Guerre de Grenade — Wikipédia

La guerre de Grenade est un conflit, en plusieurs phases, qui opposa de 1482 à la fin de l'année 1491 les royaumes d'Aragon et de Castille à celui de Grenade. Cette guerre mit fin à la présence musulmane (en tant qu'entité politique indépendante) en Espagne, l'année cruciale pour les Rois catholiques.

Les belligérants[modifier | modifier le code]

Portrait du roi Ferdinand d'Aragon et de la reine Isabelle de Castille - XVe siècle

Les royaumes chrétiens[modifier | modifier le code]

Ces deux royaumes sont gouvernés par les futurs Rois catholiques, Isabelle de Castille et Ferdinand d’Aragon. Ils s’étaient mariés en 1469. En 1474, le roi Henri IV de Castille, frère d’Isabelle, était mort en laissant une fille soupçonnée d’illégitimité. Un conflit de succession s’en était suivi, dont Isabelle était sortie victorieuse, en 1479, mais la noblesse, aussi bien parmi les anciens partisans de la fille d’Henri IV que les partisans d’Isabelle, mécontente d’être laissée à l’écart du pouvoir, restait agitée. Entretemps, Ferdinand avait succédé à son père, en 1479.

Afin de consolider leur pouvoir et l’unification des royaumes, les Rois catholiques décidèrent de lancer leur noblesse et de fédérer leurs peuples dans une entreprise à mettre un terme final à la Reconquista. Les nobles y virent une occasion de se distinguer et de se faire attribuer des nouvelles terres et des honneurs.

Le royaume de Grenade[modifier | modifier le code]

L'émirat de Grenade se maintient depuis deux siècles et ne survit qu’en raison de l’hostilité existant entre les royaumes chrétiens d’Espagne. Il verse en outre d’importants tributs au royaume de Castille en garantie de la paix, ce qui n’exclut pas de nombreuses escarmouches frontalières. Les États musulmans d’Afrique du Nord ne disposent alors pas des moyens militaires pour maintenir l'indépendance de l’émirat de Grenade, à l’exception de l’Égypte mamelouk, dont les dirigeants sont plus préoccupés par l’expansion de l’Empire ottoman.

La démographie du royaume ne permet également pas d'importantes levées de troupes, contrairement à l’Aragon et à la Castille, et son artillerie, élément déterminant pendant cette guerre, est nettement moins développée que celle de ses ennemis. Depuis les années 1410, l’émirat est en proie aux luttes intestines.

Le déroulement de la guerre[modifier | modifier le code]

Archer à cheval nasride de la guerre de Grenade.

Il n’y eut quasiment pas de grandes batailles durant cette guerre. Il y eut principalement des campagnes annuelles dont le but était de ruiner le royaume de Grenade, et des sièges où l’artillerie sera déterminante.

On peut décomposer la guerre de Grenade en quatre phases :

Première phase (1482-1484)[modifier | modifier le code]

Cette première phase se fait sous le signe de l'improvisation. Mal préparée, sans tactique réellement mise au point et ayant sous-évalué les difficultés, l'armée chrétienne subira plusieurs revers et des échecs. Le point fort de cette phase est le siège de Loja en 1482. Trop bien défendue, la ville résiste aux assauts, et les pertes sont nombreuses, si bien que Ferdinand devra abandonner le siège au bout de quatre jours. La barre ne sera redressée qu'à l'automne 1483, avec la prise de Zahara et le maintien des chrétiens à Alhama.

Seconde phase (1485-1487)[modifier | modifier le code]

Mieux préparée et équipée, l'armée catholique remporte plus de succès. Elle prend Ronda au bout d'un siège de quinze jours, la Vega de Grenade, Loja et Malaga. Les moyens qui permirent les prises des villes furent l'artillerie, mais aussi la trahison d'un certain nombre de Maures. À la fin de cette phase, toute la partie occidentale du royaume est conquise. La chute du port de Malaga coupe les relations du royaume avec l'Afrique du Nord.

Troisième phase (1488-1489)[modifier | modifier le code]

Cette troisième phase va voir la conquête de la majeure partie du royaume. La campagne de 1489 fut la plus dure de la guerre, avec le siège de Baza qui dura six mois. Zagal, l'oncle de Boabdil et son compétiteur, vaincu, quitte l'Espagne et se réfugie près du Roi de Fez.

Quatrième phase (1490- 2 janvier 1492)[modifier | modifier le code]

Le départ de Boabdil.

Au début de 1490, seule la ville et les alentours immédiats de Grenade restent aux mains des musulmans. Boabdil s'est engagé personnellement après la défaite de Zagal à la livrer aux Rois catholiques, mais, redoutant les réactions des habitants, il fait traîner les choses.

Après de vaines discussions au cours de l'année 1490, un armée part de Séville le . Le siège commence le , en même temps qu'est construit le camp de Santa Fe.

Grenade tient bon[réf. nécessaire], mais des conciliabules entre souverains ont lieu en secret. Les accords signés le laissent à Boabdil et à ses soldats jusqu'au pour évacuer Grenade.

La fin de la Reconquista en 1492

Les conséquences de la guerre[modifier | modifier le code]

Bannière des Tercios.

Avec la prise de Grenade, l'Espagne a achevé sa réunification, qui ne sera définitive qu'à la mort de Ferdinand le Catholique. En effet, après la mort d'Isabelle (1504), il s'est remarié. Les difficultés de la guerre de Grenade ont obligé la modernisation de l'armée, aussi bien en termes d'artillerie qu'en termes d'organisation (tercios), permettant à une armée espagnole rénovée de dominer les champs de bataille européens jusqu'à la bataille de Rocroi.

Cette guerre marque la fin de la présence musulmane en Espagne en tant que puissance étatique. Malgré les traités garantissant les droits des musulmans, ceux-ci sont expulsés des villes dès 1498. Boabdil, qui avait eu le droit de conserver un fief en Espagne, doit le quitter et se réfugier en Afrique. Des opérations de conversions forcées suivent dans les campagnes (1526). Des révoltes (1568 pour la plus importante) rythment la vie de ces populations, et un édit de 1609 ordonne à tous les Maures d'Espagne de quitter le pays sous peine de mort.

Les Rois catholiques amorcent ensuite une expansion sur la rive africaine du détroit de Gibraltar : sont ainsi prises les villes de Melilla (1497), Mers el-Kébir (1505) et Oran (1509). Mais l'expansion s'y arrête rapidement, car autant la noblesse adhère au projet de protéger l'Espagne en contrôlant le Nord du Maghreb, autant elle se montre réticente à s'engager dans la conquête du Maghreb pour rejoindre le royaume de Sicile.

Enfin, Christophe Colomb participe au siège de Grenade. Son projet d'expédition maritime avait déjà été refusé par la Couronne. Dans l'euphorie de la victoire, l'autorisation et le financement de l'expédition lui sont accordés.

Notes et références[modifier | modifier le code]

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Sources[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]