Acanthostega — Wikipédia

Acanthostega gunnari

Acanthostega
Description de cette image, également commentée ci-après
USNM PAL 617511, moulage d'un squelette partiel d'Acanthostega gunnari, exposé au musée national d'histoire naturelle des États-Unis.
Classification
Règne Animalia
Embranchement Chordata
Sous-embr. Vertebrata
Classe Sarcopterygii
Clade Elpistostegalia
Clade Stegocephalia

Famille

 Acanthostegidae
Jarvik, 1952

Genre

 Acanthostega
Jarvik, 1952

Espèce

 Acanthostega gunnari
Jarvik, 1952

Acanthostega est un genre éteint de stégocéphales basaux ayant vécu durant le Dévonien supérieur (Famennien), vers environ 365 millions d'années avant notre ère, dans ce qui est aujourd'hui le Groenland. Il figure parmi les premiers vertébrés à avoir des membres chiridiens, caractéristiques anatomiques qui en font un bon exemple d'évolution en mosaïque, avec des caractères ancestraux des sarcoptérygiens ichthyens et des caractères dérivés des premiers tétrapodes[1].

Découverte[modifier | modifier le code]

Les restes fossiles sont généralement bien conservés. Le fossile par lequel l'importance de cette espèce a été connue, est découvert par Jennifer A. Clack dans l'est du Groenland en , bien que des fragments du crâne aient été auparavant exhumés en par Gunnar Säve-Söderbergh et Erik Jarvik[2].

Description[modifier | modifier le code]

Restitution d'Acanthostega gunnari par la paléoartiste Maija Karala.

Acanthostega a une taille estimée à 60 cm de longueur et possède huit doigts sur chaque main (le nombre de doigts de pieds n'est pas clair) reliés par un étui tendineux, sans poignets. Il a également une épaule et un membre antérieur remarquablement semblables à ceux d'un poisson[3]. Les membres antérieurs d'Acanthostega ne pouvaient pas se plier vers l'avant au niveau du coude et ne pouvaient donc pas être amenés dans une position d'appui, semblant être plus appropriés pour pagayer ou pour s'accrocher aux plantes aquatiques, que pour marcher[4]. Toutefois Acanthostega est le premier proto-tétrapodes à montrer le changement de dominance locomotrice de la ceinture pectorale à la ceinture pelvienne. Il existe de nombreux changements morphologiques qui permettent à la ceinture pelvienne d'Acanthostega de devenir une structure portante. Chez les genres les plus ancestraux, les deux côtés de la ceinture ne sont pas attachés. Chez Acanthostega, il y a contact entre les deux côtés et fusion de la ceinture avec la côte sacrée de la colonne vertébrale. Ces fusions rendent la région pelvienne plus puissante et équipée pour contrer la force de gravité lorsqu'elle n'est pas soutenue par la flottabilité d'un environnement aquatique[5]. Il y a des ouïes internes couvertes comme celles des poissons et possède également des poumons, mais ses côtes sont trop courtes pour soutenir la cage thoracique hors de l'eau[6].

Jennifer A. Clack interprète cela comme montrant qu'Acanthostega serait principalement un animal aquatique descendant de poissons qui n'ont jamais quitté la mer, et que les spécialisations dans la lignée des tétrapodes aurait développé des caractéristiques qui seraient plus tard utiles à la vie terrestre. À cette époque, les plantes à feuilles caduques prospèrent et perdent chaque année des feuilles dans l'eau, attirant de petites proies dans des bas-fonds chauds et pauvres en oxygène dans lesquels il est difficile pour les plus gros poissons de nager ; Clack remarque comment la mâchoire inférieure d'Acanthostega montre un changement par rapport à ceux des poissons qui ont deux rangées de dents, avec un grand nombre de petites dents dans la rangée extérieure, et deux gros crocs et quelques dents plus petites dans la rangée intérieure. Cette différence correspond probablement à un changement chez les tétrapodes souches de l'alimentation exclusive dans l'eau à l'alimentation avec la tête hors de l'eau ou sur terre[6].

Crâne d'Acanthostega gunnari.

Bien que normalement considéré comme plus basal qu'Ichthyostega, il est possible qu'Acanthostega soit en fait plus dérivé. Étant donné qu'Acanthostega ressemble à un Ichthyostega juvénile et montre beaucoup moins de différences entre les juvéniles et les adultes que ces derniers, il est suggéré qu'Acanthostega pourrait être issu d'une lignée néoténique. Bien qu'il semble avoir passé toute sa vie dans l'eau, son humérus présente également des traits qui ressemblent à ceux des tétrapodes souches ultérieurs, qui sont entièrement terrestres(l'humérus chez Ichthyostega étant quelque peu dérivé et homologue des os des nageoires pectorales et pelviennes des poissons antérieurs). Cela pourrait indiquer que les vertébrés ont développé des traits terrestres plus tôt qu'il n'est supposé auparavant, et plusieurs fois indépendamment les uns des autres[7].

Des recherches basées sur l'analyse de la morphologie des sutures dans le crâne d'Acanthostega indiquent que l'espèce est capable de mordre des proies au bord de l'eau ou à proximité. Markey et Marshall compare le crâne avec les crânes de poissons, qui utilisent l'alimentation par succion comme principale méthode de capture des proies, et les créatures connues pour avoir utilisé la morsure directe sur les proies typiques des animaux terrestres. Leurs résultats indiquent qu'Acanthostega est adapté pour ce qu'ils appellent l'alimentation de type terrestre, soutenant fortement l'hypothèse selon laquelle le mode d'alimentation terrestre est apparu pour la première fois chez les animaux aquatiques. Si c'est correct, cela montre un animal spécialisé pour la chasse et vivant dans des eaux peu profondes dans la ligne entre la terre et l'eau[8]. Des recherches plus récentes indiquent également qu'il est possible qu'Acanthostega ait évolué à partir d'un ancêtre qui aurait plus d'adaptations terrestres que ce dernier[9].

Classification[modifier | modifier le code]

Historique[modifier | modifier le code]

Phylogénie[modifier | modifier le code]

Acanthostega est inclus dans de nombreuses analyses phylogénétiques concernant les tétrapodomorphes en raison du fait que certains fossiles sont suffisamment complet pour l'anatomie comparée. Les classifications actuels le considèrent comme étant un stégocéphale basal placé en intermédiaire aux côtés de plusieurs genres très proches tels que Ventastega ou Ichthyostega. Cependant, malgré le fait qu'il possède quatre membres, il est classé en dehors du groupe-couronne Tetrapoda. Ce qui suit est un cladogramme simplifié suivant les résultats d'une analyse réalisée et publié par Brian Swartz en 2012[10] :

 Elpistostegalia

Panderichthys


Stegocephalia


Tiktaalik



Elpistostege





Elginerpeton




Ventastega




Acanthostega




Ichthyostega




Whatcheeriidae




Colosteidae




Crassigyrinus




Baphetidae



Tetrapoda (groupe-couronne)












Évolution[modifier | modifier le code]

Illustration de la spéciation des poissons à nageoires lobées du Dévonien.

Acanthostega est considéré comme faisant partie d'une radiation évolutive répandu à la fin du Dévonien, à commencer par les tétrapodomorphes à nageoires purement aquatiques, leurs successeurs montrant une capacité accrue de respiration aérienne et des adaptations connexes aux mâchoires et aux branchies, ainsi qu'un cou plus musclé permettant un mouvement plus libre de la tête que les poissons ont, et l'utilisation des nageoires pour soulever le corps des poissons. Ces caractéristiques sont affichées par l'antérieur Tiktaalik, qui, comme Ichthyostega, montre des signes de plus grandes capacités à se déplacer sur terre, mais les chercheurs pensent qu'il serait principalement aquatique[6].

Dans la spéciation des vertébrés du Dévonien supérieur, les descendants de poissons à membres charnues présentent une séquence d'adaptations : Panderichthys, adapté aux bas-fonds boueux ; Tiktaalik, avec des nageoires en forme de membres qui pourraient l'emmener sur terre et les proto-tétrapodes dans des marécages remplis de mauvaises herbes, comme Acanthostega, qui a des pieds constitués de huit doigts ; et Ichthyostega, avec des membres pleins. Leurs descendants comprennent également des poissons pélagiques à nageoires lobées tels que les cœlacanthes.

Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

(en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « Acanthostega » (voir la liste des auteurs).

Références[modifier | modifier le code]

  1. (en) Michael J. Benton, Vertebrate Palaeontology, Wiley, , Kindle éd., « Acanthostega », p. 90
  2. Laura B. Porro, Emily J. Rayfield et Jennifer A. Clack, « Descriptive Anatomy and Three-Dimensional Reconstruction of the Skull of the Early Tetrapod Acanthostega gunnari Jarvik, 1952 », PLOS ONE, vol. 10, no 3,‎ , e0118882 (PMID 25760343, PMCID 4356540, DOI 10.1371/journal.pone.0118882 Accès libre, Bibcode 2015PLoSO..1018882P)
  3. (en) « Acanthostega gunneri », Devonian Times (consulté le )
  4. Au Dévonien, la Lune se trouvait à 345 000 km au lieu de 384 400 km aujourd'hui, tournant plus vite (jours de 22h) et soulevant des marées bien plus amples qu'aujourd'hui avec des estrans immenses aux courants très violents, favorables à toutes les adaptations appelées « sortie des eaux » : cf. Stephen Giner, Miroirs de la Terre, Les Presses du Midi 2010, (ISBN 978-2-8127-0188-7), p. 186-187.
  5. (en) Catherine A. Boisvert, « The pelvic fin and girdle of Panderichthys and the origin of tetrapod locomotion », Nature, vol. 438, no 7071,‎ , p. 1145–1147 (PMID 16372007, DOI 10.1038/nature04119, S2CID 4412211)
  6. a b et c Jennifer A. Clack, « Getting a Leg Up on Land », Scientific American, vol. 293, no 6,‎ , p. 100–107 (ISSN 0036-8733, PMID 16323697, DOI 10.1038/scientificamerican1205-100, Bibcode 2005SciAm.293f.100C)
  7. (en) Fossils suggest earlier land-water transition of tetrapod
  8. (en) M. J. Markey et C. R. Marshall, « Terrestrial-style feeding in a very early aquatic tetrapod is supported by evidence from experimental analysis of suture morphology », Proceedings of the National Academy of Sciences, vol. 104, no 17,‎ , p. 7134–7138 (PMID 17438285, PMCID 1855429, DOI 10.1073/pnas.0701706104 Accès libre)
  9. (en) V. Callier, J. A. Clack et P. E. Ahlberg, « From Fish To Landlubber: Fossils Suggest Earlier Land-water Transition Of Tetrapod », Sciencedaily.com, vol. 324, no 5925,‎ , p. 364–7 (PMID 19372425, DOI 10.1126/science.1167542, S2CID 28461841, lire en ligne, consulté le )
  10. (en) B. Swartz, « A marine stem-tetrapod from the Devonian of Western North America », PLOS ONE, vol. 7, no 3,‎ , e33683 (PMID 22448265, PMCID 3308997, DOI 10.1371/journal.pone.0033683 Accès libre)

Voir aussi[modifier | modifier le code]

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Articles connexes[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • (en) Clack, J.A. 1989. "Discovery of the earliest-known tetrapod stapes". Nature (London), 342:424-427.
  • (en) Clack, J.A. 1994. "Acanthostega gunnari, a Devonian tetrapod from Greenland; the snout, palate and ventral parts of the braincase, with a discussion of their significance." Meddelelser om Grønland: Geoscience, 31: 1-24.
  • (en) Clack, J.A. 1994. "Earliest known tetrapod braincase and the evolution of the stapes and fenestra ovalis". Nature (London), 369: 392-394.
  • (en) Clack, J.A. 1997. "Devonian tetrapod trackways and trackmakers: a review of the fossils and footprints". Paleogeography, Paleoclimatology, Paleoecology 130: 227-250.
  • (en) Coates, M.I. 1996. "The Devonian tetrapod Acanthostega gunnari Jarvik: postcranial anatomy, basal tetrapod interrelationships and patterns of skeletal evolution". Trans. Royal Soc. Edinburgh; Earth Sciences, 87:363-421.
  • (en) Coates, M.I. and J.A. Clack, 1990. "Polydactyly in the earliest known tetrapod limbs". Nature (London), 347: 66-67.
  • (en) Coates, M.I. and J.A. Clack. 1991. "Fish-like gills and breathing in the earliest known tetrapod". Nature (London) 352: 234-236.
  • (en) Coates, M.I., 1994. "The origin of vertebrate limbs". Development 1994. Supplement, 169-180, p. 174.
  • (en) Daeschler, E.B. and N. Shubin. 1995. "Tetrapod Origins". Paleobiology 21(4): 404-409.
  • Michel Laurin. 2008. "Systématique, paléontologie et biologie évolutive moderne : l’exemple de la sortie des eaux des vertébrés" Éditions Ellipses, 176 pp.
  • Sébastien Steyer, 2009. "La Terre avant les Dinosaures" Éditions Belin - Pour la Science.

Lien externe[modifier | modifier le code]

Références taxonomiques[modifier | modifier le code]