Marcel Brindejonc des Moulinais — Wikipédia

Marcel Brindejonc des Moulinais
Marcel Brindejonc des Moulinais

Naissance
Légué (Plérin)
Décès (à 24 ans)
Vadelaincourt
Mort au combat
Origine Drapeau de la France France
Grade Lieutenant
Années de service 19131916
Conflits Première Guerre mondiale
Distinctions Légion d'honneur
Croix de guerre 1914-1918
Ordre de Sainte-Anne
Ordre de Dannebrog
Ordre de Vasa
Mort pour la France
Hommages Rue Brindejonc-des-Moulinais

Marcel-Georges Brindejonc des Moulinais, né le au Légué à Plérin (Côtes-du-Nord) et mort le à Vadelaincourt (Meuse), est un aviateur français.

Biographie[modifier | modifier le code]

Enfance[modifier | modifier le code]

Fils de Georges-Jean Brindejonc des Moulinais, capitaine d'infanterie, et de Blanche-Marie-Amélie Merlin, famille nantaise de marins et armateurs originaire d'Irlande, il est instruit chez les frères de Saint-Jean-Baptiste-de-la-Salle, puis au collège de Saint-Servan (Ille-et-Vilaine). De 1901 à 1912, il habita la maison dite « Le Clos des Tilleuls » à Pleurtuit (dans le Clos Champion, au 41 de la rue Saint-Guillaume). Ses vacances d'été se passèrent le plus souvent avec ses cousins germains dans le vieux manoir familial du Val à Pleurtuit, près duquel ses parents possédaient la propriété du Pontouraude. Bachelier en 1910, il obtint la même année la licence de mathématiques spéciales à l'université de Rennes.

Une vocation : voler[modifier | modifier le code]

Sa vocation de pilote surgit lors des premiers vols auxquels il assista à Dinan et à Dinard pendant l'été de 1909, et surtout pendant l'été de 1910 en regardant voler à Dinard Roland Garros (qui atteignit là en la vitesse de 150 kilomètres à l'heure sur une Demoiselle).

En 1910, on diagnostiqua une appendicite, qui le fit souffrir jusqu'à sa mort.

Brindejonc des Moulinais en 1910.

En , il acheta à Issy-les-Moulineaux un appareil Demoiselle d'Alberto Santos-Dumont, au prix de 4 000 francs. Il le remonta à Pau où il s'inscrivit à l'école d'aviation. Il fit là ses premiers essais le . Il obtint son brevet de pilote civil le (no 448). En juin, il participa au meeting d'Abbeville (Somme) sur un monoplan Blériot. Après un entretien avec Gabriel Voisin à Issy-les-Moulineaux, il remplaça bientôt son premier appareil par un Borel pour gagner sa vie, et rembourser le prêt que lui avait consenti sa famille (4 000 francs), en participant à des exhibitions à Pau, Toulouse, Carcassonne, Perpignan, Foix. En , il revint à Paris : l'entreprise Morane l'engagea comme pilote. À cette époque, il fit une chute de cinquante mètres, son appareil s'étant accroché à une grue par un de ses tendeurs ; il fut soigné à l'Hôpital Boucicaut à Paris. Le , il va faire une chute de 100 mètres, se crashant sur le toit de l’École des Minimes avant de finir dans un champ de maraîcher, alors qu'il tentait le record de hauteur[1].

Il devint vite un aviateur renommé, participant à de nombreuses épreuves. La foule assista avec allégresse au spectacle offert par Marcel Brindejonc des Moulinais à Kercorb (Aude) le . Il était à Juvisy-sur-Orge en . Le , au circuit d'Anjou (comptant pour le grand prix de l'Aéro-Club de France), où il fallait boucler sept fois Angers-Cholet-Saumur (1 100 kilomètres), malgré le mauvais temps qui cloua au sol la plupart des pilotes à Avrillé, et malgré l'opposition du constructeur de son avion (Léon Morane), il décolla. Il se classa troisième sur son Morane-Saulnier (équipé d'un moteur Gnome de 80 chevaux), après avoir brillamment diminué son écart avec Roland Garros, qui fut néanmoins le seul à pouvoir faire le troisième et dernier tour. Marcel Brindejonc des Moulinais devint célèbre dans toute la France, son nom étant associé à celui de Roland Garros. Le , il tenta en vain de remporter la coupe Pommery sur le trajet Paris-Berlin, mais un incident mécanique l'immobilisa en Westphalie.

L'année 1913 fut la plus glorieuse. Son raid Paris-Londres-Bruxelles-Paris (1 040 kilomètres sur un monoplan Morane-Saulnier C, avec double traversée de la Manche) se déroula du 25 au . À Londres, il fut condamné à une amende de mille francs avec sursis pour avoir survolé la ville. Durant son raid Paris-Bordeaux-Burgos-Madrid (arrivée le 1er avril)-Barcelone-Perpignan-Lyon-Paris, du au , réalisé avec un appareil monoplan Morane-Saulnier à moteur Gnome[2], les conditions climatiques furent rudes : « Quel voyage terrible ! Combien j'ai pu souffrir ! On ne peut l'imaginer ! » écrivit-il.

La prestigieuse Coupe Pommery était le trophée donné entre 1909 et 1913, deux fois par an (avant le et avant le ), à l'aviateur qui parcourait la plus grande distance en un jour (puis en deux jours en 1913). Marcel Brindejonc des Moulinais fit plusieurs tentatives infructueuses en 1912 et 1913 : Paris-Berlin le , Villacoublay-Berlin le , tentative impossible après la bénédiction de son Morane-Saulnier à Villacoublay par l'évêque de Versailles, Charles Gibier, le , Paris-Münster le , Brème-Bruxelles-Londres du 9 au . Malgré la tricherie de Maurice Guillaux, qui prétendit avoir parcouru 1 386 kilomètres le , Marcel Brindejonc des Moulinais remporta de fait la célèbre coupe le sur les 1 382,8 kilomètres (longueur homologuée, à la vitesse de 170 kilomètres à l'heure, les arrêts étant décomptés) de Paris (Villacoublay, départ à 3 h 37) à Varsovie (arrivée 14 heures et 18 minutes plus tard). En Pologne, il continua sur son Morane-Saulnier H (monoplan biplace, le pilote étant à l'arrière, avec moteur Gnome de quatre-vingts chevaux) dans un circuit des capitales d'Europe (un peu plus de 4 800 kilomètres) entre le et le  : Varsovie-Dwinsk ()-Saint-Pétersbourg ()-Reval ()-Stockholm ()-Copenhague ()-La Haye (1er juillet)-Paris (Villacoublay, )[3]. Pour franchir les 300 kilomètres de la mer Baltique, Marcel Brindejonc des Moulinais avait obtenu de la marine russe, grâce au prince Liben, que huit torpilleurs fussent placés le tous les dix-huit milles entre l'île Argo et la capitale suédoise. L'accueil fut partout triomphal[4]. L'ovation fut exceptionnelle à Villacoublay, où il arriva un peu après quatre heures de l'après-midi, escorté de Corbeaulieu à Villacoublay par quatre monoplans. Il fut reçu à l'hôtel de ville de Paris. Les journaux du monde entier louèrent l'audace du jeune Breton. Quantité de lettres de félicitation avaient la simple adresse : « Brindejonc des Moulinais, France ».

Il fut fait chevalier de la Légion d'honneur le [5]; il avait vingt et un ans et il était le plus jeune légionnaire de France. Le , il avait reçu la grande médaille d'or de l'Aéro-Club de France. Le , il reçut la médaille de l'Académie des sports. Il avait été décoré à Saint-Pétersbourg (par le grand-duc Alexandre) de l'ordre de Sainte-Anne, à Stockholm de l'ordre de Gustave Vasa et à Copenhague (le par le roi) de l'ordre de Daneborg.

En vol.

Le , il sortit vainqueur du match contre Edmond Audemars et Maurice Guillaux à Juvisy-sur-Orge, pour le prix de l'Essor, une épreuve de vitesse ascensionnelle organisée par le journal L'Auto. Le , il parcourut sans incident les mille kilomètres de Marseille à Dinard, en passant par Albi et Poitiers. Le 1er septembre, il vola de Dinard à Deauville, puis gagna Nantes, Royan et Agen (845 kilomètres). Du 27 au , lors des épreuves de la coupe Gordon-Bennett à Reims, il remporta le concours de vitesse, et se classa deuxième au concours de hauteur avec passager.

Pilote de guerre[modifier | modifier le code]

Marcel Brindejonc des Moulinais s'apprêtant à partir en reconnaissance. À ses pieds, les cinq bombes qu'il va lancer (1914).

Appelé à accomplir son service militaire, il fut incorporé le au 1er groupe aéronautique à Versailles. Le , il fut nommé caporal, et affecté au 2e groupe d'aviation à Lyon.

Il fut autorisé à participer à quelques épreuves civiles. Le , il fit Madrid-Vitoria-Bordeaux-Marseille (1 083 kilomètres) en douze heures et cinquante-quatre secondes. Le , il fit Marseille-Monaco (210 kilomètres) en trois heures et neuf minutes. Le , il remporta le prix du meilleur temps sur Madrid-Monaco. Le , il participa à l'épreuve de Monaco (Coupe Schneider) ; volant sur un Morane-Saulnier, il dut abandonner. Le il fait effectuer à Marcel Merat son troisième vol à bord du biplan Dorand[6]

Son avancement dans l'armée fut rapide : caporal aviateur à l'escadrille DO 22 lorsque la guerre éclata en , sergent le , sous-lieutenant le , lieutenant le . Il reçut la croix de guerre le .

Le , le caporal Marcel Brindejonc des Moulinais rejoignit à Stenay (Meuse) l'escadrille DO 22 (4e armée) qui volait sur biplan Dorand DO.1 conçu par le capitaine polytechnicien Émile Dorand. Dès le , il observa l'avancée des armées allemandes qui laissaient derrière elles des villages en feu. Le soir du , il expliqua au général Foch, qui commandait la 5e armée française, ce qu'il venait de découvrir concernant la marche sur Reims de la 3e armée allemande (général von Hausen). Ses observations pour le général Foch se poursuivirent les jours suivants ; il volait avec le capitaine Pujo.

Le , pendant la bataille de la Marne, le sergent Marcel Brindejonc des Moulinais signala par trois fois qu'il existait un trou entre les armées allemandes vers le camp de Mailly. Il eut du mal à convaincre. Le renseignement fut de la plus haute importance. L'espace libre permit le succès de la contre-offensive française. Le , le général Joffre fit enfin publier un communiqué de victoire : « Notre victoire s'affirme de plus en plus complète. Partout l'ennemi est en retraite. »

Après la première bataille de Champagne, sa santé devint de plus en plus mauvaise. Une crise d'entérite le terrassa le . Il fut contraint de se reposer en Bretagne, et d'accepter une affectation à l'arrière. Le , il fut chef pilote à l'école Morane-Saulnier du Bourget. Cette situation loin du front l'affligea tant qu'il demanda, en vain, à passer dans l'infanterie.

Le , le lieutenant Marcel Brindejonc des Moulinais rejoignit comme pilote l'Escadrille 23 (en) du capitaine Robert de Beauchamp. Il y effectua des missions de chasse, mais surtout des « missions spéciales ». Sa santé restait néanmoins mauvaise. Peu après son retour, au crépuscule du , Maxime Lenoir et lui abattirent un Fokker E.I à Souilly-Étain. Le matin du 1er août, il abattit un appareil ennemi « ridiculement surpris » et « tiré à bout portant ».

Mort pour la France[modifier | modifier le code]

Volant haut, son avion camouflé fut abattu par erreur par deux Nieuport français dans l'après-midi du à Vadelaincourt, près de Verdun (Meuse)[7]. Le lieutenant Marcel Brindejonc des Moulinais, célibataire âgé de vingt-quatre ans, fut d'abord inhumé à Souilly (Meuse), puis le au cimetière de Pleurtuit. Il fut cité à l'ordre de l'armée à titre posthume : « Officier aussi brave que modeste, incarnant en lui toutes les qualités qui font le héros simple et accompli. » Il avait déjà été cité à l'ordre de l'armée le et le .

Le capitaine de Beauchamp, qui fut tué le , lui rendit ainsi hommage : « Brindejonc, c'est l'homme au panache, c'est le symbole léger, vivant, c'est la beauté, l'honneur qui passe très haut, au-dessus de la vie. »

Distinctions[modifier | modifier le code]

Anecdote[modifier | modifier le code]

Le , Brindejonc est le premier aviateur étranger à comparaître devant la justice anglaise pour non-respect de la réglementation aérienne britannique, s'étant rendu coupable d'avoir survolé une zone interdite et d'avoir omis de signaler son arrivée par les airs dans le pays[9]. Une méconnaissance de la réglementation qui aurait pu lui coûter le trophée Geisler, gagné le : l’Aéro-Club royal de Grande-Bretagne lui retirant sa victoire compte tenu des infractions mentionnées plus haut, avant de revenir sur sa décision le , sous la pression d'autres aviateurs[10].

Hommages[modifier | modifier le code]

Plusieurs villes possèdent une rue Brindejonc-des-Moulinais : Nantes, Rennes,Toulon, Toulouse, Le Mans, Vélizy-Villacoublay (un des berceaux de l'aéronautique française), Plérin, Dinard , Pleurtuit.

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Sources[modifier | modifier le code]

  • Thierry Le Roy, Les Bretons et l'aéronautique des origines à 1939, Rennes, Presses universitaires de Rennes, coll. « Histoire », , 530 p. (ISBN 978-2-86847-656-2).
  • Jean Goüin de Roumilly, Un Breton sublime – Brindejonc des Moulinais, Imprimerie cornouaillaise, Quimper, 1930, réédition augmentée de 200 photographies, 2010, éditions Bellus, cf.article du 8/01/2011 dans Ouest France
  • Guerre Aérienne illustrée (qui publia le journal de bord de Marcel Brindejonc des Moulinais).
  • Gilbert Broyelle, Brindejonc des Moulinais – Pionnier de l'Aviation 1892-1916, album (dessins d'Alain Goutal) édité pour le 100e anniversaire de la naissance de l'aviateur, grâce aux archives familiales et aux recherches de Suzanne Guidon, 1992.

Références[modifier | modifier le code]

  1. Le 12 novembre 1911 dans le ciel : Brindejonc des Moulinais s’écrase mais a la vie sauve
  2. Le dans le ciel : Le monoplan de Brindejonc des Moulinais arrive à Madrid
  3. Carte du circuit suivi, Le Petit Parisien, Paris, 26 juin 1913, quotidien (ISSN 0999-2707), https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5647437.langFR
  4. "Brindejonc est de retour!", En Envor, consulté le 10 juillet 2013
  5. « Cote LH/366/36 », base Léonore, ministère français de la Culture
  6. Ensemble de document du lot 89 livres et manuscrits chez Pierre Bergé & Associés à Paris, vente du 22 mars 2017, souvenir de Marcel Merat
  7. Fiche de décès sur le site Mémoire des Hommes [1]
  8. « Recherche - Base de données Léonore », sur www.leonore.archives-nationales.culture.gouv.fr (consulté le )
  9. Le 15 mai 1913 dans le ciel : Comparution de Brindejonc des Moulinais devant la justice anglaise Air-journal.fr 15 mai 2013
  10. Le 11 novembre 1913 dans le ciel : Brindejonc des Moulinais est finalement déclaré vainqueur du trophée Geisler Air-journal.fr 11 novembre 2012

Liens externes[modifier | modifier le code]