Langues occitano-romanes — Wikipédia

Occitano-roman
Image illustrative de l’article Langues occitano-romanes
Langues filles catalan (valencien, baléare, alguérois, roussillonnais)


occitan (gascon, auvergnat, limousin, provençal, niçois, vivaro-alpin)
piémontais[1] ?
royasque ?
aragonais ?

Pays Andorre, Espagne, France, Italie, Monaco
Région Occitanie culturelle, incluse dans tout ou partie des régions administratives :
Nouvelle-Aquitaine, Auvergne-Rhône-Alpes, Centre-Val de Loire, Occitanie, Provence-Alpes-Côte d'Azur, mais aussi Monaco, Val d'Aran (Catalogne), Vallées occitanes (Piémont et Ligurie), Guardia Piemontese (Calabre).
Pays catalans :
Catalogne, Communauté valencienne, Îles Baléares, Pyrénées-Orientales, Franja de Ponent (Aragon), El Carxe (région de Murcie), L'Alguer (Sardaigne)
Nombre de locuteurs 16 500 000[réf. nécessaire]
Typologie SVO
Classification par famille
Statut officiel
Langue officielle Drapeau d'Andorre Andorre
Drapeau de la Catalogne Catalogne
Drapeau des îles Baléares Îles Baléares
Drapeau de la Communauté valencienne Communauté valencienne
Drapeau de l'Italie Italie (langue minoritaire)
L'occitano-roman est au cœur du continuum linguistique des langues romanes.

Les langues occitano-romanes (catalan : llengües occitanoromàniques, occitan : lengas occitanoromanicas) sont une branche des langues romanes qui englobe l'occitan et le catalan élargie parfois à l'aragonais, au piémontais et au royasque.

Elles se parlent dans cinq pays d'Europe: en Andorre, en Espagne (Catalogne, Communauté valencienne, Îles Baléares, Frange d'Aragon, El Carche), en Italie (Vallées occitanes, Alghero, Guardia Piemontese), en France (région culturelle d'Occitanie et Pyrénées-Orientales catalanes), et à Monaco, ainsi qu'historiquement dans le comté de Tripoli (Liban), en Algérie française et dans les possessions de la couronne d'Aragon : Duché d'Athènes, Sud de l'Italie, etc.

On retrouve aussi des communautés linguistiques existantes ou historiques dans l'Europe protestante (Allemagne, Suisse, etc.) et dans le Nouveau Monde : Argentine, Uruguay, États-Unis, etc.

Un débat existe sur l'existence de ce groupe de langues où s'opposent des critères linguistiques à des critères politiques. Toutefois, dans leur forme écrite, le catalan moderne et l'occitan moderne sont hautement intelligibles ; le pourcentage de lexique commun est supérieur à celui existant entre l'espagnol et le portugais. Les langues occitano-romanes sont donc très proches, de plus elles forment un continuum linguistique transitionnel entre les langues ibéro-romanes et les langues gallo-romanes[2].[source insuffisante] La proximité avec les parlers gallo-italiques peut aussi être relevée. De fait, il existe des raisons fondées pour considérer les langues occitano-romanes comme un groupe phylogénétique valide (sens linguistique) ; à la différence des anciennes classifications qui les faisaient appartenir à des groupes polyphylétiques différents (sens géographique).[réf. nécessaire]

Classification[modifier | modifier le code]

Famille linguistique[modifier | modifier le code]

Le groupe occitano-roman au sein des langues romanes selon Y. B. Koryakov[3].

Selon certains linguistes, l’occitan et le catalan doivent être considérées comme des langues gallo-romanes. D’autres linguistes y classent l'occitan, mais considèrent le catalan comme faisant partie des langues ibéro-romanes. Certains linguistes classent le catalan dans le diasystème occitan. De ce fait, le catalan serait considéré comme une variante occitane de type Ausbau[4].[évasif]

La question en débat est autant politique que linguistique, car la division classique entre gallo-roman et ibéro-roman repose sur l'idée que la France et l'Espagne sont des États-nations. Cette classification s'appuie donc plus sur des critères territoriaux que sur des critères historiques et linguistiques. L'un des principaux promoteurs de l'unité des langues de la péninsule Ibérique était le philologue espagnol Ramón Menéndez Pidal. En France, un courant autour de Gaston Paris s’attacha à présenter l'unité des dialectes gallo-romans en y incluant l'occitan. Tandis que déjà bien avant d'autres linguistes comme Wilhelm Meyer-Lübke[5] et Friedrich Christian Diez ou plus récemment comme Louis Alibert[6] ont soutenu la parenté de l'occitan et du catalan.[réf. nécessaire]

Gascon et catalan[modifier | modifier le code]

La réponse à la question de savoir si le gascon et le catalan doivent être considérés comme des dialectes occitans ou des langues distinctes a longtemps été affaire d'opinion ou de convention, plutôt que la sanction de critères scientifiques. Cependant, les deux études citées ci-après soutiennent que le gascon et le catalan doivent être considérés comme des langues étrangères à l'occitan :

  • Pour la toute première fois dans les années 1980, Stephan Koppelberg a appliqué une approche quantitative fondée sur des statistiques pour tenter d'apporter une réponse à la question. Sur la base des résultats obtenus, il conclut que le catalan, l'occitan et le gascon devraient être considérés comme trois langues distinctes[7].
  • Plus récemment, Y. Greub et J.P. Chambon (Université de la Sorbonne, Paris) ont démontré que la formation du Proto-Gascon était déjà terminée à la veille du VIIe siècle, alors que Proto-Occitan n'était pas encore formé à cette époque[8].

Ces résultats ont incité certains linguistes à abandonner le classement traditionnel du gascon comme dialecte de l'occitan, en l'alignant sur celui du catalan qualifié de « langue distincte »[citation nécessaire]. Les deux études ont soutenu l'intuition précoce de feu Kurt Baldinger, un spécialiste de l'occitan médiéval et du gascon médiéval, qui a recommandé que l'occitan et le gascon soient classés comme langues distinctes[9],[10].

Le « Bulletin de l'observatoire des pratiques linguistiques », publié par le ministère de la Culture français, estime pour sa part, que seule l'appartenance du béarnais/gascon à l'ensemble occitan peut être légitimement discutée[a]. Il poursuit en précisant qu'un consensus se dessine pour considérer que le béarnais/gascon « constitue, du point de vue de sa genèse[b], un ensemble distinct de l'occitan proprement dit ». Mais en évoluant en « symbiose » avec ce dernier depuis des siècles, le béarnais/gascon est généralement considéré comme étant une variété de la langue d'oc.

Gerhard Rohlfs a étudié particulièrement le gascon en le comparant aux autres idiomes pyrénéens, basque et aragonais notamment, y compris en allant enquêter sur le terrain des deux versants pyrénéens[11]. Prolongeant les travaux précurseurs d'Achille Luchaire[12], il montre les parentés entre gascon et basque, particulièrement pour des noms de plantes, d'animaux, de relief ou de terrain (sans équivalent latin ?) mais aussi du gascon avec l'aragonais et le catalan, ainsi que l'espagnol.

Répartition[modifier | modifier le code]

Pierre Bec considère[13] un domaine occitano-roman, au sens large, qui regroupe les langues et dialectes (parlers) du midi de la France (exception faite du basque aux caractéristiques distinctes et du poitevin-saintongeais qui est une langue d'oïl). Sur la base de différents traits linguistiques communs ou distinctifs, il conclut en deux façons, selon lui, de regrouper ou séparer les sous-ensembles de ce domaine occitan-roman, voici la première :

  • Le nord-occitan, où CA et GA latins sont palatisés en cha (tsa) et ja (dja). Il comprend le (ou les parlers) limousin(s), auvergnat(s) et "vivaro-alpin"(s) (mentonasque, roquebrunasque et gardiol inclus). La limite sud du nord-occitan est la l'isoglosse ca/cha (exemple en toponymie, Castelnau ou Castetnau vs Châteauneuf en français).
  • L’occitan méridional comprend le languedocien et le provençal. Le Vidourle est la frontière qui sépare ces deux dialectes. À l’ouest, le languedocien « est approximativement limité par la Garonne, prolongée par son affluent l’Ariège (limite avec le gascon) ».
  • Gascon/béarnais (langue officielle lorsque le Béarn était un État indépendant, les trois formes de gascon sont parlées en Béarn)

La seconde façon de classer les sous-ensembles précédents, selon Pierre Bec, est décrite au chapitre « Autres classifications possibles ».

Aragonais[modifier | modifier le code]

La position de l'aragonais est moins claire, il partage un certain nombre d'anciens isoglosses importants avec le catalan et l'occitan qui ne figurent pas dans les langues ibero-romanes. Cependant, la langue navarro-aragonaise a subi une restructuration majeure dans les derniers siècles et elle s'est considérablement rapprochée des langues ibéro-romanes, occultant certaines des caractéristiques occitano-romanes. Le navarro-aragonais a pratiquement disparu de tout son territoire historique. Seul subsiste aujourd'hui le haut-aragonais (accroché aux Pyrénées) qui est la forme la plus proche de l'occitan général et du catalan.

Royasque et brigasque[modifier | modifier le code]

Le royasque et le brigasque sont considérés comme des parlers de transition entre l'occitan et le ligure. Ils sont généralement classés dans le ligure. Cependant la population locale revendique son appartenance à l'Occitanie.

Piémontais[modifier | modifier le code]

Les premiers documents en piémontais datent du XIIe siècle, alors que la langue était encore très proche de l'occitan. Le piémontais littéraire s'est développé aux XVIIe et XVIIIe siècles et possède toujours une norme propre et stable. Bien qu'il fasse une transition entre le lombard et l'occitan, il est habituellement classé dans le gallo-italique. Toutefois, il possède également un lexique, une phonétique et une morphosyntaxe particulière.

Autres classifications possibles[modifier | modifier le code]

Même si la plupart des linguistes actuels séparent le catalan de l'occitan, les deux langues sont parfois confondues dans les travaux de linguistes[Lesquels ?] tentant de classer les dialectes de l'occitan dans des groupes supradialectaux.

C'est le cas de Pierre Bec[14], repris plus récemment par Domergue Sumien[15], qui définit (p. 36, p. 52-54) une « structuration supra-dialectale » en décrivant, pour un ensemble « aquitano-pyrénéen (centré autour du gascon) », des traits communs du gascon avec le languedocien pyrénéen – parlé au sud, environ, d’une ligne Bordeaux-Toulouse-Narbonne.

Par la suite, Bec a développé cette classification en élaborant l’idée d’un groupe supradialectal aquitano-pyrénéen ou préibérique incluant le catalan, le gascon et une partie du languedocien. Tandis qu'ils ont classé le reste de l'occitan dans un autre groupe ou dans deux autres groupes supradialectaux (arverno-méditerranéen, occitan central). Cette classification (structuration) supra-dialectale comprend trois groupes :

Comparaison lexicale[modifier | modifier le code]

Transcription phonétique et écritures normées des chiffres dans les différentes variétés occitanoromanes [16],[17]:

GLOSE Occitan septentrional Occitan méridional Catalan
Auvergnat Limousin Gascon Languedocien Provençal Oriental Occidental
'1' yn / yna/ynɔ

un, una

yⁿ / ynɔ
un / una
y / yɔ
un / ua
yn / ynɔ
un / una
yn / ynɔ/yna
un / una
un / unə
un / una
un / una
un / una
'2' du / dua

dos, doàs

du / dua
dos / doas
dys / dyɔs
dus / duas
dus / duɔs
dos / doas
dus / duas
dos / doas
dos / duəs
dos / dues
dos / dues (val. dos)
dos / dues (val. dos)
'3' tre / tri

tres

tɾej
tres
tɾes
tres
tɾes
tres
tɾes/tʀes
tres
trɛs (bal. trəs)
tres
tres
tres
'4' katʀə

quatre

katɾe
quatre
kwatə
quatre
katɾe
quatre
katɾe/katʀe
quatre
kwatrə
quatre
kwatre
quatre
'5' ʃiⁿ

cinc

ʃiⁿ
cinc
siŋk
cinc
siŋk
cinc
siⁿ/siŋk
cinc
siŋ / siŋk
cinc
siŋ / siŋk
cinc
'6' sej

seis

sej

sieis

ʃeis
sheis
sjɛjs
sièis
sjɛj
sièis
sis
sis
sis
sis
'7' setə

sete

se
sèt
sɛt
sèt
sɛt
sèt
sɛ/sɛt
sèt
sɛt
set
sɛt
set
'8' œ / œj

eut / uèit

œj / œi

uech / ueit

wɛit
ueit
ɥɛʧ
uèch
ɥɛ/ɥɛʧ
uèch
bujt (bal. vujt)
vuit
bujt (val. wit)
vuit (val. huit)
'9' nɔw

nòu

nɔw
nòu
nɔw
nòu
nɔw
nòu
nɔw
nòu
nɔu
nou
nɔu
nou
'10' de

detz

de
dètz
dɛʦ
dètz
dɛʦ
dètz
dɛs
dètz
dɛu
deu
dɛu
deu

On distingue les formes masculines et féminines pour les chiffres '1' et '2'.

Anciennes régions de langues occitano-romanes[modifier | modifier le code]

Le catalan a gagné du terrain sur l'occitan dans le Capcir et peut-être le Roussillon[18].

Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

  1. L'intégration du provençal, du languedocien, du limousin, de l'auvergnat et du vivaro-alpin à l'ensemble occitan ne fait pas débat pour le bulletin ministériel.
  2. Le gascon/béarnais contient un important substrat aquitain, ou proto-basque, ce qui le distingue des autres parlers occitano-romans.

Références[modifier | modifier le code]

  1. F.RUBAT BOREL, M.TOSCO, V. BERTOLINO, Il Piemontese in Tasca, cours élémentaire et guide de conversation en langue piémontaise publié par Assimil Italia, 2006, (ISBN 88-86968-54-X): « a un francese ricorda una parlata occitana [...] Il piemontese si trova nel punto d’incontro di due grandi gruppi di lingue neolatine, [...], presentando caratteri comuni a entrambi i gruppi, proprio per la sua posizione di frontiera. » traduit par « à un français cela lui rappelle l'occitan. Le piémontais est situé au point de rencontre de deux grands groupes de langues romanes, présentant des caractéristiques communes aux deux groupes en raison de sa position frontalière ».
  2. Pierre Bec (1963, 1995) La langue occitane, Paris : Presses universitaires de France
  3. Koryakov Y. B. Atlas of Romance languages. Moscou, 2001
  4. Composition linguistique des nations du monde
  5. Das Katalanische , Heidelberg, 1925
  6. Gramatica occitana segon los parlars lengadocians, Montpelhièr, 1976
  7. (oc) Stephan Koppelberg, « El lèxic hereditari característic de l'occita i del gascó i la seva relació amb el del català: conclusions d'una anàlisi estadística », Actes del Vuitè Col.loqui International de Llengua i Literatura Catalanes, Tolosa de Llenguadoc, 12-17 de setembre de 1988, Vol. 1, 1989, (ISBN 84-7826-083-8), págs. 109-122, Abadia de Montserrat,‎ , p. 109–122 (lire en ligne, consulté le )
  8. (de) ETH-Bibliothek Zuerich, « Note sur l'âge du (proto)gascon », sur E-Periodica (consulté le )
  9. Kurt Baldinger, « La langue des documents en ancien gascon », Revue de Linguistique Romane, no 26,‎ , p. 331–347
  10. Kurt Baldinger, « Textes anciens gascons », Revue de Linguistique Romane, vol. 26,‎ , p. 348–362
  11. (fr + eu + an + ca + oc-gascon) Gerhard Rohlfs, Le Gascon. Études de philologie pyrénéenne, Pau, Marrimpouey Jeune, , 3e éd. (ISBN 3-484-52025-6)
  12. (fr + eu + oc-gascon) Achille Luchaire, Études sur les idiomes pyrénéens de la région française,
  13. Pierre Bec, La langue occitane, 1995, coll. Que sais-je ? no 1059, Paris, Presses universitaires de France [1re éd.1963]
  14. BEC Pierre (1973), Manuel pratique d'occitan moderne, coll. Connaissance des Langues, Paris: Picard
  15. Domergue Sumien (2006), La normalisation de l'occitan pluricentrique:. Nouvel ENJEU sociolinguistique, développement du lexique et de la morphologie , coll. Publications de l'Association Internationale d'Études Occitanes, Turnhout: Brepols
  16. Indo-european numerals (Eugene Chan)
  17. Diccionari Alcover-Moll
  18. Christian Nique. Précis d'occitan et de catalan.

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Pierre Bec, Manuel pratique de philologie romane, vol. 2, Paris, Picard
  • Charles Camproux, Les langues romanes, Paris, P.U.F., coll. « Que sais-je ? »,
  • Pierre Bec, La langue occitane, Paris, P.U.F., coll. « Que sais-je ? »,

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]

  • (oc) Domergue Sumien, « Classificacion dei dialèctes occitans », Revista d’òc,‎ , p. 55 (lire en ligne, consulté le )