Base spatiale de Pituffik — Wikipédia

Base spatiale de Pituffik
Pituffik Space Base
Base aérienne de Thulé
La base en 1989.
La base en 1989.
Cocarde
Localisation
Pays Drapeau du Danemark Danemark
Pays constitutif Drapeau du Groenland Groenland
Municipalité Avannaata
Date d'ouverture 1943
Coordonnées 76° 31′ 52″ nord, 68° 42′ 11″ ouest
Altitude 77 m (253 ft)
Informations aéronautiques
Code IATA THU
Code OACI BGTL
Type d'aéroport Militaire
Gestionnaire United States Air Force
Pistes
Direction Longueur Surface
08T/26T 3 047 m (9 997 ft) Asphalte
Géolocalisation sur la carte : océan Arctique
(Voir situation sur carte : océan Arctique)
THU
Géolocalisation sur la carte : Groenland
(Voir situation sur carte : Groenland)
THU

La base spatiale de Pituffik (Base aérienne de Thulé jusqu'en 2023) est la base la plus septentrionale de l'United States Space Force depuis le et auparavant de l'United States Air Force (USAF), située à 1 524 km du pôle Nord.

Elle est située à environ une centaine de kilomètres au sud de la ville de Qaanaaq, qui porta également le nom de Nouvelle Thulé[1], parce qu'elle fut créée pour les habitants de la région, déplacés lors de la construction de la base.

Cette dernière se trouve dans une région côtière du Nord-Ouest du Groenland, enjeu géopolitique crucial pour le Danemark, qui entend conserver les bonnes grâces de son allié américain. En effet, l'administration Bush souhaitait faire de la base militaire de Thulé un des maillons du bouclier antimissile américain.

Elle est un maillon important de la chaîne de radars du Commandement de la défense aérospatiale de l'Amérique du Nord (NORAD) — prévue pour détecter les éventuels tirs de missile balistiques venant d'Eurasie — depuis le début de la guerre froide, et une station de surveillance de satellites de l'Air Force Space Command.

Sa piste de trois mille mètres accueille environ deux mille six cents vols militaires et internationaux par an.

Historique[modifier | modifier le code]

En 1941, en pleine guerre mondiale, le Danemark autorisa les États-Unis à implanter des bases aériennes au Groenland, à Thulé notamment.

Années 1950[modifier | modifier le code]

Un des bâtiments de la base avec les drapeaux américains, danois et groenlandais au début du XXIe siècle.
Vue aérienne de la base.
La tour de contrôle de Thulé en 1989.

Cet accord de coopération militaire fut renforcé dans le cadre de l'OTAN en 1951, étant donné la valeur stratégique de la colonie danoise au début de la guerre froide. Le Danemark ne prit pas la peine de consulter la population locale, représentée par le Conseil des chasseurs, pour donner son feu vert à l’agrandissement de la base aérienne américaine, et ordonna en le déplacement des autochtones de Thulé (les Inughuits), une petite communauté inuite vivant de la chasse et de la pêche traditionnelles. Les 187 représentants du peuple le plus septentrional au monde furent contraints de quitter leurs terres millénaires en quelques jours pour s’exiler à Qaanaaq, à cent cinquante kilomètres au nord. Ils ne reçurent un dédommagement qu'en 1999.

Aux effets dramatiques de ce déplacement de population s’ajouta un fort ressentiment envers les Américains. La base militaire, transformée en secret en base pour bombardiers stratégiques, devint une véritable enclave de l’armée américaine, accueillant des milliers de militaires. Des Convair B-36 Peacemaker et des Boeing B-47 Stratojet y eurent ainsi leur base pendant les années 1950, puis des Boeing B-52 Stratofortress de la fin des années 1950 aux années 1960. L'armée américaine y testa également le caractère opérationnel et la résistance de ses armes dans des conditions de froid extrême.

Le , Jean Malaurie et son ami inuit Kutsikitsoq découvrirent fortuitement la base. Leur découverte fut relatée dans un ouvrage publié quatre ans plus tard[2].

En 1954, l'armée américaine procéda à la construction de la Globecom Tower (en), un mât radio d'une hauteur de 378 mètres. Ce mât est isolé de la terre et utilisé pour les transmissions télex sur grandes ondes. Il est construit sur un sol chaud en permanence. Au moment de sa construction, il s'agissait de la troisième plus haute construction humaine.

Durant l'hiver 1956-1957, des B-47 effectuèrent des vols de reconnaissances à partir de Thulé pour inspecter les défenses soviétiques. Ils étaient ravitaillés en vol par des Boeing KC-97 Stratofreighter.

En 1959, la base de Thulé fut la principale base de soutien pour la construction du Camp Century à quelque deux cent quarante kilomètres de la base. Creusé dans la glace, Camp Century était une base militaire souterraine visant à héberger des missiles nucléaires le plus près possible de l'URSS. Alimenté par un réacteur nucléaire transportable, il fut en fonction entre 1959 et 1967. Le projet fut abandonné, mais permit au géophysicien Willi Dansgaard (en) d'obtenir les premières carottes de glace jamais analysées.

Années 1960[modifier | modifier le code]

En 1961, un radar du Ballistic Missile Early Warning System (BMEWS) fut construit au site J à 21 kilomètres au nord-est de la base principale. Le BMEWS fut développée par Raytheon Corporation pour avertir l'Amérique du Nord en cas d'attaque de missile transpolaire depuis l'Union soviétique ou depuis des sous-marins situés dans l'océan Arctique ou le Nord de l'océan Atlantique. À ce moment-là, Thulé était à son apogée et environ dix mille personnes y travaillant.

À partir de , la base de Thulé connut un ralentissement général de ses activités. L'unité qui y était installée fut désactivée. En , la population de la base n'était plus que de 3 370 personnes.

Le de la même année, un B-52 transportant quatre bombes nucléaires s'écrasa près de la base de Thulé.

Accident du B-52[modifier | modifier le code]

La communauté inuite contesta encore plus vivement la présence de troupes américaines après l’accident d’un B-52 américain qui s’abîma dans l’océan Arctique le , près du Groenland[3]. Ce bombardier transportait quatre bombes nucléaires, dont trois furent pulvérisées contre la banquise ou tombèrent en mer : l’une d’elles ne fut jamais récupérée. De nombreux Inuits, réquisitionnés pour participer aux opérations de nettoyage après la catastrophe, eurent droit à une indemnité tardive, à la suite des maladies qu'ils contractèrent.

Années 1970 et 1980[modifier | modifier le code]

En 1982, Thulé devint une base de l'Air Force Space Command.

Années 2020[modifier | modifier le code]

Elle dépend actuellement de l'United States Space Force fondée le 20 décembre 2019.

La base de Thulé change de nom en avril 2023, devenant la base spatiale de Pituffik, afin de mieux refléter le nom Groenlandais local et sa nouvelle vocation spatiale [4].

Unités militaires actuelles[modifier | modifier le code]

Insigne du 821st Air Base Group.
  • 821st Air Base Group (en)
    • 821st Support Squadron
    • 821st Security Forces Squadron
  • 12th Space Warning Squadron, chargé du radar du BMEWS.
  • Det. 3, 22nd Space Operations Squadron

Situation[modifier | modifier le code]

Climat[modifier | modifier le code]

La base spatiale de Pituffik est soumise à des conditions climatiques très rudes avec de longs hivers très froids en raison de sa localisation très au-delà au nord du cercle polaire arctique.

Relevé météorologique de Thulé Air Base - altitude : 77 m - latitude : 76°31'N (période 1961-1990)
Mois jan. fév. mars avril mai juin jui. août sep. oct. nov. déc. année
Température minimale moyenne (°C) −27 −28,4 −27,8 −21 −8,6 −0,7 2,1 1,6 −4 −12,8 −20,1 −25 −14,3
Température moyenne (°C) −23,3 −24,6 −24,1 −17 −5,6 1,5 4,6 3,8 −1,7 −9,8 −16,6 −21,6 −11,2
Température maximale moyenne (°C) −19 −20,6 −20,1 −12,8 −2,6 4,2 7,4 6,2 0,6 −6,7 −12,9 −17,8 −7,8
Précipitations (mm) 6 6 4 6 7 7 16 24 18 12 10 8 124
Source : Le climat à Thulé (en °C et mm, moyennes mensuelles) climate-charts.com


Références[modifier | modifier le code]

  1. « Escale à Qaanaaq, la nouvelle Thulé », sur expresscotier.free.fr (consulté le ).
  2. Les Derniers Rois de Thulé, avec les Esquimaux polaires, face à leur destin, Paris, Plon, 1955, coll. "Terre humaine"; 5e édition définitive, Paris, Plon, 1989, Poche, Paris, Pocket, 2001. Ouvrage traduit en 23 langues.
  3. (en) Peter Starck, « Lost U.S. Nuclear Bomb to Affect Talks on Greenland », Reuters, (consulté le ).
  4. Space Force, « La base de Thulé se dote d'un nouveau nom » Accès libre, (consulté le ).

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Article connexe[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]

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