Ishmael Marika — Wikipédia

Ishmael Marika (Nhulunbuy, 1991) est un musicien, cinéaste, réalisateur, producteur et artiste visuel aborigène d'Australie.

Artiste primé, ses installations ont été exposées dans plusieurs des plus importants musées australiens, notamment le musée d'Art contemporain d'Australie à Sydney et la galerie d'art d'Australie-Méridionale à Adélaïde.

Il est le directeur créatif de la principale unité médiatique aborigène d'Australie, le Mulka Project, qui cherche à préserver et à diffuser les langues sacrées et les pratiques culturelles du peuple Yolngu en collectant et en archivant des photographies, des documents audio et vidéo.

Biographie[modifier | modifier le code]

Racines aborigènes[modifier | modifier le code]

Ishmael naît à Nhulunbuy, une communauté aborigène de la Terre d'Arnhem (péninsule de Gove), dans le Territoire du Nord, en Australie. Sa mère Yalmakany Marawili est garde forestière à Yirralka et une artiste exposée, et la sœur de Djambawa Marawili[1],[2]. Son père Wanyubi Marika est un éminent artiste et leader de son clan[3]. Le côté maternel de la famille appartient au clan Madarrpa[4] et le côté paternel au clan Rirratjingu[5], tous deux appartenant au peuple Yolŋu[1]. Son grand-père paternel, Milirrpum Marika, accompagné de ses frères, mène les autres clans en présentant les pétitions sur l'écorce de Yirrkala (en) au gouvernement australien en 1963, dans la perspective de l'affaire des droits fonciers de Gove (en)[a],[6],[7],[8]. Cette affaire, conclue en 1971, a finalement conduit à l'adoption de la première législation sur les droits fonciers aborigènes en Australie (en)[9].

Jeunesse et formation[modifier | modifier le code]

Ishmael Marika passe sa jeunesse à Yilpara. Il fréquente l'école primaire de Nhulunbuy avant de partir à Melbourne pour terminer le secondaire puis étudie dans un lycée à Darwin, la capitale du Territoire du Nord[2].

En 2009, il retourne à Yirrkala, dans le comté d'East Arnhem, où il travaille pendant six mois comme garde forestier avant de commencer à travailler pour le Mulka Project[b] en 2010, dont il devient le directeur créatif[11]. Basé au Buku-Larrnggay Mulka Art Centre (en) à Yirrkala, dans le nord-est de la Terre d'Arnhem, le Mulka Project cherche à préserver et à diffuser les langues sacrées et les pratiques culturelles du peuple Yolngu en collectant et en archivant des photographies, des documents audio et vidéo[11],[12]. Après sept ans d'existence (en 2014), 80 000 photos ont été archivées, ainsi que quelques milliers de fichiers audio et plusieurs centaines de vidéos, la plus ancienne vidéo datant des années 1930 et montrant en noir et blanc des membres de la communauté Yolngu en train de danser un bunggul (danse cérémoniale)[13].

Carrière musicale[modifier | modifier le code]

Ishmael Marika grandit avec la musique traditionnelle et commence à chanter à l'âge de 10 ans[14]. Il continue à écrire des chansons qui racontent les histoires traditionnelles de son peuple sur la création du monde, la relation entre l'homme et son environnement naturel, les comportements et les valeurs de son peuple, entre autres sujets[15].

Le , Ishmael Marika joue d'un didjeridoo et d'un instrument typique aborigène constitué d'une paire de baguettes de claquement en bois sculpté et poli à l'occasion de l'exposition « Indigenous Australia: enduring civilisation ». Après l'exposition, il en fait don, ainsi que d'autre objets, à la collection Océanie du British Museum[16].

En 2016, Marika est acclamé par la critique pour sa chanson Two Sisters Journey[14]. Outre l'écriture de chansons, Ishmael travaille sur de nombreuses productions culturelles pour le peuple Yolngu, avec l'autorisation des anciens, notamment des documentations de diverses traditions cérémonielles telles que les cérémonies dhapi et baparru[2].

Carrière de cinéaste[modifier | modifier le code]

Son premier film documentaire, le plus connu, s'intitule Wanga Watangumirri Dharuk (2013) et traite des droits fonciers des Yolngu (en), un sujet qui revêt une importance familiale pour lui, car il traite des mouvements de défense des droits fonciers de Yirrkala dans les années 1960 et 1970[2],[17] : son grand-père, accompagné de ses frères, a mené plusieurs clans pour présenter les pétitions sur l'écorce de Yirrkala (en) au gouvernement australien en 1963, dans la perspective de l'affaire des droits fonciers de Gove (en)[c],[6],[7],[8]. Cette affaire, conclue en 1971, a finalement conduit à l'adoption de la première législation sur les droits fonciers aborigènes en Australie (en)[9]. Ce documentaire est présenté dans plusieurs festivals de musique et est projeté en privé pour l'ancien président du Timor-Oriental, José Ramos-Horta[2].

En 2014, il sort un deuxième film, Galka, un film dramatique sur la sorcellerie Yolŋu[2]. Galka est présenté au Festival Garma des cultures traditionnelles (en) en 2014, où il est ovationné[2],[13].

Depuis, Marika produit plusieurs autres films, notamment Gapu Ga Gunda : The Art of Nongirrngga Marawili (2015, sur l'artiste Nonggirrnga Marawili), et une installation en cinq épisodes intitulé Wunya'Gali (The Other Side) en 2017, commandé par Transport for NSW (en)[2].

Carrière d'artiste visuel[modifier | modifier le code]

Ishmael Marika est aussi sculpteur sur métal et artiste d'installation et d'art vidéo[18],[19]. Il expose dans des expositions collectives de musées importants, comme Primavera 2014 (2014)[17] et The National 2019 (2019)[20] au Musée d'Art contemporain de Sydney, Tarnanthi (2019-2020)[21] à la galerie d'art d'Australie-Méridionale (Adélaïde), Art of the Nation (2021)[22] au musée et galerie d'art du Territoire du Nord (dans la banlieue de Darwin) et Naadohbii: To Draw Water (2021-2022)[23] au musée des beaux arts de Winnipeg (Winnipeg, Canada)[11].

Dans le cadre du Mulka Project, Marika crée une série d'animations génératives, Rulyapa, qu'il a dessinées à la main illustrant les états temporels de l'eau salée sacrée de Rirratjingu Rulyapa. Il les met à disposition sous forme de NFT[24],[25],[26], afin de s'assurer que l'héritage culturel de son peuple puisse être transmis aux ayants droit appropriés[27]. « Avoir une archive numérique veut dire que nous sommes toujours en train de connecter les familles, de nous passer des messages les uns aux autres, au reste du monde et à travers le temps[28]. » Il insiste sur la transmission de génération en génération : « nous devons garder la culture forte pour la prochaine génération et tout documenter, documenter tout ce que nous avons ici du passé et du présent. [...] Si vous regardez les documents que nous avons ici, c’est vraiment important pour les futures générations, pour les jeunes afin qu’ils puissent garder cette culture forte et la poursuivre[29]. »

Prix et reconnaissance[modifier | modifier le code]

Conservation[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

  1. Milirrpum v Nabalco Pty Ltd, également connu sous le nom de l'affaire des droits fonciers de Gove parce que son sujet était la terre connue sous le nom de péninsule de Gove dans le Territoire du Nord, a été le premier litige sur les titres indigènes en Australie, et le premier cas juridique important pour les droits fonciers aborigènes en Australie, décidé le 27 avril 1971.
  2. Selon Marika, Mulka signifie « garder quelque chose en sécurité »[10].
  3. Milirrpum v Nabalco Pty Ltd (du nom de son grand-père, Milirrpum Marika), également connu sous le nom de l'affaire des droits fonciers de Gove parce que son sujet était la terre connue sous le nom de péninsule de Gove dans le Territoire du Nord, a été le premier litige sur les titres indigènes en Australie, et le premier cas juridique important pour les droits fonciers aborigènes en Australie, décidé le 27 avril 1971.

Références[modifier | modifier le code]

  1. a et b (en) « Wukun Wanambi & Ishmael Marika, In conversation, Buku-Larrnggay Mulka, Yirrkala N.T. » [PDF], sur La Trobe Art Institute, Université La Trobe, (consulté le ).
  2. a b c d e f g et h (en) « Ishmael Marika », sur transport.nsw.gov.au (consulté le ).
  3. (en) « Notice de l'œuvre Dhuwa Honeybee de Manyubi Marika », sur Kluge-Ruhe Aboriginal Art Collection (en) (consulté le ).
  4. (en) « Maḏarrpa », sur madayin.kluge-ruhe.org (consulté le ).
  5. (en) « Rirratjiŋu », sur madayin.kluge-ruhe.org (consulté le ).
  6. a et b (en) « Dhuwarrwarr Marika », sur gallerygondwana.com.au (consulté le ).
  7. a et b (en) « Fight for land rights : our Campaign », sur rirratjingu.com (consulté le ).
  8. a et b (en) « Leaders in law, business and community », sur oric.gov.au, Australian Government: Office of the Registrar of Indigenous Corporations (consulté le ).
  9. a et b (en) John Hookey, « The Gove Land Rights Case: A Judicial Dispensation for the Taking of Aboriginal Lands in Australia? », Federal Law Review, vol. 5, no 1,‎ , p. 85–114 (ISSN 0067-205X, DOI 10.1177/0067205X7200500105).
  10. (en) « Notice d'un sac donné par Marika au British Museum », sur British Museum (consulté le ).
  11. a b c d et e (en) « The Mulka Project », sur Mellon Indigenous Arts Program, Université de Virginie (consulté le ).
  12. (en) « The Mulka Project », sur Biennale de Sydney (consulté le ).
  13. a et b (en) « Indigenous film-maker Ishmael Marika on standing between two cultures », sur The Guardian, (consulté le ).
  14. a b c et d (en) Tony Barrass, « Ishmael and his Two Sisters walk with major music award » Accès limité, sur National Indigenous Times, (consulté le ).
  15. (en) « Mulka Archive », sur issuu.com, (consulté le ).
  16. (en) « Notice de l'instrument de musique joué et donné par Marika », sur British Museum (consulté le ).
  17. a et b (en) « Ishmael Marika: Primavera 2014 », sur Musée d'Art contemporain de Sydney (consulté le ).
  18. (en) « Notice de l'œuvre Murrnginy », sur salonartprojects.com.au (consulté le ).
  19. (en) « Notice de l'œuvre Gayit », sur salonartprojects.com.au (consulté le ).
  20. (en) « Notice de l'exposition The National 2019 », sur mutualart.com (consulté le ).
  21. (en) « Notice de l'exposition Tarnanthi », sur mutualart.com (consulté le ).
  22. (en) « Art of the Nation (2021) », sur aboriginalartdirectory.com, (consulté le ).
  23. (en) « Notice de l'exposition Naadohbii: To Draw Water », sur mutualart.com (consulté le ).
  24. (en) « Rulyapa By Ishmael Marika », sur nft-stats.com (consulté le ).
  25. (en) « Mulka NFT », sur yirrkala.com (consulté le ).
  26. (en) Jeremy Eccles, « An NFT for your Stocking this Christmas? », sur aboriginalartdirectory.com, (consulté le ).
  27. a et b De Largy Healy 2022, p. § 32.
  28. Wanambi et Marika 2016, p. 84.
  29. (en) « Ishmael Marika: Knowledge flows », sur creativecowboyfilms.com (consulté le ), cité par Jessica De Largy Healy[27].
  30. (en) « Ishmael Marika », sur Galerie d'art d'Australie-Méridionale (consulté le ).
  31. (en) « Ishmael Marika », sur Musée national du Victoria (consulté le ).

Annexes[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • (en) Wukun Wanambi et Ishmael Marika, « The mulka project », Artlink, vol. 36, no 2,‎ , p. 82-84 (ISSN 0727-1239).
  • (en) « In a winning painting, the stolen generations », The Age, Melbourne,‎ , p. 16 (ISSN 0312-6307).
  • Jessica De Largy Healy, « Karel Kupka et les maîtres-peintres de la Terre d’Arnhem : la biographie d’une collection d’art aborigène », Gradhiva, no 12,‎ , p. 198-217 (DOI 10.4000/gradhiva.1961).
  • Jessica De Largy Healy, « Archives numériques aborigènes, parenté et création », Ateliers d’anthropologie, no 51,‎ (DOI 10.4000/ateliers.15632, lire en ligne).
  • (en) Nancy Williams, The Yolŋu and their land : A system of land tenure and the fight for its recognition, Canberra, Australian Institute of Aboriginal Studies, .

Liens externes[modifier | modifier le code]