La France (Sigmaringen) — Wikipédia

La France est un journal quotidien créé par Jean Luchaire, commissaire à l'Information de la Commission gouvernementale de Sigmaringen, gouvernement en exil du régime de Vichy dans la ville souabe de Sigmaringen dans le Sud-Ouest de l'Allemagne. Le journal parut du au [1] et servit également de journal officiel pour la Commission.

Otto Abetz, ancien ambassadeur d'Allemagne dans la France occupée et ami depuis les années 1930 de Luchaire, poussa et aida celui-ci à prendre la tête de la propagande française de Sigmaringen. Luchaire créa alors, avec un financement allemand, le journal La France et une radio, Ici la France[2]. Ce financement permit à Luchaire de recruter et d'offrir des salaires confortables dans une communauté française en exil vivant dans des conditions difficiles[2].

La France comptait initialement quatre pages[3] puis à la fin seulement deux[4] et se vendait 4 francs ou 20 pfennigs[3]. Il était tiré à 45 000 exemplaires[5]. Le premier numéro parut le avec une photo de Pétain et un éditorial indiquant que Sigmaringen est la « forteresse de la légitimité du Maréchal »[3].

Les locaux du journal étaient au no 3 de la Karlstrasse, la rue principale de la ville, dans une maison qui abritait le ministère de l'Information de la Commission gouvernementale et où travaillaient plus de 200 fonctionnaires[3]. Le journal est dirigé à l'origine par Jacques Ménard, ancien rédacteur en chef du quotidien Le Matin et ancien président de l'Association des journalistes antijuifs sous l'Occupation[6]. Il est écarté en décembre au profit d'Henry Mercadier, membre du PPF de Jacques Doriot[7]. L'équipe de rédaction se situait au deuxième étage, juste au-dessus de l'Office français d'information, l'agence de presse officielle du régime de Vichy, devenue à Sigmarigen, une annexe de la DNB, l'agence officielle allemande[3]. Les rotatives se trouvaient elles dans la cave.

Alors que la libération de la France par les Alliés avançait, trois autres journaux en français étaient publiés en Allemagne : Le Petit Parisien, le journal de Jacques Doriot imprimé à Constance et qui tirait à plus de 80 000 exemplaires, L'Écho de Nancy, journal collaborationniste dirigé et possédé par des Allemands[8],[9] replié à Neustadt[10] et La voix du Reich, journal allemand mais paraissant en français[11].

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Philippe Randa, Dictionnaire commenté de la collaboration française, Jean Picollec, 1997, p. 518.
  2. a et b Jean-Paul Cointet, dans l'émission radiophonique 2000 ans d'histoire, « L'enclave française de Sigmaringen (1944-1945) », France Inter, 20 octobre 2013 [vidéo] Disponible sur YouTube.
  3. a b c d et e Henry Rousso, Petain et la fin de la collaboration : Sigmaringen, 1944-1945, éditions Complexes, 445 p. (lire en ligne), p. 122-123.
  4. Andreas Laska, Presse et propagande allemandes en France occupée : des Moniteurs officiels (1870-1871) à la Gazette des Ardennes (1914-1918) et à la Pariser Zeitung (1940-1944), Utz Verlag, , 478 p., p. 233.
  5. Christine Sautermeister, Louis-Ferdinand Céline à Sigmaringen : novembre 1944 - mars 1945 chronique d'un séjour controversé, Paris, éditions Écriture, (lire en ligne).
  6. Pierre-André Taguieff ( dir. ), L'antisémitisme de plume 1940-1944. Etudes et documents, Berg international éditeurs, 1999. Né le 11 février 1902 à Angers, inconnu avant 1940 - il a été rédacteur dans divers journaux de province et a collaboré à l'Auto -, Ménard n'est pas un antisémite militant de l'avant-guerre, c'est un antisémite d'occasion, qui préside une association peu active, fondée en décembre 1941 ( Le Matin, 8 octobre 1942, "Les journalistes antijuifs ont inauguré leur nouveau siège social" ). Rédacteur en chef du Matin à partir d'août 1940, il signe quelques articles collaborationnistes ( Le Matin, 30 janvier 1943, J. Ménard, "Il y a aujourd'hui dix ans, Adolf Hitler prenait le pouvoir" ) et est en rapport avec la Gestapo . Brièvement directeur politique du Matin à la mort de son propriétaire, en remplacement de Stéphane Lauzanne ( Le Matin, 3 août 1944 ), il fuit Paris en août 1944 et gagne Sigmaringen. Il fuit l'Allemagne en décembre 1944 et revient en 1945 en France où il se fait passer pour un travailleur requis du STO. Il est reconnu en août 1946, est arrêté, jugé en juillet 1948 par la Cour de justice de la Seine et condamné à 5 ans de travaux forcés: Fabrice Virgili, François Rouquet, Les Françaises, les Français et l'Épuration, Gallimard, 2018, Le Monde, 26 juillet 1948, Ibid., 22 juillet 1948
  7. L'Un et l'Autre - tome II : Correspondance entre Romain Rolland et Alphonse de Chateaubriant, 1914-1944, numéro 30, Marie Saulnier-Bloch, Le statut juridique du régime de Vichy: de Vichy à Sigmaringen: d'un statut l'autre, Thèse de doctorat, Univ. Genève, 2016, p. 224 (en ligne)
  8. « Nancy, ultime refuge des collabos », sur estrepublicain.fr, L'Est républicain, (consulté le ).
  9. Olivier Prugneau, « 1940-1944 : la chasse aux Maçons dans L’Écho de Nancy », sur sjj-nancy.fr, (consulté le ).
  10. « Notice de périodique – L'Écho de Nancy », sur cataloguelabs.bnf.fr, BnF (consulté le ).
  11. Henry Rousso, Un château en Allemagne : la France de Pétain en exil, Sigmaringen 1944-1945, Paris, Arthème-Fayard, coll. « Pluriel », , 648 p. (ISBN 9782818500422, lire en ligne).