Bataille de l'Oued-el-Leben — Wikipédia

Bataille de l'Oued-el-Leben

Informations générales
Date Du au
Lieu Oued el-Leben (environs de Fès, dans la Province de Taounate), Maroc
Issue

Victoire marocaine décisive[1]

  • Retrait des forces ottomanes du Maroc
  • Consolidation de l'indépendance marocaine[2],[3]
Belligérants
Empire Ottoman
Régence d'Alger
Saadiens
Commandants
Hassan Pacha Abdallah al-Ghalib
Forces en présence
16 000 cavaliers et fantassins
6 000 arquebusiers
30 000 cavaliers
10 000 fantassins
700 arquebusiers
Pertes
Lourdes pertes Pertes légères

Conflit maroco-ottoman et conflits algéro-chérifiens

Batailles

Coordonnées 34° 18′ nord, 4° 54′ ouest
Géolocalisation sur la carte : Maroc
(Voir situation sur carte : Maroc)
Bataille de l'Oued-el-Leben

La bataille de l'Oued-el-Leben a lieu en mars- au nord de Fès. Elle oppose les forces de Hassan Pacha, beylerbey de la régence d'Alger, à celles de l'Empire chérifien où règne alors la dynastie des Saadiens[4],[5].

Contexte[modifier | modifier le code]

La bataille a lieu en raison du refus du sultan marocain Abdallah al-Ghalib de prêter allégeance aux Ottomans et de l'alliance qu'il conclut avec les Espagnols[4].

Sûr de la solidité de son armée et de la force de son projet, le sultan marocain préfère l'affrontement militaire[6]. Il s'ensuivra plusieurs confrontations entre, d'un côté les forces marocaines et, de l'autre côté, les forces ottomanes [4].

Déroulement[modifier | modifier le code]

Une expédition ottomane est alors lancée contre le Maroc saadien pendant l', dirigée par Hassan Pacha, beylerbey d'Alger[4]. Les deux armées se confrontent au nord de Fès, sur les bords de l'oued el-Leben (litt. « la rivière du lait »), un affluent du Sebou[4].

Dans une lettre, Abdallah el-Ghalib revendique la fuite des Ottomans vers les montagnes avoisinantes, où les Marocains les ont poursuivis le lendemain jusqu'à l'oued Luyma, et rapporte la mort de trois de leurs capitaines. Les forces ottomanes se sont ensuite réfugiées dans une autre montagne où elles ont établi leur campement, et le 4 avril, les Marocains les ont harcelées jusqu'à la nuit. Abdallah el-Ghalib affirme également que le 5 avril, les Marocains ont continué à poursuivre les Ottomans dans les montagnes de l'Ouargha, en ont massacré une partie et se sont emparés de leurs bêtes de somme et de leurs chevaux. Très peu de Turcs ont réussi à traverser l'oued Ouargha.

Le 6 avril, les Marocains ont consolidé leur victoire éclatante, tandis que le pacha d'Alger s'enfuit précipitamment avec une escorte de 2000 renégats[7]. Selon l'historien et chercheur au CNRS Nabil Mouline, le contingent ottoman a été décimé, et Hassan Pacha n'a survécu que grâce à la rapidité de son cheval[8].

Issue et conséquences[modifier | modifier le code]

Au terme de la bataille Hassan Pacha établit son camp sur les hauteurs des collines environnantes. Les forces turco-algériennes sont cependant rapidement contraintes de se retirer, à l'annonce d'une probable attaque espagnole contre la Régence depuis Oran[4] ainsi qu'à la suite de la défection du prince de Debdou, qui rallie le camp saadien lors du deuxième jour de la bataille[9],[10]. Hassan Pacha divise alors son armée en deux groupes ; certains goums battent en retraite par voie terrestre vers Tlemcen tandis que lui-même et les arquebusiers embarquent vers Alger depuis le port de Qassassa, près de Melilla, afin de se préparer à contrer les Espagnols qui ne tarderont pas à lancer une offensive contre Mostaganem en août-septembre de la même année[4].

La bataille de l'Oued-el-Leben revêt une grande importance pour le Maroc et la dynastie Saâdienne : la tentative d'invasion ottomane va créer une union sacrée autour du sultan, qui lui concèdera 16 ans de répit, et constituera la dernière tentative ottomane de conquête du pays[6].

À la suite de cette victoire, soucieux de contrer l'influence grandissante des Turcs au Maroc, que ce soit sur le plan religieux ou militaire, le Sultan Abdallah el-Ghalib prit des mesures d'une grande portée. Il s'allia avec Sidi Allal El-Hadj El-Baqqal, le chef spirituel des Ghomaras, prenant ainsi position en faveur de la tariqa Chadhiliyya au détriment de la tariqa Qadiriyya, chère aux Ottomans. Cette décision démontra la volonté du Sultan de promouvoir une version "local" des sciences religieuses, se détachant ainsi de l'influence des savants d'Istanbul[11].

Parallèlement, pour le Sultan, renforcer la défense militaire contre les incursions ottomanes était prioritaire, notamment dans les régions stratégiques entre Fès et Tlemcen, le Roi Saâdien opta pour une politique de territorialisation. Il accueillit ainsi les tribus "Guich", en qui il plaçait sa confiance, parmi les Arabes Banu Maqil et les Arabes originaires de Tlemcen, leur octroyant des terres propices à l'agriculture. Ces terres, servaient donc de "zone tempon" face à l'armée ottomane[12].

Référencement[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Henri-Delmas de Grammont, Histoire d'Alger sous la domination turque : 1515-1830, Saint-Denis, Éditions Bouchène, , 328 p. (ISBN 978-2-912946-53-9 et 2-912946-53-0) Document utilisé pour la rédaction de l’article
  • Chantal de la Véronne, Histoire sommaire des Sa'diens au Maroc, FeniXX réédition numérique, (ISBN 9782307061076, lire en ligne), PT23

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Chantal de la Veronne, Revue des mondes musulmans et de la Méditerranée : Relations entre le Maroc et la Turquie dans la seconde moitié du XVIe siècle et le début du XVIIe siècle (1554-1616), (lire en ligne), p. 391-401
  2. Jamil M. Abun-Nasr, « A history of the Maghrib in the Islamic period, p.157 », Cambridge University Press,
  3. « In 965/1558, the new sovereign succeeded in defeating the Turko-Ottomans of Algiers near Wadi 'l-Laban and invading the Regency » dans: The Encyclopaedia of Islam Vol.8 Sir Hamilton Alexander Rosskeen Gibb, Johannes Hendrik Kramers, Bernard Lewis - 1954
  4. a b c d e f et g Jamil M. Abun-Nasr, « A history of the Maghrib in the Islamic period, p.157 », Cambridge University Press, .
  5. « In 965/1558, the new sovereign succeeded in defeating the Turko-Ottomans of Algiers near Wadi 'l-Laban and invading the Regency » dans: The Encyclopaedia of Islam Vol.8 Sir Hamilton Alexander Rosskeen Gibb, Johannes Hendrik Kramers, Bernard Lewis - 1954.
  6. a et b Nabil Mouline, Le califat imaginaire d'Ahmad al-Mansûr: Pouvoir et diplomatie au Maroc au XVIe siècle, Presses Universitaires de France, (ISBN 978-2-13-074021-6, lire en ligne)
  7. D. S. M., « Les Sources Inédites de l'Histoire du Maroc. Publiées parPierre de Cenival. 2me Série. Dynastie Filalienne: Archives et Bibliothèques de France. Tome IV, Mai 1693 – Novembre 1698. 11 × 8. Paris: P. Geuthner, 1931. », Journal of the Royal Asiatic Society, vol. 64, no 4,‎ , p. 987–989 (ISSN 1356-1863 et 1474-0591, DOI 10.1017/s0035869x00153882, lire en ligne, consulté le )[réf. obsolète]
  8. Nabil Mouline, Le califat imaginaire d'Ahmad al-Mansûr: Pouvoir et diplomatie au Maroc au XVIe siècle, Presses Universitaires de France, (ISBN 978-2-13-074021-6, lire en ligne)
  9. P. Boyer, « Contribution à l'étude de la politique religieuse des Turcs dans la régence d'Alger (XVIe et XIXe siècles » (lien), dans : Revue de l'Occident musulman et de la Méditerranée, vol.1 (1966), p. 23
  10. Robert Ricard et Cantal de La Véronne, « Les Sources Inédites de l'Histoire du Maroc Tome II ».
  11. Charles-Robert Ageron, « Abun-Nasr (Jamil M.) : A History of the Maghrib in the Islamic period », Outre-Mers. Revue d'histoire, vol. 77, no 286,‎ , p. 119–120 (lire en ligne, consulté le )
  12. Pierre Boyer, « Contribution à l'étude de la politique religieuse des Turcs dans la Régence d'Alger (XVIe – XIXe siècles) », Revue des mondes musulmans et de la Méditerranée, vol. 1, no 1,‎ , p. 11–49 (DOI 10.3406/remmm.1966.910, lire en ligne, consulté le )

Annexes[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]