Les Poissons et le Cormoran — Wikipédia

Les Poissons et le Cormoran
Image illustrative de l’article Les Poissons et le Cormoran
Gravure de Pierre Quentin Chedel d'après Jean-Baptiste Oudry, édition Desaint & Saillant, 1755-1759

Auteur Jean de La Fontaine
Pays Drapeau de la France France
Genre Fable
Éditeur Claude Barbin
Lieu de parution Paris
Date de parution 1678
Chronologie

Les Poissons et le Cormoran est la troisième fable du livre X de Jean de La Fontaine situé dans le second recueil des Fables de La Fontaine, édité pour la première fois en 1678.

Texte de la fable[modifier | modifier le code]

IL n’était point d’étang dans tout le voisinage
Qu’un Cormoran n’eût mis à contribution.
Viviers et réservoirs lui payaient pension :
Sa cuisine allait bien ; mais, lorsque le long âge
Eut glacé le pauvre animal,
La même cuisine alla mal.
Tout Cormoran se sert de pourvoyeur[N 1] lui-même.
Le nôtre un peu trop vieux pour voir au fond des eaux,
N’ayant ni filets ni réseaux,
Souffrait une disette extrême.
Que fit-il ? Le besoin, docteur en stratagème,
Lui fournit celui-ci. Sur le bord d’un étang
Cormoran vit une Écrevisse.
Ma commère, dit-il, allez tout à l’instant
Porter un avis important
À ce peuple ; Il faut qu’il périsse :
Le maître de ce lieu dans huit jours pêchera :
L’Écrevisse en hâte s’en va
Conter le cas : grande est l’émute[N 2].
On court, on s’assemble, on députe
À l’Oiseau : Seigneur Cormoran,
D’où vous vient cet avis ? quel est votre garant ?
Êtes-vous sûr de cette affaire ?
N’y savez-vous remède ? et qu’est-il bon de faire ?
Changer de lieu, dit-il. Comment le ferons-nous ?
N’en soyez point en soin[N 3] : je vous porterai tous
L’un après l’autre en ma retraite.
Nul que Dieu seul et moi n’en connaît les chemins,
Il n’est demeure plus secrète.
Un Vivier que nature y creusa de ses mains,
Inconnu des traitres humains,
Sauvera votre république.
On le crut. Le peuple aquatique
L’un après l’autre fut porté
Sous ce rocher peu fréquenté.
Là Cormoran le bon apôtre
Les ayant mis en un endroit
Transparent, peu creux, fort étroit,
Vous les prenait sans peine, un jour l’un, un jour l’autre.
Il leur apprit à leurs dépens,
Que l’on ne doit jamais avoir de confiance
En ceux qui sont mangeurs de gens.
Ils y perdirent peu, puisque l’humaine engeance
En aurait aussi bien croqué sa bonne part ;
Qu’importe qui vous mange ? homme ou loup ; toute panse
Me parait une[N 4] à cet égard ;
Un jour plus tôt, un jour plus tard,
Ce n’est pas grande différence.

— Jean de La Fontaine, Fables de La Fontaine, Les Poissons et le Cormoran, texte établi par Jean-Pierre Collinet, Fables, contes et nouvelles, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », 1991, p. 398

Notes[modifier | modifier le code]

  1. celui qui a soin de pourvoir une maison de vivres (Furetière)
  2. émeute
  3. en souci
  4. équivalente

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