Domaine (biologie) — Wikipédia

En classifications biologiques, le domaine (néolatinisé en dominium) est le premier niveau de rang, au-dessus des règnes.

Historique[modifier | modifier le code]

Le terme domaine a été introduit pour discuter de la classification du monde vivant selon un modèle divisant celui-ci en trois grands groupes supposés monophylétiques[1]. Bien que pratique, le modèle à trois domaines est critiquable puisqu'au moins l'un d'entre eux n'est pas monophylétique. Par ailleurs, certains taxonomistes lui préfèrent, au nom de l'antériorité, le terme vieilli d'empire.

Le modèle à trois domaines[modifier | modifier le code]

Une illustration plus réaliste des liens entre les 3 domaines avec les transferts horizontaux de gènes, les endosymbioses et l'embranchement des Eukaryota chez des Archaea paraphylétiques.

La classification de Carl Woese et al. (1977, 1990)[2],[3],[4] distingue trois domaines présumés monophylétiques  :

  1. le domaine Bacteria (ou Eubacteria) ;
  2. le domaine Archaea (ou Archaebacteria) ;
  3. et le domaine Eukaryota (ou Eucarya).

Ces taxons, s'ils possèdent un héritage génétique commun (les gènes impliqués dans le métabolisme général des cellules eucaryotes sont d’origine bactérienne, tandis que ceux liés aux processus de réplication et de réparation de l'ADN ainsi que de la traduction génétique sont d'origine archéenne), comportent en effet des différences fondamentales dans leurs génomes ou leur morphologie[5].

Les unicontes et bicontes sont des sous-domaines des Eucaryotes[6].

Variantes[modifier | modifier le code]

D'autres modèles ont été proposés, parmi lesquels :

Critiques[modifier | modifier le code]

Modèle des trois domaines et hypothèse éocyte (en) (modèle des deux domaines)[12].

Le modèle à trois domaines permet une vision synthétique dans une optique évolutionniste mais ne correspond pas exactement à la phylogénie du vivant.

Pour les systématiciens phylogénétiques, le modèle à trois domaines est mis en défaut s'il se confirme que les eucaryotes émergent parmi les archées d'Asgård[13]. Les archées dans leur ensemble ne constituent donc pas le groupe frère des eucaryotes et les archées seuls (sans les eucaryotes) constituent un groupe paraphylétique, les Neomura selon Thomas Cavalier-Smith. Or, la classification phylogénétique ne reconnaît que des clades (monophylétiques)[14]. La découverte des archées d'Asgård en 2015 renforce ainsi les études phylogénétiques suggérant qu'il y a seulement deux domaines, les bactéries et les archées qui forment les deux grandes lignées ancestrales indépendantes.

Pour les systématiciens évolutionnistes, la classification du monde vivant ne devrait pas se fonder uniquement sur des clades mais devrait incorporer le concept de grade évolutif[15] (voir aussi empire et plan d'organisation). De ce point de vue, les archées, procaryotes, se distinguent nettement des eucaryotes, lesquels ont beaucoup évolué avec notamment l'acquisition d'un noyau et, par endosymbiose avec une α-protéobactérie, d'une mitochondrie.

Autres rangs taxonomiques[modifier | modifier le code]

Les rangs taxonomiques[a] utilisés en systématique pour la classification hiérarchique du monde vivant sont les suivants (par ordre décroissant) :


Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

  1. En gras les sept rangs principaux (RECOFGE, sigle mnémotechnique pour Règne/Embranchement/Classe/Ordre/Famille/Genre/Espèce), en maigre les rangs secondaires. En romain les noms vulgaires, en italique les noms scientifiques.
  2. Un embranchement en zoologie, ou division en botanique, est traditionnellement caractérisé par une description schématique appelée « plan d'organisation ».
  3. a b et c Les taxons aux rangs de race et de sous-race (animaux domestiques principalement) n'ont pas de nom scientifique. Ils ne sont pas régis par le Code international de nomenclature zoologique (CINZ).

Références[modifier | modifier le code]

  1. (en) Carl R. Woese et George E. Fox, « Phylogenetic structure of the prokaryotic domain: The primary kingdoms », Proceedings of the National Academy of Sciences, vol. 74, no 11,‎ , p. 5088–5090 (ISSN 0027-8424 et 1091-6490, PMID 270744, DOI 10.1073/pnas.74.11.5088, lire en ligne, consulté le )
  2. (en) C. R. Woese, W. E. Balch, L. J. Magrum, G. E. Fox and R. S. Wolfe, « An ancient divergence among the bacteria », dans Journal of Molecular Evolution, vol. 9, 1977, p. 305–311
  3. Carl R. Woese & George E. Fox, "Phylogenetic structure of the prokaryotic domain : The primary kingdoms", Proc. Natl. Acad. Sci. USA, Vol.74, No.11, November 1, 1977, p. 5088-5090. DOI 10.1073/pnas.74.11.5088
  4. (en) Carl R. Woese, Otto Kandlert & Mark L. Wheelis, "Towards a natural system of organisms : Proposal for the domains Archaea, Bacteria, and Eucarya", Proc. Natl. Acad. Sci. USA, Vol.87, No.12, June 1, 1990, p. 4576-4579. DOI 10.1073/pnas.87.12.4576
  5. Frédéric Thomas, Thierry Lefevre, Michel Raymond, Biologie évolutive, De Boeck supérieur, , p. 38.
  6. (en) Alexandra Stechmann et Thomas Cavalier-Smith, « The root of the eukaryote tree pinpointed », Current Biology, vol. 13, no 17,‎ , R665-R666 (PMID 12956967, DOI 10.1016/S0960-9822(03)00602-X, lire en ligne)
  7. (en) E. Mayr, « Two empires or three? », Proc. Natl. Acad. Sci USA., vol. 95, no 17,‎ , p. 9720–9723 (PMCID 33883, DOI 10.1073/pnas.95.17.9720, lire en ligne)
  8. (en) T. Cavalier-Smith, « Only six kingdoms of life », Proc. R. Soc. Lond. B, vol. 271,‎ , p. 1251–62 (PMID 15306349, PMCID 1691724, DOI 10.1098/rspb.2004.2705, lire en ligne)
  9. Michael L. Cain, Hans Damman, Robert A. Lue & Carol Kaeseuk Yoon, Découvrir la biologie, De Boeck Supérieur, Bruxelles, 2006, p.26-27. (ISBN 2-8041-4627-8)
  10. Lansing M. Prescott, John P. Harley, Donald A. Klein, Joanne M. Willey, Linda M. Sherwood & Christopher J. Woolverton, Microbiologie, 3e édition, De Boeck, Bruxelles, 2010, p.491-492. (ISBN 978-2-8041-6012-8)
  11. (en)Cecie Starr, Ralph Taggart, Christine Evers & Lisa Starr, Biology : The Unit and Diversity of Life, Fourteenth Edition, Cengage Learning, Boston, 2016, p.11. (ISBN 978-1-305-07395-1)
  12. (en) C. J. Cox, P. G. Foster, R. P. Hirt, S. R. Harris, T. M. Embley, « The archaebacterial origin of eukaryotes », Proc Natl Acad Sci USA, vol. 105, no 51,‎ , p. 20356–61 (DOI 10.1073/pnas.0810647105).
  13. (en) Laura Eme, Anja Spang, Jonathan Lombard, Courtney W. Stairs et Thijs J. G. Ettema, « Archaea and the origin of eukaryotes », Nature Reviews Microbiology, vol. 15, no 12,‎ , p. 711-723 (ISSN 1740-1534, DOI 10.1038/nrmicro.2017.133, lire en ligne).
  14. (en) Willi Hennig (trad. D. Dwight Davis et Rainer Zangerl), Phylogenetic Systematics, Urbana, Chicago, London, University of Illinois Press, , 263 p. (lire en ligne)
  15. (en) Ernst Mayr et W. J. Bock, « Classifications and other ordering systems », Journal of Zoological Systematics and Evolutionary Research, vol. 40, no 4,‎ , p. 169–194 (ISSN 0947-5745 et 1439-0469, DOI 10.1046/j.1439-0469.2002.00211.x, lire en ligne, consulté le )

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]