Jaspe — Wikipédia

Jaspe
Catégorie IX : silicates[1]
Image illustrative de l’article Jaspe
Jaspe poli.
Général
Classe de Strunz
Formule chimique O2Si SiO2
Identification
Masse formulaire[2] 60,0843 ± 0,0009 uma
O 53,26 %, Si 46,74 %,
Couleur blanc, beige, rouge, vert, marron voire rosé, noir
Système cristallin Trigonal
Réseau de Bravais microcristallin très fracturé, cryptocristallin
Clivage aucun
Cassure conchoïdale
Échelle de Mohs 6,5-7
Trait blanc
Éclat brillant, vitreux, mat, gras
Propriétés optiques
Fluorescence ultraviolet aucune
Transparence translucide à opaque
Propriétés chimiques
Masse volumique 2,58 à 2,91 g/cm3
Densité 2,75
Propriétés physiques
Magnétisme aucun
Radioactivité aucune

Unités du SI & CNTP, sauf indication contraire.

Le jaspe est une roche sédimentaire contenant de 80 à 95 % de silice, souvent classée avec les quartz microcristallins mais qui peut aussi contenir de l'argile. Elle est constituée de radiolaires calcédonieux pris dans un ciment de calcédoine. Sa cassure est écailleuse, parfois conchoïdale. Le jaspe peut avoir plusieurs aspects : tacheté, rubané, rouge (ou oriental), à taches rouges sur fond vert, noir (de Sicile), etc. Par contre, il ne contient pas de grains de quartz détritique. D'origine sédimentaire ou volcanique, c'est donc un minéral de transformation, parfois classifié comme minéral, parfois comme roche, selon le point de vue ou son taux d'impuretés. Sa particularité essentielle, outre son abondance, est sa large palette de coloris naturels. On peut estimer, a priori, qu'aucun coloris n'est impossible pour le jaspe, ce qui, d'ailleurs, rend complexe son identification.

Variétés[modifier | modifier le code]

Il existe un grand nombre de jaspes dans la nature. Autrefois, ils étaient nommés par leurs couleurs dominantes, ou encore avec les corps minéraux ou cristaux qu'ils étaient susceptibles de contenir : ainsi, le jaspe pyritifère, le jaspe quartzifère, le jaspe argileux, jaspe rouge… Ils faisaient l'objet de collections spécialisées.

Voici une liste actuelle, non exhaustive :

Nom Étymologie Couleur Composition Gîtologie Image
Basanite dite aussi Lydite[3] ... Noire ... .. Basanite et Dunite
Bois silicifié[4] Bois fossilisé par de la silice Bariolé C'est une catégorisation de bois fossile versé dans les jaspes car les cellules ont été remplacées par de la silice Zones de sédimentation profondes riches en silice Bois pétrifié du Brésil
Cacholong[Atlas_RoMi 1] ... Blanc Avec de l'opale .. Croix en jaspe blanc
Chrysoprase[Atlas_RoMi 1] ... Vert poireau à vert bleuté ... .. Chrysoprase
Cornaline[Atlas_RoMi 1] ... Rouge à orangé Contient de l'hématite en quantité .. Cornaline
Jaspe bréchoïde Vient de sa composition rocheuse en brèche Beige à marron Nous quittons ici les minéraux pour rentrer dans les roches .. ...
Jaspe de terre ... Beige à marron ... .. Sphéroïde
Jaspe léopard Nommé ainsi car comportant des taches comme une peau de léopard Tacheté Constellé de taches avec des centres parfois en quartz pur .. Jaspe léopard
Jaspe océan ... Verdâtre, à motifs ... .. Jaspe océan de Madagascar
Jaspe plasma[Atlas_RoMi 1] ... Vert foncé uni Coloré par la chlorite ou la serpentine ..
Jaspe sanguin ... Fond vert à taches rouges ou complètement rouge-brunâtre ... .. Intaille représentant la tête d'Athéna Parthénos
Jaspe orbiculaire[5] ... Fond vert à taches dorées Son nom lui vient des nombreux formations en cercle Parsemés de réseaux serrés de taches circulaires concentriques Origine Madagascar
Jaspe zoné Parce que comportant les traces de couches de dépôt Multicolore Il comporte la trace des différentes couches de dépôts Volcanique en mélange avec des roches Jaspe océan de Madagascar
Lamparci ou Dalmatien[Atlas_RoMi 1] ... Blanc à taches noires ... .. Dalmatien
Lydienne[6] ... Gris ou noir présence de matières charbonneuses, un peu de pyrite et quelques grains phosphatés Elles alternent souvent avec des calcaires et des schistes, en bancs réguliers, dans les séries du Carbonifère.
Onyx[Atlas_RoMi 1] ... Noire à marron Peut être une agate ou jaspe, selon sa composition .. Onyx polie
Phtanite[6] Vient du grec et signifie « je devance ». Gris ou noir Plus argileux que les lydiennes, formées de quartz en très petits cristaux, de quelques radiolaires encore visibles, de matière charbonneuse ou graphiteuse (d'où leur couleur), elles sont généralement considérées comme issues de dépôts marins. Les phtanites annoncent souvent le passage à des schistes. Gros plan d'un bloc de phtanite
Sardoine[Atlas_RoMi 1] ... Marron ... .. Patène en Sardoine
Sardonyx[Atlas_RoMi 1] ... Bariolé ... .. Camée en Sardonyx
Unakite ... verte tranchée d'orangé ... .. Unakite

Étymologie[modifier | modifier le code]

Du latin iaspis, « agathe, jaspe », venant du grec ἴασπις / íaspis, « jaspe », issu lui-même des langues sémitiques (cf. hébreu יושפה yushphah, akkadien yashupu)[7], à rapprocher du persan یشپ (yašp)[réf. souhaitée], tous signifiant « pierre tachetée ».

Utilisations[modifier | modifier le code]

Outillage[modifier | modifier le code]

Schéma d'un foret à archet pour allumer un feu.

Le jaspe a été utilisé pour réaliser des forets à archet, pour allumer des feux, dans le Mehrgarh, entre le IVe et le Ve millénaire av. J.-C.

La phtanite a été utilisée pour façonner des outils préhistoriques en Bretagne[Note 1],[8].

Le jaspe a également été utilisé pour tailler des outils : c'est le cas du jaspe de Fontmaure[9],[10] par exemple, mais aussi, très localement, du jaspe de Bretagne.

Bijoux[modifier | modifier le code]

Le jaspe est connu pour avoir été le bijou préféré dans le monde antique, son nom peut être retracé en arabe, en persan, en hébreu, en assyrien, en grec et en latin. Sur l'île minoenne de Crète, le jaspe a été sculpté pour produire des sceaux vers 1800 av. J.-C., comme en témoignent les découvertes archéologiques dans le Palais de Knossos.

Décoration[modifier | modifier le code]

Miniatures de Jésus-Christ et de la Sainte Vierge, en héliotrope, Florence (vers 1560).

Les chrétiens du Moyen Âge se servaient du jaspe sanguin, pour graver des scènes de la Crucifixion, ce qui amena l’appellation de « pierre des martyrs », compte tenu des taches rouges d'oxyde de fer, contenues dans la pierre, qui évoquent les gouttelettes de sang, ou la couleur du soleil couchant, d'où le nom héliotrope donné à la pierre[11].

Drapeau de la Bohême Bohême (actuellement Drapeau de la Tchéquie République tchèque)

Drapeau de l'Italie Italie

Drapeau de la France France

Drapeau de la Russie Russie

Vase de Kolyvan, (1829-1843), musée de l'Ermitage, Saint-Pétersbourg, Russie.
  • Le célèbre vase de Kolyvan ou « Tsarine des vases », pesant 19,2 tonnes[21], est le symbole de l'extrême professionnalisme des tailleurs de pierre de l'Altaï et la preuve irréfutable de la richesse unique de cette chaîne de montagnes. Le vase a été conçu par l'architecte Avraam Melnikov (en), qui a lui-même supervisé la fabrication de 1831 à 1843. C'est un processus extrêmement difficile de travailler un bloc de cinq mètres de « jaspe de Resnev » pendant plus de onze ans. Un bloc monolithique trouvé en 1819 dans la montagne Revnyoukha[Note 3], et extrait en . Cette variété de pierre est très dure, mais en même temps fragile et incapable de résister à des chocs. La coupe ovale, de 5 mètres de long sur 3,25 mètres de large, a été taillée à la Manufacture lapidaire impériale de Kolyvan, puis transportée sur un traîneau, tiré par 154 chevaux, vers la rivière Chusovaya, pour être transférée sur une barge, et atteindre Saint-Pétersbourg, en . Le vase porte un grand nombre de retouches et de reprises (patches), mais elles ont été appariées avec une telle habileté qu'elles ne peuvent pas être repérées. Le travail a été achevé dans le Nouvel Ermitage, et maintenu emballé sur le remblai de la Neva. Ce n'est que le , que la « Tsarine des vases » a été transportée, grâce à un percement dans un mur et mise en valeur dans le hall sur un piédestal[Note 4] construit spécialement pour elle[Note 5].

Drapeau des États-Unis États-Unis

  • Certains jaspes polis développent des images surprenantes, à tel point que certaines origines, telles que celles de l'Idaho, ou de l'Oregon, ont reçu une dénomination distincte, comme le Jaspe Bruneau (ou Bruneau jasper)[22], ou encore Owyhee[23].

Gisements[modifier | modifier le code]

Le jaspe est extrêmement répandu dans le monde, mais chaque pièce est quasiment unique[24].

Formation[modifier | modifier le code]

Il est soit de source volcanique par hydrothermalisme, soit sédimentaire via les boues de dépôt des radiolaires et parfois nommé alors radiolarite[Universalis_RoMi 1].

Critères de discernement[modifier | modifier le code]

Le jaspe est constitué de SiO2 et donc formé de calcédoine[25], très proche de l'héliotrope mais, surtout, des agates[25].

On le différencie des autres à cause de ses coloris infinis, sa non-fluorescence, qu'il ne contient pas de quartz détritique mais, surtout parce que le jaspe contient 5 à 20 % d'autre chose que le gisement d'origine.

L'identification est d'autant plus délicate qu'il n'y a pas de fixation de critères objectifs entre ces 3 formations qui ont toutes la même origine. De nombreux minéraux resteront donc contestés ou indéterminables[26], la littérature étant parfois même contradictoire sur le sujet.

Si l'on a affaire à des jaspes très riches en impuretés, la densité peut être le facteur déterminant pour autant que la moyenne de la densité des matériaux ajoutés soit très différente de celle du quartz.

Les formations rubanées ou tachetées sont majoritairement des agates et c'est l'opacité qui sera souvent alors déterminante dans l'identification.

Galerie[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

  1. La Préhistoire de Bretagne et d'Armorique, Jean Laurent Monnier, Les Universels Gisserot, 1991, (ISBN 978-2877470759).
  2. Après l'effondrement de l'URSS, l'usine intègre le ministère des Services publics de la Russie. Dès 1990, l'usine n'a pas été en mesure de survivre. Elle est mise en faillite en 1998. Depuis , l'usine fabrique des produits en granit, telles les bordures de protection. En conséquence, le premier centre de taille de pierre de la Sibérie, continue à fonctionner, à ce jour.
  3. La montagne Revnyukha, se trouve dans le district de Zmeinogorskiy.
  4. Les archives indiquent que deux socles destinés au vase ont été cassés pendant la fabrication.
  5. Le vase de Kolyvan figure sur les armoiries du kraï de l'Altaï.

Références[modifier | modifier le code]

  1. La classification des minéraux choisie est celle de Strunz, à l'exception des polymorphes de la silice, qui sont classés parmi les silicates.
  2. Masse molaire calculée d’après « Atomic weights of the elements 2007 », sur www.chem.qmul.ac.uk.
  3. Basanite, Mindat.
  4. Au cœur de la silice, ... du silex au wafer, sur le site www.futura-sciences.com
  5. Jaspe orbiculaire, sur le site www.futura-sciences.com
  6. a et b A. Foucault et J.-F. Raoult, Dictionnaire de géologie, Dunod, Paris, 2001.
  7. (en) « jasper | Etymology, origin and meaning of jasper by etymonline », sur etymonline.com (consulté le ).
  8. Gallia préhistoire, 1971, Volume 14, p 339-361, « Circonscription de Bretagne », sur persee.fr (consulté le ).
  9. « Jaspe de Fontmaure (Vienne) », sur la-detection.com (consulté le ).
  10. « Musée Grand Pressigny - Préhistoire - Indre-et-Loire », sur hominides.com (consulté le ).
  11. Gem Select, « Le jaspe sanguin », sur gemselect.com (consulté le ).
  12. « Karlstein un château et un golf à couper le souffle », sur lindigo-mag.com (consulté le ).
  13. (en) Web Gallery of Art, « Gasparo Miseroni (1518-1573) », sur wga.hu (consulté le ).
  14. (en) Web Gallery of Art, « Ottavio Miseroni (1567-1624) », sur wga.hu (consulté le ).
  15. Muriel Barbier, « Musée du Louvre , nef en jaspe », sur louvre.fr (consulté le ).
  16. Daniel Alcouffe, « Musée du Louvre, Les gemmes du roi Louis XIV », sur louvre.fr (consulté le ).
  17. Splendeur et secrets du métro de Moscou, « La mosaïque florentine », sur metro-in-moscow.com (consulté le ).
  18. Christie's, « Vasque russe en jaspe revna (vers 1830-1840) », sur christies.com (consulté le ).
  19. « Les pierres précieuses - Jaspe 3 », sur les-pierres-precieuses.fr (consulté le ).
  20. (en) Ermitage Museum, « Basin Decorated with Griffins (Bassin orné de griffons) », sur hermitagemuseum.org (consulté le ).
  21. Maurice Albray, « Le vase Kolyvan au Musée de l'Ermitage, à Saint-Pétersbourg », sur flickr.com, (consulté le ).
  22. (en) « Idaho - jaspers : Bruneau jasper », sur worldofjaspers.com (consulté le ).
  23. (en) « The Gemstone Owyhee Picture Jasper », sur minerals-n-more.com (consulté le ).
  24. « Les pierres précieuses - Jaspe 2 », sur les-pierres-precieuses.fr (consulté le ).
  25. a et b A. Foucault, JF Raoult, dictionnaire de Géologie, 1980, Dunod, 6e édition, 2005, page 187 ; (ISBN 9782100490714).
  26. Ole Johnsen, Guide Delachaux des minéraux, 2002, Paris, Delachaux & Niestlé, 438 pages, (ISBN 9782603017289), page 357.

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Dictionnaire des Roches et des Minéraux, Paris, Albin Michel, coll. « Encyclopedia Universalis », , 1066 p. (ISBN 2-226-12715-1) (Universalis_RoMi)
  1. p. 466-467.
  • Minéraux et Pierres de collection, Paris (France), Éditions Atlas, , 1246 p. (Atlas_RoMi)
  1. a b c d e f g et h Fiche de la gemme jaspe tailée.
  • (en) Angeles Gavira et Peter Frances, Rocks and Minerals, The definitive visual guide [« Rock and Gem (2005) »], Londres (Grande-Bretagne), Dorling Kindersley Limited, , 364 p. (ISBN 978-1-4053-2831-9) (RoMiGuide)

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Sur les autres projets Wikimedia :

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Lien externe[modifier | modifier le code]