Ensemble vide — Wikipédia

Un symbole qui représente l'ensemble vide.

En mathématiques, l'ensemble vide est l'ensemble ne contenant aucun élément.

Notation[modifier | modifier le code]

Autre notation de l'ensemble vide.

L'ensemble vide peut être noté d'un O barré[1], à savoir ∅ ou simplement { }, qui est une paire d'accolades ne contenant qu'une espace, pour représenter un ensemble qui ne contient rien. La notation ∅ a été introduite par André Weil, dans le cadre de l'institution de notations par le groupe Bourbaki[2]. Von Neumann dans son article de 1923[3],[4], qui est l'une des premières références qui l'aborde, le note O.

Exemples[modifier | modifier le code]

Les ensembles et sont tous deux égaux à l'ensemble vide[5].

Propriétés[modifier | modifier le code]

Pour tout ensemble A :

  • l'ensemble vide est un sous-ensemble de A :∅ ⊂ A ;
  • l'union de A avec l'ensemble vide est A :
    ∅ ∪ A = A ∪ ∅ = A,
    soit : l'ensemble vide est neutre pour la réunion ;
  • l'intersection de A avec l'ensemble vide est l'ensemble vide :
    ∅ ∩ A = A ∩ ∅ = ∅,
    soit : l'ensemble vide est absorbant pour l'intersection ;
  • le seul sous-ensemble de l'ensemble vide est l'ensemble vide lui-même :
    A ⊂ ∅ ⇔ A = ∅,
    donc l'ensemble des parties de l'ensemble vide est un singleton, dont l'élément est l'ensemble vide :  ;
  • le produit cartésien de A par l'ensemble vide est vide :
    A × ∅ = ∅ × A = ∅,
    soit : l'ensemble vide est absorbant pour le produit cartésien ;
  • si A est non vide, l'ensemble des applications de A dans l'ensemble vide est vide :
    A ≠ ∅ ⇒ ∅A = ∅ ;
  • l'ensemble des applications de l'ensemble vide dans A est un singleton, dont l'élément est l'« application vide de ∅ dans A » (de graphe ∅)[6]. Si on la note ∅A, on a donc :
    A = {∅A}.
    Par exemple, {0, 1} = {∅{0, 1}}, ce qui est cohérent avec l'égalité ci-dessus.

L'union d'une famille d'ensembles indexée par ∅ est égale à ∅.

L'intersection d'une famille d'ensembles indexée par ∅ n'est pas définie sans faire référence à un ensemble qui les contient tous. Auquel cas, elle est égale à ce dernier.

∅ est fini ; son cardinal est 0 : card(∅) = 0.

∅ admet une unique topologie, qui est {∅}. Elle est à la fois grossière (donc cet espace topologique est connexe) et discrète (donc cet espace est compact, comme tout espace fini discret).

∅ admet une unique tribu, qui est {∅} (grossière et discrète).

Deux ensembles sont égaux s'ils contiennent les mêmes éléments ; c'est l'axiome d'extensionnalité de la théorie des ensembles. Par conséquent, il ne peut y avoir qu'un ensemble ne contenant aucun élément, donc un seul ensemble vide.

Dans certaines variantes de la théorie des ensembles, on peut introduire des « objets » appelés ur-elements[7], qui eux aussi n'ont pas d'éléments et peuvent aussi être éléments d'ensembles, mais qui, contrairement à l'ensemble vide, ne sont pas des ensembles.

Subtilité de la notion d’ensemble vide[modifier | modifier le code]

L'ensemble vide ne contient rien, mais comme c'est un ensemble, il n’est pas rien. C'est la base sur laquelle s'appuie von Neumann[3],[4] pour construire les entiers et les ordinaux.

La notation {∅} n'a pas le même sens que la notation ∅ ; en effet, l’ensemble désigné par ∅ n'a aucun élément (car c’est l'ensemble vide), tandis que l’ensemble désigné par {∅} en a un (cet élément est l'ensemble vide). D'ailleurs, von Neumann définit 0 comme étant ∅ et 1 comme étant {∅}.

Rappelons (voir supra) que l'ensemble vide est un sous-ensemble de n'importe quel ensemble A, c'est-à-dire que pour tout élément x de ∅, x appartient à A, ce qui s'écrit formellement : (∀x ∈ ∅) x ∈ A. Plus généralement, un énoncé de la forme « tout élément de l'ensemble vide possède la propriété P  », ou plus formellement (∀x ∈ ∅) P(x), qui est une abréviation de ∀x (x ∈ ∅ ⇒ P(x)), est toujours vrai, par ex falso quodlibet ; de même, tout énoncé de la forme «il existe un élément de l'ensemble vide possédant la propriété P  » est toujours faux (ce second résultat est sans doute plus évident, mais ce n'est que la négation de l'affirmation précédente).

L'axiome de fondation affirme que toute suite se termine, donc il existe un tel que, dans cette suite, .

L'ensemble vide dans la théorie axiomatique des ensembles[modifier | modifier le code]

L'ensemble vide est essentiel dans la théorie des ensembles ou théorie ZFC, son existence est assurée par l'axiome de l'ensemble vide. Son unicité découle de l'axiome d'extensionnalité.

De plus, on peut démontrer en utilisant le schéma d'axiomes de compréhension, que l'existence d'un ensemble quelconque implique l'axiome de l'ensemble vide, ce qui évite, quand on formalise la théorie des ensembles en logique du premier ordre, de faire appel à un axiome spécifique pour l'existence de l'ensemble vide (voir axiome de l'ensemble vide).

Le point de vue intuitionniste[modifier | modifier le code]

On dit, par définition, qu'un ensemble est habité (en)[8] s'il a au moins un élément.

Par conséquent :

un ensemble habité est non vide,

Sa réciproque s'énonce ainsi :

un ensemble non vide est habité,

et peut se formuler :

un ensemble qui n'est pas ∅ possède au moins un élément.

Affirmer son équivalence à un ensemble habité est non vide nécessite le tiers exclu et n'est donc pas valide en logique intuitionniste[9].

On a d'ailleurs le théorème :

  • Le principe du tiers exclu est équivalent à l'affirmation tout ensemble non vide est habité[10]

Le point de vue catégorique[modifier | modifier le code]

L'ensemble vide peut être caractérisé très simplement comme objet de la catégorie des ensembles. C'est en effet l'unique objet ayant la propriété suivante :

Pour tout ensemble E, il existe une et une seule flèche de ∅ vers E.

Dans le cas de cette catégorie, flèche signifie application. Plus généralement, un objet qui, dans une catégorie, a cette propriété est appelé un objet initial.

Notes et références[modifier | modifier le code]

(en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « Empty set » (voir la liste des auteurs).
  1. L'unicode possède trois caractères distincts U+2205 (∅) pour l'ensemble vide, U+00D8 (Ø) lettre de l'alphabet danois, et U+2300 (⌀) représentant le diamètre d'un cercle. Ces trois caractères ont la forme d'un cercle barré par un trait allant du sud-ouest au nord-est. Il est plus aisé de les distinguer de la lettre Phi majuscule de l'alphabet grec (Φ), qui elle consiste en un cercle barré d'un trait vertical. Le rond barré n'est pas non plus le zéro barré. TeX possède au moins deux graphies, et .
  2. (en) Jeff Miller, « Earliest Uses of Symbols of Set Theory and Logic », sur jeff560.tripod.com.
  3. a et b Johann von Neumann, « Zur Einführung der transfiniten Zahlen », Acta litterarum ac scientiarum Ragiae Universitatis Hungaricae Francisco-Josephinae, Sectio scientiarum mathematicarum, vol. 1,‎ , p. 199-208 (lire en ligne).
  4. a et b John von Neumann, « On the introduction of transfinite numbers », dans Jean van Heijenoort, From Frege to Gödel: A Source Book in Mathematical Logic, 1879-1931, Harvard University Press, , 3rd éd. (ISBN 0-674-32449-8, lire en ligne), p. 346-354.
  5. Saunders MacLane et Garrett Birkhoff (trad. de l'anglais par Jean Weil), Algèbre et solutions développées des exercices : structures fondamentales, les grands théorèmes, théorie de Galois, Paris, J. Gabay, (ISBN 978-2-87647-138-2, OCLC 490130463), p. 3.
  6. Très précisément, par définition d'une application, c'est le triplet (∅, A, ∅).
  7. Le préfixe « Ur » vient de ce terme allemand, qui signifie « originel ».
  8. Cette notion est due à Brouwer, voir (en) Pierre Ageron, Logiques, ensembles, catégories : le point de vue constructif, Paris, Ellipses, coll. « Mathématiques pour le 2e cycle », (ISBN 978-2-7298-0245-5), chap. 3 (« Ensembles »), p. 11.
  9. Affirmer en logique intuitionniste qu'un ensemble est habité suppose que l'on a un moyen de construire un habitant. Or en déclarant seulement « un ensemble non vide est habité » on ne fournit pas une telle construction, donc cette propriété ne peut pas être acceptée telle quelle en logique intuitionniste.
  10. Ageron 2000, p. 11.

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

Roger Godement, Analyse mathématique I : Convergence, fonctions élémentaires, Springer, , 2e éd. (1re éd. 1998) (lire en ligne), p. 9-11