Cardinalité (mathématiques) — Wikipédia

En mathématiques, la cardinalité est une notion de taille pour les ensembles. Lorsqu'un ensemble est fini, c'est-à-dire si ses éléments peuvent être listés par une suite finie, son cardinal est la longueur de cette suite, autrement dit il s'agit du nombre d'éléments de l'ensemble. En particulier, le cardinal de l'ensemble vide est zéro.

La généralisation de cette notion aux ensembles infinis est fondée sur la relation d'équipotence : deux ensembles sont dits équipotents s'il existe une bijection de l'un dans l'autre. Par exemple, un ensemble infini est dit dénombrable s'il est en bijection avec l'ensemble des entiers naturels. C'est le cas de l'ensemble des entiers relatifs ou de celui des rationnels mais pas de celui des réels, d'après l'argument de la diagonale de Cantor. L'ensemble des réels a un cardinal strictement plus grand, ce qui signifie qu'il existe une injection dans un sens mais pas dans l'autre. Le théorème de Cantor généralise ce résultat en montrant que tout ensemble est de cardinal strictement inférieur à l'ensemble de ses parties.

L'étude de la cardinalité en toute généralité peut être approfondie avec la définition des nombres cardinaux.

Il existe plusieurs notations classiques pour désigner le cardinal d'un ensemble, avec l'opérateur Card, le croisillon (#) préfixe, à l'aide de barres verticales de chaque côté ou une ou deux barres horizontales au-dessus[1].

Un ensemble de cardinal 4.
Différentes notations pour le cardinal d'un ensemble .

Aspects historiques[modifier | modifier le code]

Galilée : le sous ensemble d'un ensemble peut avoir la même cardinalité que lui ; ceci définit les ensembles infinis[modifier | modifier le code]

Galilée avait déjà remarqué qu'il y a autant d'entiers que d'entier pairs[2] au sens où, dit en termes contemporains, il existe une fonction bijective entre ces deux ensembles, soit, pour exemple parmi une infinité, la fonction .

Ainsi il est possible que deux ensembles, dont l'un est strictement inclus dans l'autre aient la même taille en termes de bijectabilité.

Cette propriété étonnante découverte par Galilée se généralise au point que ce devient une définition :

  • Un ensemble est infini si et seulement si il a la même cardinalité qu'un de ses sous ensembles propre.

Cantor : tous les ensembles infinis ne sont pas bijectables entre eux ; il existe une infinité de cardinalités infinies[modifier | modifier le code]

La grande découverte de Cantor est que tous les ensembles infinis n'ont pas la même taille, la même cardinalité au sens de la bijectabilité : l'ensemble des entiers et l'ensemble des réels ne sont pas bijectables.

Ainsi prend fin une querelle philosophique millénaire concernant la différence ou non entre l'infini potentiel et l'infini en acte ; la réponse étant que tous les infinis illimités (potentiels) ne donnent pas la même cardinalité (infini en acte).

Bien plus Cantor démontre qu'aucun ensemble n'est de même cardinal que l'ensemble de ses parties, ce qui entraîne qu'il y a une infinité de cardinalités infinies.

Hypothèse du continu[modifier | modifier le code]

Cantor ayant découvert que et ne sont pas bijectables, via que a une cardinalité supérieure à celle de , se pose la question de savoir s'il existe un ensemble (par exemple un sous ensemble de ) dont la taille est intermédiaire (en termes de bijectabilité) entre et .

La réponse à cette question disant qu'un tel ensemble intermédiaire n'existe pas est nommée hypothèse du continu, celle ci se généralise : l'hypothèse généralisée du continu dit que les cardinalités infinies correspondent exactement avec celles que l'on obtient à partir de en utilisant l' axiome de l'ensemble des parties.

L'indécidabilité de l'hypothèse du continu dans la théorie des ensembles usuelle a été démontrée par Gödel et Cohen.

Cardinal d'un ensemble fini[modifier | modifier le code]

Définition[modifier | modifier le code]

Un ensemble est dit fini s'il est vide ou s'il existe un entier naturel non nul et une suite finie d'éléments de dans laquelle chaque élément de apparait exactement une fois. Autrement dit, un ensemble non vide est fini s'il est en bijection avec un intervalle d'entiers .

Dans ce cas, le cardinal de est .

La propriété fondamentale pour bien définir le cardinal d'un ensemble fini est l'unicité de l'entier correspondant. En effet, si un ensemble est en bijection avec deux intervalles d'entiers et , alors .

Propriétés[modifier | modifier le code]

Soit et deux ensembles finis de cardinaux respectifs et .

  • Si et peuvent être mis en bijection, alors .

Parties d'un ensemble[modifier | modifier le code]

  • Tout sous-ensemble de est fini et de cardinal inférieur à .
  • Tout sous-ensemble strict de est de cardinal strictement inférieur[3] à .
  • Si est un sous-ensemble de alors le cardinal de son complémentaire est donné par la formule :
  • L'union et l'intersection de deux parties et de sont reliées par la formule :

Opérations sur les ensembles[modifier | modifier le code]

  • L'union disjointe de et est finie de cardinal la somme .
  • Le produit cartésien de et est fini de cardinal le produit .
  • L'ensemble des applications de dans est fini et de cardinal la puissance (avec la convention si les deux ensembles sont vides).
  • L'ensemble des parties de est fini de cardinal .
  • L'ensemble des injections de dans est vide si et de cardinal donné par le quotient de factorielles sinon.
  • En particulier, l'ensemble des permutations de est de cardinal .
  • Le cardinal de l'ensemble des surjections de dans est donné par la somme suivante (qui est nulle si ) :

D'autres constructions usuelles à partir d'ensembles finis ont des cardinaux décrits par des formules explicites.

Cas dénombrable[modifier | modifier le code]

L'ensemble N des entiers naturels n'est pas fini, car l'application qui à chaque entier associe l'entier suivant est une bijection de N dans l'ensemble N* des entiers naturels non nuls, qui est un sous-ensemble strict.

Au-delà du dénombrable[modifier | modifier le code]

Le résultat qui fonde la théorie des nombres cardinaux est le théorème de Cantor qui montre qu'un ensemble n'est jamais équipotent à l'ensemble de ses parties. Il en résulte qu'il existe une infinité de cardinalités différentes[4].

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Dictionnaire des mathématiques par Alain Bouvier, Michel George et François Le Lionnais, 5e édition, 1996, Presses Universitaires de France (ISBN 978-2-13047821-8), p.117.
  2. Galilée Discours concernant deux sciences nouvelles, traduction par Maurice Clavelin. Paris, PUF 1995. (ISBN 2-13-046854-3)
  3. Cette propriété est fausse dans le cas des ensembles infinis.
  4. Une théorie plus formalisée (par exemple ZFC) permet même de montrer que les cardinalités forment une classe propre, autrement dit que cette infinité est elle-même plus vaste que tout cardinal.