrangère du général de Gaulle, Graduate Institute Publications, Genève, 1985, 208 p.

Annexes[modifier | modifier le code]

Sources primaires[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Émile-François Callot, Le Mouvement républicain populaire : origine, structure, doctrine, programme et action politique, Paris, Marcel Rivière, , 443 p. (présentation en ligne), [présentation en ligne], [présentation en ligne], [présentation en ligne].
  • Jean-Claude Delbreil, Centrisme et Démocratie-chrétienne en France : le Parti démocrate populaire des origines au MRP (1919-1944), Paris, Publications de la Sorbonne, coll. « France XIX-XX » (no 30), , 481 p. (ISBN 2-85944-182-4, présentation en ligne).
  • Jean-Dominique Durand, L'Europe de la Démocratie chrétienne, Bruxelles, Éditions Complexe, 1995, 382 p.
  • Joseph Hours, « Les origines d’une tradition politique. La formation en France de la doctrine de la Démocratie chrétienne et des pouvoirs intermédiaires », in Robert Pelloux (dir.), Libéralisme, traditionalisme, décentralisation, Armand Colin, 1952, p. 79‑123.
  • Pierre Letamendia (préf. François Bayrou), Le Mouvement républicain populaire : histoire d'un grand parti français, Paris, Beauchesne, coll. « L'Histoire dans l'actualité », , IX-381 p. (ISBN 2-7010-1327-5, présentation en ligne).
  • Émile Poulat, « La démocratie mais chrétienne », in Église contre Bourgeoisie (chapitre 4), Tournai, Castermann, 1977, p. 136‑172.
  • Émile Poulat, « Pour une meilleure compréhension de la Démocratie chrétienne », Revue d’Histoire Ecclésiastique, t. LXX, n° 1, 1975, p. 5‑38
  • Jean-Marie Mayeur, Des partis catholiques à la Démocratie chrétienne, XlXe‑XXe siècles, Paris, Armand Colin, 1980, 246 p.
  • Jean‑Marie Mayeur, Catholicisme social et Démocratie chrétienne : principes romains, expériences françaises, Paris, Éditions du Cerf, 1986, 287 p.
  • René Rémond (dir.), Forces religieuses et attitudes politiques dans la France contemporaine, Paris, Presses de la Fondation Nationale des Sciences Politiques, 1965, 397 pages.
  • René Rémond, « Droite et gauche dans le catholicisme français contemporain », Revue Française de Science Politique, 1958, p. 529‑544.
  • René Rémond, « Le vocabulaire de la Démocratie chrétienne », in Formation et aspects du vocabulaire politique français, XVII-XXe siècles, Cahiers de Lexicologie, 1969, t. II, pp. 87‑92. Ce bref article présente de manière très suggestive l’évolution de la perception de la société par la Démocratie chrétienne à travers l’étude de son champ lexical.
  • René Rémond, « Le cas de la France », in L’Église et la Démocratie chrétienne, Communio, 1987, n° 2‑3, p. 89‑98
  • Anne Sa'adah, « Le Mouvement républicain populaire et la reconstitution du système partisan français, 1944-1951 », Revue française de science politique, no 1 (37e année),‎ , p. 33-58 (lire en ligne).

Liens externes[modifier | modifier le code]