Martin Bidouré — Wikipédia

Martin Bidouré
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Monument à Martin Bidouré à Barjols.
Nom de naissance Jean Louis Ferdinand Martin
Naissance
Barjols
Décès (à 26 ans)
Aups
Nationalité Française Drapeau de la France
Profession
Autres activités
Héros et martyr de la résistance varoise au coup d’État du 2 décembre 1851

Martin Bidouré, pseudonyme de Jean Louis Ferdinand Martin, né à Barjols le et mort à Aups le , est un héros[1] et martyr[2] de la résistance varoise au coup d’État du 2 décembre 1851, pris par les soldats et fusillé deux fois[3].

Biographie[modifier | modifier le code]

Jean Louis Ferdinand Martin, dit Martin Bidouré, est le fils de François Martin, scieur de long originaire d’Apinac et installé à Barjols, et de Magdelaine Agnelly, née à Barjols dans une famille de cultivateurs[4].

En 1851, âgé de 26 ans, Martin est peigneur de chanvre à Barjols, tout comme son frère François qui a 32 ans[5]. Tous deux sont républicains dans ce gros bourg de 3302 habitants où se trouvent 12 chambrées et une société secrète de La Nouvelle Montagne (parti républicain clandestin) qui est abonnée au journal Le Peuple[6].

La nouvelle du coup d’Etat arrive à Barjols le jeudi 4 décembre et une nouvelle municipalité est mise en place le samedi 6. Marcel et son frère aîné font partie de la colonne insurrectionnelle qui part pour Salernes le dimanche 7, forte de 500 hommes[7] et formée des détachements de Barjols, Varages, La Verdière et Pontevès[8].

Le mardi 9, alors que le gros des insurgés est dans Aups sous le commandement de Camille Duteil[Note 1], Martin fait partie du détachement qui, sous le commandement de Pierre Arambide[Note 2], prend position sur les hauteurs de Tourtour afin de contrôler la route de Draguignan. Le mercredi 10 au matin, Martin est choisi pour porter un message à Duteil. Pour effectuer cette mission, il utilise le cheval du maréchal ferrant de Tourtour[9] et deux pistolets prêtés par Joseph Vincens de Barjols. Il arrive à la mairie d’Aups, on lui remet le billet de réponse de Duteil[Note 3] et il repart aussitôt à cheval vers Tourtour.

Pendant ce temps, la colonne militaire, commandée par le colonel Trauers et le préfet Pastoureau, surprend à Tourtour le contingent insurgé, qui se débande. Le détachement militaire est composé de 600 hommes du 50e régiment d’infanterie de ligne et de 35 gendarmes à cheval[10],[11]. Poursuivant sa route vers Aups, la troupe rencontre Martin qui galope vers Tourtour. Les gendarmes l’interceptent et le conduisent devant le préfet qui l’interroge, lui prend ses pistolets et en décharge un sur le côté de la tête. Il est ensuite sabré par les gendarmes et laissé pour mort sur le bord de la route. Peu après, le détachement militaire arrive à Aups, attaque les insurgés et les met en déroute[12].

Martin, qui n’est que blessé, parvient à se trainer jusqu’au château de la Baume, près de Tourtour. Le fermier le recueille et le soigne, mais le soir même, ayant appris la déroute des insurgés à Aups et craignant de se compromettre, il va faire sa déclaration au maire qui s’empresse d’écrire au préfet. Par ordre de l’autorité, le pauvre Martin est saisi le vendredi 12 et conduit à l’hôpital d’Aups, pour y être fusillé à nouveau le dimanche 14[13]. Il marche à la mort avec un grand courage[14]. Le même jour, Joseph Vincens, capitaine d'infanterie en retraite et insurgé de Barjols, se donne la mort dans une ferme de La Verdière, craignant d’être compromis parce qu’il a prêté à Martin les deux pistolets trouvés sur lui[15],[Note 4].

Son frère aîné François fait partie des 72 républicains Barjolais qui sont poursuivis[16],[17], mais qui sont indemnisés par la République en 1882[18],[19]. Sous la Troisième République, transcendant les divisions entre opportunistes, radicaux ou socialistes, Martin fait dorénavant partie de la mythologie républicaine du « Var rouge »[12]. Le célèbre Martin Bidouré génère jusqu’à aujourd’hui un culte fortement enraciné dans les hautes terres varoises[20].

Hommages[modifier | modifier le code]

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Pierre Cochet de Savigny, Notice historique sur la révolution du mois de décembre 1851, Éditions Léautey, 1852.
  • Noël Blache, Histoire de l’insurrection du Var en décembre 1851, Éditions Armand Le Chevalier, 1869.
  • Pierre Larousse, Grand dictionnaire universel du XIXe siècle, Administration du grand dictionnaire universel, 1878.
  • René Merle, Martin Bidouré, fusillé deux fois, Bulletin de l’Association 1851-2001, numéro 12, octobre-novembre 2000.

Liens externes[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

  1. Camille Duteil, rédacteur au journal Le Peuple à Marseille, arrive à Brignoles le 5 décembre. Désigné chef de la colonne le 6 décembre, « commandant général des forces démocratiques du Var », il n’en a pas les qualités : son indécision et son manque d’envergure mèneront les insurgés à la défaite.
  2. Pierre Arambide, ouvrier révoqué de l’arsenal, puis employé au journal Le Démocrate du Var qu’il a diffusé largement, enfin contremaître à la mine argentifère de Cogolin, est un ardent militant démocrate. Désigné « colonel du 5e bataillon révolutionnaire », il n'en a pas les qualités.
  3. Selon le rapport du capitaine Houlez qui commande les gendarmes à cheval, le message écrit est le suivant : « Ordre au colonel Arambide de se rendre de suite à Aups avec sa troupe. Le général en chef, signé : Duteil. »
  4. Il s'agit de la ferme la Vincence située entre La Verdière et Montmeyan.
  5. Une souscription nationale est lancée en 1901, à laquelle répondent positivement plusieurs communes du département. La réalisation du monument est confiée au peintre et sculpteur Jules Récubert, originaire de Barjols, également auteur de la fontaine Raynouard et des monuments aux morts de Barjols et Pontevès.

Références[modifier | modifier le code]

  1. Irène Astier, Réflexions au sujet de Martin Bidouré, terroriste ou résistant varois, Annales du Sud-Est Varois, Tome 5, 1980.
  2. Jean-Claude Bouvier et Jean-Marie Guillon, Le Panthéon provençal : noms de rues et mise en scène du passé, Actes du colloque d’onomastique d’Aix-en-Provence, juin 2010.
  3. Jules Claretie, La débâcle, Éditions de la Librairie Centrale, 1878.
  4. Naissance de Jean Louis Ferdinand Martin, Registre de l’état civil de la commune de Barjols, Cote 7E 12_12 1823-1826, Archives départementales du Var.
  5. Naissance de Louis François Martin, Registre de l’état civil de la commune de Barjols, Cote 7E 12_11 1818-1822, Archives départementales du Var.
  6. Frédéric Négrel, Clandestinité et réseau républicain dans le Haut-Var. La société secrète montagnarde d'Artignosc (1849-1851), Mémoire de maîtrise sous la direction de Jean-Marie Guillon, Association 1851 pour la mémoire des résistances républicaines, 2001.
  7. J. G. Prat, Les exploits du 2 décembre, Éditions Ernest Leroux, 1873.
  8. Frédéric Négrel, Quelques éléments sur la résistance de décembre 1851 à Barjols, Conférence donnée à Barjols le 10 mai 2019.
  9. Nicole et André Cabau, Tourtour : chronique d’un village du Haut-Var, Éditions Serre, 1989.
  10. Pierre Cochet de Savigny, Notice historique sur la révolution du mois de décembre 1851, Éditions Léautey, 1852.
  11. Patrick Lagoueyte, Le coup d’État du 2 décembre 1851, Éditions du CNRS, 2016.
  12. a et b René Merle, Martin Bidouré, fusillé deux fois, Bulletin de l’Association 1851-2001, numéro 12, octobre-novembre 2000.
  13. Décès de Ferdinand Martin, Acte établi par la mairie d'Aups et légalisé par la préfecture du Var, Registre de l'état civil de Barjols, Cote 7E 12_20 1849-1952, Archives départementales du Var.
  14. Pierre Larousse, Grand dictionnaire universel du XIXe siècle, Administration du grand dictionnaire universel, 1878.
  15. Frédéric Négrel, Morts pour la République, Bulletin de l’association 1851, numéro 24, juillet 2003.
  16. Jean-Claude Farcy et Rosine Fry, Poursuivis à la suite du coup d’État de , Centre Georges Chevrier, Université de Bourgogne/CNRS), 2013.
  17. Adolphe Robert, Statistique pour servir à l'histoire du , Éditions Gaittet, 1869.
  18. Noël Blache, Histoire de l’insurrection du Var en , Éditions Le Chevalier, Paris, 1869.
  19. Yannick Rossignol, Les insurgés Varois de 1851 à travers leur indemnisation, Éditions Serre, 2004.
  20. André Jassaud, Aups (Var) et la mémoire de 1851, Association 1851, Actes des journées d’étude, 1997.
  21. Monument des insurgés de 1851 et de la Résistance, monument à Martin Bidouré sur le site Dossiers inventaire de la région PACA.
  22. Le monument à Martin Bidouré sur le site "À nos grands hommes".
  23. Le monument à Martin Bidouré, Revue du Louvre et des musées de France, numéro 31, 1981.
  24. Maurice Agulhon, "Mémoire et tourisme. Les monuments provençaux de 1851", Revue d'histoire du XIXe siècle, numéro 22, 2001.
  25. a et b Jean-Marie Guillon, Une histoire sans légende, Bulletin de l’Association 1851, numéro 22, janvier 2003.
  26. Alexandre Briano, Toulon et ses rues d'ardents républicains, Éditions Les Presses du Midi, 2014.
  27. Chanson Martin Bidouré sur le site d’Éric Dussart.
  28. Chanson La légende de Martin Bidouré sur le site 1851.
  29. Martin Bidouré o lo cop d’Estat de 1851 sur le site de la Bibliothèque nationale de France.
  30. Notice de Gaston Beltrame sur le site de Marius Autran.