Marguerite de Bourgogne (v. 1290-1315) — Wikipédia

Marguerite de Bourgogne
Illustration.
Sceau de Marguerite de Bourgogne, attaché à une charte datant d'août 1311.
Fonctions
Reine consort de Navarre

(9 ans, 7 mois et 7 jours)
Couronnement
en la cathédrale de Pampelune
Prédécesseur Blanche d'Artois
Successeur Clémence de Hongrie
Reine de France

(5 mois et 1 jour)
Prédécesseur Jeanne de Navarre
Successeur Clémence de Hongrie
Biographie
Dynastie Maison capétienne de Bourgogne
Date de naissance v. 1290
Date de décès (à 24 ou 25 ans)
Lieu de décès Château-Gaillard (France)
Père Robert II de Bourgogne
Mère Agnès de France
Conjoint Louis X
Enfants Jeanne II de Navarre

Marguerite de Bourgogne (v. 1290-1315)
[Note 1]
Reines de France et de Navarre

Marguerite de Bourgogne (v. 1290Château-Gaillard, ) est reine de Navarre et de France par son mariage avec le roi Louis X le Hutin.

Biographie[modifier | modifier le code]

Famille et mariage[modifier | modifier le code]

Marguerite de Bourgogne est la seconde fille de Robert II, duc de Bourgogne, et d'Agnès de France[1], et donc, par sa mère, petite-fille de Louis IX, dit saint Louis[2]. Elle est la sœur, notamment, des ducs Hugues V et Eudes IV, ainsi que de Jeanne, reine de France en 1328 par son mariage avec le futur roi Philippe VI de Valois[1].

Le mariage par contrat de Marguerite avec Louis, fils aîné du roi de France Philippe IV le Bel et de la reine de Navarre Jeanne Ire, est négocié successivement à l'abbaye de Longchamp le , puis à Vincennes le . Le , à Corbeil, Marguerite épouse formellement Louis, devenu roi de Navarre le précédent sous le nom de Louis Ier[3]. C'est donc comme reine de Navarre qu'elle assiste en janvier 1308 à Boulogne-sur-Mer au mariage de sa belle-sœur, Isabelle de France avec Édouard II d'Angleterre[4].

De son mariage avec Louis le Hutin est issue une fille, Jeanne[5], écartée de la succession au trône de France, qui ne recouvre qu'une partie de ses droits sur la Navarre en 1328, par un arrangement entre son mari Philippe d'Évreux et le roi de France Philippe VI de Valois.

Adultère et incarcération[modifier | modifier le code]

Au mois d', Philippe IV le Bel fait arrêter ses trois brus, Marguerite, Jeanne et Blanche de Bourgogne. Elles sont accusées d'adultère avec deux jeunes écuyers, Philippe et Gauthier d'Aunay. Ce scandale est aujourd'hui connu sous le nom d'affaire de la tour de Nesle.

Sous la torture, les deux écuyers auraient avoué leurs relations avec les princesses. Marguerite et Blanche sont finalement convaincues d'adultère. Jeanne de Bourgogne est reconnue complice, mais est innocentée de l'accusation d'adultère[6]. À Pontoise, Philippe et Gauthier d'Aunay sont suppliciés le Vendredi saint, , sur la place du Grand Martroy[7]. Ils meurent roués, écorchés vifs, châtrés et décapités, après quoi leurs dépouilles sont suspendues à un gibet[8]. Marguerite, enfermée dans la forteresse de Château-Gaillard avec sa belle-sœur Blanche, y est tenue au secret.

Mort[modifier | modifier le code]

Marguerite devient reine de France à la mort de son beau-père Philippe IV le Bel, survenue le . Elle reste cependant enfermée dans la forteresse de Château-Gaillard, son époux, le roi Louis X, ne levant pas la sanction prise à son encontre pour adultère.

Marguerite de Bourgogne meurt à Château-Gaillard le . Seule une chronique contemporaine, la Chronique métrique, donne quelques détails : Marguerite aurait été enfermée dans une partie élevée du château (contrairement à Blanche, internée dans une partie basse). Selon cette chronique, elle y serait morte de maladie, sans autre précision, peut-être à cause des mauvaises conditions de détention ou du froid[9].

Le moment et les circonstances de sa mort ont suscité bien des spéculations.

En effet, malgré cet adultère, il était difficile pour Louis X d'obtenir l'annulation de son mariage car celui-ci avait déjà donné un enfant. En outre, le trône papal était vacant depuis la mort de Clément V, survenue le 20 avril 1314.

Quoi qu'il en fut, la mort de Marguerite intervint opportunément pour Louis X[10].

Marguerite est inhumée dans l'église du couvent de Cordeliers Saint-Éloi à Vernon (anciennement église des Frères Mineurs).

Alors qu'il était encore engagé dans les liens du mariage avec Marguerite, Louis X a choisi pour nouvelle épouse Clémence de Hongrie, qui débarque en Provence au début d' et épouse le roi à Troyes le 19 du même mois.

De nombreux historiens se sont penchés par la suite sur la vie et la mort de Marguerite de Bourgogne et ont apporté des précisions nouvelles, non confirmées par les écrits contemporains[11]. Giovanni Villani écrit au quatorzième siècle dans sa Nuova Cronica qu'elle périt étouffée avec une serviette. François de Belleforest, en 1579, écrit qu'elle fut emmurée. Henri Martin, en 1836, écrit qu'elle fut étouffée entre deux matelas. De nombreuses théories existent actuellement[12]. Selon Christian Bouyer, « elle meurt [...], peut-être assassinée, plus sûrement des suites du traitement qu'on lui a fait subir »[8], alors que Michel Mourre dans son Dictionnaire d'histoire, soutient que Louis X « la fit étrangler l'année suivante », thèse reprise par Maurice Druon dans son œuvre transposée à la télévision Les Rois maudits.

Postérité[modifier | modifier le code]

Fiction[modifier | modifier le code]

Mademoiselle George interprétant le rôle de Marguerite de Bourgogne, dans la pièce de théâtre La Tour de Nesle de Dumas Et Gaillardet (1832).
  • son personnage apparaît dans la saison 2 de la série Knightfall, sortie en 2019.

De ces romans il ressort que l'adultère des cousines de Bourgogne aurait été dénoncé par Isabelle de France, reine consort d'Angleterre, qui aurait vu à la ceinture des frères d'Aunay des aumônières qu'elle avait auparavant offertes à ses belles-sœurs. C'est Alexandre Dumas qui, le premier, indique que Marguerite de Bourgogne attirait ses futurs amants dans la tour de Nesle, au bas de laquelle on retrouvait le matin des corps de jeunes hommes. Mais la légende de la tour de Nesle est plus ancienne puisque déjà en 1460, François Villon se fait écho de « Buridan, jeté dans un sac dans la Seine », sans pour autant faire le lien avec Marguerite de Bourgogne. Là encore, aucun de ces éléments ne repose sur des écrits d'époque.

Peinture[modifier | modifier le code]

Le scandale de la Tour de Nesle, et, surtout, la pièce de théâtre La Tour de Nesle de Gaillardet et Dumas, inspirent au XIXe siècle quelques peintres d'histoires. Un an après les débuts de la pièce, Joseph-Désiré Court présente au Salon de 1833 Marguerite de Bourgogne, reine de France, ordonnant l'arrestation du ministre Marigny[13]. Dans ce tableau, la reine est représentée seule, à une croisée[14].

En 1840, Charles-Alexandre Debacq expose au Salon La Tour de Nesle. Des pêcheurs trouvent un cadavre au pied de cette tour[15]. En 1842, le peintre exploite le même sujet en présentant Marguerite de Bourgogne et Blanche, sa sœur, convaincues d'adultère, sont conduites au Château-Gaillard, forteresse de Normandie[16].

En 1845, Frédéric Peyson expose au Salon Marguerite de Bourgogne écoutant Buridan (ou Marguerite de Bourgogne et Buridan dans la prison de la Tour de Nesle), dont il fera don l'année suivante au musée Fabre[17]. Le même musée conserve aussi de Peyson une Marguerite de Bourgogne assise, non datée [18].

Chanson[modifier | modifier le code]

Dans le troisième couplet de la chanson Ah ! Si vous connaissiez ma poule (publiée en 1938, paroles d'Albert Willemetz et René Toché, sur une musique de Charles Borel-Clerc), Maurice Chevalier compare le tempérament sexuel débordant de sa « poule » à celui de Marguerite de Bourgogne :

« Marguerite de Bourgogne, auprès d'elle,

N'avait que nib comme tempérament.

Il faut l'entendre quand elle appelle

Son petit Momo au grand moment.

Son corps frissonne d'une façon telle

Que la maison tremble également.

Et ça vous explique

Les secousses sismiques

Dont les journaux parlaient récemment. »

Ascendance[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

  1. Armoiries de Marguerite de Bourgogne : écu mi-parti aux armes de France et de Navarre et blason de la première maison des ducs de Bourgogne.

Références[modifier | modifier le code]

  1. a et b Jiri Louda et Michael MacLagan, Les Dynasties d’Europe, Bordas, (ISBN 2-04-027115-5), tableau 74.
  2. Louda et MacLagan 1995, tableau 64.
  3. Christian Bouyer, Dictionnaire des reines de France, Librairie académique Perrin, (ISBN 2-262-00789-6), p.192.
  4. Gaëlle Audéon, Philippe le Bel et l’Affaire des brus, 1314, Paris, Editions L’Harmattan, « Collection Historiques, série Travaux », , 260 p. (ISBN 978-2-34320371-3), p. 65.
  5. Louda et MacLagan 1995, tableau 65.
  6. Ramirez de Palacios 2022, p. 21.
  7. Ramirez de Palacios 2022, p. 22.
  8. a et b Bouyer 1992, p. 193.
  9. Ramirez de Palacios 2022, p. 25, 311-312.
  10. Ramirez de Palacios 2022, p. 26.
  11. Ramirez de Palacios 2022, p. 311-313.
  12. Éric Le Nabour, Les Rois maudits, l'enquête historique, Paris, Perrin, , 296 p. (ISBN 2-262-02396-4), p. 156.
  13. Explication des ouvrages de peinture, sculpture, architecture, gravure et lithographie des artistes vivans [sic], exposés au Musée royal, le 1er mars 1833, Paris, imprimerie Vinchon, (lire en ligne), p. 229, no 2981.
  14. C. V., « Exposition au Louvre (huitième article) », Journal des artistes et des amateurs, 7e année, vol. 1, no 16 (21 avril 1833), p. 275-276 [lire en ligne].
  15. Explication des ouvrages de peinture et dessins, sculpture, architecture et gravure des artistes vivans [sic] exposés au Musée royal, le 5 mars 1840, Paris, Vinchon, (lire en ligne), p. 45, no 381.
  16. Explication des ouvrages de peinture, sculpture, architecture, gravure et lithographie des artistes vivants, exposés au Musée royal, le 15 mars 1842, Paris, imprimerie Vinchon, (lire en ligne), p. 58, no 496.
  17. Notice de l'œuvre, Musée Fabre, Montpellier (page consultée le 8 décembre 2017).
  18. Notice de l'œuvre, Musée Fabre, Montpellier (page consultée le 8 décembre 2017).

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Gaëlle Audéon (préf. Éliane Viennot), Philippe le Bel et l'affaire des brus, 1314, Paris, Editions L’Harmattan, « Collection Historiques, série Travaux », , 260 p. (ISBN 978-2-343-20371-3, EAN 9782343203713, présentation en ligne).
  • Gaëlle Audéon, A la Cour de Philippe le Bel, 1305-1313, Paris, Editions L’Harmattan, « Collection Historiques, série Travaux », , 296 p. (ISBN 978-2-343-22920-1, présentation en ligne).
  • Gaëlle Audéon, « Le banquet des dames offert par Philippe le Bel à la Pentecôte 1313 », 2020, 2023, [En ligne] Academia.edu
  • Gaëlle Audéon, « Marguerite de Bourgogne », notice biographique, sur Dictionnaire des Femmes de l'ancienne France [en ligne], Société internationale pour l'étude des femmes de l'Ancien Régime (SIEFAR), 2020.
  • (en) Elizabeth A. R. Brown, « Philip the Fair and His Family: His Sons, Their Marriages, and Their Wives », Medieval Prosopography, 2017, vol. 32, p. 125-185.
  • (en) Elizabeth A. R. Brown, « Philip the Fair’s Sons: Their Statues, and Their Landed Endowments », Medieval Prosopography, 2017, vol. 32, p. 186-227
  • Bruno Ramirez de Palacios, Jeanne de France et Philippe d'Evreux : rois de Navarre à défaut d'être rois de France, Le Chesnay, Hallebarde, , 420 p. (ISBN 978-2-9540585-6-6).

Voir aussi[modifier | modifier le code]

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Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]