Livre de Dede Korkut — Wikipédia

Héritage de Dede Qorqud/Korkyt Ata/Dede Korkut : la culture, les légendes populaires et la musique liées à cette épopée *
Image illustrative de l’article Livre de Dede Korkut
Dede Korkut sur un timbre azéri de 1999.
Pays * Drapeau de l'Azerbaïdjan Azerbaïdjan
Drapeau du Kazakhstan Kazakhstan
Drapeau de la Turquie Turquie
Liste Liste représentative
Année d’inscription 2018
* Descriptif officiel UNESCO

Le Livre de Dede Korkut (ou « Livre du grand-père Korkut » ; azéri : Kitabi Dədə Qorqud, کیتابی دده قورقود ; turc : Dede Korkut Kitabı ; turkmène : Gorkut-ata) est une des plus fameuses fables épiques des Turkmènes ou des turcs oghouzes. En 2000, Kitab-i Dede Qorqud a reçu à l'occasion de son 1300e anniversaire le prix littéraire de l'année par l'UNESCO.

L'héritage de Dede Qorqud/Korkyt Ata/Dede Korkut : la culture, les légendes populaires et la musique liées à cette épopée est inscrit sur la liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l'humanité le [1].

Origine et synopsis de l'épopée[modifier | modifier le code]

Dede Korkut est un dastan héroïque (légende), également appelé Oghouznameh parmi le peuple turc-Oghouz, qui commence en Asie centrale, se poursuit en Anatolie et concentre l'essentiel de son action dans le Caucase azerbaïdjanais[2].  Selon Barthold, "il n'est pas possible de supposer que ce dastan aurait pu être écrit ailleurs que dans le Caucase"[3].

Pour les peuples turcophones, en particulier ceux qui s'identifient comme Oghouz, il s'agit du principal dépositaire de l'identité ethnique, de l'histoire, des coutumes et des systèmes de valeurs des peuples turcophones à travers l'histoire. Il commémore les luttes pour la liberté à une époque où les Turcs Oghouz étaient un peuple rassembleur, bien qu'il "soit clair que les récits ont été mis dans leur forme actuelle à une époque où les Turcs d'Oghouz ne se considéraient plus comme des Oghuz"[3].  À partir du milieu du Xe siècle, le terme « Oghuz » a été progressivement remplacé chez les Turcs eux-mêmes par « Turcoman » (Turkmène) ; ce processus a été achevé au début du XIIIe siècle. Les Turcomans étaient ces Turcs, principalement mais non exclusivement Oghouz, qui avaient adopté l'Islam et commencé à mener une vie plus sédentaire que leurs ancêtres. Au XIVe siècle, une fédération d'Oghuz, ou, comme ils s'appelaient à cette époque, de tribus turcomanes, qui s'appelaient eux-mêmes Ak koyunlu, fonda une dynastie qui dirigea l'est de la Turquie, l'Azerbaïdjan, l'Irak et l'ouest de l'Iran[3].

Contenu[modifier | modifier le code]

Les douze histoires qui constituent l'essentiel de l'œuvre ont été écrites après la conversion des Turcs à l'islam, et les héros sont souvent décrits comme de bons musulmans, tandis que les méchants sont qualifiés d'infidèles. Le personnage de Dede Korkut, c’est-à-dire "Grand-père Korkut", est un devin et un barde de renommée qui sert à relier les histoires, et le treizième chapitre du livre rassemble les paroles qui lui sont attribuées. "Dans les dastans, Dede Korkut apparaît sous le nom de aksakkal [littéralement "la barbe blanche", le dieu respecté], le conseiller ou le sage, résolvant les difficultés rencontrées par les membres des tribus[4]. Parmi la population, les aksakals respectés sont sages et savent comment résoudre les problèmes ; parmi les achiks [récitants de dastans], ils sont généralement appelés dede [grand-père]. Dans le passé, ce terme était désigné comme ancien de la tribu et utilisé dans les familles ; dans de nombreuses localités d'Azerbaïdjan, il remplace ata [ancêtre ou père]. L'historien Rachid al Din Hamadani (décédé en 1318) affirme que Dédé Korkout était une personne réelle et a vécu 295 ans ; qu'il est apparu à l'époque du souverain Oghuz Inal Syr Yavkuy Khan, par qui il avait été envoyé comme ambassadeur auprès du Prophète; qu'il est devenu musulman; qu'il donnait des conseils au Grand Khan des Oghouz, assistait à l'élection du Grand Khan et donnait des noms à des enfants[3].

Tradition manuscrite[modifier | modifier le code]

Depuis le début du XVIIIe siècle, le livre de Dede Korkut a été traduit en français, anglais, russe et hongrois[5]. Cependant, ce n’est que lorsque H. F. Von Diez, qui publia une traduction partielle en allemand de Dede Korkut en 1815, s’inspira d’un manuscrit découvert à la Bibliothèque royale de Dresde, que Dede Korkut est devenu largement connu en Occident[6]. Le seul autre manuscrit de Dede Korkut a été découvert en 1950 par Ettore Rossi dans la bibliothèque du Vatican[7]. Jusqu'à ce que Dede Korkut soit transcrit sur papier, les événements qui y sont décrits ont survécu dans la tradition orale, au moins des IXe et Xe siècles. Le chapitre "Bamsi Beyrek" de Dede Korkut conserve presque textuellement l'immensément populaire dastan Alpamych d'Asie centrale, datant d'une époque encore plus ancienne. Les histoires étaient écrites en prose, mais parsemées de passages poétiques. Des recherches récentes menées par des spécialistes turcs et turkmènes ont révélé que la variante turkmène du livre de Dede Korkut contient seize histoires, qui ont été transcrites et publiées en 1998[8].

Datation de la composition[modifier | modifier le code]

L'œuvre est à l'origine une série d'épopées racontées oralement et transférées au fil des générations avant d'être publiées sous forme de livre. Il existe de nombreuses versions rassemblées des histoires. On pense que les premières versions étaient en vers naturel, car le turc est une langue agglutinante, mais qu'elles se sont progressivement transformées en combinaisons de vers et de prose à mesure que les éléments islamiques ont affecté le récit au fil du temps.

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. « Trente-et-un nouveaux éléments inscrits sur la Liste représentative », sur UNESCO, (consulté le )
  2. «Китаби деде Коркуд», sur archive.is,‎ (consulté le )
  3. a b c et d Lewis, Geoffrey, ed. (1974), The Book of Dede Korkut. Harmondsworth, UK: Penguin Books
  4. « Archive of Turkish Oral Narrative •• Türk Öykürleri Sandığı », sur aton.ttu.edu (consulté le )
  5. Bentinck, Histoire Genealogique des Tatars, 2 vols. (Leiden, 1726)
  6. Abu Al Ghazi Bahadur, A History of the Turks, Moguls, and Tatars, Vulgarly called Tartars, Together with a Description of the Countries They Inhabit, 2 vols. (London, 1730)
  7. (de) SLUB Dresden, « Kitab-i Dedem Korkut - Mscr.Dresd.Ea.86 », sur Bibliothèque d'État et universitaire de Saxe à Dresde (consulté le )
  8. « DigiVatLib », sur digi.vatlib.it (consulté le )

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • (fr) Le Livre de Dede Korkut dans la Langue de la Gent Oghuz, récit de la Geste Oghuz, de Kazan Bey et autres, traduit du turc à partir des manuscrits originaux du Vatican et de Dresde et présenté par Louis Bazin et Altan Gökalp, préface de Yachar Kemal, in coll. : « NRF, L’Aube des Peuples », (Paris, 1998), 256 pp., 23 cm. [Ed. : Gallimard]. (ISBN 2-07-074276-8)
  • (en) Geoffrey Lewis (Ed.), The Book of Dede Korkut, Harmondsworth, Penguin, 1974, (ISBN 0-14-044298-7)
  • (en) H. B. Paksoy, D. Phil., « Introduction to DEDE KORKUT », Soviet Anthropology and archeology, Vol. 29, No. 1. été 1990.
  • (en) Michael E. Meeker, « The Dede Korkut Ethic », International Journal of Middle East Studies,vol. 24, n° 3, 1992, p. 395-417

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]

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