Histoire des Francs — Wikipédia

Histoire des Francs
Image illustrative de l’article Histoire des Francs
Grégoire de Tours, Histoire des Francs, livres 1 à 6, page de frontispice. Luxeuil ou Corbie, fin du VIIe siècle. BnF, Manuscrits, Latin 17655 fol. 2.

Auteur Grégoire de Tours
Pays Drapeau de la France France
Genre Histoire
Date de parution VIe siècle

L'Histoire des Francs est une œuvre de Grégoire de Tours, évêque de Tours et historien, au VIe siècle. Le titre originel de l'ouvrage est Dix livres d’histoire (Decem libros historiarum). Il s'agit d'une histoire universelle du monde et de l'Église, écrite dans une perspective eschatologique, de la Genèse aux règnes des rois francs, en 572, à laquelle s'ajoute un ensemble de récits de vies de saints gaulois, composés de 574 à la mort de Grégoire et réunis sous le nom de Livre(s) des miracles.

Œuvre[modifier | modifier le code]

Le récit accorde une large place à la Gaule mérovingienne, que Grégoire connaît mieux que le reste du monde : cinq des dix livres et le Livre des miracles concernent l'époque de l'auteur. Ce dernier en donne une image plutôt sombre, mettant l'accent sur les conséquences désastreuses du comportement de certains rois, par opposition au comportement de leurs aïeux chrétiens, à commencer par Clovis. C'est à travers l'Histoire des Francs de Grégoire de Tours que nous est parvenue l'histoire du vase de Soissons ou du baptême de Clovis.

Pour cette raison, l'œuvre a pu être ultérieurement rebaptisée Histoire des Francs (Historia Francorum) ou Geste des Francs (Gesta Francorum) ou plus simplement Chroniques (Chronicae). Elle fait en tous cas de Grégoire de Tours le père d'une « histoire nationale » des Francs, le principal historien des Mérovingiens et la source majeure dont nous disposons sur leurs règnes.

L'œuvre de cet éducateur était destinée au peuple chrétien à l'époque, de sorte que soit encore améliorée leur connaissance de l'histoire au regard de la conversion d'un peuple barbare, Francs, à la vraie foi, notamment celle de Clovis. C'est la raison pour laquelle il l'écrivit en latin mi-littéraire mi-parlé[1], de telle façon qu'Erich Auerbach peut écrire que « la langue vernaculaire fait partout et indubitablement sentir sa présence dans cette œuvre »[2]. Dans cette optique, Grégoire de Tours y citait un grand nombre de dialogues, discours, discussions, et cette caractéristique est surtout visible dans la numérisation achevée par Fournier, conversations indiquées en bleu.

Par la suite, l’Histoire des Francs a pu servir d'inspiration à d'autres chroniqueurs, notamment à Bède le Vénérable dans son Histoire ecclésiastique du peuple anglais (Historia ecclesiastica gentis Anglorum). C'est peut-être à cause du livre de Bède, un des plus populaires en Europe durant le Moyen Âge, que celui de Grégoire a reçu en retour l'appellation d'Histoire ecclésiastique des Francs (Historia ecclesiastica Francorum).

L’Histoire des Francs a été continuée durant les siècles suivants par des auteurs inconnus, auxquels ont été donnés les noms de Frédégaire et Pseudo-Frédégaire.

Sa valeur en tant que document historique[modifier | modifier le code]

À l'exception du début du Livre I, Grégoire de Tours utilisait principalement un certain nombre de matériaux écrits. Donc, il pouvait profiter des archives ecclésiastiques au regard des histoires des églises alors que sa connaissance par rapport aux guerres n'était pas suffisante, faute de documents[3]. Ainsi, concernant la vie de Clovis, il bénéficiait d'une biographie de saint Remi de Reims, écrite peu de temps après la mort de ce saint et meilleure que celle qui remplaça cette écriture sous le nom de l'évêque Venance Fortunat, mais sans valeur historique[4],[3]. De plus, lorsque l'œuvre fut écrite, il pouvait profiter des témoins encore vivants, notamment ceux de l'ancienne reine Clotilde qui avait demeuré dans la ville de Tours, de laquelle Grégoire était évêque, plus précisément dans l'abbaye Saint-Martin[1].

Étant donné que la mentalité au VIe siècle était différente de celle de nos jours, il faut certes que soient scientifiquement vérifiés tous les renseignements dans cette œuvre. De plus, son édition doit être critique. À savoir, encore faut-il une ou des conditions suffisantes. Nonobstant, il s'agit de meilleurs documents ou témoignages de l'époque, grâce à « son esprit de recherche, une connaissance approfondie de la Gaule du VIe siècle[3] » ainsi qu'à sa haute fonction publique et à celle de sa famille. Par exemple, le roi de Bourgogne Gontran conservait son amitié avec cet auteur[5].

En sortant son œuvre Clovis en 1896, Godefroid Kurth écrivit : « L'Histoire des Francs de Grégoire de Tours est de loin le plus important de tous les documents historiques relatifs à Clovis. À elle seule, elle dépasse en importance et en intérêt tous les autres réunis. Si nous ne la possédions pas, c'est à peine si nous saurions de ce roi autre chose que son existence, et çà et là un trait curieux. Sans elle, ce livre n'aurait pu être écrit. Il est indispensable de connaître la valeur d'un témoignage si précieux[3]. » Donc, il s'agit de l'une des meilleures sources du haut Moyen Âge qui nous donne de nombreuses conditions nécessaires. Cependant, si l'historien Otto Gerhard Oexle (de) voit en Grégoire un chroniqueur consciencieux, il considère que sa volonté de produire des récits qui démontrent et confirment la foi chrétienne, rend son œuvre « objectivement fausse »[6].

Selon Rémi Brague, expert de la pensée chrétienne médiévale à l'Université Paris I - Sorbonne, cette œuvre est l'une des plus difficiles qui soient à analyser par les étudiants débutants, car l'enchevêtrement de données historiques, métahistoriques, religieuses et personnelles rend l'usage d'un esprit historique critique absolument nécessaire, et donc requiert une formation d'Histoire et d'Archives conséquente.

Composition[modifier | modifier le code]

Manuscrits[modifier | modifier le code]

Manuscrit achevé à la fin du VIIe siècle, vraisemblablement à l'abbaye de Luxeuil ou à Saint-Pierre de Corbie. Au IXe siècle, il était conservé à cette dernière. En 1756, la Bibliothèque du roi accueillit ce manuscrit [lire en ligne (fac-similé)]
  • Bibliothèque municipale de Cambrai, manuscrit 624
Ce manuscrit fut découvert, par Dom Bouquet, dans une église de Cambrai. Il s'agit de dix tomes dont six livres avaient été écrits en grandes lettres romaines onciales. Les quatre derniers sont moins anciens[8].
Manuscrit mutilé, au cours du chapitre 29 du livre X ; copié en minuscule caroline dans la seconde moitié du VIIIe siècle[9] [lire en ligne]

Publications[modifier | modifier le code]

Publications originales[modifier | modifier le code]

  • 1561 : Gregorii Turonensis, Historia Francorum, cum Adnis Viennensis chronicon, Paris[10],[a 3]
  • 1610 : Grégoire de Tours, L'Histoire françoise de saint GRÉGOIRE de Tours, contenue en dix livres, augmentée d'un onzième livre, traduite du latin par C. B. D., traduction par Claude Bonet, Seb. du Molin, Tours[11],[a 3]
  • 1668 : Grégoire de Tours, Les Histoires de S. Grégoire, évesque de Tours, contenant ses livres de la Gloire des Martyrs & des Confesseurs, avec les quatre Livres de la Vie de S. Martin, & celui de la Vie de Pères, traduction par Michel de Marolles, Frédéric Leonard, Paris[a 3] [lire en ligne : seconde partie]
  • 1699 : Grégoire de Tours, traduction par Thierry Ruinart[12]
  • 1823 : Grégoire de Tours, Histoire des Francs, dans la collection des Mémoires relatifs à l'histoire de France, depuis la fondation de la monarchie française jusqu'au XIIIe siècle, traduction par François Guizot, J.-L.-J. Brière, Paris
  • 1836 - 1838 : Sancti Georgii Florentii Gregorii / Georges Florent Grégoire, Historiæ ecclesiasticæ Francorum / Histoire ecclésiastique des Francs, texte en latin et traduction par Joseph Guadet et N. R. Taranne, 4 tomes, Société de l'histoire de France et Édition Renouard, Paris
  • 1861 : Grégoire de Tours, Histoire des Francs, nouvelle édition de Guizot, augmentée de la géographie par Alfred Jacobs, 2 tomes, Librairie Académique, Paris[13]

Voir aussi : publications depuis le XIXe siècle dans la référence Wikipédia

Réimpressions chez Hachette Livre BnF[modifier | modifier le code]

  • Histoire des Francs. 1 (Éd. 1823),
  • Histoire des Francs. 2 (Éd. 1823),
  • Histoire ecclésiastique des Francs. Suivie d'un sommaire de ses autres ouvrages, et précédée de sa vie écrite au Xe siècle Tome 1 (Éd. 1859 - 1862), 2012 (ISBN 978-2-01-255429-0) 338 p.
  • Histoire ecclésiastique des Francs. Suivie d'un sommaire de ses autres ouvrages, et précédée de sa vie écrite au Xe siècle Tome 2 (Éd. 1859 - 1862), 2012 (ISBN 978-2-01-255430-6) 488 p.
  • Histoire des Francs, livres I - VI : texte du manuscrit de Corbie. Bibliothèque nationale, ms. latin 17655 (Éd. 1886), 2017 (ISBN 978-2-01-288871-5) 297 p.
  • Histoire des Francs, livre VII - X : texte du manuscrit de Bruxelles, Bibliothèque royale de Bruxelles, ms. 9403 (Éd.1893), 2012 (ISBN 978-2-01-255271-5) 253 p.

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. a et b http://expositions.bnf.fr/carolingiens/antho/02.htm site officiel de la Bibliothèque nationale, dans le Trésor carolingien
  2. Grégoire de Tours, L'histoire des rois Francs, traduction de J.J.E. Roy, Gallimard coll. L'aube des peuples, préf. d'Erich Auerbach, 1990, p.11
  3. a b c et d Godefroid Kurth, Clovis, p. 538 - 543, Tallandier, Paris 2000 (première édition, 1896)
  4. Saint Gregory (Bishop of Tours), Histoire ecclésiastique des Francs, , 329 p. (lire en ligne), p. 219.
    Livre II, 31 : « Nous avons encore aujourd'hui un livre de sa vie, où il est dit qu'il ressuscita un mort. »
  5. Saint Gregory (Bishop of Tours), Histoire ecclésiastique des Francs, , 352 p. (lire en ligne), p. 65.
    Livre VII, 2
  6. Otto Gerhard Oexle, Les tendances actuelles de l'histoire du Moyen Age en France et en Allemagne, Publications de la Sorbonne, , p. 85.
  7. saint Gregorius (évêque de Tours), Sancti Georgii Florentii Gregorii episcopi Turonensis Historiae ecclesiasticae Francorum libri decem, , 568 p. (lire en ligne), p. 270.
  8. Memoires De La Societe D'emulation De Cambrai, , 646 p. (lire en ligne), p. 249.
  9. Livre publié en par Gaston Collon, introduction p. i, note n° 1 [1]
  10. Catalogues de livres des bibliothèques des collèges des ci-devant Jésuites de Bruxelles et de Malines, , 368 p. (lire en ligne).
  11. Antoine-Alexandre Barbier, Dictionnaire des ouvrages anonymes et pseudonymes, composés, traduits ou publiés en Français et en Latin, avec les noms des auteurs..., , 564 p. (lire en ligne), p. 132.
  12. Annuaire-bulletin de la Société de l'histoire de France, , 238 p. (lire en ligne), p. 12.
  13. saint Gregorius (évêque de Tours), Les livres des miracles et autres opuscules de Georges Florent Grégoire, évêque de Tours, , 398 p. (lire en ligne), p. 316.

Annexes[modifier | modifier le code]

Sur les autres projets Wikimedia :

Références bibliographiques[modifier | modifier le code]

  • François Guizot, Collection des mémoires relatifs à l'histoire de France depuis la fondation de la monarchie jusqu'au 13e siècle ; avec une introduction, des supplémens, des notices et des notes par M Guizot : Histoire des Francs, par Grégoire de Tours, J.-L.-J. Brière, Paris 1823 [lire en ligne]
  1. p. xix
  2. a b c d e f g h et i p. xx
  3. a b et c p. xxi

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]

Historiæ eccleasiasticæ Francorum et Histoire ecclésiastique des Francs[modifier | modifier le code]

Édition en latin publiée par la Société de l'histoire de France

Édition bilangue latin-français (traduction par Joseph Guadet ainsi que Taranne) et publiée par la Société de l'histoire de France

Histoire des Francs[modifier | modifier le code]

Traduction par Joseph Guadet

Traduction par François Guizot

Fac-similé[modifier | modifier le code]

Numérisés par François-Dominique Fournier[modifier | modifier le code]