Bataille de Dakar — Wikipédia

Bataille de Dakar
Description de cette image, également commentée ci-après
Télépointeur de la batterie Nord du Castel à l'île de Gorée, utilisée contre les bâtiments britanniques. Les canons de cette batterie sont des canons de 240 mm, provenant des pré-dreadnoughts. de la classe Danton.
Informations générales
Date du 23 au
Lieu Dakar (Sénégal, Afrique-Occidentale française)
Issue Victoire de l'État français
Belligérants
Drapeau du Royaume-Uni Royaume-Uni
Drapeau de la France France libre
Drapeau de l'Australie Australie
Drapeau de l'État français État français
Commandants
Drapeau du Royaume-Uni John Cunningham
Drapeau de la France Charles De Gaulle
Drapeau de la France Pierre François Boisson
Forces en présence
2 cuirassés - 1 porte-avions - 3 croiseurs lourds - 2 croiseurs légers - 11 destroyers - 6 frégates/sloops 1 cuirassé - 2 croiseurs légers - 4 contre-torpilleurs - 6 avisos/escorteurs - 5 croiseurs auxil. - 3 sous-marins
Pertes
Drapeau du Royaume-Uni
1 cuirassé Resolution hors de combat
croiseurs Australia et Cumberland endommagés 9 avions (7 Swordfish, 1 Warlus, 1 avion de réglage de tir)
Drapeau de la France
203 morts
393 blessés
contre-torpilleur l'Audacieux
sous-marins Persée et Ajax

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Coordonnées 14° 40′ 43″ nord, 17° 25′ 15″ ouest
Géolocalisation sur la carte : Sénégal
(Voir situation sur carte : Sénégal)
Bataille de Dakar
Géolocalisation sur la carte : Afrique
(Voir situation sur carte : Afrique)
Bataille de Dakar

La bataille de Dakar, également appelée l'opération de Dakar, l'expédition de Dakar ou l'opération Menace, est une attaque navale britannique de la Seconde Guerre mondiale, qui opposa au large de Dakar et sur la presqu'île du Cap-Vert, près de Rufisque, du au , la Marine britannique accompagnée du général de Gaulle et de quatre navires des Français libres qui furent repoussés par les forces armées du Gouvernement français, sous les ordres de gouverneur Boisson, gouverneur général de l'Afrique-Occidentale française (AOF) depuis le .

C'est à Dakar que le gouvernement français avait rapatrié 1 100 tonnes d'or des Banques de France, ainsi que celui de la Banque de Belgique, embarqués du au [1]. « Le , le gouverneur général Boisson et le général Barrau, commandant supérieur en A.O.F., donnent l’ordre de transporter tous les dépôts d’or de Thiès à Kayes (Soudan français) ».

Contexte[modifier | modifier le code]

En , deux mois après l'attaque de Mers el-Kébir et l'attaque du Richelieu à Dakar par les Fairey Swordfish du porte-avions HMS Hermes (le ), le général De Gaulle et Winston Churchill pensent pouvoir conquérir l'Afrique-Occidentale française (AOF) qui est restée sous contrôle du Gouvernement français en application du Traité d'armistice signé le .

Ils viennent d'obtenir le ralliement de trois colonies d'Afrique-Équatoriale française (AEF), l'Oubangui-Chari (l'actuelle République Centre-Africaine), le Tchad et le Moyen-Congo (l'actuel Congo-Brazzaville), ainsi que du territoire sous mandat du Cameroun, formant ensemble l'Afrique française libre.

Pour De Gaulle, ce serait un second espace de légitimité et pour les Britanniques, la garantie d'écarter la menace allemande sur une position assez stratégique pour le contrôle de l'Atlantique central. En outre, comme le gouvernement français avait envoyé en sécurité à Dakar avant l’armistice une partie de l’or des États polonais et belge, l'opération aurait permis de le rendre aux gouvernements polonais et belge réfugiés à Londres. Le projet initial de De Gaulle, tel qu’il le rappelle dans ses Mémoires, consistait à débarquer à Konakry une colonne qui progresserait vers Dakar en ralliant des forces sur son périple, avec une couverture maritime de la part de la flotte anglaise. Mais, pour des raisons stratégiques exprimées par Churchill, ce projet dut être abandonné.

De son côté, le gouvernement de Vichy avait, courant juillet 1940, éloigné de Dakar un certain nombre de responsables jugés trop anglophiles dans les jours qui avaient précédé l'attaque du 1940, notamment le commandant de la Marine à Dakar et le gouverneur général Cayla, muté à Madagascar. Ce dernier a été remplacé dès le 25 juin 1940 par le gouverneur Boisson, déjà gouverneur général de l'AEF et qui réunit désormais sous son autorité l'ensemble des territoires français en Afrique noire.

Début septembre 1940, le gouvernement de Vichy, avec l'accord de la Commission franco-allemande d'armistice, a envoyé depuis Toulon une escadre de trois croiseurs et trois grands contre-torpilleurs (la Force Y) pour s'opposer aux menées britanniques et gaullistes au Gabon. Or la Royal Navy a contraint cette escadre à rebrousser chemin, en interceptant dans le golfe de Guinée le pétrolier qui devait la ravitailler à Libreville. Mais elle n'est pas parvenue à contraindre deux des trois croiseurs à gagner Casablanca, alors que l'escadre destinée à intervenir à Dakar est à la mer. L'avant-veille du déclenchement de l'opération Menace sur Dakar, le commandant de l'escadre, dont l'amiral Darlan considère qu'il n'a pas réussi dans sa mission, est remplacé par l'amiral Lacroix, dont le navire amiral a été très gravement endommagé à Mers el-Kébir.

Forces en présence[modifier | modifier le code]

De Gaulle et la Marine royale britannique[modifier | modifier le code]

Marine britannique
Marine gaulliste
  • Navires marchands : 4 navires français libres.

Marine nationale française[modifier | modifier le code]

Déroulement[modifier | modifier le code]

Le à l'aube, trois navires marchands des Forces Françaises Libres, accompagnés par deux cuirassés britanniques anciens non modernisés, le porte-avions HMS Ark Royal, plusieurs croiseurs et destroyers constituant la Force M, commandée par l'Amiral John Cunningham[5], se présentent devant Dakar, la capitale de l'Afrique-Occidentale française, pour leur proposer de les libérer et exiger leur reddition. La visibilité de l'armada alliée est gênée par le brouillard. Pierre Boisson, gouverneur général de l'A.O.F., envoyé de Brazzaville à Dakar en juillet, après l'attaque britannique du , refuse catégoriquement de se rallier, affirmant sa volonté de défendre Dakar « jusqu'au bout »[6].

Du au , au large du Sénégal, pour la première fois de la guerre, des Français se battent contre des Français. La présence du général De Gaulle, en mer, ne provoque pas les ralliements escomptés et aucune des trois opérations simultanées ne réussit. L'Attaque de Mers el-Kébir faisant 1297 morts et 350 blessés chez les marins français [7] vient d'avoir lieu. Un commando débarqué par deux Caudron Luciole est arrêté[8], une tentative de persuasion politique échoue et Georges Thierry d'Argenlieu, arrivé par mer pour parlementer avec un drapeau blanc, est accueilli par un tir de mitrailleuse : lui-même est sérieusement blessé, mais son embarcation parvient à s'échapper.

Le 23 septembre vers 11h, le sous-marin Persée envoie une torpille vers des navires britanniques. Il est repéré et coulé.

Dans la nuit du 23 au , un ultimatum britannique est adressé aux autorités françaises de Dakar, leur enjoignant de livrer la place au général De Gaulle. Le texte accuse les forces de Dakar de vouloir livrer leurs moyens aux Allemands. Il provoque l'indignation des défenseurs, le contre-amiral Landriau et le gouverneur général Boisson, Haut-Commissaire à Dakar, qui répond : « La France m'a confié Dakar. Je défendrai Dakar jusqu'au bout ! ». Les Britanniques entament alors une opération militaire, mais cette fois, celle-ci échoue du fait de l'aviation française, basée sur le terrain d'aviation de Ouakam, et aussi de celle inopinée, des deux croiseurs et trois contre-torpilleurs de la Force Y[9],[10].

Conséquences[modifier | modifier le code]

Affiche de propagande allemande utilisant les morts de marins bretons consécutives aux attaques anglaises de Mers el-Kébir et Dakar (Musée de la Résistance en Bretagne de Saint-Marcel).

L'opération a constitué un tournant idéologique pour les gouvernements, bien plus qu'un affrontement important du point de vue des forces en présence, du nombre des victimes ou des unités militaires détruites ou endommagées.

De cette action, De Gaulle sort un temps personnellement ébranlé et isolé. Jean-Raymond Tournoux rapporte[11] que De Gaulle, dans une conversation ultérieure à Brazzaville avec M. René Pleven « confesse » à celui-ci : « J’ai songé à me brûler la cervelle ». Lui-même, dans ses « Mémoires de guerre » n’en fait pas mention mais écrit : « Les jours qui suivirent me furent cruels. J’éprouvais les impressions d’un homme dont un séisme secoue brutalement la maison et qui reçoit sur la tête la pluie des tuiles tombant du toit. ». Au reste, M.  Pleven, faisait savoir à Jean Lacouture[12], qu’il n’avait : « pas pensé un instant que le général ait réellement eu cette intention » et que c’était « un contresens que d’interpréter autrement ses propos ». Il est d'ailleurs politiquement menacé par l'amiral Muselier, accusé à tort d'être à l'origine des fuites qui ont empêché la réussite du débarquement. Le jugement de Roosevelt en est durablement affecté[13]. Mais pour Churchill, « l'affaire de Dakar » pose De Gaulle comme alternative crédible à la France de Vichy dans les colonies, après la réussite de l'opération de Leclerc sur l'AEF en , et à la veille de l'affirmation des Forces françaises libres lors des événements du Liban et de la Syrie face aux Vichystes.

Un mois après le débarquement anglo-américain en Afrique du Nord du , les autorités vichystes d'Afrique-Occidentale française, sous l'impulsion (plus ou moins de circonstance) de l'amiral Darlan, finissent par signer, le , un accord avec les Alliés, qui remet ce territoire dans la guerre. En juin 1943, lors de la constitution du CFLN, Boisson démissionne ; il est remplacé le par le gaulliste Pierre Cournarie. Les hauts fonctionnaires vichystes sont progressivement écartés[14].

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. [1]
  2. à ne pas confondre avec la frégate américaine USS Tacoma
  3. (da) Jørgen Marcussen, « Handels- og Søfartsmuseets Årbogsindeks », Maritim og historisk information, (consulté le )
  4. (en) Lise Lindba︠e︡k, Norway's new saga of the sea : the story of her merchant marine in World War II, Exposition Press,‎ , p. 204
  5. Max Gallo, Une histoire de la seconde guerre mondiale, Pocket, , p. 357
  6. Pierre Montagnon, La France coloniale, t. 2 : Retour à l'Hexagone, Paris, Pygmalion, , 498 p. (ISBN 978-2-857-04319-5), p. 28, 29
  7. « 3 juillet 1940 », sur herodote.net (consulté le ).
  8. selon les auteurs J.A. Watson (op. cit. 1968, p. 61) et De Geoffre (op. cit. p. 36-37), deux avions légers Caudron Luciole ont décollé du porte-avions Ark Royal et atterri à Ouakam. Les pilotes et les passagers furent arrêtés. Un des pilotes était l'adjudant Joire qui s'illustrera plus tard dans Normandie-Nièmen.
  9. Étienne Schlumberger, L'Honneur et les rebelles de la marine française
  10. Pierre Montagnon, La France coloniale, t. 2, Pygmalion-Gérard Watelet, , p. 29
  11. Jamais dit, Plon, 1961.
  12. De Gaulle, 1965, Le Seuil,
  13. « De Gaulle et Roosevelt »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?)
  14. Christian Roche, Le Sénégal à la conquête de son indépendance : 1939-1960 : Chronique de la vie politique et syndicale, de l'Empire français à l'indépendance, Paris, Karthala Éditions, coll. « Hommes et sociétés », , 286 p. (ISBN 978-2-845-86113-8, présentation en ligne), p. 44

Bibliographie[modifier | modifier le code]

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Personnalités associées à l'événement[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]