Humbert II de Viennois — Wikipédia

Humbert II
Illustration.
Humbert II de Viennois
Titre
Dauphin de Viennois

(15 ans, 11 mois et 18 jours)
Prédécesseur Guigues VIII
Successeur Charles Ier
Baron de Faucigny
(co-seigneur), 1349 (seul)
(12 ans)
Prédécesseur Hugues Dauphin
Biographie
Date de naissance
Lieu de naissance La Tour-du-Pin
Date de décès
Lieu de décès Clermont (Auvergne)
Père Jean II de Viennois
Mère Béatrice de Hongrie
Conjoint Marie des Baux
Enfants André de Viennois
Famille Famille de La Tour du Pin

Humbert II de Viennois

Humbert II de la Tour-du-Pin, né en 1312, mort le , fut le dernier dauphin de Viennois, comte de Vienne, d'Albon et seigneur de la Tour de 1333 à 1349. Sévèrement jugé par ses contemporains, il est décrit comme un incapable et un dépensier. N'ayant pas l'ardeur guerrière de son frère Guigues VIII de Viennois, auquel il succède, il se range plutôt dans le camp des pacifiques[1]. Malgré tout, il fut un remarquable administrateur, organisa le Dauphiné selon des modes innovants pour l'époque (Conseil delphinal et cour des comptes, université, statut delphinal pour ses états…). Il est également le rédacteur et le signataire de la Charte des Escartons qui donna à la région briançonnaise une autonomie comparable à celle des premiers cantons suisses qui, à cause de la centralisation grandissante du pouvoir royal français, ne déboucha pas sur la création d'une entité similaire.

Biographie[modifier | modifier le code]

Il est fils de Jean II, dauphin de Viennois, et de Béatrice de Hongrie[N 1],[2].

Jeunesse[modifier | modifier le code]

Ayant reçu le Faucigny en héritage de son oncle Hugues, il entreprend à 18 ans un tour d'Europe pour apprendre le métier de prince et passe notamment plusieurs mois chez son oncle maternel Carobert, en Hongrie, puis chez son grand-oncle Robert d'Anjou, à la cour de Naples. Il épouse en Marie des Baux (vers 1319-), fille de Bertrand des Baux de Berre († 1351), comte d'Andria et de Béatrice d'Anjou (1295 † 1321), nièce de Robert d'Anjou et membre de la famille des seigneurs des Baux, une puissante maison du comté de Provence[2]. En 1333, le couple a un fils, prénommé André, mais celui-ci meurt en 1335[3]. Le généalogiste André Favyn suggère un premier mariage antérieur d'Humbert avec une infante de Majorque, bien qu'aucun document ne soit connu pour vérifier ce fait[4]. Cependant, cette même année, Humbert, âgé de vingt ans, est précipitamment appelé à remplacer son frère Guigues, mort au cours de l'assaut d'un château près de Voiron[5].

Dès 1334, il est cité en sus du titre de dauphin de Viennois, comme ses prédécesseurs, de comte de Vienne, d'Albon et seigneur de la Tour[6].

Ayant pour référence les cours de Hongrie et de Naples, Humbert entretient alors une cour fastueuse dans son château de Beauvoir-en-Royans, ce qui est mal perçu par ses contemporains et s'équilibre mal avec la richesse réelle du dauphin[2]. À la différence de ses prédécesseurs, Humbert ne mène plus cette vie itinérante d'un château delphinal à l'autre et préfère rester à Beauvoir.

Humbert II est le créateur du Conseil delphinal en 1337, puis de la cour des comptes à partir de 1340. Il fonde également l'université de Grenoble le avec l'accord du pape Benoît XII[7]. En 1337, il se rendent en pèlerinage à la grotte de la Sainte-Baume accompagné de Pétrarque[8],[9].

L’affaire du Dauphiné[modifier | modifier le code]

Après la perte de son fils unique André, en , Humbert II en proie à des accès de découragement projette régulièrement de céder son héritage. Dès 1337 il propose de vendre ses États à Robert de Naples, mais celui-ci ne veut pas payer le prix demandé[10],[11]. Malgré tout, comme tout prince de cette époque, Humbert II eut plusieurs enfants adultérins (un fils : Amédée de Viennois dont descendance , et deux filles : Catherine mariée au bâtard de Lucinge, et Marie, religieuse), mais ceux-ci ne purent lui succéder à la dignité delphinale.

Humbert nomme le , Agoult des Baux, oncle de son épouse, administrateur de ses finances privées. En , le Dauphin, confronté au problème de ses caisses vides, lui donne ordre de poursuivre les Juifs, les Lombards et les Toscans dans ses États. Accusés d’usure et de contrats usuriers, ils sont taxés de fortes amendes[N 2]. Le pape Benoît XII envoie aussitôt sur place Johannes de Badis, son Grand Inquisiteur de Provence, pour rechercher les juifs convertis et relaps du Dauphiné[N 3].

Le rôle politique d’Agoult des Baux s’amplifie lors des négociations de paix entre le Dauphin et Vienne, en , à la suite de la révolte des Viennois. Au cours de l’été, Humbert doit emprunter 30 000 florins au pape pour solder ses troupes ; sa dette est gagée sur ses terres et il propose au pontife de lui vendre le Dauphiné contre 452 000 florins. Les difficultés financières s'accumulant, Humbert fait procéder à l'inventaire de ses biens en 1339, par le biais d'une enquête delphinale, dans le but de vendre sa principauté au pape Benoît XII. Sans doute mis au courant des convoitises du roi de France, le pontife lui en offre 150 000, tout en décidant d’enquêter sur les revenus domaniaux du Dauphin. Entre janvier et , Jean de Cojordan, évêque d'Avignon, trésorier pontifical, et Jean d’Arpadelle[N 4], chapelain du pape, parcourent le Viennois et le Briançonnais pour une enquête papale[12]. Ils estiment les revenus annuels du Dauphin à 27 970 florins[13], ce qui donne une valeur théorique de vente pour le Dauphiné de 559 400 florins. La transaction avec le pape échoue.

La politique delphinale de la France[modifier | modifier le code]

Carte du royaume de France en 1328 soulignant l'influence culturelle de celui-ci et la situation géographique du Dauphiné, voisin du sud-est de ce royaume.
Le royaume de France en 1328 et ses relations avec certains des royaumes voisins ; le Dauphiné est un voisin du sud-est.
  • Possessions de Jeanne de Navarre
  • États pontificaux
  • Territoires contrôlés par Édouard III
  • Zone d'influence économique anglaise
  • Zone d'influence culturelle française

En effet, Philippe VI de Valois et son conseiller l’archevêque de Rouen, Pierre Roger, avaient senti se dessiner une opportunité. Le roi de France engagea d’abord à son service le brillant Agoult des Baux. Il fut d’abord nommé Sénéchal de Beaucaire par Philippe VI, le , puis Sénéchal de Toulouse et d’Albi, le . Puis, il fit savoir au pontife qu’il acceptait l’accession de son conseiller à la pourpre[N 5]. C’est ce que fit Benoît XII par lettre bullée, en date du . L’archevêque de Rouen arriva à Avignon le et reçut, le 12, le chapeau de cardinal.

Au cours de cette année, le Dauphin voulut à nouveau mater une « émotion » à Vienne. Il se tourna vers le pape et obtint 15 000 florins qu’il promit de rembourser sous six mois. En , il demanda un délai de paiement. En , il était toujours débiteur de 16 200 florins. Le cardinal Pierre Roger intervint auprès de Benoît XII qu’il persuada d’excommunier le mauvais payeur.

Affolé, le pieux Humbert offrit alors au pape de couvrir sa dette en donnant au Saint-Siège quelques-uns de ses fiefs. Toujours conseillé par Pierre Roger, Benoît XII fit une réponse négative à l’ambassade delphinale. Sans héritier, endetté jusqu’au cou, rejeté de l’Église, Humbert II allait être, sous peu, une proie facile pour le royaume de France.

Clément VI et le rattachement du Dauphiné à la France[modifier | modifier le code]

Avec le nouveau pape Clément VI, ancien conseiller de Philippe VI de Valois sur le trône pontifical, le sort du Dauphiné était scellé : il serait rattaché à la France. Sur l’initiative de Clément VI, un grand pas fut franchi au cours du mois de . Le roi et son fils aîné, Jean de Normandie, vinrent rencontrer Humbert II dans la cité papale.

Le Dauphin du Viennois était aux abois. Toujours à la recherche de liquidités, il se vit proposer par le roi de France un arrangement financier qui le tirerait du besoin. S’il acceptait que le Dauphiné fût dévolu au second fils du roi après sa mort, ses dettes seraient réglées et il jouirait d’une rente annuelle[N 6]. Humbert sollicita un temps de réflexion.

Depuis quelques mois, il avait pris contact avec son oncle, Robert d’Anjou, pensant que le comte de Provence serait intéressé par l’achat de ses États qui jouxtaient les siens[14]. La réponse de Robert d’Anjou se faisait attendre. Et pour cause… Il venait de rendre son dernier soupir à Naples[N 7]. Le Dauphin tenta alors de trouver un palliatif. Le , il vendit leur indépendance à cinquante-deux paroisses des Alpes qui se regroupèrent pour former la « République des Escartons »[N 8]. Mais sous la pression pontificale - il n'y aurait pas de levée d'excommunication si Humbert II n'obtempérait pas - le Dauphin signa un accord avec la France le [11].

Clément VI fait céder le Dauphin Humbert II[modifier | modifier le code]

Clément VI, toujours attentif à la question dauphinoise, écrivit à Philippe VI, le , pour lui proposer que le fils aîné du roi de France portât le titre de Dauphin[N 9]. Le pape envisagea ensuite de lever l’excommunication d'Humbert II, qui avait remboursé jusqu’au dernier florin à la Révérende Chambre Apostolique, mais il y mit une condition. Il devait lui céder le fief de Visan[N 10]. L’accord passé, le , Clément VI reçut Humbert dans son palais de Villeneuve-lès-Avignon. Le Dauphin du Viennois rendit hommage et le pape leva les sentences.

Clément VI put entrer en possession de son fief de Visan à la fin du mois d’octobre au moment où, sur son initiative, arrivaient à Avignon les émissaires de France et d’Angleterre pour discuter d’une nouvelle trêve sous l’égide du cardinal Jean Raymond de Comminges[N 11].

Les croisades pontificales[modifier | modifier le code]

Grand sceau de Humbert II de Viennois

Début 1345, Humbert se proposa pour commander la croisade projetée pour secourir la citadelle de Smyrne, conquise par une précédente expédition le mais qui était depuis assiégée par les Turcs. Le pape, avec une certaine réserve, accepta de le nommer, le , capitaine général du Siège apostolique, commandant l’armée chrétienne. Le dauphin, après avoir vidé les caisses de son trésor, embarqua à Marseille le , en compagnie de Jean Ier Le Meingre, dit Boucicaut, qui s’était déjà illustré à Smyrne. Ce « prince médiocre » – l’expression est d’Y. Renouard – allait mener une expédition sans envergure. Après avoir confié le gouvernement du Dauphiné à Henri de Villars, archevêque de Lyon, il partit en compagnie de son épouse Marie des Baux, âgée de vingt-six ans, et de sa mère, Béatrix de Hongrie. Très soucieux de leur santé, le dauphin passa son premier hiver à Rhodes. Il battit le les Turcs qui assiégeaient Smyrne. Il fit ensuite engager des pourparlers avec eux après cette petite victoire. Les négociations duraient encore en 1347, année où décéda la dauphine, au cours du mois de mars. Effondré de chagrin, Humbert II retourna en Dauphiné en . Il était ruiné.

Annexion du Dauphiné à la France[modifier | modifier le code]

En , le roi de France Philippe VI achète pour 120 000 écus la ville de Montpellier à Jacques III de Majorque. Puis, il repense au Dauphiné. Pour s'assurer que le Dauphiné, devenant fief du fils aîné du roi de France, ne soit pas assimilé à n'importe quel autre domaine du souverain, Humbert signe le le traité de Romans avec le royaume de France. Ce traité instaure le « Statut delphinal », ce qui exempte les Dauphinois de nombreux taxes et impôts. La défense de cette constitution particulière sera l'objet principal des discussions du parlement provincial dans les siècles qui suivront.

Le , les conseillers du roi Guillaume Flote, Pierre de La Forest et Firmin de Coquerel, évêque de Noyon, après plusieurs semaines passées à Tain-l'Hermitage, obtiennent l’accord d'Humbert II pour la cession. Le suivant, le dauphin du Viennois aliène enfin ses droits viagers en faveur de Charles, fils de Jean de Normandie et aîné des petits-fils de Philippe VI, qui est donc le premier à porter le titre de dauphin de France. Humbert cède ses domaines contre 200 000 florins et une rente annuelle de 24 000 livres payable à Pâques ou à la Trinité. La cérémonie du transport (qui est le nom donné à la cession pour sauver les apparences) se déroule à Lyon, au couvent des dominicains de la place Confort. Au cours de celle-ci, Humbert « se dévêt » de sa suzeraineté pour en « saisir et investir » Charles. Il lui remet l’épée du dauphin au manche incrusté du bois de la Vraie Croix, la bannière de saint Georges éclaboussée du sang du dragon, le sceptre et l’anneau delphinaux. Le nouveau dauphin jure, entre les mains de Jean de Chissé, évêque de Grenoble, de respecter les franchises du Dauphiné, en particulier les statuts solennels promulgués par Humbert II.

Fin de vie[modifier | modifier le code]

Humbert II
Frère prêcheur
Image illustrative de l’article Humbert II de Viennois
Plaque à l'emplacement de l'ancien Couvent des Jacobins de la rue Saint-Jacques (aujourd'hui le no  14 de la rue Soufflot à Paris 5e), où est inhumé Humbert II.
Biographie
Naissance
La Tour-du-Pin
Ordre religieux Ordre des Prêcheurs
Décès
Clermont (Auvergne)
Évêque de l'Église catholique
Ordination épiscopale
Archevêque émérite de Reims
Patriarche d'Alexandrie
Évêque de Paris
Archevêque-duc de Reims

Blason
(en) Notice sur www.catholic-hierarchy.org
Relevé de la tombe d'Humbert II au couvent des Jacobins de Paris.

Dès le lendemain, Humbert entre dans l'ordre des Prêcheurs où il prend l'habit de saint Dominique et se retire au couvent de Montaux. Il est ordonné prêtre par Clément VI, le , à Notre-Dame des Doms d’Avignon. Il reçoit les trois ordres majeurs, lors des trois messes de Noël, en présence du roi Jean et du dauphin Charles. Nommé patriarche d’Alexandrie le , il est chargé de l’administration perpétuelle du diocèse de Reims à partir du . Puis le patriarche se met à rêver de gloire ecclésiastique. En 1355, il décide d’entreprendre le voyage jusqu’à Avignon pour obtenir d'Innocent VI le titre et la fonction d’évêque de Paris. Il n’achève pas son périple puisqu’il meurt le dans le couvent des Jacobins de Clermont d’Auvergne, à l'âge de 43 ans. Il est inhumé au couvent des Jacobins à Paris.


Seigneuries delphinales[modifier | modifier le code]

Humbert II de Viennois au Palais du parlement du Dauphiné à Grenoble.

Benoît XII et Clément VI entreprirent de confisquer Visan au Dauphin Humbert II. Le premier pontife l'excommunia pour dettes et le second n'accepta de lever la sentence que le en se faisant rétrocéder Visan, qui contrôlait les communications entre le Comtat Venaissin et Valréas. Furieux, les Visanais refusèrent de prêter hommage tant que leurs privilèges n'auraient pas été avalisés. Ce que fit Clément VI le [15]. Le passage de Visan sous le contrôle pontifical fit fermer l'Hôtel des Monnaies delphinal. Celui-ci frappait des florins d'or, des vingtains et des douzains blancs, ainsi que des redortats et des deniers noirs[16].

Saint-Marcellin-lès-Vaison et Saint-Romain-en-Viennois furent des enclaves delphinales en Comtat Venaissin.

Chabottes, situé dans le Champsaur dépendait à la fois du dauphin et du seigneur de Montorcier.

Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

  1. fille de Charles Martel, roi titulaire de Hongrie, et de Clémence de Habsbourg ; née à Naples en 1285, morte à Saint Just de Claix en 1354 ; son corps est transféré en 1910 dans la collégiale Saint Barnard à Romans-sur-Isère, où l'on peut voir sa pierre tombale moderne.
  2. Jacques le Goff a explicité : « Dans ce nouveau monde où l’argent est vainqueur, où la cupidité (avaritia), péché bourgeois, détrône, à la tête des sept péchés capitaux, l’orgueil (superbia), péché féodal par excellence, l’usurier, spécialiste du prêt à intérêt, devient un homme nécessaire et détesté, puissant et fragile à la fois » (La bourse et la vie, Paris, 1986).
  3. Avec l’accord du Dauphin, l’inquisiteur Johannes de Badis s’attacha à pourchasser les relaps en particulier le juif espagnol Alfondus Diaz, converti à la foi catholique et qui continuait à pratiquer son ancienne religion.
  4. remplaçant Louis de Petragrossa, archiprêtre de Viviers, tombé malade en janvier
  5. Lors de la nomination annuelle des nouveaux membres du Sacré Collège en 1335, au début de son pontificat, Benoît XII proposa le chapeau de cardinal à Pierre Roger. Le roi de France l’informa, qu’en l’état actuel des choses, il ne désirait pas se séparer de son conseiller et la promotion fut repoussée.
  6. Si le Dauphin restait sans héritier légitime, Philippe VI promettait d’apurer ses passifs à la hauteur de 120 000 florins et de lui verser, chaque année à Pâques ou à la Trinité, une rente de 22 000 livres. Cette proposition finalisait le traité, signé l’année précédente à Villeneuve-lès-Avignon, entre Humbert II et Pierre de Cugnières, Guillaume Flotte et Jean Richier, conseillers du roi, qui prévoyait le rattachement du Dauphiné à la France.
  7. Robert d’Anjou, qui s’était fait recevoir le chez les frères de la Pauvre Vie, s’éteignit le , après trente-deux ans de règne.
  8. Escarton provenait du provençal escarta (fixer les impôts). La charte du est fondatrice de cette République des Escartons qui fut l’une des premières d’Europe avec celles de Saint-Marin, des cantons d’Helvétie et des landers autrichiens. À cheval sur les deux versants des Alpes, la "République" regroupait cinq escartons : Oulx et Clurenflouer, Château-Dauphin (Casteldelfino et non Mont-Dauphin) du côté transalpin, le Queyras et le Briançonnais, du côté cisalpin.
  9. Car, expliquait le pape au roi, « cette province est sise assez ès frontière du royaume ». Le Valois dut comprendre cette raison puisqu’il accepta la suggestion pontificale. En compensation, il cédait à Humbert II les seigneuries de Beaumont-le-Roger et de Breteuil. Le lendemain, Clément VI faisait parvenir une autre missive «À notre cher fils Hélion de Villeneuve, Maître de l’Hôpital de Saint-Jean de Jérusalem » lui confiant que « Désireux d’étendre en tous lieux le culte divin, nous formons avec ferveur le vœu de pouvoir accomplir et réaliser de notre vivant l’extension durable de ce culte dans l’église patriarcale de Rosiers où nous sommes nés de nouveau de l’eau du saint baptême. Nous envisageons de créer et d’établir un prieuré de moines noirs de l’ordre de saint Benoît dont nous fûmes profès dans nos jeunes années avec un effectif déterminé soumis au monastère de la Chaise-Dieu, pour servir Dieu dans l’église susdite. Donné à Avignon, le , Clément VI ».
  10. Humbert II, prêt à tout pour réintégrer le sein de l’Église romaine, accepta si, en dédommagement, il obtenait la moitié de la juridiction de Romans qui dépendait de l’évêché de Valence. Clément VI n’émit aucune objection. Et la transaction se fit avec l’aval de l’évêque Pierre de Chalus, l’ancien abbé de Cluny. C’était pourtant un véritable marché de dupe car, comme l’ont fait remarquer un certain nombre d’historiens : «Le Saint Siège, outre les seize mille florins, reçut Visan qu’il convoitait en échange de la moitié de Romans qui appartenait au Dauphin et reçut, en plus, la haute seigneurie de cette ville qui ne lui appartenait pas ». Il faut dire que Clément VI, lui-même, en fut conscient puisqu’au cours de cette année 1344, il fit reverser au Dauphin douze mille florins.
  11. Ces pourparlers se déroulèrent à Avignon au cours des mois d’octobre et de novembre. Ce fut en cette occasion que Clément VI fit parvenir une lettre bullée à Henri de Villars, archevêque de Lyon, où il indiquait : « Le pape est le garant sur terre des intérêts du Roi pacifique et céleste, chargé de promouvoir la paix entre tous les fils de l’Église ».

Références[modifier | modifier le code]

  1. Delaville Le Roulx, Les Hospitaliers à Rhodes jusqu'à la mort de Philibert de Naillac, Ernest Leroux, Paris, 1913, p. 96-97
  2. a b et c Paul Fournier, « Le dauphin Humbert II », Comptes rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres,‎ , p. 581-599 (www.persee.fr/doc/crai_0065-0536_1912_num_56_8_73111)
  3. Fournier 1912, p. 585 et 597.
  4. (es) Tomeu Servera, « Sobre un posible matrimonio del delfín Humberto II con una infanta de Mallorca » Accès libre (consulté le )
  5. Fournier 1912, p. 586.
  6. Ulysse Chevalier (acte 27109), Regeste dauphinois, ou Répertoire chronologique et analytique des documents imprimés et manuscrits relatifs à l'histoire du Dauphiné, des origines chrétiennes à l'année 1349, t. 5, fascicules 13-15, (lire en ligne), p. 331
  7. Jacques Berriat-Saint-Prix, Histoire de l'ancienne université de Grenoble, page 8.
  8. « Pétrarque en Provence », sur Provence 7 (consulté le ).
  9. Henry Cochin, Le Frere de Petrarque Et Le Livre Du Repos Des Religieux, Slatkine, , 245 p. (lire en ligne), p. 51.
  10. Fournier 1912, p. 597.
  11. a et b Claude Faure, « Un projet de cession du Dauphiné à l'Église romaine (1338-1340) », Mélanges d'archéologie et d'histoire, Paris ; Rome, E. Thorin ; joseph Spithöver, vol. 27, no 1,‎ , p. 197 (ISSN 2036-0258, lire en ligne).
  12. Faure Claude, « Un projet de cession du Dauphiné à l'Église romaine (1338-1340) », In : Mélanges d'archéologie et d'histoire t. 27, 1907, p. 155-161
  13. Claude Faure, 1907, p. 191
  14. Les souverains de Naples étaient comtes de Provence et du Piémont.
  15. Jules Courtet, op. cit., p. 377.
  16. Robert Bailly, op. cit., p. 469.

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

Chroniques contemporaines
  • J. Froissart, Chroniques, texte et notes de Kervyn de Lettenhove, Bruxelles (t. IV à VIII), 1868.
  • J. Froissart, Chroniques, texte et notes de Siméon Lucé, Paris (t. IV à VIII), 1873 - 1874
  • J. Le Bel, Chronique de Jean le Bel (1326-1361), texte et notes de J. Viard et E. Deprez, t. I et II, vol. 1, 1326-, vol. 2, -1361, Société de l’Histoire de France, Paris, 1904-1905
Études générales
  • É. Baluze, Vitae paparum Avenionensium, sive collectio actorum veterum, vol. I et II. Paris, 1693.
  • Guillaume Mollat, Les papes d’Avignon (1305 – 1378), Limoges. 1949
  • Y. Renouard, La papauté à Avignon, Paris. 1954
  • B. Guillemain, La cour pontificale d’Avignon, (1309 – 1376). Étude d’une société, Paris. 1962
  • D. Paladilhe, Les papes en Avignon, Paris. 1975
  • B. Guillemain, Les papes d’Avignon (1309 – 1376), Paris. 1998 Document utilisé pour la rédaction de l’article
  • A. Lemonde, Le temps des libertés en Dauphiné. L'intégration d'une principauté à la Couronne de France (1349-1407), Grenoble, 2002
  • Jean Favier, Les papes d’Avignon, Fayard, Paris. 2006
Études particulières
  • Jules Courtet, Dictionnaire géographique, géologique, historique, archéologique et biographique du département du Vaucluse, Avignon, 1876.
  • Paul Fournier, « Le dauphin Humbert II », Comptes rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres,‎ (lire en ligne)
  • E. Muntz, L’argent et le luxe à la Cour pontificale d’Avignon, Revue des questions historiques, 1899.
  • E. Déprez, Clément VI (1342 – 1352). Lettres closes, patentes et curiales se rapportant à la France publiées et analysées d’après les registres du Vatican, Bibliothèque des écoles françaises d’Athènes et de Rome, 1er fasc. 1900
  • F. Vernet, Une bulle de Clément VI sur la fête des fous à Vienne (), Bulletin d’histoire ecclésiastique des diocèses de Valence, Gap, Grenoble et Viviers (janvier – mars). 1901
  • U. Berlière, Les suppliques de Clément VI (1342 – 1352), Institut historique belge à Rome, 1906
  • E. Déprez et G. Mollat, Clément VI (1342-1352). Lettres se rapportant à la France publiées ou analysées d’après les registres du Vatican, t. I, II et III. Paris, 1959
  • G. Mollat, Le Saint-Siège et la France sous le pontificat de Clément VI, RHFF, p. 5 – 24, 1960.
  • Robert Bailly, Dictionnaire des communes du Vaucluse, Éd. A. Barthélemy, Avignon, 1986. (ISBN 2903044279)
  • A. Demurger, Le pape Clément VI et l’Orient : ligue ou croisade ? dans Guerre, pouvoir, et noblesse au Moyen Âge. Mélanges en l’honneur de Philippe Contamine, Paris, 2000.
  • Laurent Jacquot, Société d'Études Historiques de Romans - Bourg de Péage, Humbert II et les Romanais, Les Cahiers de Léoncel, 2000.
  • Anne Lemonde, « Le dauphin Humbert II à l'école de la monarchie napolitaine. Du Dauphiné à Naples en passant par Bude et retour ». Dossier de la Revue Medioevo, .


Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]