Élections législatives sénégalaises de 2022 — Wikipédia

Élections législatives sénégalaises de 2022
165 sièges de l'Assemblée nationale
(majorité absolue : 83 sièges)
Corps électoral et résultats
Inscrits 7 036 466
Votants 3 279 110
46,60 % en diminution 7,1
Blancs et nuls 18 224
Unis par l'espoir – Aminata Touré
Voix 1 518 137
46,56 %
en diminution 2,9
Sièges obtenus 82 en diminution 43
Libérer le peuple – Ousmane Sonko
Voix 1 071 139
32,85 %
en augmentation 14,6
Sièges obtenus 56 en augmentation 44
Sauver le Sénégal – Abdoulaye Wade
Voix 471 517
14,46 %
en diminution 2,2
Sièges obtenus 24 en augmentation 5
Diagramme
Premier ministre
Sortant Élu
Fonction vacante Amadou Ba
APR

Les élections législatives sénégalaises de 2022 se déroulent le afin de renouveler pour cinq ans les 165 membres de l'assemblée nationale du Sénégal.

La coalition Unis par l'espoir du président Macky Sall arrive en tête mais essuie un recul en perdant la majorité absolue des sièges qu'elle détenait depuis 2012.

La coalition Libérer le peuple d'Ousmane Sonko réalise une percée et quadruple son nombre de sièges, devenant la principale force d'opposition. La coalition Sauver le Sénégal menée par le Parti démocratique sénégalais connait quant à elle une légère baisse de sa part des voix, mais parvient toutefois à augmenter son nombre de sièges.

Bénéficiant du ralliement post-électoral du député du parti Convergence démocratique Bokk Gis Gis, Unis par l'espoir parvient à conserver de justesse la majorité à l'assemblée nationale. Le scrutin est suivi du rétablissement de la fonction de Premier ministre, avec la nomination d'Amadou Ba le 17 septembre.

Contexte[modifier | modifier le code]

Macky Sall.

Les élections législatives de juillet 2017 sont marquées par la victoire écrasante de la coalition Unis par l'espoir (Benno Bokk Yakaar), majorité parlementaire sortante soutenant le président en exercice Macky Sall et principalement constituée de son parti, l'Alliance pour la République (APR), ainsi que de l'Alliance des forces de progrès (AFP) et du Parti socialiste (PS). La coalition réunit seule 125 sièges sur 165, permettant au chef de l’État de bénéficier du soutien d'une large majorité à l'assemblée. Mahammed Dionne est ainsi reconduit dans ses fonctions de Premier ministre[1].

L'opposition, divisée en plusieurs coalitions dont la Coalition gagnante Wattu Senegaal, menée par le Parti démocratique sénégalais (PDS) de l’ex-président Abdoulaye Wade, échoue ainsi à s'imposer[1]. À l'opposé des pronostics, la participation est relativement forte, avec un peu plus de la moitié des inscrits, soit près de 20 points plus élevée qu'aux précédentes législatives en 2012[2],[3].

Macky Sall est par la suite réélu pour un second mandat lors de l'élection présidentielle de février 2019, qu'il remporte dès le premier tour avec un peu plus de 58 % des voix[4]. Le 14 mai 2019, il décide la suppression du poste de Premier ministre. La mesure, censée fluidifier le fonctionnement de l'Etat, se révèle très controversée notamment en raison de son absence du programme présidentiel de Macky Sall lors de la campagne. L'opposition accuse le président de chercher à concentrer tous les pouvoirs. La fonction est finalement rétablie début décembre 2021, Macky Sall reconnaissant lors d'une interview ne pouvoir s'occuper seul du Sénégal dans le contexte de la présidence à venir de l’Union africaine par le Sénégal. Il annonce à cette occasion que la nomination d'un nouveau Premier ministre interviendra après les élections municipales et départementales organisées le 23 janvier 2022[5].

Ces élections s'avèrent une défaite pour la coalition présidentielle Unis par l'espoir, l'opposition remportant notamment la capitale Dakar ainsi que la plus grande ville du Sud du pays, Ziguinchor. Cette dernière est remportée par Ousmane Sonko, qui se positionne en favori de l'opposition pour l'élection présidentielle de 2024[6],[7],[8]. Deux semaines plus tard, Macky Sall fixe les législatives au 31 juillet[9]. La nomination du nouveau Premier ministre est par la suite reportée à une date indéterminée après ces dernières[10].

Système électoral[modifier | modifier le code]

Bâtiment de l'assemblée à Dakar.

L'Assemblée nationale est composée de 165 sièges pourvus pour cinq ans selon un mode de scrutin parallèle dans 54 circonscriptions électorales correspondant aux 46 départements du Sénégal auxquels s'ajoutent 8 circonscriptions de la diaspora. Sur ce total, 112 sièges sont pourvus au scrutin de liste majoritaire à raison d'un à sept sièges par circonscription, selon leur population. Les circonscriptions de la diaspora comportent entre un et trois sièges, pour un total fixé à quinze sièges. Les électeurs votent pour une liste bloquée de candidat et d'un nombre égal de suppléants, sans panachage ni vote préférentiel. La liste ayant reçu le plus de voix remporte tous les sièges à pourvoir dans sa circonscription. Dans celles ne comportant qu'un seul siège, le vote prend de fait la forme d'un scrutin uninominal majoritaire à un tour[11],[12],[13].

Les 53 sièges restants sont pourvus au scrutin proportionnel plurinominal sur la base du total des voix des partis additionnées au niveau national. Les deux systèmes opèrent indépendamment l'un de l'autre. Contrairement à un système mixte par compensation, les sièges à la proportionnelle ne sont pas attribués de manière que leurs additions à ceux du scrutin majoritaire fassent correspondre le total de sièges des partis à leurs parts des voix au niveau national. Chaque parti obtient une part des sièges pourvus à la proportionnelle correspondant à sa part des suffrages, auxquels s'ajoutent les 112 sièges obtenus dans les circonscriptions à la majorité relative, donnant au scrutin une tendance majoritaire. La répartition des sièges se fait selon le système du quotient simple. Dans le cas de candidats indépendants, les sièges restants après le premier décompte sont attribués suivant la règle du plus fort reste[11],[14],[15],[13].

Depuis une loi sur la parité votée en 2010, les listes de candidats et de suppléants doivent obligatoirement alterner les candidats de l'un ou l'autre sexe. Dans le cas où un seul siège est à pourvoir dans la circonscription, le titulaire et le suppléant sont obligatoirement de sexes différents[16]. Pour participer aux élections législatives, les partis doivent préalablement recueillir les signatures d'au moins 0,5 % des électeurs inscrits sur les listes électorales dans la moitié au moins des régions du pays, avec un minimum de milles signatures par région[12].

Forces en présence[modifier | modifier le code]

Forces en présence
Partis ou Coalitions Tête de liste
Unis par l'espoir
Benno Bokk Yakaar (BBY)
Aminata Touré
Libérer le peuple
Yewwi Askan Wi (YAW)
Ousmane Sonko
Convergence démocratique Bokk Gis Gis (BGG) Pape Diop
Naataangue Askan Wi (NAW) Sheikh Alassane Sène
Alternative pour une Assemblée de Rupture (AAR) Thierno Alassane Sall
Bunt Bi Ibrahima Mbow
Les Serviteurs / En marche pour la renaissance (LS/MPR) Pape Djibril Fall
Sauver le Sénégal Abdoulaye Wade

Résultats[modifier | modifier le code]

Résultats des législatives sénégalaises de 2022[17],[18]
Partis ou Coalitions Voix % +/- Sièges +/-
SM SP Total
Unis par l'espoir (Benno Bokk Yakaar) 1 518 137 46,56 en diminution 2,91 57 25 82 en diminution 43
Libérer le peuple (YAW) 1 071 139 32,85 en augmentation 14,62 39 17 56 en augmentation 44
Sauver le Sénégal 471 517 14,46 en diminution 2,21 16 8 24 en augmentation 5
Les Serviteurs / En marche pour la renaissance (LS/MPR) 56 303 1,73 Nv 0 1 1 en augmentation 1
Alternative pour une assemblée de rupture (AAR) 52 173 1,60 Nv 0 1 1 en augmentation 1
Convergence démocratique Bokk Gis Gis (BGG) 44 862 1,38 Nv 0 1 1 en stagnation
Naataangue Askan Wi (NAW) 25 833 0,79 en diminution 1,18 0 0 0 en diminution 2
Bunt Bi 20 922 0,64 en augmentation 0,09 0 0 0 en diminution 1
Suffrages exprimés 3 260 886 99,44
Votes blancs et invalides 18 224 0,56
Total 3 279 110 100 112 53 165 en stagnation
Abstentions 3 757 356 53,40
Inscrits / participation 7 036 466 46,60

Analyse et conséquences[modifier | modifier le code]

Bien qu'arrivée toujours largement en tête avec près de la moitié des suffrages exprimés, la coalition Unis par l'espoir du président Macky Sall essuie un recul par rapport à 2017 en termes de part des voix, et subit la concurrence au scrutin majoritaire d'une opposition réunie en coalitions. Unis par l'espoir perd ainsi la majorité absolue des sièges qu'elle détenait depuis les élections législatives de juillet 2012[19],[20],[21].

L'opposition confirme sa montée amorcée lors des municipales. Avec près d'un tiers des voix, la coalition Libérer le peuple d'Ousmane Sonko réalise une percée et quadruple son nombre de sièges, devenant la principale force d'opposition. La coalition Sauver le Sénégal du Parti démocratique sénégalais connait quant à elle une légère baisse de sa part des voix, mais parvient toutefois à augmenter son nombre de sièges. Le scrutin de 2022 conduit ainsi à un partage de l'assemblée en trois principaux blocs : contrairement à 2017, seules trois autres formations parviennent à recueillir un siège[22].

La perte de sa majorité absolue est un coup dur pour Macky Sall, qui entretient alors le flou sur son intention de se présenter pour un troisième mandat présidentiel[19]. L'opposition dénonce par ailleurs des irrégularités dans la région du Fouta, fief du président, celle-ci enregistrant un taux de participation jugé anormalement élevé par l'opposition[23],[24]. Aucun recours n'est cependant déposé auprès du Conseil constitutionnel[25].

Unis par l'espoir ayant besoin d'un seul siège pour atteindre la majorité absolue, les trois partis d’opposition alternative détenteurs d'un siège se retrouvent en position de faiseur de rois. Dans la soirée du 11 août, l'unique député et dirigeant du parti Convergence démocratique Bokk Gis Gis, Pape Diop, annonce rejoindre la coalition présidentielle. Le ralliement de l'ancien maire de Dakar, qui se justifie par une volonté d'éviter un « blocage dans le fonctionnement de nos institutions », permet ainsi à Macky Sall de conserver la majorité à l'assemblée avec 83 sièges sur 165. Dans le cadre d'un régime présidentiel, Sall n’était pas dans l’obligation de nommer un gouvernement de cohabitation ni de procéder à la nomination d'un Premier ministre. Cette situation, où le président aurait gouverné par ordonnance aurait cependant constitué un « recul pour [la] démocratie », selon Pape Diop[26],[27].

Macky Sall nomme Amadou Ba Premier ministre le 17 septembre 2022, rétablissant ainsi cette fonction[28]. Amadou Ba démissionne de son mandat de député et est remplacé par le candidat suivant sur la liste de la coalition BBK, Abdoulaye Diagne[29].

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. a et b « Législatives au Sénégal : la coalition présidentielle largement en tête », Le Monde.fr,‎ (ISSN 1950-6244, lire en ligne, consulté le ).
  2. « Sénégal : la majorité présidentielle remporte haut la main les législatives – JeuneAfrique.com », sur Jeuneafrique.com, (consulté le ).
  3. « Résultats définitifs des Législatives, BBY 125 députés... PUR 3 députés... MTS 7 députés... Manko Wattu 19 députés. »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?), sur Dakarbuzz, .
  4. « DÉCISION N° 4-E-2019 AFFAIRE N° 25-E-19 », (consulté le )
  5. « Le Sénégal rétablit la fonction de premier ministre », sur Le Monde.fr, Le Monde, (ISSN 1950-6244, consulté le ).
  6. Le Point Afrique, « Municipales au Sénégal : l’opposition gagne à Dakar et Ziguinchor », sur Le Point, lepoint.fr, (consulté le ).
  7. « Au Sénégal, le pouvoir reconnaît sa défaite aux municipales à Dakar », sur Le Monde.fr, Le Monde, (ISSN 1950-6244, consulté le ).
  8. « Municipales au Sénégal : l'opposition remporte Dakar et plusieurs autres grandes villes du pays », sur Franceinfo, (consulté le ).
  9. « Sénégal : le gouvernement annonce la tenue des élections législatives le 31 juillet », sur TV5MONDE, (consulté le ).
  10. « Au Sénégal, des élections législatives ouvrent les hostilités politiques », sur Le Monde.fr, Le Monde, (ISSN 1950-6244, consulté le ).
  11. a et b « IPU PARLINE database: Sénégal (Assemblée nationale) » (consulté le ).
  12. a et b « Code électoral », sur www.sec.gouv.sn (consulté le ).
  13. a et b Mawunyo Hermann Boko, « Législatives au Sénégal : pourquoi le nombre de députés n’augmentera pas », Jeune Afrique,
  14. « Législatives 2017 au Sénégal : Quinze députés vont représenter la diaspora au parlement », La Tribune Afrique,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  15. « Les Sénégalais de l'étranger seront représentés par 15 députés », sur leparisien.fr, (consulté le ).
  16. Coumba Kane, « Au Sénégal, la polygamie ne rebute plus les femmes instruites », lemonde.fr, 11 mai 2018.
  17. « Résultats », sur dge.sn (consulté le ).
  18. « PROCLAMATION DES RÉSULTATS DÉFINITIFS DES ÉLECTIONS LÉGISLATIVES DU 31 JUILLET 2022 », sur conseilconstitutionnel.sn (consulté le ).
  19. a et b « Législatives au Sénégal : le camp présidentiel, en tête, perd sa majorité absolue », sur France 24, FRANCE24, (consulté le ).
  20. « Législatives 2022 : le Premier Président de la Cour d'Appel de Dakar proclame les résultats provisoires », sur PRESSAFRIK.COM, Premier journal en ligne au Sénégal et en Afrique de l'ouest (consulté le ).
  21. « #Legislatives2022: voici les résultats provisoires proclamés par la CNRV », sur www.pressafrik.com (consulté le ).
  22. « Elections législatives au Sénégal : le camp présidentiel perd la majorité absolue, selon les résultats officiels provisoires », sur Le Monde.fr, Le Monde, (ISSN 1950-6244, consulté le ).
  23. « Au Sénégal, l’opposition se hisse à hauteur du pouvoir », sur Libération, Libération (consulté le ).
  24. « Législatives au Sénégal : l'opposition demande de suspendre la publication des résultats », sur France 24, FRANCE24, (consulté le ).
  25. « Législatives au Sénégal: pas de recours des coalitions après l'annonce des résultats », sur RFI, RFI, (consulté le ).
  26. « Sénégal: le député Pape Diop rallie la coalition présidentielle et lui donne la majorité », sur RFI, RFI, (consulté le ).
  27. « Revue de presse Afrique - À la Une: la majorité absolue «ric-rac» au Sénégal », sur RFI, RFI, (consulté le ).
  28. « Amadou Ba nommé Premier ministre du Sénégal », sur .msn.com, .
  29. « Assemblée nationale : Abdoulaye Diagne remplace Amadou Ba », sur pressafrik.com, .

Articles connexes[modifier | modifier le code]