Bush v. Gore — Wikipédia

Bush v. Gore
Sceau de la Cour suprême des États-Unis
Cour suprême des États-Unis
Informations générales
Nom complet George W. Bush and Richard Cheney, Petitioners v. Albert Gore, Jr. and Joseph Lieberman, et al.
Composition de la cour Sous la présidence de William Rehnquist, assisté de John P. Stevens, Sandra Day O'Connor, Antonin Scalia, Anthony Kennedy, David Souter, Clarence Thomas, Ruth Bader Ginsburg, Stephen Breyer
Question posée La Cour suprême de Floride a-t-elle violé l'article II, section 1, clause 2 de la Constitution américaine en adoptant une nouvelle loi électorale ? Les recomptes manuels sans normes enfreignent-ils les clauses d'égalité de protection et de procédure régulière de la Constitution ?
Plaidé le 11 décembre 2000
Décidé le 12 décembre 2000
Réponse donnée Per Curiam : Notant que la clause d'égalité de protection garantit aux individus que leurs bulletins de vote ne peuvent pas être dévalorisés par « un traitement arbitraire et disparate ultérieur », l'opinion per curiam a jugé par 7 voix contre 2 que le système de la Cour suprême de Floride pour le recomptage des bulletins de vote était inconstitutionnel. Même si le recomptage était juste en théorie, il était injuste en pratique. Le dossier suggérait que des normes différentes étaient appliquées d'un scrutin à l'autre, d'une circonscription à l'autre et d'un comté à l'autre. En raison de ces difficultés de procédure et d'autres, la cour a jugé, par 5 voix contre 4, qu'aucun recomptage constitutionnel ne pouvait être formé dans le temps restant (qui était court parce que le législateur de Floride voulait profiter de la "sphère de sécurité" prévue par la section 3 USC. 5.
No de l'affaire 00-949
Branche de droit 3 U.S. Code § 5.Determination of controversy as to appointment of electors
Lien cas https://www.oyez.org/cases/2000/00-949
Lien débats https://supreme.justia.com/cases/federal/us/531/98/
Opinion majoritaire
Juge Rehnquist (dans une opinion concordante rejoint par Scalia et Thomas) a fait valoir que le système de recomptage était également inconstitutionnel parce que la décision de la Cour suprême de Floride a adopté une nouvelle loi électorale, ce que seule la législature de l'État peut faire.
Opinion(s) dissidente(s)
Juge(s) Breyer et Souter (écrivant séparément) étaient d'accord avec la décision per curiam affirmant que le système de recomptage du tribunal de Floride violait la clause d'égalité de protection, mais ils étaient dissidents quant au recours, estimant qu'un recomptage constitutionnel pouvait être pratiqué.

Ginsburg et Stevens (écrivant séparément) ont soutenu que pour des raisons de fédéralisme, la décision de la Cour suprême de Floride devrait être respectée. De plus, la décision concernant la Floride était fondamentalement juste.

L'Arrêt Bush v. Gore (531 US 98), rendu par la Cour suprême des États-Unis le , met un terme aux recours et aux contestations consécutifs à l'élection présidentielle américaine de 2000 et aux recomptages des voix en Floride. Il permet l'élection de George W. Bush à la présidence des États-Unis au détriment d'Al Gore. Cet arrêt fut assez critiqué car la cour suprême s'arroge un rôle inédit dans ses attributions, et la partialité de la décision fait débat.

Historique[modifier | modifier le code]

L'élection présidentielle américaine a lieu le 2000. Les spécialistes indiquent qu'elle est la plus indécise depuis 40 ans. Le soir même, après des annonces prématurés et des rétractations, aucun vainqueur n'est désigné.

En Floride, après dépouillement, George W. Bush obtient 1 784 voix de plus qu'Al Gore, soit moins de 0,5 % du nombre des votants. La Floride est un swing state comptant 25 grands électeurs, le vainqueur de l'État remporte l'élection. En application du Code électoral de l'État[1], on procède alors à un recomptage automatique des votes à l'issue duquel le candidat républicain reste vainqueur mais avec un nombre de voix plus faible. L'équipe de Gore demande un recompte manuel dans quatre comtés, qui leur est favorable. Le , le recompte est interrompu dans le Comté de Miami-Dade dû à une tentative d'intimidation de plusieurs républicains (en)[2],[3].

Le , Katherine Harris proclame la victoire de Bush avec 537 voix d'avance.

Manifestation devant la Cour suprême

Procédure de la cour et controverse[modifier | modifier le code]

Al Gore relance la procédure vers la Cour suprême de Floride après la proclamation. La cour suprême des États-Unis est saisie par George Bush qui fit interrompre le comptage. Le , les avocats des deux camps plaident le cas, le lendemain, la cour rend la décision : le recompte de la cour suprême de Floride est inégalitaire donc invalide et le délai est épuisé.

La controverse est forte de la part de nombreux juristes, qui remettent en cause les arguments juridiques et même la pertinence de la cour de se saisir de l'affaire. La décision est dénoncée comme partisane et politique, du fait que la plupart des juges avaient été nommés par des présidents républicains mais surtout que l'impartialité de la Cour n'est pas tenue. La décision sur l'épuisement du délai suit l'idéologie politique des juges, cinq conservateurs contre quatre progressistes. Le juge John Paul Stevens déclare dans l'opinion dissidente : « nous ne saurons sans doute jamais avec certitude l'identité du vainqueur de l'élection présidentielle de cette année. Mais l'identité du perdant ne fait aucun doute. Il s'agit de la confiance portée par notre Nation au juge en tant que gardien impartial de l'État de droit. »[4].

Questions contenues dans l'affaire[modifier | modifier le code]

Globalement trois questions étaient posées à la Cour suprême au terme du feuilleton judiciaire de l'élection présidentielle américaine de 2000.

Dénaturation de la loi de l'État par la Cour suprême de Floride[modifier | modifier le code]

« Chaque État nommera, selon les règles déterminées par sa législature, un nombre d'électeurs égal au nombre total de Sénateurs et de Représentants auquel cet État peut avoir droit dans le Congrès; mais aucun Sénateur, ni Représentant, ni aucun titulaire d'une fonction fédérale rémunérée ou honorifique ne pourra être électeur. »

— Constitution des États-Unis, Article II, Section 1.

La Constitution des États-Unis laisse chacun des États fédérés libres de déterminer le mode de désignation des grands électeurs chargés d'élire le président. S'appuyant sur une disposition du Code électoral de Floride pris en vertu de l'Article II, Section 1., la Secrétaire d'État de Floride Katherine Harris ordonna que les recomptages de voix cessent au plus tard le 14 novembre. La Cour Suprême de l'État, saisie par le camp démocrate, estimait quant à elle que les recomptages devaient se prolonger jusqu'au 25 novembre.

La question était alors de savoir si, en agissant de la sorte, la Cour Suprême de Floride avait outrepassé les limites de ses prérogatives et dénaturé la Loi de l'État, prise en vertu de la Constitution[5].

Violation de la clause de l'« égale protection des lois »[modifier | modifier le code]

La Cour Suprême de Floride, en ordonnant le recomptage des votes, n'a pas assorti sa décision de prescriptions établissant des méthodes identiques dans tous les bureaux de vote pour procéder à cette opération. Le recomptage n'était donc pas effectué de la même manière dans les bureaux de vote. Ce faisant, la Cour Suprême a-t-elle contrevenu au principe constitutionnel de l'égale protection des lois contenu dans le XIVe amendement[6],[7] ?

Épuisement du délai de contestation[modifier | modifier le code]

Le code des États-Unis indique que les États doivent déterminer leurs électeurs six jours avant la réunion du collège électoral. La date limite, désignée comme la « safe harbor provision », est au 12 décembre, le jour où la cour suprême rend la décision.

Les juges dissidents déclarent qu'au nom du fédéralisme, la décision doit revenir à la Cour suprême de Floride.

Opinions des juges[modifier | modifier le code]

Juges Dénaturation de la loi de l'État Violation de l'equal protection clause Épuisement du délai
Rehnquist Oui Oui Oui
Stevens Non Non Non
O'Connor Ne se prononce pas Oui Oui
Scalia Oui Oui Oui
Kennedy Ne se prononce pas Oui Oui
Souter Non Oui Non
Thomas Oui Oui Oui
Ginsburg Non Non Non
Breyer Non Oui Non
Opinion de la Cour Question non tranchée Oui (7 contre 2) Oui (5 contre 4)

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. §102.141(4) (2000) Fla. Sta. (maintenant §102.141(7) Fla. Sta.)
  2. (en) « ‘It’s insanity!’: How the ‘Brooks Brothers Riot’ killed the 2000 recount in Miami », sur NPR,
  3. Documentaire Netflix de 2017 Get Me Roger Stone (en).
  4. Michel Rosenfeld.
  5. (en) « Bush v. Gore | Summary, Decision, Significance, & Facts », sur Encyclopedia Britannica (consulté le )
  6. (en-US) « Bush v. Gore, 531 U.S. 98 (2000) », sur Justia Law (consulté le )
  7. (en-US) Stevens, Bush v. Gore (Stevens, J., dissenting), 2000 december 12 (lire en ligne)

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

Essais[modifier | modifier le code]

  • (en-US) Samuel Issacharoff, Pamela S. Karlan & Richard H. Pildes, When Elections Go Bad: The Law Of Democracy And The Presidential Election Of 2000, Foundation Press, , 226 p. (ISBN 9781587782336, lire en ligne),
  • (en-US) Alan M. Dershowitz, Supreme Injustice: How the High Court Hijacked Election 2000, Oxford University Press, USA, , 296 p. (ISBN 9780195148275, lire en ligne),
  • (en-US) E.J. Dionne Jr., William Kristol, Bush v. Gore: The Court Cases and the Commentary, Brookings Institution Press, , 364 p. (ISBN 9780815701071, lire en ligne),
  • (en-US) Ronald Dworkin, A Badly Flawed Election: Debating Bush V. Gore, the Supreme Court, and American Democracy, New Press, , 360 p. (ISBN 9781565847378, lire en ligne),
  • (en-US) Edwin D. Dover, The Disputed Presidential Election of 2000: A History and Reference Guide, Greenwood, , 200 p. (ISBN 9780313323195, lire en ligne),
  • (en-US) Mark Whitman, Florida 2000: A Sourcebook on the Contested Presidential Election, Lynne Rienner Publishers, , 376 p. (ISBN 9781588262042, lire en ligne),
  • (en-US) Diana K. Sergis, Bush V. Gore: Controversial Presidential Election Case, Enslow Publishers, octobre 2003, rééd. 2 décembre 2005, 136 p. (ISBN 9780766020955, lire en ligne),

Articles francophones[modifier | modifier le code]

  • Michelot Vincent, « La Cour suprême dans Bush c. Gore : du conflit entre droit et politique », Revue française d'études américaines, no 90,‎ (lire en ligne),
  • Michel Rosenfeld, « Bush contre Gore : trois mauvais coups portés à la Constitution, à la Cour et à la Démocratie », Cahiers du Conseil Constitutionnel, no 13,‎ (lire en ligne)

Articles anglophones[modifier | modifier le code]

  • (en-US) Jack M. Balkin, « Bush v. Gore and the Boundary between Law and Politics », The Yale Law Journal, Vol. 110, No. 8,‎ , p. 1407-1458 (52 pages) (lire en ligne),
  • (en-US) David A. Strauss, « Bush v Gore: What Were They Thinking ? », The University of Chicago Law Review, Vol. 68, No. 3,‎ , p. 737-756 (20 pages) (lire en ligne),
  • (en-US) Mark S. Brodin, « Bush v. Gore: The Worst (or at least second-to-the-worst) Supreme Court Decision Ever », Nevada Law Journal, vol. 12,‎ (lire en ligne)
  • (en-US) Peter Berkowitz & Benjamin Wittes, « The Professors and Bush v. Gore », The Wilson Quarterly (1976-), Vol. 25, No. 4,‎ , p. 76-89 (14 pages) (lire en ligne),
  • (en-US) Michael J. Klarman, « Bush v. Gore through the Lens of Constitutional History », California Law Review, Vol. 89, No. 6,‎ , p. 1721-1765 (45 pages) (lire en ligne),
  • (en-US) Theodore O. Prosise & Craig R. Smith, « The Supreme Court's Ruling in "Bush v. Gore": A Rhetoric of Inconsistency », Rhetoric and Public Affairs, Vol. 4, No. 4,‎ , p. 605-632 (28 pages) (lire en ligne),
  • (en-US) Chad Flanders, « Bush v. Gore and the Uses of "Limiting" », The Yale Law Journal, Vol. 116, No. 5,‎ , p. 1159-1168 (10 pages) (lire en ligne),

Liens externes[modifier | modifier le code]

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