Élections législatives néo-zélandaises de 2020 — Wikipédia

Élections législatives néo-zélandaises de 2020
120 sièges de la Chambre des représentants
(Majorité absolue : 61 sièges)
Corps électoral et résultats
Inscrits 3 549 580
Votants 2 919 073
82,24 % en augmentation 2,5
Blancs et nuls 32 653
Travailliste – Jacinda Ardern
Voix 1 443 545
50,01 %
en augmentation 13,1
Sièges obtenus 65 en augmentation 19
National – Judith Collins
Voix 738 275
25,58 %
en diminution 18,9
Sièges obtenus 33 en diminution 23
Vert – James Shaw et Marama Davidson
Voix 226 757
7,86 %
en augmentation 1,6
Sièges obtenus 10 en augmentation 2
ACT – David Seymour
Voix 219 031
7,59 %
en augmentation 7,1
Sièges obtenus 10 en augmentation 9
53e législature
Diagramme
Premier ministre
Sortante Élue
Jacinda Ardern
Travailliste
Jacinda Ardern
Travailliste

Les élections législatives néo-zélandaises de 2020 ont lieu le en Nouvelle-Zélande afin d'élire les députés de la cinquante-troisième législature de la Chambre des représentants[1]. Prévu le , le scrutin est reporté d'un mois en raison de la pandémie de Covid-19[2].

Deux référendums sont organisés simultanément sur proposition du gouvernement sortant, l'un sur la légalisation de l'euthanasie et l'autre sur celle du cannabis à usage récréatif.

Le Parti travailliste mené par la Première ministre Jacinda Ardern remporte sa victoire la plus importante depuis 1946 avec plus de 50 % des voix et la majorité absolue des sièges, une première depuis l'introduction du système de représentation proportionnelle-mixte en 1996. Le Parti national, opposition officielle, subit sa défaite la plus sévère depuis 2002 avec moins de 26 % des voix et seulement trente-trois sièges. Nouvelle-Zélande d'abord, partenaire de coalition du gouvernement travailliste depuis 2017, perd toute représentation au Parlement au bénéfice du parti ACT New Zealand, qui connait une forte hausse. Les Verts connaissent une poussée moindre, mais atteignent la troisième place en termes de suffrages.

Forte de sa majorité, Jacinda Ardern est reconduite au poste de Première ministre, à la tête d'un gouvernement incluant plusieurs ministres des Verts, mais en dehors du cabinet.

Contexte[modifier | modifier le code]

Majorité sortante[modifier | modifier le code]

Les élections de 2017 ont produit une alternance politique, avec l'arrivée au pouvoir d'un gouvernement de coalition composé du Parti travailliste (46 sièges), du parti Nouvelle-Zélande d'abord (neuf sièges) et du Parti vert (huit sièges).

Le Parti travailliste dirigé par la Première ministre Jacinda Ardern est un parti de centre gauche. Il promeut l'égalité des chances, une plus juste répartition des richesses, la justice sociale, et une gestion durable des ressources du pays, respectueuse des intérêts des générations futures[3]. Le parti Nouvelle-Zélande d'abord, dirigé par le vice-Premier ministre et ministre des Affaires étrangères Winston Peters, est un parti centriste nationaliste qui prône principalement une réduction de l'immigration et défend les intérêts des retraités et des personnes âgées[4]. Le Parti vert est un parti écologiste de gauche. Outre une économie soutenable et respectueuse de l'environnement, il prône « la participation de tous à la société, la justice et une bonne qualité de vie », qui doivent primer « l'enrichissement matériel individuel ». Quatrième plus grand parti au Parlement, il est, de par ses statuts, co-dirigé par une femme (Marama Davidson) et un homme (James Shaw, ministre du Changement climatique)[3].

Opposition sortante[modifier | modifier le code]

Le Parti national (56 sièges) est un parti libéral-conservateur, au pouvoir de 2008 à 2017. Il prône un rôle restreint pour l'État, une politique libérale en matière d'économie, la notion de responsabilité individuelle, et un développement durable respectueux de l'environnement[3]. Il est dirigé jusqu'en par le chef de l'opposition parlementaire, Simon Bridges. Face toutefois aux sondages très favorables aux travaillistes, dus notamment à la très bonne gestion de la pandémie de Covid-19 en Nouvelle-Zélande par le gouvernement Ardern, le Parti national démet courant mai son chef et le remplace par Todd Muller (en)[5].

Le parti ACT (« Association des consommateurs et des contribuables », un siège), seul autre parti d'opposition à la Chambre des représentants durant la législature sortante, est un parti de la droite néo-libérale, qui prône un « marché libre et ouvert », la responsabilité de chaque individu, et un rôle minime pour l'État sauf en matière de sécurité intérieure et de défense nationale. Le Parti māori, qui vise à représenter les intérêts particuliers de la population autochtone, a perdu ses deux sièges lors des élections de 2017.

Système politique et électoral[modifier | modifier le code]

Bâtiment de la chambre à Wellington.

La Nouvelle-Zélande est une démocratie multipartite et une monarchie parlementaire. C'est un royaume du Commonwealth : un État indépendant reconnaissant symboliquement la reine Élisabeth II comme chef de l'État. Le Parlement est élu au suffrage universel. À la suite de l'élection, les nouveaux députés renouvellent leur confiance dans le Premier ministre sortant, ou bien choisissent un nouveau Premier ministre, en application du système de Westminster.

La Nouvelle-Zélande est dotée d'un parlement unicaméral, la Chambre des représentants, composé d'un minimum de 120 sièges pourvus pour trois ans selon un mode de scrutin mixte à finalité proportionnelle. Soixante-douze députés sont ainsi élus au scrutin uninominal majoritaire à un tour dans autant de circonscription électorale tandis que les quarante-huit restants sont élus au scrutin proportionnel plurinominal dans une unique circonscription nationale avec listes bloquées. Les sièges sont répartis selon la méthode de Sainte-Laguë entre tous les partis ayant franchi le seuil électoral de 5 % ou obtenu au moins un siège au scrutin majoritaire[6].

Chaque électeur dispose ainsi de deux voix : une pour élire un député dans sa circonscription, et une pour une liste de candidats soumise par un parti politique au niveau national. Ces deuxièmes voix ont pour but de rééquilibrer les résultats des circonscriptions majoritaires de manière à se rapprocher sur le plan national du rapport de forces obtenu à la proportionnelle pour tous les partis dépassant le seuil électoral ou ayant obtenu au moins un siège de circonscription. Si un parti remporte un nombre de circonscriptions inférieur à la proportion de voix qu'il a obtenue au niveau national, des candidats de sa liste sont élus députés, pour que la proportion de députés de ce parti corresponde à la proportion des secondes voix[7]. Le ratio de sièges majoritaires et proportionnels peut être amené à différer de quelques sièges, la part des circonscriptions variant en fonction du dernier recensement officiel. Il est ainsi de 71/49 depuis les élections de 2014, contre 70/50 auparavant.

En raison de ce système, il est possible qu'un parti remporte un nombre de circonscriptions supérieur à la proportion de voix qu'il devrait obtenir au scrutin de liste. Dans un tel cas, le nombre de sièges obtenus par ce parti dépasse le nombre de sièges qui lui serait normalement alloué à la proportionnelle. Ce cas de figure engendre la création de « sièges excédentaires » (overhang seats), portant le nombre de sièges au Parlement au-delà de cent-vingt. Les autres partis se voient en effet attribuer des sièges complémentaires afin qu'ils conservent un total proportionnel à leur secondes voix[8]. Cela n'a toutefois pas été le cas pour la législature 2017-2020.

Le pays est divisé en soixante-cinq circonscriptions uninominale dites « circonscriptions générales » (general electorates), auxquelles sont superposées sept circonscriptions uninominales dites « circonscriptions maori » (Maori electorates), pour un total de soixante-douze[9]. Aux élections précédentes il y avait soixante-et-onze circonscriptions, donc soixante-quatre circonscriptions générales ; pour le scrutin de 2020, une nouvelle circonscription générale appelée Takanini est créée dans le sud de la ville d'Auckland, et le nombre de sièges répartis à la proportionnelle est donc abaissé de quarante-neuf à quarante-huit[10]. Les sièges maori existent depuis 1867, afin de garantir que les Maori soient représentés au Parlement. Les citoyens maori peuvent néanmoins choisir de s'inscrire sur les listes générales[11].

Forces en présence[modifier | modifier le code]

Principaux partis.
Parti Idéologie Chef de file Résultats en 2017
Parti national
New Zealand National Party
Centre droit
Libéralisme, conservatisme, libéralisme économique
Judith Collins 44,45 % des voix
56 sièges
Parti travailliste
New Zealand Labour Party
Centre gauche
Social-démocratie, socialisme démocratique, progressisme, troisième voie
Jacinda Ardern 36,89 % des voix
46 sièges
Nouvelle-Zélande d'abord
New Zealand First
Centre
Nationalisme, protectionnisme, démocratie directe, conservatisme sociétal
Winston Peters 7,20 % des voix
9 sièges
Parti vert
Green Party of Aotearoa New Zealand
Gauche
Écologie politique
James Shaw
et Marama Davidson
6,27 % des voix
8 sièges
ACT New Zealand Centre droit à droite
Libéralisme classique, libertarianisme
David Seymour 0,50 % des voix
1 siège

Campagne[modifier | modifier le code]

En février, le Parti national annonce sa décision de ne former en aucun cas un accord de gouvernement avec le parti Nouvelle-Zélande d'abord, accusant ce dernier d'être trop proche des travaillistes. Simon Bridges explique ne pas pouvoir envisager de relation « constructive et de confiance » avec le parti de Winston Peters[12].

Le Parti travailliste de la Première Ministre Jacinda Ardern bénéficie à partir de la mi-mars de sondages d'opinions particulièrement favorables en raison de sa gestion jugée excellente de la pandémie de Covid-19, qui la fait monter à 66 % d'opinion favorables[13]

La forte baisse du parti national dans les sondages amène le à un renversement de Simon Bridges par Todd Muller à la tête du parti. La campagne est par la suite marquée par une controverse liée à la divulgation par des députés du parti d'informations confidentielles de patients atteint du coronavirus. Le , à la surprise générale, Muller annonce sa démission de la présidence du parti, évoquant la campagne comme un poids sur lui et sa famille devenu intenable d'un point de vue médical[14]. Un caucus du parti national se réunit plus tard dans la journée et élit l'ancienne ministre de la justice Judith Collins à la tête du parti[15],[16].

Après avoir culminé à plus de 55 % au cours de l'été, le parti travailliste redescend à 50 % d'intentions de vote dans les sondages, ce qui pourrait permettre à Jacinda Ardern de décrocher la majorité absolue des sièges. Le système électoral de représentation proportionnel mixte qui favorise les petites formations pourrait toutefois forcer le Parti travailliste à recomposer avec l'un de ses deux alliés actuel, les Verts et Nouvelle-Zélande d'abord. Le Parti national de Judith Collins n'est pour sa part crédité que de 23 % des intentions de vote[17].

Sondages[modifier | modifier le code]

Évolution des intentions de vote exprimées depuis les dernières élections en 2017.
Parti national Parti travailliste Parti vert Nouvelle-Zélande d'abord

Résultats[modifier | modifier le code]

Résultats des législatives néo-zélandaises de 2020[18],[19],[20]
Parti Circonscriptions Listes Total
sièges
+/-
Voix % Sièges +/- Voix % +/- Sièges
Parti travailliste 1 357 501 48,07 46 en augmentation 17 1 443 545 50,01 en augmentation 13,12 19 65 en augmentation 19
Parti national 963 845 34,13 23 en diminution 18 738 275 25,58 en diminution 18,87 10 33 en diminution 23
Parti vert 162 245 5,74 1 en augmentation 1 226 757 7,86 en augmentation 1,59 9 10 en augmentation 2
ACT New Zealand 97 697 3,46 1 en stagnation 219 031 7,59 en augmentation 7,09 9 10 en augmentation 9
Nouvelle-Zélande d'abord 30 209 1,07 0 en stagnation 75 020 2,60 en diminution 4,60 0 0 en diminution 9
Parti des opportunités 25 181 0,89 0 en stagnation 43 449 1,51 en diminution 0,93 0 0 en stagnation
Nouveau Parti conservateur 49 598 1,76 0 en stagnation 42 613 1,48 en augmentation 1,24 0 0 en stagnation
Parti māori 60 837 2,15 1 en augmentation 1 33 630 1,17 en diminution 0,01 1 2 en augmentation 2
Avancée Nouvelle-Zélande 25 054 0,89 0 Nv. 28 429 0,99 Nv. 0 0 en stagnation
Parti du cannabis 8 044 0,28 0 en stagnation 13 329 0,46 en augmentation 0,15 0 0 en stagnation
Autres partis 36 688 1,32 0 22 342 0,77 0 0 en stagnation
Indépendants 7 299 0,26 0 en stagnation 0 en stagnation
Suffrages exprimés 2 824 198 96,75 2 886 420 98,88
Votes blancs et invalides 94 875 3,25 32 653 1,12
Total 2 919 073 100 72 en augmentation 1 2 919 073 100 48 120 en stagnation
Abstentions 630 507 17,76 630 507 17,76
Inscrits/Participation 3 549 580 82,24 3 549 580 82,24

Analyse et conséquences[modifier | modifier le code]

Parti arrivé en tête par circonscription ordinaire et par circonscription maorie, et répartition des sièges à la proportionnelle.

Le scrutin est une grande victoire pour le Parti travailliste, qui remporte seul la majorité absolue des sièges, une première depuis l'instauration de la proportionnelle en 1996[21].

Un accord entre les travaillistes et le Parti vert conduit au soutien sans participation au Cabinet de ce dernier. Les deux co-chefs du Parti vert sont nommés ministres, en-dehors du Cabinet[22].

À l'issue de ce scrutin, le parlement néo-zélandais devient à certains égards le plus inclusif du monde : « 48 % des députés sont des femmes, 11 % sont ouvertement homosexuels et 21 % sont maoris »[23], alors que les Maoris ne constituent que 12 % de la population adulte du pays[24]. Bryce Edwards, de l'université Victoria de Wellington, souligne toutefois que cette diversité ne s'étend plus aux classes sociales, comme elle le faisait pourtant historiquement : « Nous avons un parlement de la classe moyenne supérieure, moins relié de manière organique aux besoins des gens ordinaires »[24].

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. (en) « La première ministre néo-zélandaise convoque des élections législatives en septembre », Le Monde, .
  2. (en) Henry Cooke, « Election 2020: Prime Minister Jacinda Ardern delays the election a month until October 17 », sur Stuff, (consulté le ).
  3. a b et c (en) « MPs, parties and electorates: Parliamentary parties », sur parliament.nz.
  4. (en) Kieran McNulty, « The role of political positioning in party performance in the 2008 New Zealand general election », sur otago.ac.nz.
  5. (en) Eleanor Ainge Roy et Charlotte Graham-McLay, « New Zealand's opposition leader Simon Bridges dumped after crash in popularity », The Guardian, .
  6. Inter-Parliamentary Union, « IPU Parline database: Nouvelle-Zelande (House of Representatives), Texte intégral », sur archive.ipu.org (consulté le ).
  7. (en) « Elections New Zealand », sur referendum.org.nz.
  8. (en) « How are MPs elected? », sur elections.org.nz.
  9. (en) « Electorate profiles », sur parliament.nz.
  10. (en) « Flat Bush was proposed as New Zealand's new electorate, but Takanini triumphed », NewsHub, .
  11. (en) « Maori représentation », sur elections.org.nz.
  12. (en) « National leader Simon Bridges rules out post-election deal with New Zealand First », sur The New Zealand Herald, .
  13. Karen Lajon, « Coronavirus : en Nouvelle-Zélande, les victoires de Jacinda Ardern », sur lejdd.fr (consulté le ).
  14. (en) Thomas Manch, « Todd Muller resigns as leader of the National Party », sur Stuff, (consulté le ).
  15. « Législatives NZ : Judith Collins s'opposera à Jacinda Ardern »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?), sur lepetitjournal.com (consulté le ).
  16. AFP, « Nouvelle-Zélande – L’opposition choisit une candidate pour défier Jacinda Ardern », sur 24 heures (consulté le ).
  17. Isabelle Dellerba, « En Nouvelle-Zélande, la populaire Jacinda Ardern espère consolider sa majorité », Le Monde, , p. 6.
  18. « Statistics ».
  19. « Résultats ».
  20. « Résultats concis ».
  21. Isabelle Dellerba, « Nouvelle-Zélande : pourquoi la victoire politique de la première ministre Jacinda Ardern est historique », Le Monde, (ISSN 1950-6244, consulté le ).
  22. (en) Deal done: Greens accept ministerial portfolios, New Zealand Herald, .
  23. Grégory Plesse, « Les députés néo-zélandais tombent la cravate », Le Figaro,‎ 13-14 février 2021, p. 10 (lire en ligne).
  24. a et b (en) Bryce Edwards, « New Zealand's politicians are too middle-class to tackle our biggest problems », The Guardian, .